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Ez3kiel : «En festival ça ne sert à rien de faire des morceaux calmes»

Un son rock new wave électronique et progressif, bienvenue dans le monde instrumental d’Ez3kiel. Au Chorus comme au Rock dans Tout ses Etats, ils nous ont retourné par leur maîtrise et leur puissance musicale et scénique. On les a rencontrés en pleine tournée des festivals.

Ez3kiel existe depuis 20 ans. Avec l’album LUX, comment avez-vous pensé cette tournée ? Comme une rupture, une continuité par rapport à vos précédents projets ?

Sylvain, basse, guitare et claviers : Un peu des deux, c’est une continuité dans la rupture. A chaque album, on fait table rase, on reprend à zéro, on recommence un nouveau projet. On essaye de chambouler à chaque fois nos habitudes, de ne pas s’endormir.

Qu’est-ce qui a changé ? Qu’est ce qu’on a de nouveau ? Avant vous aviez beaucoup de gens sur scène avec vous.

Sylvain : Là c’est le retour à un quatuor, avec un trio musical et Yann à la créa visuelle. C’est le retour à nous, à poil musicalement. On vient effectivement de terminer notre tournée Extended, où on était 13 sur scène, et Yann aux images. Il y a eu un petit moment de latence pour savoir ce qu’on voulait, et surtout ce qu’on voulait ne pas faire.

Vous avez un show très visuel, est-ce que c’est facile de s’adapter aux contraintes des festivals ?

Stéphane, batterie et percussions : Lors des premières dates avec les Têtes raides, on avait joué sous un chapiteau. Ca s’est bien passé. Après notre magic screen, un grand mur de lumière composé de 36 leds et 48 projecteurs, est prévu pour se démonter facilement. Mais il faut quand même prendre des précautions car c’est assez fragile.

Et vis à vis de votre musique, de ce que vous avez envie de faire ressentir au public, ça a le même effet en extérieur en festival ? Vous cherchez absolument à jouer de nuit par exemple ?

Johann, guitare et claviers : On a remarqué qu’en festival depuis longtemps ça ne sert à rien de faire des morceaux calmes, en général on joue vers 11H ou minuit, et les gens veulent un truc plus bourrin. Pour ma part, je préfère jouer en salle où on a le temps de développer tout le panel de musique qu’on fait. En festival c’est plus compliqué.

En 1h vous n’avez pas le temps de développer votre musique ?

Sylvain : Vu que notre musique est principalement instrumentale, c’est vrai qu’en salle quand on a 1h30 ou 1h45 on peut un peu s’attarder sur une intro, sur des longueurs, installer une ambiance et jouer sur les reliefs, passer d’un morceau calme à un autre. En festival, on oublie un peu ce relief et on va favoriser les morceaux pechus de notre set.

Cet été vous êtes au coeur d’une belle tournée des festivals. Vous aviez notamment fait une grosse tournée en 2008, il y a des festivals dont vous vous souvenez particulièrement ?

Johann : On retourne souvent au Fusion festival qui est en Allemagne, qui est pour moi le festival qui devrait être normalisé partout. Ils font plus attention à l’accueil des gens plutôt qu’à celui des groupes. Ca joue 24h sur 24, le site est énorme, tu peux te poser partout, il y a un lac, ils ont tout fait pour l’accueil des gens. Pour moi c’est la référence.

Sylvain : Les Eurockéennes en 2008 ça a été au top

Johann : Après il y a beaucoup de festivals qui se ressemblent, les programmations sont toutes les mêmes.

Mais comme celui en Allemagne, il y en a quand même quelques-uns qui vous ont fait ressentir une philosophie différente ?

Johann : Ouai, en fait tout tient sur les gens qui l’organisent et comment ils approchent la musique. Il y a beaucoup de festivals où tu fais la queue pendant 1h, tu bois de la bière pas très bonne, tu as un petit sandwich pour beaucoup, c’est un peu l’usine. C’est le lot des festivals. En Allemagne, dans les pays de l’Est, même en Belgique, ca commence à changer, moins en France.

Sylvain : Les artistes sont moins mis sur un pied d’estale. Sur certains festivals tu n’as pas de loges, tu manges avec les festivaliers. Voilà, c’est super.

Vous trouvez que ça devient trop l’industrie en France ?

Johann : Ouai, mais même en temps que festivalier, j’ai jamais autant râlé qu’en festival.

Stéphane : En plein été ne pas avoir d’ombre, faire 1h d’attente pour les chiottes, c’est inhérent au fait qu’il y ait plein de monde, mais il faut y réfléchir avant. La bière quand tu en as bu 20, tu as l’impression d’en avoir bu 1 et demi car elles étaient coupées (rires)

Donc la pinte de Kro à 7,5€ du Chorus vous l’avez apprécié ?

