On était à
A Rock en Seine, on se la coule douce avant la rentrée

Rendez-vous phare de la fin de l'été en matière de festivals, Rock en Seine met le paquet à Saint-Cloud avec une affiche bien fournie et concoctée aux petits oignons. Sur place, sept scènes accueillent une très large palette d'artistes, de la star intergalactique aux petits groupes lycéens bourrées de talent. Récit de nos 3 jours ensoleillés de fin de vacances aux portes de Paris. 

Jour 1, Vendredi 25 août, 16h06, un décollage so british

Après avoir totalement zappé à quel point Saint-Cloud est synonyme de bout du monde pour tout bon petit parisien qui se respecte, nous arrivons sur le site du festival franchement à la bourre et pile pour la dernière chanson de Frank Carter & The Rattlesnakes. C'est con, c'était lui l'artiste qu'on voulait voir tout défoncer aujourd'hui à Paris, après avoir été totalement conquis par le plus grand circle-pit de tous les temps lors de son concert au Hellfest, mais au vu des conversations aux bars du festival, le rouquin semble avoir conquis le coeur de quelques novices. On ne perd pas de temps et première bière en main (vendredi, tout est permis) on s'attaque à la première découverte de l'année avec les jeunes mancuniens Cabbages dont le concert électrisé et très engagé promet un avenir si punk, si rebelle et si radieux. 

C'est ensuite du côté de la scène de l'Industrie qu'on tentera d'invoquer le sacro saint soleil grâce aux ballades gorgées de vitamine D de Barbagallo (photo), le projet solo du batteur de Tame Impala. Le subterfuge fonctionne, quelques rayons de soleil réussisent à se faire une place entre les épais nuages parisiens. Il ne manque plus qu'un 'ti punch et nous voilà sur une plage antillaise. 

18h50, voici votre burger, ça vous fera un rein s'il vous plait

Tous les ans on retombe des nues quand on découvre les prix de la bouffe et des consos à Rock en Seine. Les burgers tournent autour des 12€ (avec frites, tout de même !), les burritos à 10, on trouve de tristounets wraps avec une rondelle de chèvre égarée à 8, sans oublier la pinte de Kro fadasse à 6,50€ ou les 8,50€ de la Grim, décidément équivalente du Graal au pays de Saint-Cloud. Pour nous ce sera des frites de kebaberie qui n'ont pas inventé la grande gastronomie pour 4€ et une fouée à la crème de chèvre a 6€ (le Val de Loire tout entier a tremblé suite à la lecture de ce prix, déso). On s'encaissera nous-mêmes avec la machine cashless, la dame du stand de fouées n'ayant pas tout bien compris lors de sa formation. Le bide plein, on se fera un petit comeback dans les années 90 avec Pharcyde, le quota hip-hop de la soirée, mais la mayo met un bail à prendre entre le public et le duo hyper bavard. Le plus petit lobby de la fumette de Californie a une pêche d'enfer mais les coupures intempestives du set deviennent fatiguantes. On passe...

21h17, "Well here we are at the Rock en Seine Party"


Il nous aura pas fallu des lustres pour découvrir comment se nourrir pour pas cher à Rock en Seine. Notre stand coup de coeur sera donc celui de la dégustation de la Fourme d'Ambert qui propose des sucettes au bleu, ou encore des croquettes au spéculoos et autres délices qui font sentir bon de la bouche. On remercie donc nos voisins de foule d'avoir été tolérants lors du concert de The Jesus and Mary Chain sur la scène de la Cascade. Le concert en soi, ne fût pas une suprême révélation, bien que musicalement irréprochable, on déplore le manque d'interaction de Jim Reid avec son public pourtant bien étoffé à présent. Alex Kapranos, chanteur de Franz Ferdinand, sera quant à lui bien plus éloquent sur la Main Stage. Le groupe écossais met une super ambiance, le public est au rendez-vous et ultra chaud, Kapranos parle en français pendant tout le concert, on se flagelle avec les plumes du bonheur mais... pourquoi diantre a-t-il fallu ralentir toutes les chansons ? 

23h45, l'équation du bonheur est aussi simple que la pop-folk 

On loupe le concert de Allah-Las entre les bouchons humains, les interminables queues des chiottes et les glissades dans la gadoue en quittant la grande scène. Allez, mon PEL pour une bière et on s'en va oublier tous les malheurs du monde devant le live de The Shins (photo). Mais si, vous savez, les mecs qui ont fait la BO absolument envoûtante de "Garden State" ?  Devant la scène on rencontrera notre âme soeur, un beau bébé britannique de 2m10, romantique jusqu'à la moelle et qui entonnera toutes les chansons en choeur avec nous, comme un bon vieux copain.  

