On était à
La 7ème Vague boit la tasse

Toujours accolée au jeudi de l'Ascension, La 7ème Vague de Bretignolles-sur-Mer en Vendée sonne chaque année le début de notre saison des festivals. Plus de 10 000 personnes se sont retrouvées en mode vacances pour partager deux jours festifs, pour une édition 2017 animée mais décevante.

 Jour 1. 17h42, camping nous voilà !

Après avoir bravé les contrôles de gendarmerie, s’être garés sur un parking mi-voitures / mi-camions, avoir pris une navette du parking à l’entrée du site (environ 3,5 km), avoir marché une dizaine de minutes avec tout notre attirail : nous voilà au camping (photo)… On peut dire que l’aventure a déjà commencé et que sous 25°, on hésiterait presque à faire une sieste. Mais pas le temps de niaiser, les voisins nous accueillent à la bière et Alma Road, gagnant du tremplin d’hiver, nous attend déjà sur la petite scène.

 20h18, Biga roxe du poney

Une oreille sur la petite scène au son funky-pop idéal pour débuter la soirée, on profite qu’il y ait peu de monde pour découvrir un système de paiement au bar via application. On a surtout testé pour les 3 € offerts sur la première consommation. C’est astucieux mais on doute que les smartphones tiennent deux jours en festival... il faudra se rabattre sur les jetons habituels. C’est au tour de Biga*Ranx a.k.a. Telly (photo) de nous faire découvrir son nouvel album 1988, prévu pour le 9 juin, et une tournée épurée de musiciens. On apprécie son liquid dub toujours excellemment distillé, mais si tôt dans la soirée avec une scène digne d’une kermesse qui donne l’impression d’être trop grande, on en sort presque déçu.

21h29, le Kremlin passe crème

 En tant qu’habitués des lieux depuis 2009, nous faisons un rapide tour du propriétaire : la décoration est quasiment absente, le site est mal éclairé, la seule bière proposée - bien qu’à environ 2,50 € - se cantonne à de la Kro, tout comme les indémodables américain-frites et crêpe en dessert qui ne révolutionnent pas la carte. L’éco-responsabilité n’existe plus ; aucun tri, poubelles qui se comptent sur les doigts de deux mains, pas de cendriers portatifs… À croire que le festival régresse avec le temps, c’est désolant. Pendant ce temps, Barbés.D se démène pour faire monter l’ambiance auprès d’un public très jeune. Son dub stepper digital est appréciable et joue bien la transition avant Soviet Suprem (photo). Ces derniers tournent avec les mêmes blagues depuis trois ans mais leur fausse grand-messe communiste atteint toujours de nouveaux adeptes et permet à toutes les générations de jumper sur les cendres de l’U.R.S.S., alors on profite de leur rap soviétique avec gaieté !

 23h34, « Wax, t’as l’heure ? »

Sur la petite scène, Jive Me poursuit le bal avec des sonorités electro-swing qui rappellent Deluxe. C’est entraînant, c’est dansant et en plus c’est à la mode, l’ambiance est lancée. C’est au tour d’une des têtes d’affiche de prendre place sur la grande scène : Wax Tailor (photo). On comprend mieux l’utilité de l’imposante installation présente sur scène, ce sont des écrans géants qui diffusent messages et vidéos pendant le concert. By Any Beats Necessary, son dernier album, amène une couleur plus blues-rock psychédélique à son hip-hop envoûtant. C’est calme, très calme, trop calme. On entend certains festivaliers se plaindre «c’est chiant» et l’artiste leur rend bien «on va continuer sans vous, c’est la première fois que ça arrive. Vous êtes le pire public qu’on ait eu…». Sûrement ironiques,  accompagné de huées.

02h08, balancez-nous ces basses, iRaize & Pho

C’est au tour de Madame de poursuivre sur la petite scène qui joue en alternance parfaite avec la grande. On écoute les premiers sons technos puis on préfère se poser dans l’herbe en attendant la suite. On a l'impression d’être à l’extérieur d’une boîte de nuit avec des basses distinctes et cinglantes, ce n’est pas vraiment notre tasse de thé. Voilà Tha Trickaz (photo) avec un set mêlant dubstep et electro hip-hop qui envoie du lourd. Ils arrivent en même temps que la pluie qui ne les quittera plus pendant une heure. Avec la chaleur qu’il fait et l’ambiance de feu, on remarque à peine que tout le monde est trempé. On en profite à fond pour se défouler, c’est parfait pour clore cette soirée. Les plus courageux doivent prendre la navette pour retourner à leur voiture ou camion, on leur fait un signe de la main et on va se mettre à l’abri dans nos tentes.

Jour 2. 19 h 52, new generation is future

Réveillés aux aurores par le sauna de nos tentes et de joyeux cris, on apprend que plusieurs tentes se sont faites visiter et voler pendant les concerts. De plus le camping est complet, on se demande bien où vont dormir les nouveaux arrivants. Aujourd’hui, direction la plage pour se poser tranquillement dans le sable avec la horde de festivaliers. On en profite pour faire un petit tour sur les animations ludiques présentes en centre-ville.

