On était à
La Douve Blanche 2023 : le château dont vous êtes le héros

Comme nous sommes heureux.se.s de revenir cette année fêter les 9 ans du festival le plus célèbre d’Egreville. La Douve Blanche et nous c’est une belle histoire qui a commencé il y a 6 ans en suivant les traces du label Animal Records pour se retrouver à danser dans les douves et le jardin d’un château du sud Seine et Marne en compagnie du châtelain (rien que ça). Rien n’a changé, le superbe cadre, l’intimité du lieu permettant une certaine complicité entre festivaliers (les Douvistes), l’offre culinaire pointue et la musique partout (toujours aussi forte jusqu’au petit jour). L’horoscope du week-end, la charcuterie musicale au camping, les “Sureau Boyz” du stand de cocktail Natz, l’écrasante majorité de femmes parmi les artistes, on vous raconte sans plus attendre notre édition 2023 au château de la teuf.

 

Jour 1. Vendredi 7 juillet. 20h30, fête foraine au camping

Après avoir déballé notre paquetage pour le week-end dans le petit parc du château, nous sommes directement propulsés dans la fête. Ici, pas de séparation entre les scènes et le camping. On découvre l’animation principale des soirées prévues pour le camping : la caravane de la Charcuterie Musicale, rose bonbon avec son animateur et sa panoplie de cochon. On l’entend de loin animer un blind test pour personnes alcoolisées en prenant une voix de forain. La Douve Blanche a le chic pour mélanger un esprit fête au château (petits plats dans les grands) et fête de village (Ricard Pastis vibes). Nous partons vite à la découverte des Douves, curieux de voir les scènes.

22h, grand bain electro

Les deux scènes (du Château et du ¨Pont) dans la Douve n’ont pas changé. Le Food Court est revenu dans les Douves avec les autres stands d’alcool (Fever Tree, Super Bock et Natz), de merch et autres (CBD, tatouages, glaces). Sur la scène du pont nous assistons médusés au concert de Calling Marian. Seule sur scène, elle jongle entre ses platines et une cymbale de batterie avec un énergie folle et communicative. Mais la programmation est serrée ce soir, son set ne doit durer qu’une heure, et l’orga s’affole quand elle dépasse sciemment l'horaire prévu. C’est vrai que personne n’a envie qu’elle s’arrête dans le public. À contre-cœur, elle quitte l’estrade presque 15 minutes après l’horaire convenu.

On en profite pour aller voir la petite scène “de la Lune”, la seule à l’extérieur des Douves, et écouter un peu du set electro de DVDE. Là, des DJs sets sont proposés en parallèle des concerts sur la grande scène ou sur la scène du pont, de quoi permettre aux insatisfaits de trouver l’herbe plus verte ailleurs. Mais attention à ceux restés au camping, pris entre deux feux : la musique venant des douves et celle de la petite scène se télescopent.

23h,  problème technique et cocktail

L’un des grands noms de la soirée, le franco-grec, Johan Papaconstantino (photo) se produit sur la grande scène. L’occasion pour nous d’apprécier l’installation et la qualité de l’acoustique sonore. En face de la grande scène, le petit stand de la marque Natz (hard seltzer au citron et au gingembre) propose des cocktails légers mais super frais à la liqueur de sureau. Les serveurs s’activent en ne manquant jamais de discuter avec nous. Eux aussi sont impressionnés par la puissance des enceintes (ils faut dire qu’ils sont aux premières loges). On reviendra souvent leur commander des cocktails et nous y croiserons aussi souvent le châtelain des lieux, reconnaissable entre mille avec sa coupe en crystal rouge en guise de verre et sa grenouille en pendentif autour du cou. Mais 15 minutes après le début du concert de Papaconstantino (nous nous y prenons toujours plusieurs fois pour le prononcer) une coupure électrique générale oblige les organisateurs à évacuer intégralement l’intérieur des douves. Eux qui avaient un timing serré doivent décaler le reste de la programmation d’1h pour la fin de soirée.

1h, dans la clairière enchantée

Nous passons par la clairière enchantée où se tient le stand de Rave Safe (une association de prévention) qui propose de dessiner des affiches avec des supers slogans en écoutant de la hard tech. On les aime beaucoup, eux et leur teint frais. Nous nous remplissons les poches de bouchons d’oreilles en prévision de la nuit.  Au loin on peut assister au set de Social Dance avant de rejoindre la grand-messe électro : Romain FX (photo) s’installe aux platines de la scène principale, la nuit commence, les corps sont déjà bien échauffés. Nous allons avec bon cœur reprendre un cocktail au sureau et faire un brin de causette avec les serveurs qui tanguent un peu mais tiennent la barre dans la tempête face à la foule de la scène du château.

Fatigués, vers 3 h, nous assistons un peu distraits au set de Marina Trench. Nous ne sommes pas très convaincus musicalement par ces deux sets mais l’ambiance nous a comblé. 

Jour 2. Samedi 8 juillet. 13h, à nous la grande cuisine !

