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Girls in Hawaii : "Ne pas te laver et manger de la merde ça fait 50% d'un festival"

Daniel Offermann est un vrai festivalier. Pukkelpop, Werchter … le bassiste de Girls in Hawaii a arpenté pendant sa jeunesse les festivals belges et leurs campings. C’est maintenant comme bassiste de Girls In Hawaii qu’il y tourne. On l’a rencontré du côté de Solidays.

Tous les Festivals : On t’a amené quelques bières belges pour commencer. Tu ne te sens pas en France un peu frustré sur le houblon ?

Daniel Offermann : Justement dans notre rider, ou sur une date tu mets ce que tu veux manger ou boire, genre si t’es végétarien, on mettait qu’on avait une préférence pour les bières belges. Des fois on se trouvait après des concerts avec septante trappiste Rochefort et après en concert t’en bois deux et t’es fait et fini! Donc on précise maintenant des bières belges mais à moins de 9%. Une de temps en temps ca le fait bien.

Comment se passe votre tournée de festival estival avec Girls in Hawaii ?

On a commencé la saison avec le Printemps de Bourges. Puis les 3 éléphants, avant Solidays et les Charrues. Puis là on a une vingtaine de festivals à suivre. On va pas mal voyager pendant tout l’été, en Italie, Allemagne, en Suisse au Paléo. On va aller au Sziget en Hongrie et apparement c’est assez impressionant. J’espère qu’on pourra rester deux trois jours, c’est toujours frustrant de seulement venir jouer et repartir. On arrive des fois à en voir. On va tourner quand même jusqu’à début septembre.

Vous avez des festivals belges en prévision ?

En juillet, Dour et les Francofolies de Spa. On vient de faire Couleurs Café à Bruxelles. L’année dernière on avait fait Pukkelpop, c’était un peu le premier grand rendez-vous pour notre retour sur scène.

Quel souvenir tu en gardes ?

C’était Magique. C’était le festival où j’allais vers 15-16 ans. C’est toujours magique de jouer à un endroit pareil où t’as des souvenirs de quand t’avais envie de commencer la musique. C’était un peu spécial, le premier grand rendez vous avec le public belge après toute cette période difficile. Il s’est passé un truc spécial, c’était vraiment chouette. Un très bon souvenir.

T’étais donc un festivalier avant Girls in Hawaii ?

On essayait de faire deux ou trois festivals chaque année. Dans le moyen du possible, car c’est cher d’en faire plein. On allait au Werchter, un peu le gros festival mainstream. On s’est rendu compte qu’on passait tout notre week-end au camping au lieu d’aller faire les concerts, donc on a décidé une année de juste faire du camping. Ca coutait moins cher !

T’as un meilleur souvenir comme festivalier ?

Je me rappelle, c’était la première fois que Robbie Williams jouait au Werchter. Il venait de quitter Take that. Il voulait un peu gagner en crédibilité indé. Et nous on avait fait une collecte avec des scouts à l’époque, une collecte de nounours pour un projet caritatif. Mais le camion qui devait nous les amener depuis l’Albanie était parti sans les prendre. Du coup on a rempli deux bagnoles, on les a pris au festival, et on les a jeté pendant tout le concert sur Robbie Williams. Il a arrêté son concert en râlant et disant “I hate Teddy Bears. I left Take that to get away from Teddy bear!”. On était très très fier !

S’il y a des festivals qu’on ne connait pas en Belgique, tu nous parlerais desquels ?

Il y a deux festivals dont j’ai envie de parler. Deep in the Woods, à la frontière française, dans un espèce de village touristique. C’est méga écolo, et la bouffe est super bonne. En fait tu loues la chambre et il y a plein d’activités, il y a plein de gosses, tu peux y aller en famille, il y a même un service baby-sitter. C’est là qu’on a recommencé à travailler pour notre dernier album Everest, on avait une résidence. Il y a peut-être 15 groupes qui jouent pour le week-end mais autour tu peux aller suivre un chasseur qui te montre la forêt, faire du yoga. Sinon, ill y a à Liège le See you festival, qui est organisé entre autre par notre tour manager. Eux ils essayent que le festival se passe partout dans la ville, que tout soit gratuit, avec l’idée de rencontres autour de la culture. C’était la première édition cette année, j’espère une deuxième l’année prochaine !