La soirée arrive vite, on évite la fanfare banda et on se rue sur les premiers rangs pour Jahneration (photo). Ce groupe de reggae français cartonne en ce moment avec son album éponyme et une tournée générale des festivals français. Les vibes sont bonnes, l’énergie communicative et le plaisir partagé.

21h14, power Tryo !

Le duo Catfish débarque sur la petite scène avec ses sons rocks indépendants, blues et électro. C’est une belle pêche d’infuences qui s’écoute de loin, accoudé au comptoir d’un bar encore calme. La capacité du site est à son maximum quand Tryo (photo) arrive sur la grande scène. Déjà croisés lors du Couvre Feu 2016, on ne peut s’empêcher de chanter leurs hymnes incontournables avec les 7 000 personnes présentes. Leur dernier opus Vent Debout est repris en cœur comme les premiers titres qui ont fait leur succès. En tout cas, le groupe a gardé son énergie, sa sincérité et sa spontanéité. Après 1h20 de concert, le public en redemande !

22h43, vous avez dit étrange ?

Sur la petite scène, Le Son Étrange (photo) commence déjà et distille des sonorités électro-dubstep avec une pincée de dub-hip-hop. Ça fait bouger la tête et lever les mains. Au moins ça a le mérite de réveiller les ardeurs alcooliques de certains et de les secouer, quand d’autres se refont le fil du concert de Tryo assis tranquillement dans l’herbe : «c’était grave cool». On en profite pour aller se rassasier et discuter avec quelques joyeux lurons dans un état de festivité bien avancé. On fait également un petit tour sur le stand de préventions et on remplit nos bouteilles au robinet d’eau gratuite.

23h32, le courant passe entre nous

Sur la grande scène se préparent General Elektriks (photo) qui, dans la continuité, viennent proposer un set hypnotique et revigorant d’électro-pop toute fraîche. Ça ne transcende pas les foules mais ça a le mérite de faire voyager et de plaire à tout le monde. Emmené par Hervé Salters, voilà 14 ans que ce groupe sillonne les routes de France pour ambiancer les foules. La musique que vous devez avoir fredonnée récemment est certainement Raid the Radio qui reste dans la tête entre 2 et 8 semaines. De rien, c’est pour nous.

01h57, « eh’ Manu, tu descends les basses ? »

XxX, second gagnant du tremplin d’hiver, vient faire découvrir son électro-rock parfois à la limite de la trance psychédélique. C’est sympa et ça se marie bien dans le thème proposé depuis plusieurs heures, mais Jahneration aurait été le bienvenu à cet horaire. Comme la veille, une petite pluie fine accompagne le dernier concert de la soirée, c’est ManuDigital & Joseph Cotton (photo) qui s’en chargeront. Le beatmaker français propose à des chanteurs de poser leur voix sur ses riddims depuis quelques EPs, en avril dernier c’est donc Jah Walton qui était invité. L’alliance des deux artistes est aussi étonnante que détonante, c’est vraiment réussi et on en redemanderait volontiers une tournée pour la nuit. La pluie se densifie, les orages de l’Atlantique font leurs apparitions, il est temps de rentrer au camping en n’oubliant pas de trinquer une dernière fois avec les voisins. Les pieds dans le sable et la tête dans les étoiles, le festival s’achève sur un ciel brumeux et sombre comme nos impressions.

Le bilan 

Côté scène 

Du chill, du dub, du bonheur
Biga*Ranx, vivement la sortie de 1988

Le duo gagnant
ManuDigital & Joseph Cotton, mariage surprenant qui nous a convaincu

Le groupe prometteur que vous verrez partout
Jahneration, sans aucun doute la révélation reggae de cet été et c’est mérité

Le son qui tabasse et qui déboîte
Tha Trickaz, parfait pour réveiller ses voisins un dimanche matin

Côté festival 

On a aimé :
- Aucune attente aux stands et une armée de bénévoles toujours souriants à disposition
- L’ambiance de cour de récréation sur le camping et le site (déguisement de rigueur)
- La proximité avec la mer (environ 5 minutes à pied)
- Les prix raisonnables, aussi bien du pass 2 jours à 35 € que des consommations sur place
- Une programmation éclectique dans laquelle tout le monde peut trouver son bonheur

On n’a moins aimé :
- L’absence de décoration et de coins aménagés, qui donnent une cohérence et surtout une identité à un évènement
- L’éco-responsabilité totalement délaissée (aucun sac poubelle était distribué ; pas de poubelle de tri sur le site ; pas de toilettes sèches…)
- La nécessité de prendre des navettes - peu fréquentes - pour rejoindre les parkings ; certains ont préféré marcher 3,5 km en pleine nuit, soit presque 45 minutes
- Un choix de boisson / restauration rébarbatif et très peu qualitatif
- Un public très jeune qui manque encore de codes de bonnes conduites (consommation excessive d’alcool et drogues, écologie, partage, respect…)

Conclusion

Notre avis est assez mitigé sur cette édition : les belles heures du festival semblent définitivement derrière elles. Avec une programmation enthousiasmante et un temps idéal, la fête s’est vue dénaturée par des problèmes d’organisation et un manque d’aménagements. Ayant déjà perdu la quasi-totalité de ses fidèles depuis le changement de site en 2015, il est temps que l’association relève la barre... et vite !

Récit et photos de Pierrot Navarrete