Nous avions réservé un repas bistronomique pour le déjeuner du samedi au sein du festival, au niveau du food court. Au “bistrot des chef·fe·s” (photo), le menu est composé de façon collaborative entre le patron du festival et chef cuistot Antonin Girard et son compère Adrien Tran, avec Mahir Atia, chef investi dans le projet solidaire du Recho. Allez les garçons, après l’usage de l’écriture inclusive, il reste encore un petit effort à faire pour que les cheffes soient vraiment mises en valeur ! On nous sert une salade de concombre marinés avec tranches de pêches blanches et feuilles de basilic pourpre. Le plat de résistance est un grand classique du bistrot à la française : saucisse de porc et son jus (ou option végétarienne possible), purée de pommes de terre et pickles d’oignons aigre-doux. Un dessert à la ricotta assaisonné de miel et de fruits rouges accompagnés d’éclats de pistaches vient clore ce repas. On en sort repus, le soleil ardent n’aidant pas à la digestion, mais un peu dubitatifs : à ce prix (boisson non comprise), on s’attendait à un tout petit peu mieux.

14h30, sueur et douche froide

Une chaude journée s’annonce à la Douve Blanche. Pas question de manquer la douche (bien fraîche, elle). La queue pour celle-ci s’allonge, nous avons de la chance de n’attendre qu’une demi heure, mais sous le cagnard. Le temps pour nous d’observer ce qu’il se passe au camping, sur le stand de la Toque blanche : un nouveau jeu à mi-chemin entre Interville et Top Chef avec des festivaliers en équipe qui doivent goûter des vins à l’aveugle, couper des trucs... On vous avoue, on ne comprend pas tout. Il fait une chaleur étouffante, tout ce petit monde est en plein soleil, le public clairsemé et les participants sont arrosés régulièrement au karcher pour éviter les insolations... Un des tuyaux des douches semble un peu fatigué et finit par rompre. Un petit mot glissé au stand d’accueil des bénévoles entraînera une réaction rapide. Ouf, les douches restent en état de fonctionnement.

16h, un peu de poésie dans ce monde de brutes

Sur la scène du pont s’installe Julia Pertuy (photo), qui chante seule en s’accompagnant de son violoncelle ou au synthé. L’ambiance est intime, et on peut se protéger du soleil ardent grâce aux contreforts de la douve. On apprécie la production orchestrale enregistrée qui se déploie autour de sa voix par moments.

La chaleur continue de grimper, et on s’offre une glace gourmande au camion tout proche de Dolce Mama. Cela ne nous suffit toujours pas et on entame un retrait sous la fraîcheur des arbres du site de camping. De loin, on entend d’improbables mélanges entre les différentes sonos : la Charcuterie Musicale envoie de son côté le Te Deum de Charpentier, une musique baroque que l’ORTF avait utilisé en son temps comme jingle, tandis que ce qui semble être les DJs de Rondpoint balancent de l’eurodance à fond les ballons sur la scène de la Lune. Le cocktail évidemment asynchrone est détonnant.

20h, Pussy Power

Après plusieurs gourdes d’eau vidées et un peu de repos sur un hamac tendu entre deux arbres du camping, on entame un retour vers la musique. Tracy de Sà nous sert un show très punchy et fait entonner son hymne Pussy Power au public. Non loin, des circassiennes sur échasses déambulent dans la douve, ajoutant à l’ambiance de fête de village médiéval que nous suggère le cadre architectural. Les fameuses grandes lettres en bois disposées à l’entrée de la douve (supposément disposées pour former le nom du festival) sont régulièrement réarrangées pour générer des messages plus ou moins drôles, souvent graveleux, et même parfois politiques : un hommage au jeune Nahel apparaît notamment pendant un moment.

On se rapproche du DJ set de Zaatar (photo) qui nous enjaille avec une techno léchée, brodée de références aux percussions et mélodies du monde arabe. L’ambiance sous la tente de la scène de la Lune est joyeuse et dansante. Une illustratrice se tient sur le côté des platines et fait un croquis de la djette. La fête se poursuit sous le regard presque maternant du gros van de Radio Nova décoré tout en couleurs et arborant un slogan malicieux : “Travailler moins pour danser plus”. C’est bien un motto qu’on pourrait s’approprier !

23h, pouet pouet à bicyclette

Après quelques nouveaux cocktails au sureau sirotés en écoutant Trefl7, on patiente devant la scène du château pour le set de Radio Cargo (photo). Les membres de ce duo d’électro adorateurs de la house du début des années 90 et de la transe de la fin de cette même période, sont de grands habitués des fêtes sauvages et autres open-air grâce à leur système son transporté sur vélo cargo. Leurs côtés éclectiques voire iconoclastes à faire alterner des musiques radicalement différentes sans transition nous font rire un moment mais ne permettent pas de construire une ambiance sonore très stable. Les festivaliers apprécient mais les danseurs endiablés se font rares.

La suite est assurée par la DJ marocaine Glitter55, mais son set très techno indus nous semble un peu trop agressif pour nos petites oreilles alourdies par la chaleur. Une pause nocturne s’impose.

