On était à
Marsatac, souffler la 20ème bougie les pieds dans le sable

En pleine Coupe du Monde, nous avons pris la route direction Marseille pour s'installer près du Vélodrome afin de vivre le 20ème match de Marsatac. Entre pogo, soleil et un melting-pot entre rap et électro, on vous raconte nos deux jours passés dans la cité phocéenne. 

Jour 1. Vendredi 15 juin. 17h, rendez-vous en terre marseillaise

Ce n'est pas une légende, le soleil ne quitte définitivement jamais Marseille. Après 6h de route sans encombres, nous posons nos sacs dans un hébergement à quelques pas des festivités, Marsatac étant un festival entièrement urbain. Après avoir côtoyé plusieurs lieux emblématiques de la cité phocéenne, l'événement scouatte depuis deux ans les enceintes du Parc Chanot avec une vue imprenable sur le Vélodrome. Une petite pause bien méritée et nous prenons la direction de Marsatac situé à 5 min à pied. L'arrivée se fait tranquillement avec une petite poignée de festivaliers, pas de galères pour se garer ni pour trouver son chemin, c'est quand même cool un festival en centre-ville.

Les portes ouvrent à 18h pétante sans embarras, pour le moment il n'y a pas foule, le passage de la sécurité est fluide, la queue supportable, on engage donc les premiers mètres carrés du festival comme des joyeux lurons prêt à sauter partout. Comme tout bon festivalier, qui dit premier concert, dit première bière, on court remplir notre petit porte-monnaie du week-end et récupérer notre bracelet cashless au stand attitré. En plus de ce système devenu universel, il était également possible de payer grâce à l'application Lyfpay offrant un système de parrainage et surtout d'éviter une perte de temps à faire la queue afin de recharger son précieux sésame. Malheureusement, en 2018, la batterie d'un smartphone est une denrée rare, on préfère donc garder nos quelques pourcentages fébriles pour éviter de se perdre après un concert.

18h40, le turn-up à la sauce belge et parisienne, supplément soleil 

Après s'être offert une pinte bien fraîche à un prix raisonnable (6,50, ça passe), on se dirige vers le premier concert de la scène extérieure, la grande nouveauté de cette édition 2018. Lomepal s'occupe d'ouvrir le bal sous un soleil massacrant, une belle entrée en matière mais néanmoins sans grande hystérie, notamment dû au peu de festivaliers présents pour le moment. Le rappeur parisien enchaîne quelques morceaux entre chill et égo-trip, on rentre assez facilement dans l'univers, mais on en veut plus pour se mettre franchement dans l'ambiance. C'est le rôle qu'assumera son acolyte Roméo Elvis pour la seconde partie du show. Exclusivité mondiale, les deux rappeurs ont livré pour la première fois un duo en live, et la recette prend. Le MC belge s'occupe de faire sauter et se rentrer dedans tout ce beau monde qui se remplit au fur et à mesure avec ses propres morceaux, avant d'être de nouveau rejoint par son collègue parisien. Les deux rappeurs (photo) enchaînent leurs hits et leurs collabs sans ne laisser aucun repos. Le pari est réussi, ce premier concert annonce officiellement la couleur de ce Marsatac 2018. On regrette néanmoins un son abrupt que l'on rencontrera tout le week-end sur la scène extérieure.

20h15, il ne manquait plus que les maillots de bain

On se remet doucement de nos pogos en sirotant une deuxième fois un nectar bien frais, cette fois le peuple marseillais a définitivement pris place dans les enceintes du Parc Chanot, rendant la queue vers le précieux houblon beaucoup plus longue qu'à notre arrivée. On découvrira au cours du week-end que plusieurs buvettes étaient disséminées entre les différentes enceintes du lieu, ce sera donc la première et la dernière fois que nous attendrons pour boire un coup. En attendant la suite, nous nous baladons sur le béton du parc des expos afin de profiter du thème "plage" de cette édition 2018 respecté à la lettre sur la partie extérieure du festival. On s'offre alors un petit gif souvenir dans un décor plagiste crée pour l'occasion. Manque de chance, on avait laissé la crème solaire et les maillots à l'appartement. 