Johann : Sérieux ? 7,5€ la pinte ? C’est une blague ! L’arnaque !

Mais racontez moi plutôt vos bonnes expériences de festivaliers !

Johann : Comme musicien, aux Vieilles Charrues, c’était une super ambiance. En tant que festivalier, j’ai un bon souvenir à Astropolis à Brest, aux Eurock pareil, et puis des festivals plus petits …

Stéphane : C’est dans la vallée !

Johann : Après je pense qu’il y a beaucoup de festival où cela se passe bien, des plus petits, avec moins de budget.

Et vers Tours ?

Johann : Le festival Aucard de Tours est vraiment super bien. Il y a avait le festival Cosmopolite aussi, je ne sais plus où c’est. Il y a le festival Teryaki.

Sylvain : Le EZH au pays Basque est chouette aussi.

Et si vous vous aviez à créer votre festival, en terme musical et en terme visuel, vous feriez quoi ?

Sylvain : Chaud d’y répondre comme ça !

Johann : Je me lancerais jamais là dedans ! (rires)

Stéphane : Des scènes moins grosses tiens, je trouve que c’est la course à l’échalotte de qui aura la scène la plus grosse. Ca n’a plus d’intérêt de regarder les artistes au loin comme des fourmis, ou sur des écrans géants, Je ne vois pas l’intérêt … Déjà réduire la taille des scènes, cela n'empêchera pas de garder une programmation ambitieuse.

Johann : Il y a un festival auquel je suis allé à Porto, le Primavera. C’est en juillet à Barcelone, et un tiers des groupes vont à Porto. C’est sur un espace de cirque naturelle en pelouse, il y a pleins de stands, de petits lieux pour se posé sur des canap, les filles ont des colliers en fleur, et tu as la mer juste derrière

Pour finir, j’ai vu que vous étiez attirés par créer des musiques pour le cinéma. J’ai récolté des demandes de réalisateurs, vous allez me dire vos premières idées

Stéphane : Ce sont des vrais messages ? (rires)

Oui oui, je les ai reçu dans la journée ! Le premier : “Salut c’est Georges Lucas. J’aimerais changer de musique pour Star Wars VII, notamment quand Luke Skylwalker rejoindra le côté obscur. Vous me proposez quoi ?”

Sylvain : La guerre nucléaire en musique !

Stéphane : y a de l’idée

Sylvain : Tu vas voir ça va tabasser, la guerre nucléaire !

Salut c’est Luc Besson …

Johann : Non !

Haha, ok ! Troisième message : “Salut c’est Sylvester Stalonne, Pour Expendables 4, je voudrais une musique pour le final avec Bruce Willis et Schwarzenegger. Vous pouvez m’écrire quelque chose ?”

Sylvain : Coool !

Stéphane : Grave ! (rires)

Johann : (hésitation) Ah là j’ai pas d’idées … un truc pour percussions et cuivres. Il y a aurais des grosses lignes de basses avec des machines.

Sylvain : Un son bien kitch ! Pas trop filtré

Et dernier message : “Salut c’est Woody Allen, J’aimerais faire une comédie romantique à Joué-les-Tours (Ndlr : ville d’origine d’Ez3kiel) où un anglais qui vient d’arriver tombe amoureux d’une française après avoir mangé un fouée. Vous me proposez quoi ?”

Johann : Wahou ! (rires) y’a plein de choses à faire avec une comédie romantique.

Sylvain : On s’attaque tous les trois à la guitare classique, et faut qu’on apparaisse dans le film derrière le couple en train de jouer, comme un bandidas.

Et en vrai, si vous deviez choisir un film dont vous auriez composé la musique ? Ou un réalisateur avec lequel vous aimeriez bien travailler ?

Johann : Interstellar ça l’aurait bien fait !

Stéphane : Le dernier film de Spike Jonze, Birdman, mais le batteur qui joue est déjà complètement hallucinant.

Sylvain : Pour moi, le dernier film de Jim Jarmush, Only Lovers rest alive. Un film incroyable avec des sortes de vampires, une ambiance de dingue, plein de moments mortels.

J’enverrais vos réponses, on verra si ça marche !

Les Trois : Merci ! (rires)

Propos recueillis par Morgan Canda

En festival cet été : Vieilles Charrues le 17 juillet, Paléo le 22 juillet, Emmaus Lescar le 29 juillet, Chien a Plumes le 8 août, Musicalarue le 15 août, Rocktambule le 9 octobre, Nordik Impact le 24 octobre, Rockomotives le 31 octobre