On était à
Nuits Sonores, édition rafraîchissante en fournaise lyonnaise

Sous un soleil de plomb, le festival Nuits Sonores a fait danser pour la quinzième fois la ville de Lyon pendant 5 jours. Des anciennes usines Fagor-Brandt aux Subsistances en passant par la Sucrière, moments choisis de nos 5 jours dans la vibe lyonnaise.

Mercredi 24 mai. Jour 1, 23h10, entrée dans les usines

Le mercredi à Nuits Sonores, c’est toujours un moment particulier. Le moment où l’on retrouve les amis venus pour l’occasion, le moment où le week-end démarre après trois jours à compter les heures, et surtout l’ouverture du festival avec la première nuit. En bons festivaliers que nous sommes, c’est un peu après 23h que nous arrivons dans les anciennes Usines Fagor-Brandt, usines qui ont fermé leurs portes à la fin de l’année 2015.

Cette année pas de problèmes aux entrées : les bénévoles et la sécurité, très présente, font parfaitement le travail et l’on découvre très vite les bâtiments désaffectés. On visitera les lieux plus tard, on se dirige rapidement vers la Halle B, teintée hip-hop ce soir. Après la fin du set de Aj Tracey, c’est devant le phénomène grime Stormzy qu’on se cale. La salle n’est pas encore remplie et on prend une première claque visuelle avec le mur d’écrans/lumières encore plus impressionnant que la scénographie d’Ezekiel. Même si le set tape plutôt bien, le mixage voix est mal réglé et la voix du MC est bien trop masquée pour rentrer dedans. La claque sonore attendra.

00h45, hip-hop et Vitalic.

La chaleur est montée d’un cran, ou disons plutôt que depuis le début de l’après-midi elle n’est toujours pas redescendue. La pinte de bière fraîche à 7€ est plus qu’indispensable, même si en ce premier soir, le stand de rechargement du Cashless est pris d'assaut par tous les mecs comme nous qui n’ont pas anticipé en chargeant leur carte. Ce verre de fraîcheur est éphémère. Dans la plus grande salle des Nuits, Vitalic (photo) démarre son OCD Live. Un live puissant et visuellement impressionnant, dans la lignée de ce que le français nous avait déjà proposé lors de sa dernière tournée. Difficile de s’approcher de la scène tellement la foule est compacte, mais cela ne nous empêche pas de prendre notre pied sur les classique du dj qui démarre son show avec Ok Cowboy. Ca tape techno, ça tape fort, ça tape bien.

Mais ce soir, la programmation nous joue des tours, et dans le Halle B Lady Leshur met le feu en même temps que notre Vitalic national. Pas question de rater la fin, et on comprend rapidement pourquoi la jeune anglaise est aujourd’hui un véritable phénomène. Un flow impressionnant et ravageur fait danser le public de la salle, même si une fois de plus le son n’est pas à la hauteur.

02h20, Laurent Garnier frappe le coup final

Après les MC, c’est Sarah Farina qui enchaîne aux platines. L’allemande reste bien de l’autre côté de la manche avec un set grime, garage et jungle parfaitement exécuté.  Ça groove et c'est puissant, tout ce qu’on aime ! Et pour conclure cette premiere nuit intense, qui de mieux que Laurent Garnier (photo), à domicile ici où il vient chaque année quasiment depuis le début. Le tonton des nuits est en mode UK ce soir et ca fait du bien. Il sait tout jouer et il le prouve. Le set est rempli de classiques, on danse sur du garage, UK bass, jungle et même de la neurofunk ! La sélection est parfaite pour les amoureux de la baseline que nous sommes mais on aurait aimé un set un peu plus dynamique avec des enchaînements plus rapides. L’heure et demie passe comme un éclair et on clôture cette première nuit sur un track liquid drum & bass à tomber dont on recherche encore le nom.