On quitte les lieux le sourire au lèvres à la fin de cette première journée prometteuse... jusqu'à l'arrivée dans le métro où plutôt que d'ouvrir les portiques pour permettre un départ fluide des festivaliers, la RATP s'obstine à nous laisser mariner comme des sardines dans une station de toute évidence pas assez grande pour accueillir tout le monde. A priori aucun métro supplémentaire n'a été ajouté pour permettre à notre grande famille de rejoindre Paris. RATPbat-joies. 

Jour 2, Samedi 26 août, le soleil en tête d'affiche 

A peine les portes du festival franchies, on se retrouve à nouveau face à la distribution quotidienne de goodies de marques diverses et variées, les unes moins connues que les autres. Hier on a eu des capotes, aujourd'hui ce sera un magnifaïk chapeau rouge. Si nos calculs sont bons, à la fin du weekend on devrait ressembler à un homme sandwich. Notre premier concert de la journée se fera sur la scène de l'Industrie avec Lysistrata (photo), groupe lauréat du prix Ricard Live 2017 et qui se lance tout juste sur les scènes de festivals. L'immense talent musical du jeune groupe constraste sympathiquement avec leur manque d'expérience de scène. Ils nous tournent le dos en permanence et on les sent un peu intimidés, mais ça ne les rendra que plus craquants à nos yeux. Un trio brillant à suivre de très près (et de dos). 
Autre découverte de la journée, le retour du soleil ! Et qui dit soleil, dit besoin permanent de rafraîchissement et par la même occasion découverte des failles de l'application de paiement Lyf qui devait nous permettre de repartir vaillants, 3 pintes en main, avec le scan d'un simple QR Code sur nos téléphones. Misère, le scan bug, la connexion est approximative, ça crée de l'attente dans la file... on finira par régler avec notre bracelet cashless. Le turfu du paiement, ce sera pour la prochaine fois.

18h32, the chill is real

Nos Kros en main, on rejoint l'apéro géant qui s'est improvisé devant la scène de la Cascade pour le concert de Girls in Hawaii (photo). Ca transpire, ça rigole, ça débriefe et ça roule des cônes, bref c'est le bonheur de la fin de l'été au son acidulé et coloré du groupe belge qui ne décoit jamais. Pas franchement convaincus par la molesse de Timber Timbre, on se rabat sur de superbes gaufres sucre chantilly dégustées dans des transats au soleil avec Jain en fond sonore et son interpretation de Come qui nous semble durer un bon quart d'heure. La programmation de l'après-midi se fera sans nous, et on fera passer le temps aux différents stands de marques présents sur le festival et qui proposent blind tests, Dj sets et... encore des goodies à gagner. 

21h40, le coeur tel un camembert coulant

Le couple on ne peut plus rock et tout droit sorti d'un affichage pour The Kooples, The Kills, nous fera définitivement fondre de bonheur avec un live sensuel au possible. Du côté de la scène du Bosquet, on aurait aimé découvrir Columbine, le collectif de hip-hop rennais qui monte, mais une foule trop compacte et déjà beaucoup trop excitée nous fait reporter la rencontre à une prochaine fois. On se cale alors dans le bar Kro Tigre Bock meublé avec des canapés douillets en cuir et autres poufs dont tu n'arrives jamais à relever tes fesses, accompagné de notre meilleure découverte du festival : un camembert rôti au miel et ses frites belges à l'aïoli maison (photo)
C'est avec le groupe de post-punk anglais et totalement déjanté Sleaford Mods qu'on ira finir la soirée. Le spectacle, dont on n'avait pas cessé de nous parler depuis Dour, nous fait penser un genre de karaoké de pub du dimanche dans un village au fin fond du nord de l'Angleterre. Sur scène, le chanteur du groupe Jason Williamson slamme avec un accent à la limite du compréhensible et lâche des feux d'artifices de postillons et de simulations de pets. Le tout sur un enregistrement musical répepetitif mais prenant. Ou comment finir son samedi soir de la manière la plus perchée qui soit. 

