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Tha Trickaz : "Si on ne saute pas dans le public, c'est que c'est trop loin et qu'on risque de se faire mal"

Tha Trickaz, c’est comme si tu mélangeais du hip hop, de l’électro qui tape et l’univers du Japon dans ton shaker. Voilà maintenant 10 ans que Dj iRaize et Pho sillonnent la planète et ils se sont arrêtés quelques minutes avec nous au Fil du Son pour taper la causette.

Tous les Festivals : Pour commencer, on voulait parler d'une de vos démarches. Vous balancez la plupart de vos sons gratuitement. Pourquoi ?

iRaize : Tout ce qu'on fait avec notre label, Otodayo, on le file gratuitement. On produit d'autres sons qui sortent sur des labels payants, notamment Smog ou Firepower. Il y a plein d'exception à la règle, comme on travaille avec d'autres artistes, mais tout ce qu'on fait avec Otadayo on le fait de manière purement gratuite car on trouve qu'aujourd'hui c'est la meilleure manière de diffuser notre musique. Je pense qu'on est plus visible en étant gratuit. L'optique de la gratuité c'est aussi une facilité pour notre label, ça fait des démarches en moins et l'accès au track est plus direct, plus rapide.

Du coup c'est pas trop la dèche ?

iRaize : Non pourquoi ? (rires) Déjà je pense que la musique électronique c'est pas spécialement une musique qui est achetée, que ce soit sur itunes ou sur support physique. C'est plus une musique qui est faite pour les djs, les tracks se baladent un peu partout, tu ne vas pas forcément acheter un album complet.

Et pour la rémunération vous faites comment alors ?

iRaize : On fait des concerts, on marche comme ça depuis des années et dans notre système on préfère donner notre son gratuit pour qu'il soit streamé un peu partout, et donc gagner un peu via Youtube ou Spotify. Au final, on est gagnant sur tous les plans.

Demain s'il y a plus d’électricité comment on fait ?

iRaize : Hum ... on enregistrera tout sur cassette, à l'ancienne. Et sinon lui il fait du tuba et moi je ferais du tam-tam, on continuera à faire de la musique de toute façon.

Comment vous choisissez les festivals où vous allez ?

Pho : C'est plutôt eux qui nous choisissent en faite ! (rires). On a un manager c'est son boulot, mais on essaye de trouver les festivals par département qui nous correspondent le mieux mais ce sont les programmateurs qui nous appellent en général. Après on fait de tout, des festivals, des contests de skate, de snow, du club, du plein air. On fait beaucoup de représentation pour des sports extrêmes, notre musique se prête bien à l'univers. Puis on a fait du skate pendant longtemps donc ça nous parle !

Du coup votre musique est inspiré de cette période skate ?

Iraize : Non pas vraiment. Mais le skate c'est une culture à part entière ; nous on a capté beaucoup d'artistes et de musiques grâce aux vidéos de skate à l'époque. Que ce soit du hip hop, de la soul, du rock ou même du punk, on l'a appris via le skate.

Ca fait maintenant pas mal de temps que vous tournez, comment vous avez vu évoluer la musique ?

iRaize : C'est surtout que quand on a commencé à faire du son, avec notre style hip hop électro, il n’y avait pas de soirées spécialement pour ce type de musique. On se retrouvait à jouer dans des soirées drum'n bass mais ça ne collait pas vraiment comme on a des tempos beaucoup plus lents, ça créait un décalage. A l'époque à part le Peuple de l'herbe et quelques exceptions comme Wax Taylor, High Tone, ou Ez3kiel, il n'y avait pas énormément de musique électronique de producteur en France. En 10 ans cela a beaucoup évolué, c'est un style qui est écouté maintenant, c'est rentré dans les mœurs.

Pho : Et maintenant, il y a la nouvelle génération, t'as des producteurs qui ont 15 ou 16 ans, ceux qui sont nés dans les années 2000 avec internet. Sur Otodayo il y a des mecs qui ont 17 ans et qui nous disent qu'ils écoutaient Tha Trickaz à 12 ans, ça nous fait triper, on hallucine ! (rires)

Ça vous est déjà arrivé de ne pas sauter dans le public ?

Pho : Non ça n'arrive pas ! (rires) Franchement si on ne saute pas dans le public, c'est que c'est trop loin et qu'on risque de se faire mal !

Vous avez fait des festivals en tant que festivaliers ?

Pho : Ça fait très très longtemps ! Comme on joue quasiment tous les week-end c'est compliqué. Que ce soit des concerts, des festivals, aller au cinéma, ça fait très longtemps qu'on n'y a pas mis les pieds.

Ça vous manque pas ?

Pho : Non, puis si on a envie de s'amuser comme le public, on va avec eux et puis voilà quoi ! On en profite pas comme tout le monde car on à des balances à faire, des choses à gérer, des interviews à faire ! Mais c'est cool quand même.

Un instant ou un moment improbable qui vous a fait délirer en festivals ?

IRaize : Dernièrement on a joué pour la fête de la musique à Paris. Et la place de la République était blindé de A à Z, les gens ont mis un bordel monstre pendant 50 minutes avec le sourire, on n’avait jamais vécu une énergie pareil, on en est ressortit sur notre petit nuage !

Qu'est ce qui fait la différence entre un festival et un concert ?

Pho : La programmation tout simplement. La musique est beaucoup plus variée, on rencontre plein de gens et d'artistes différents. Tu communiques avec eux, tu rencontres d'autres cultures. Et ce qui est cool aussi c'est qu'en général c'est en plein air, je dirais pas que c'est mieux que le club mais ça marque la saison de l'été !

Iraize : Quand tu fais des festivals style Garorock, Solidays ou Dour, t'as une variété d'artiste qui va au delà de ce que tu écoutes toi de toute manière, donc tu découvres plein de choses. Et puis tu peux aller voir les autres groupes jouer, t'as des kiffs et des déceptions comme n'importe quel festivalier.

Un truc qui saoule en festival ?

Pho : La pluie ! C'est le souci du plein air contrairement au club. T'as les chaussettes mouillées, t'as plus de chaussettes de rechanges, tu remets tes chaussures avec des chaussettes mouillées.... C'est super désagréable (rires)

Iraize : Ouai mais on a fait des Garorock sous la pluie, les gens sont restés et ont tout donné quand même donc ça change pas tellement l'ambiance du festival.

Pour terminer, une pure bouse que vous avez vu en live récement ?

Pho : Hahahaha ... David Guetta à Garorock (rires)

Iraize : Une grosse pile de caca, il y avait des lances flammes et tout (rires)

Propos recueillis par Kilian Roy 
Photos par le collectif Amnexia