Jeudi 25 mai. Jour 2, 17h20, après-midi en bord de Saône

Pendant que The Black Madonna dirige la journée à la Sucrière, c’est vers les Subsistances qu’on assiste à la Carte Blanche donnée à Lisbonne. Quel plaisir de se retrouver en bord de Saône, dans un des plus beaux endroits de Lyon. Ce lieu emblématique de la ville accueille concerts et ateliers pour enfants pendant tout le festival. Dans la verrières, les artistes portugais s’enchaînent et on passe une après-midi au calme à taper du pied et à chiller dans les Subsistances. On apprécie particulièrement le coin ombragé sous les arbres vers le Quai des Arts ou on a passé une bonne partie de l’après-midi à refaire le monde entre deux sessions concerts ibériques et des master class ableton organisée par le festival. Un beau moment pour une courte journée Nuits Sonores : on passe notre tour pour le circuit qui s’installe dans une quinzaine de lieux de la ville, le vendredi n’est pas off pour tout le monde !

Vendredi 26 mai. Jour 3. 22h02, “Hot Doggy Dog, qu’est-ce qu’on attend?”

Après une longue journée de travail, c’est encore aux Usines Fagor-Brandt que l’on démarre la nuit. Pas d’Extra! ni de Days, mais une soirée de plus dans les usines. L’arrivée est moins tardive ce soir, l'occasion pour nous de découvrir un peu plus la Halle A, avec ses stands de restauration à la signalétique plus que bien trouvée : “Je vous demande de vous al-dente” pour le vendeur de pates,“Kefta t’as un foufi” pour la bouffe orientale ou “hot doggy dog, qu’est-ce qu’on attend” pour les sandwichs. L’occasion de se faire un petit plaisir chez ce dernier avant de se lancer devant les scènes.

00h30, Pharoah Sanders dans le Zion

Après un passage sur Mustafa özkent, c’est devant une des légendes du free jazz qu’on se retrouve : Pharoah Sanders. Ce saxophoniste de presque 80 ans est un ovni. Devant une salle quasi vide, l’américain erre sur scène pendant que ses musiciens assurent et essayent tant bien que mal de le faire jouer. De temps à autre, Pharoah prend le saxo, tente de jouer quelques minutes, puis abandonne. Au meilleur du live, il prend le micro pour bafouiller quelques mots et faire taper les 300 personnes présentes dans leurs mains. Un moment à la fois drôle et presque triste tant ce vieux monsieur n’est plus en capacité d’assurer un concert. Heureusement le public n’est pas exigeant, et la moindre note sortie par le saxophoniste se fait sous les applaudissements d’un public tout sourires.

01h00, de la France à la Syrie

C’est dans une halle B bien remplie que l’on retrouve les agitateurs de la techno française François X et Bambounou. Les deux producteurs et Djs enchaînent les bombes en b2b les unes apres les autres. On tape du pied et le public se fait entendre à chaque transitions, pas de doute le made in France fait mouche !

Suite à un passage aux toilettes qui sont plutôt spacieuses et en quantité, on part jeter un œil en halle C voir le Syrien Omar Souleyman (photo). La halle est bondée et l’ambiance a des airs de mariage traditionnel. Au chant accompagné d’un synthétiseur hypnotique, Omar Souleyman prend totalement le contrôle de la foule et fait monter la température d’un cran. On switch tout de même en halle B au bout de 20min, trop bousculés par le public qui s’empresse devant le chanteur. Le début de Helena Hauff marquera pour nous la fin de notre nuit.

Samedi 27 mai. Jour 4. 16h30, Soul Train baby!

Le reveil se fait tardif, et c'est en parcourant le programme des Extras! qu'on attaque la journée. Evènements gratuits organisés par les collectifs locaux, les Extras! rythment le festival et la ville depuis le début des Nuits Sonores. Et il y en a pour tous les goûts et tous les âges avec "La matinale mm pas mal" qui propose dès 10h séance de yoga, gym et brunch des familles le tout en musique, "All dayer vermut y rock n roll" bar de vermouth éphémère arrosé de groove espagnole, "Vielle école" tournoi de belote, pétanque et musique funk ou encore “Extra! Fripparty” qui propose une friperie géante en plein air et à prix libre en partenariat avec Emmaüs.

On choisira l’Extra! Soul Train qui reprend le concept de la fameuse émission des années 70. On passe l'après-midi avec les talentueux Charlie and the Soap Opera et le maître de la soul James Stewart  qui font sortir le groove qui est en nous en nous faisant danser en remontant les rails marqués sur le sol de la place Gailleton. Soleil, musique, sourires et bonne ambiance: la recette d'une après-midi plus que réussie.