21h02, l'empire contre-attaque à Marsatac 

Fini la rigolade, retour devant la grande scène extérieure pour ce début de soirée avec la tête d'affiche. Marsatac étant un festival essentiellement électro/rap, vivre un concert d'un groupe mythique comme IAM (photo) interpréter l'album classique "l'Ecole du Micro d'Argent" à Marseille leur ville natale. Clairement, sur le papier, c'est une anecdote à raconter à ses petits enfants. Nous voilà comme des ados à l'image des nombreux festivaliers venus spécialement pour ce concert, rassemblant aussi bien jeunes et vieux, pour un show millimétré, une scénographie lumineuse et un flow qui ne fatigue pas malgré une vingtaine d'années de carrière. Entre "Petit Frère", "Né sous la même étoile", "Je danse le mia" et "Demain c'est loin", le spectacle se termine avec beaucoup d'émotion.

On aurait presque déjà pris l'accent marseillais, zin. Avant le dernier concert sur la scène extérieure, nous nous dirigeons vers l'immense enceinte du Grand Palais afin de prendre la température, et c'est un nouveau monde qui s'ouvre, pas de décoration, une ambiance très industrielle complètement en marge avec la charte graphique du festival, dommage, c'était cool les boués et la plage. On y découvre Chloé et ses platines pour un dj set techno/house qui nous mettra officiellement dans l'ambiance électro pour le reste de la soirée. 

23h05, les platines sont reines 

L'électro est désormais la maîtresse des lieux. Après avoir sauté un peu partout dans l'enceinte du Grand Palais loin d'être rempli, on reprend nos esprits, l'estomac commence à crier famine. Moment royal du festival, on décide de se remplir la panse à l'espace nourriture affrêté, une faim qui sera vite calmée par la queue présente face aux food trucks. Si les buvettes étaient intelligement disséminées, ce ne sera pas le cas pour le casse-croûte, les stands étant tous agencés dans un même carré peuplé de festivaliers affamés. On reviendra plus tard, en attendant, place au show d'Amélie Lens avec un début bourré d'énergie, rapidement refroidi par un problème technique coupant totalement les lumières ainsi que les platines. Heureusement, le public s'est occupé de faire les back à coup de "Amélie ! Amélie !" en attendant que le concert reprenne. Les marseillais, on vous aime.

Légèrement calmé par cette surtension, retour face à la scène extérieure pour profiter du dernier concert en plein air avec le jeune talent Petit Biscuit (photo). L'artiste manie habilement ses différents instruments pour nous offrir un moment de chill appuyé par une scénographie étincelante nous donnant presque envie de fermer les yeux pour profiter du moment comme sur les photos d'Instagrameuses. Malheureusement on se reposera une prochaine fois, quelques minutes après le début du show, une bombe au poivre est utilisée au devant de la scène créant un mouvement de foule important qui aurait pu très vite dégénérer. Plus de peur que de mal, on a réussi à sauver nos bières donc tout va bien ! Retour au devant de la scène pour se déhancher, avec un mauvais assaissonnement dans l'air. 

00h10, bonjour comment on était fatigué 

Le voyage commence à nous faire piquer du nez, on se décide donc de poser nos pattes sur le béton du Parc Chanot histoire de nous ressourcer avant de retourner dans la jungle. Si le reste des concerts prend place entre le Grand Palais et le Palais Phocéen, de nombreux festivaliers déambulent encore sur l'esplanade, l'occasion pour nous de rencontrer plusieurs groupes de fêtards avec qui on a pu discuter de nos aventures de début de soirée (mention spéciale à une jeune femme pour laquelle il fallu expliquer que l'Ecole du Micro d'Argent n'était pas vraiment une école). Notre pause bière détente fini, nous suivons le tapage nocturne des basses qui nous mènera devant la scène de Sam Paganini au Grand Palais, devenu temple de la techno pour une soirée. Cette fois-ci la populace est présente à se laisser taper du pied sur les boucles informatiques du dj italien. Malgré une scénographie lumineuse, le fait d'être en intérieur dans un décor assez lugubre nous donne rapidement l'impression d'avoir franchi les portes d'une boîte. On se laisse donc aller au jeu à balancer de manière aléatoire notre corps sur le rythme de la musique en esquivant les multiples "Vous cherchez pas un truc les gars ?" à tel point qu'on s'amusera à les compter au fil du festival.

Manque d'alcool et d'une audition pointue pour ce dj set, le live se transforme petit à petit en routine pour les tympans, il était temps de quitter les enceintes du Palais. Nous retentons l'expérience foodtruck qui sera concluante cette fois-ci, nous resterons simple pour cette soirée en repartant chacun avec son hot-dog à 5 euros (ça passe). 1h45, en attendant le concert de Boris Brejcha, nous posons nos fesses patiemment sur les marches du Grand Palais, une attente qui aura raison de notre dernière lueur d'énergie. Ce premier jour de Marsatac s'achèvera donc pour nous. Désolé Boris, ce n'est pas personnel. 