Jour 3, Dimanche 27 août, 15h05, on n'a pas oublié de venir moustachu

On flâne entre les différentes scènes et stands en ce début d'après-midi. Cela nous permet de découvrir l'association En Avant Toutes, qui travaille dans la prévention des agressions sexuelles, mais aussi l'exposition du Studio Harcourt qui expose les clichés des artistes qui ont foulé les terres de Rock en Seine ces cinq dernières années. De côté de la scène du Bosquet, les doux britanniques Amber Run font chanter quelques centaines de jeunes gens déjà amoureux de la voix planante du chanteur. Notre séance de concert à nous ne commencera réellement qu'avec les moustachus de Deluxe (photo) sur la grande scène qui nous feront, comme d'habitude, transpirer jusqu'à la dernière goutte grâce à leur superbe énergie et une bonne humeur sans failles. Quand à 16h on a déjà vu le meilleur concert de la journée, on fait comment ? 

18h57, l'après-midi pot-pourri

Ty Segall par la suite fera trembler les terres de Saint-Cloud avec son arme ultime, la guitare qu'il manie à la perfection et sa came, le garage rock tâché comme on l'aime. Une question cependant pour les malins du fond de la scène : comment diable fait-on pour dormir pendant une telle performance ? C'est sur la même scène qu'on attendra un tout autre personnage, le charismatique chanteur britannique de pop-folk George Ezra (photo). Un vrai concert familial et romantique, parsemé de confettis en forme de coeurs et qui sent bon les amours de vacances. Les enfants chantent, les couples se roulent des pelles, nous, on ne sait pas trop où se mettre alors on va encore faire 30min de queue aux toilettes. Et pour finir cet enchainement musical fourre-tout du dernier jour, il manquait bien un peu de hip-hop bien gras, bien commercial. C'est pas un souci, voici donc Cypress Hill sur la grande scène, pour une performance qui nous désespère tant elle peut parfois être kitsch mais qui semble satisfaire le reste du public chaud comme la braise et qui ratatine le peu de pelouse restant sur la grande scène dans de grands mouvements de jump collectif. 

22h31, les montagnes russes de l'émotion musicale

Depuis ce matin on a été réveillés par Deluxe, endormis par George Ezra, secoués par Cypress Hill et nous voilà encore face à des propositions (trop) douces avec Rone et Slowdive qui peinent à nous convaincre de rester devant la scène. Il va falloir se rabattre avec beaucoup d'espoir sur le set de The Shoes, qui revisitent en partenariat avec les Inrocks 30 ans de musique à l'occasion des 15 ans du festival, tel un espèce de blind test géant. Pas tout à fait une grande performance musicale mais ça fait son effet et remet banane et pêche en place. On finira le festival sur les dernières chansons du  live de The xx, histoire de... mieux dormir debout. Désolés les fanatiques, il en faut pour tous les goûts !

Le bilan

Côté concerts

Les jeunes qui claquent

Lysistrata, des petits timides qui en ont dans le bide

La valeur sûre

Deluxe, pas de coup de mou au pays des moustachus

La déception 

Pharcyde, parfois les comebacks, il vaudrait mieux qu'ils restent dans les programme télé ringards

Le concert où tu emméneras ton prochain date Tinder

The Kills, c'est nous ou il fait VRAIMENT chaud là-dedans ?

Côté festival

On a aimé :
- Une entrée fluide et des infos claires et en nombre pour se repérer sur le festival
- Une programmation bien équilibrée entre découvertes, mainstream et musique pointilleuse
- Plein de stands à découvrir et plein d'activités à faire toute la journée, en marge des concerts
- Un public très hétérogène : des jeunes et des moins jeunes, des hipsters et des metalleux, des blogueuses mode et des touristes...

On a moins aimé : 
- Les tarifs exorbitants de la nourriture et des boissons. C'est pas parce qu'on habite à Paris qu'on a le salaire d'une maquilleuse de l'Elysée !
- Toujours pas assez de toilettes, cette fois-ci il y avait même de la queue pour les pissotières. Une vrai première pour nous !
- Un programme un peu schizophrène le dimanche...
- La marée humaine qui s'étouffe dans le métro. A priori il fallait se douter qu'on ne viendrait pas tous en bagnole, non ? 

Conclusion

La fin de l'été ne rime pas avec blues à Paris grâce à Rock en Seine. De belles découvertes et re-découvertes musicales, des après-midi paresseuses et agréables dans un joli parc bien entretenu et un compte bancaire totalement vidé, de quoi repartir sur de belles bases pour la rentrée ! 

Récit : Anja Dimitrijevic et Zoja Salom
Photos : Anja Dimitrijevic