01h35, les lives de La Halle D font du bien

Cet après-midi Extra! nous prend beaucoup d'énergie, et les jambes se font lourdes en ce quatrième jour. On se motive quand même à terminer en beauté avec la dernières nuit du côté de Fagor-Brandt. Dans le programme, une salle attire la foule : celle qui accueille les Chemical Brothers. Le duo a les commandes pendant 3h et ce n'est pas un des magnifiques lives dont eux seuls ont le secret qui est présenté mais un classique DJ set. De notre côté c'est vers les lives de la Halle D que l'on se tourne après un bain de foule devant les frêres britanniques. Dans une salle loin d'être pleine, on enchaine le groupe rock experimental Pratos (photo) et l'écossais Mr TC. Ces deux lives a instruments font un bien fou dans un week-end ou les djs font nombre et contrairement aux autres salles, on ne manque pas d'espaces pour lâcher nos dernières forces en danssant. La dernière heure se fera sur le locale l'étape : P-Moore, qui a l'honneur des programmateurs et du public pour conclure cette série de trois nuits.

Dimanche 28 mai. Jour 5. 19h00, bingo ensoleillé à la Sucrière

On y avait pas encore mis les pieds, faute de disponibilité pour les Days. C'est donc le dimanche en fin d'après-midi que l'on rentre dans la Sucrière pour la première fois. La chaleur étouffante présente tout le week-end fait arriver le public tard, mais nombreux. Derrière les silos, c'est le collectif Encore qui a la main sur la programmation et qui fait danser les quelques miliers de festivaliers venus profiter du Sunday Park. Une ambiance décontractée aux sonorité house. Le long des quais, on croise une péniche qui fait office de scène, on y croise les icauais Johnny Mafia, jeune groupe mi-punk mi-garage. Mais c'est dans la Sucrière qu'on passera un des moments les plus WTF du week-end : on reste scotché devant un bingo organisé par l'équipe de Radio Nova. On ne pouvait pas mieux terminer.

Le Bilan

Côté concert

Ca tape juste
Pratos, un vrai live puissant

Papy fait de la resistance
Pharoah Sanders, un grand père attachant au bout du rouleau

La belle découverte
Sara Farina, fraiche et talentueuse

Notre gars sûr
Laurent Garnier, parfait en version UK

Le made in France
Bambounou et Francois X, encore du bon bien de chez nous

Ca groove un max
Charlie and the Soap Opera, ces gars-là ont le groove dans les veines

Côté festival

On a aimé :
Les anciennes usines Fagor-Brandt, le lieu est parfait et bien géré même si les scènes très proches ne facilitent pas les flux
- Les subsistances pour la Carte Blanche à Lisbonne, ce lieux est l'un des plus jolis de Lyon, un vrai plaisir qu’il soit exploité
- Les Extra! et toute la créativité des collectifs lyonnais
- L’humour des stands de bouffe le soir, digne des plus belles campagnes Monoprix !

 On a moins aimé :
Le son dans les Halles, criard et pas toujours adapté à la musique live
- L'attente du cashless le mercredi
- Le retour de consigne limité à 5 verres (quand il fonctionne)
- Le court délai pour demander le remboursement du cashless : 5 jours !

Conclusion

Sous l'étouffante chaleur lyonnaise, Nuits Sonores nous a surpris tout au long du week-end. En quittant le Marché de Gros et en s'installant dans les anciennes usines Fagor-Brandt le festival a retrouvé son itinérance et a prouvé une nouvelle fois qu'il pouvait s'approprier parfaitement n'importe quel lieu. Une édition pleine de fraîcheur, bien aidée par les collectifs de la région qui chaque années proposent des Extras! de qualité et par des lieux mythiques parfaitement investis, des Subsistances à la Sucrière. Une quinzième édition réussie qui augure beaucoup de bonnes choses pour les suivantes.

Récit: David Beltramelli et Quentin Thomé. 
Photo: David Beltramelli, Jaufret Havez (Soul Train)