Jour 2. Samedi 16 juin. 19h18, sea, Rejjie and sun !

Après une bonne nuit de sommeil et une journée de tourisme dans la cité phocéenne, on est gonflé à bloc pour cette deuxième soirée des 20 ans de Marsatac. Le climat est toujours au beau fixe et un soleil ardent brûle déjà sur les scènes du festival, rendant ce thème "plage" encore plus agréable. Habitude oblige, on recharge notre précieux bracelet dès notre arrivée et cette fois-ci les festivaliers ont l'air moins perdu sur les moyens de paiement que la veille grâce à des bénévoles placés à l'entrée. On ne pouvait pas rêver mieux comme cadre pour se prendre la claque Rejjie Snow en pleine face, sans crème solaire. A peine 22 ans, le jeune rappeur irlandais a déjà tout d'une future légende avec un show mélangeant instrumentales estivales et bangers. Un concert sans prétention ni dégaine ostentatoire remplissant parfaitement son rôle à cette heure-ci du festival. Il faut le dire, pour le moment la programmation est parfaitement ficelée pour faire monter l'énergie.

On fait un petit tour par la boîte de trois minutes mise en place par Skoll dans un petit cabanon lumineux avant d'entendre les premiers gargouillements de notre estomac. Aujourd'hui, on ne se fera pas avoir, nous accélerons le pas vers les foodtruck avant qu'ils soient pris d'assaut. Au menu de ce soir : un wrap poulet, courgette, emmental, oignons pour 7€50, de quoi nous préparer sérieusement pour la suite. 

21h02, avis de tempête dans la fosse 

Retour dans les enceintes du Grand Palais pour la seconde journée. Encore aujourd'hui la scène est bien gardée avec le groupe Kokoko! qui s'occupe de chauffer gentillement le public composé de quelques curieux et des fans de la première heure. Un mélange d'électro et de musiques africaines, le tout orchestré par des instruments de récupération et des danses pleines d'humour. Un court et intense moment passé en leur compagnie, nous entendons les premières basses s'échapper de la scène extérieure.

Tête d'affiche rap de la soirée, Nekfeu (photo) démarre tranquillement son live avec un morceau intimiste. Pour avoir déjà vu le rappeur sur d'autres scènes, on aurait plutôt penser sauter dès les premières phases. Un choix que le parisien expliquera quelques minutes plus tard : "On va y aller par étape ce soir Marseille". Après plusieurs mois sans avouer jouer, Nekfeu reprend peu à peu ses marques sur la scène extérieure face à un public timide. Comme à son habitude, il n'est pas venu seul mais accompagné de ses acolytes du S-Crew qui proposent un à un leurs propres single. Les choses sérieuses débutent sur le morceau "Tempète", le MC crée alors plusieurs oeils du cyclone dans la fosse pour que tout ce beau monde se rentre dedans à maintes reprises. Le reste du concert sera dans la même veine, et ce ne sera pas pour nous déplaire. On regrette néanmoins les simple murs de lumière en guise de scénographie, normalement plus imposante sur les autres live du rappeur.

22h32, deuxième mi-temps à Marseille 

Sorti d'une session rap bien rythmée, nos Airmax en redemandent encore, nous prenons donc pour la première fois du week-end la direction du Palais Phocéen qui lui aussi rogne le côté "plage" du festival. Les aficionados sont déjà présents depuis plusieurs minutes en attendant l'arrivée de Moha La Squale. Le jeune rappeur sorti de nul part il y'a 6 mois a clairement de l'énergie à revendre et un charisme rarement vu, et son public lui rend bien. Chaque morceau fait mouche entre ses "SAAAALE LA MIF". Une belle prestation qui prouve que le parisien a de belles années devant lui malgré quelques carences scéniques (normal, il y'a à peine quelques semaines il entamait ses premiers concerts). Il fait chaud, vraiment chaud à Marseille, histoire de ne pas mourrir déssécher, on fait une halte bière avant de reprendre la direction de la scène extérieure pour le dernier concert du week-end. Paul Kalkbrenner s'occupera de clôturer cette seconde journée en plein air, et on ne pouvait pas rêver mieux. Le dj allemand rassemble les initiés comme les confirmés devant ses platines pour 1h30 de mix et de kiffe, on n'en loupera pas une miette, et nous ne serons pas les seuls. 