3h30, l’heure des fantômes dans la nuit

Sur la scène du château deux jeunes cagoulés viennent au secours des festivaliers après des prestations un peu décevantes. Phantom Traffic, pétri de référence de duos de la French Touch fait danser la foule avec énergie et enthousiasme. La fin du set est paroxystique avec un rappel de 15 minutes et un public en transe.

A 5 heures du matin le camion de la Charcuterie Musicale a baissé le rideau mais une bande d'irréductibles continue à danser sans musique. On assiste à un film muet très original avant d’aller se coucher. Enfin aller se coucher est difficile tant la concurrence fait rage entre les afters du camping.

Jour 3. Dimanche 9 juillet. 10h, fin de partie au camping

Le réveil est rude au camping. Les bruits se succèdent et nous font finalement bondir hors de la tente. Le ciel gronde de plus en plus fort et le taux d’humidité annonce le déluge. Dans la précipitation, nombreux sont les festivaliers dehors à remballer en urgence le matos de camping, pas encore bien remis de la veille. Puis l'agitation se fait encore plus vive quand ce sont les agents de sécurité qui commencent à passer entre les tentes en hurlant pour lever les plus téméraires de la veille. Après une cellule de crise, les organisateurs ont décidé d’évacuer le site dimanche matin et d’annuler les quelques dj sets prévus dans la journée. Le système des navettes doit être renforcé le matin. Nous n’échappons pas complètement à la pluie. Les sanitaires n’étant pas couverts, on pense avec tristesse à la belle collection de papier toilette qui finira en charpie. Mais les orages sont moins violents et longs que prévus, au grand désespoir du torréfacteur installé près des douches, coupé d'électricité très vite, et qui comptait beaucoup sur la demande en café des festivaliers pour cette dernière matinée.

Bilan

Côté concerts

L’explosion phonique arabe
Zaatar, sur la scène de la Lune on ne voyait plus qu’elle

Le rythme dans la peau
Calling Marian, elle aurait pu ne jamais s’arrêter

Côté festival :

On a aimé : 

-Le châtelain et ses costumes flamboyants de festivalier.
-L’accès facilité aux habitants du coin (jeunes et moins jeunes) qui sont venus se mêler et profiter de la fête.
- Le stand rave safe qui parfois envoyait du son plus ouf que sur les scènes et qui a tout compris à comment nous faire venir discuter.
- Le stand Natz, préféré du châtelain, son formidable cocktail au sureau et ses serveurs au poil qui ont réussi l’exploit de faire la fête plus que tous les Douvistes réunis : nous leur avons donné l’affectueux surnom de “Sureau Boyz”.
- Le stand de glaces avec ses parfums déments et celui du café au camping.
- La Charcuterie Musicale, cet inarrêtable ambianceur du camping, complètement décalé mais du coup complètement à propos.

On a moins aimé :

- La musique en général pour être honnête, il y avait des décalage entre le mood des festivaliers et ce qui était proposé. Des enchaînements laborieux et une sérieuse interruption le vendredi. Et dans la nuit des télescopages musicaux entre la scène de la Lune et la scène du château.
- Les douches encore trop peu nombreuses et pétées facilement au bout d’un jour.
- Le bistrot des chef·fe·s, un entre-deux qui nous laisse sur notre faim.
- Les stands du Food court facilement à court de tout le samedi.

Infos pratiques :

Prix des boissons:
- Entre 6 et 8 euros le verre de vin, 8 euros la pinte
- 9 euros les “fameux” cocktail Natz à la liqueur de sureau
- Une consigne de 1 euro sur chaque verre remboursable (of course)

Prix de la nourriture :
- Bistro des chef.fe.s (entrée, plat, dessert) à 29 euros
- Festin des chef.fe.s dans le château (duos de cheffes qui proposent un repas en 6 temps avec accord vins) à 68 euros
- Plats entre 12 et 18 euros

Prix du festival : 
- 87 euros (prix “regular”) pour les 3 jours, réduction pour les habitants d’Egreville et de la communauté de commune

Transports : 
- En train: depuis la gare de Souppes Château-Landon (Train P au départ de Paris Gare de Lyon) accès avec des navettes (3 euros aller).
- En voiture: accès à Egreville depuis l’A6, sortie 16 : Montereau-Fault-Yonne/Nemours

Conclusion

La Douve Blanche tient ses promesses de festival à taille humaine dans un cadre bucolique soigné et intimiste. Depuis sa création des traditions festivalières sont nées et se sont renforcées grâce aux succès des éditions précédentes, au savoir faire et à l’excellente organisation qui n’a gardé que le meilleur : les lettres amovibles, les espaces chill dans l’herbe, le châtelain en costume déambulant dans la fête, les repas gastronomiques, la Douvette, l’ambiance colonie de vacances du camping avec les concours géants… Pour terminer notre éloge, insistons sur la décision cette année de ne pas chercher à agrandir à tout prix la taille du festival et de compter sur la fidélité des adeptes pour garder la fête simple et peut-être plus durable. Car avoir avoir encore de l’herbe verte à la fin du festival et réussir à se faire des copains à force de se croiser sans cesse c’est précieux, comme un sentiment de vacances réussies entre amis.

Rédaction et photographie: Fanny Salmon et Georges Ledoux