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Shantel : “Le festival est le dernier lieu où tu peux atteindre une vraie liberté”

Plus de 200 dates par an. Ce Stefan est un vrai mordu de concerts, de live et de festival. L’allemand fait jumper les foules sous le nom Shantel avec son Disko Partizani. On l’a rencontré du côté des Charrues.

Tous les festivals : T’étais le premier à passer sur scène aux Charrues. Comment tu t’es senti ?

Shantel : C’est vrai que j’ai dépucelé le public. Tout le monde avait l’air très content, et la foule ne cessait de s’agrandir. Je ne m’attendais pas à quelque chose comme ça. On avait un planning assez serré ces derniers jours, c’était le seul moment disponible qu’on avait. Donc on s'est dit qu’on allait se faire un concert sympa à l’heure de l’apéro. Je pense que c’était vraiment cool.

Comment tu trouves les festivals en France ?

On en a fait beaucoup, je ne me souviens pas des noms exactes mais tous avaient quelque chose d’unique. J’aime la façon dont les choses y sont organisées. En France, vous avez vraiment une culture particulière, bien différente du reste de l’Europe.

Il y en a un qui t’as particulièrement marqué ?

Je me souviens d’un festival ... en Aveyron il me semble, dans un trou paumé! On jouait dans une tente devant à peu près 400 personnes. Ne vous méprenez pas, mais pour moi c’était un peu choquant : on a commencé à jouer, et après le deuxième morceau, les filles du premier rang ont toutes enlevé leur soutien-gorge. Je me demandais vraiment ce qu’il se passait… Wild people in Aveyron ! Je me suis dit que ça signifiait quand même qu’on avait fait du bon boulot. Une mission Accomplie.

Est-ce que tu joues différemment entre un concert et un festival ?

Quand tu fais un festival, tu réalises une performance beaucoup plus courte. Le show dure maximum une heure trente, donc tu dois tout condenser, c’est un tout autre exercice, et j’adore ça.

Combien de tournée festival t’as fait  depuis le début de ta carrière ?

Je ne sais pas… On a fait à peu près 230 concerts par an, tout confondu, donc pas seulement dans des festivals. Jusqu’ici, j’ai joué dans à peu près tous les festivals possibles, du plus connu comme Glastonbury, en passant par le Rockside, le Sziget, le Woodstock en Pologne, le Hurricane Festival … jusqu’au moins connu.

C’est quoi ton meilleur souvenir de festival ?

Au début de ma carrière, j’ai joué au Rock Am Ring, qui est en Allemagne le plus grand festival rock. Et quand je dis rock c’est vraiment rock, genre Mettalica ou Iron Maiden, c’est vraiment masculin, très alcoolisé et très primitif. C’est loin des festivals français avec ses familles et ses bénévoles. Rock am ring c’est plutôt « wooooooo fuck you ». C’est très brutal.  Donc on devait jouer là-bas, et évidement personne ne nous connaissait, on était des aliens. Je pensais que deux minutes après avoir commencé le concert ils nous lanceraient des bouteilles à la figure. Mais on a réussi à assurer ! Tout ça c’était il y a dix ans donc pour moi c’était une belle avancée. Si on peut y arriver ici, on peut le faire n’importe où.

Qu’est ce qui te plaît dans ces lives en festival ?

C’est à la fois très excitant, mais ça nécessite aussi de voyager beaucoup. Là on revient des Etats Unis, juste avant on était au Canada. Donc quand tu es dans un état d’esprit de festival, tu es dans une sorte de bulle, coupé du monde, parce que tu n’as pas vraiment un mode de vie habituel : tu dors là où il y a de la place, parfois tu manges un peu, parfois tu te douches. Tout est dans la précipitation ! C’est aussi très intense parce que tu es avec le groupe, la production, les musiciens, les techniciens, H 24. Tu es sur une autre planète. Personnellement j’aime vraiment ça. C’est génial, j’adore ça.

Il y a une ferveur particulière en festival, une sorte de philosophie de festivalier ?

Le festival c’est surement le moyen le plus démocratique pour les artistes de se faire connaître, parfois les gens te connaissent parfois non, et tout tient à la bonne énergie que tu transmets. Je pense aussi qu’on peut rivaliser avec chaque gros stéréotype musical anglo-saxon tu sais. Sur un  festival, tout ce statut marketing ne compte plus. Si tu fais une performance de merde, alors certes tu peux employer la technique et les lumières  pour cacher la misère mais les festivals c’est vraiment quelque chose de très direct. Soit t’assures, soit tu te plantes complètement. Je pense que le rôle principal d’un festival c’est de débarrasser les gens de l’ennui, de leur permettre d’arrêter d’être dans le contrôle constant de tout et de soi. C’est en quelque sorte le dernier lieu où tu peux atteindre une vraie liberté. D’où tu viens, comment tu es, ça n’a plus aucune importance. Tout le monde s’en fout dans un festival parce que tout le monde y est égal et on fait juste la fête. Un vrai esprit dionysiaque !

Propos recueillis par Morgan Canda et Victoria Le Guern

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