00h15, la bronzette d'après-minuit 

Complètement rincé par le dernier show, on décide faire une petite pause dans un coin plage synthétisé pour l'occasion avec ses transats, son sable et son ambiance musicale. Vu qu'on avait oublié les maillots, la crème et nos râteaux, nous reprenons notre aventure entre les trois scènes jusqu'à que notre choix se porte sur le concert des Hungry 5. Les concerts en plein air s'étant terminé, la fosse du Grand Palais se rempli peu à peu de joyeux lurons venus déhancher leurs nuques sur les basses, et ils seront servis grâce au show de pure techno/transe délivré par les trois compères bien connus du milieu, N'To, Joachim Pastor et Worakls. On se laisse avoir par l'enchaînement du trio qui sait définitivement ce qu'il fait. 

1h15, le reste n'est qu'électro 

Clairement, Marsatac n'a pas fait semblant sur ses choix d'artistes électro venus de toute l'Europe, au point qu'il est difficile de choisir. N'étant pas des spécialistes en la matière, un festivalier calé dans son genre nous conseille le live de Blawan (photo) qui suivra les Hungry 5. Tels de bons élèves, nous campons à notre place en attendant la suite. Et effectivement, ce bon monsieur avait raison. Le dj démarre en grandes pompes et ne laissera aucune répit à ses hôtes jusqu'à la dernière boucle. On entre dans sa dimension sans problèmes mélangeant brillamment brutalité et douceur dans son show. Arrivé 2h30, nous décidons de prendre la route du retour pour le long voyage qui nous attends. Nous aurons que de bons échos des concerts de Nina Kraviz et Ben Ufo, au même titre que le closing Marsatac qui se déroulera les pieds dans l'eau le lendemain à la plage du Petit Roucas. 

Le Bilan 

Côté concert 

L'affaire à suivre
Rejjie Snow, une prestation ensoleillée clairement adéquate pour le lieu

Les légendes
IAM, 20 ans d'un album mythique, à Marseille, tout est dit 

Le patron des platines
Paul Kalkbrenner, on s'est clairement pris le truc 

La redondance
Sam Paganini, nos oreilles ne devaient pas être conditionnées

La découverte
Chloé, une petite pépite à suivre

Le duo explosif
Lomepal et Roméo Elvis, un unique show et un pari réussi

Côté festival 

On a aimé : 
- Une programmation cohérente et de qualité, Marsatac n'a pas fait semblant pour ses 20 ans 
- La scène extérieure, la nouveauté de cette année et on espère qu'elle trouvera encore sa place les éditions prochaines, le gros point fort de ce Marsatac
- Des prix de boissons et de nourriture raisonnables
- De l'espace dans chaque recoin du festival, ça fait plaisir de respirer l'air marseillais sans se rentrer dedans

- Un thème "plage" respecté aussi bien pendant la campagne de communication que sur les lieux avec des installations innovantes

- Des buvettes disséminées dans tout le festival, on a rarement fait la queue 

On a moins aimé :
- On regrette que ce thème n'ait pas été présent dans les enceintes du Palais Phocéen et le Grand Palais, même si le côté industriel était de mise pour l'électro, le choc était parfois brutal
- Un son trop fort sur la scène extérieure, parfois inaudible sur certains morceaux au même titre que des soucis techniques rencontrés
- Des "Tu veux pas un truc" à chaque coin du festival passé une certaine heure
- Des stands de nourriture mal agencés, un estomac de festivalier qui crie famine peut difficilement la contenir durant 30 minutes d'attente

Infos Pratiques 

Prix de la bière
6€50 la pinte de Carlsberg, 7€50 la pinte de Skoll, 4€ le verre de vin...

Prix de la nourriture
Burger 10€, Hot dog 5€, 7€50 la galette de poulet...

Prix du pass
72€ le pass 2 jours

Transports
1€80 le ticket de métro

Conclusion

Le Marsatac s'est implanté comme une référence de l'Hexagone avec une programmation rap et électro pointue. A l'occasion de souffler sa 20ème bougie, le festival a su relever le défi en mélangeant têtes d'affiches et découvertes au profit d'un line-up bien ficelé. Une expérience prenant tout sens à travers son panorama unique et un thème "plage" assumé jusqu'au bout. Des problèmes techniques ainsi que quelques incohérences logistiques restent à déplorer. Marsatac arrive tout de même chaque année à se renouveler, notamment avec une scène extérieure qui fut le véritable point de fort ce nouvel opus. Une chose est sûre, le festival a encore de belles années à vivre à l'aube de sa nouvelle décennie dans la cité phocéenne. 

Récit et photos par Romain Jumeau