On a l’impression chez Tous les festivals que l’esprit festivalier est beaucoup plus présent en Belgique qu’en France. Comment tu expliques ca ?

Je sais pas très bien comment cela se passe en France. Je pense qu’en Belgique tu as un énorme mouvement de scoutisme, et en France c’est mal vu, facho ou je sais pas quoi. Moi j’étais scout, et cette idée de partir à plusieurs faire du camping, boire des bières et passer un moment ensemble et ne pas se laver pendant 4 jours, c’est vraiment un truc qu’on adore. Je sais pas peut-être qu’il y a ce truc de partir en aventure ensemble, pour moi c’est l’aspect du festival qui est important. Évidemment tu vois plein de groupe … en Belgique c’est un peu une messe de ne pas te laver, manger de la merde et dormir sous n’importe quel chapiteau. J’ai toujours aimé, et ça fait plus de 50% d’un festival.

Il y a des différences lorsque vous jouez en festival ou devant votre public, vous adaptez des choses ?

Oui quand même. Vu qu’on est un groupe qui jouons vachement sur l’atmosphère. Dans les clubs on essaye d’inclure un moment plus calme, plus intimiste. Et c’est en festival c’est beaucoup plus difficile à imposer, les conditions acoustiques sont pas les mêmes, les gens sont fatigués. Ils viennent de se taper tout un week-end de musique, t’es un peu obligé d’adapter ton répertoire. Après on essaye de rester fidèle de ce qu’on veut présenter. On y arrive petit à petit. En France ou en Belgique on nous connaît un peu plus, mais en Hongrie on se saura pas du tout à quoi s’attendre. Il  faut aller chercher les gens et les convaincre. Cela peut arriver qu’après trois chansons ils se font chier et se cassent.

Vous avez des stratégies pour convaincre les gens de rester ?

A Solidays, on va essayer de commencer en douceur. C’est marrant de changer les sets.

Vous changez souvent ? Car beaucoup d’artistes nous disent que le temps limité en festival ne leur permet pas beaucoup de liberté.

Nous on fonctionne souvent avec des modules de deux-trois chansons qu’on trouve qui marche bien ensemble. Pour l’amusement perso ou même pour les gens qui viennent nous voir plusieurs fois, on essaye d’adapter un peu, changer de temps en temps pour que ça reste amusant pour tout le monde.

Question musique, il en faut. Vous n’avez pas cédé aux sirènes de l’électro dans votre dernier album. Ca ne vous a pas tenté ?

Pour le dernier album, on a travaillé avec un producteur qui s’appelle Luuk Cox et qui vient de l’électro, il a bossé sur le dernier Stromae et c’est quelqu’un qui a quand même amené cela dans notre dernier album. Justement, on prévoit pour l’automne une tournée acoustique pour aller un peu dans l’autre sens. On se rend compte que quand tu joues dans ces conditions là, tu as plus tendance à écouter l’autre et à partager. T’es obligé de choper ton public différemment. Nous pendant la tournée en club, c’était quand même assez rock, en festival c’est encore plus rock, on s’est dit qu’on allait soigner nos oreilles et faire une formule plus calme. Ca m’excite déjà de partir là dessus.

Pour finir, est-ce qu’un France-Belgique en finale de la Coupe du Monde serait une bonne chose ? (Interview réalisée avant les quarts de finale, où France et Belgique ont été éliminées!)

J’ai peur que la France n’y arrive pas ! Nous dans nos têtes on est déjà qualifié. Vu que je suis germanophone, j’espère que la finale sera un Allemagne-Belgique. Mais je crois que cette année-ci on va vraiment vous éclater. On est encore assez bien reçu la scène belge en France, mais une fois qu’on vous battera ça va vite être fini, on essaye d’en profiter encore !

Des propos recueillis par Morgan Canda