On était à
I Love Techno France : le gâchis

Parti pour être le plus grand événement européen en intérieur de l’année, la version française de I Love Techno s’est retrouvée être un énorme gâchis suite à son annulation de dernière minute. Retour sur cette soirée frustrante pour nous, comme pour les 35 000 autres festivaliers

18h30, découverte de l’annulation sur les réseaux sociaux

Prêt à partir en direction du Parc Expo pour une des plus belles soirées de cette fin d’année, c’est avec stupeur que l’on découvre, sur les réseaux sociaux, l’annulation de l’événement. On croit à une blague dans un premier temps mais on se rend vite compte qu’il n’en est rien. Les rumeurs d’annulation qui courraient depuis plusieurs jours sont donc avérées. Suite à un avis défavorable de la commission de sécurité, le maire de Pérols, ville qui accueille I Love Techno, délivre un arrêté municipal interdisant son ouverture au public.

20h30, un parking fermé

Nous trouvant à quelques kilomètres du lieu du festival, nous allons tout de même tâter l’ambiance devant le Parc Expo. A quelques centaines de mètres, des barrages de gendarmerie interdisent aux voitures d’approcher bien que certaines voies soient encore ouvertes. Sur le chemin les rumeurs vont bon train : des bagarres auraient éclaté pour certains, la foule aurait été gazée pour d’autres. Difficile de démêler le vrai du faux. Devant la salle, le parking très proche est vide et les portes sont fermées. L’ambiance contraste avec l’an dernier à la même heure.

20h45, des vigiles appelant au calme

Contrairement à ce qu’on a pu entendre, le public devant est plutôt calme. Les cris et les sifflements sont nombreux mais les appels au calme des agents de sécurité semblent être écoutés. Pour l’un d’entre eux la situation est simplement “incompréhensible”, certains de ses collègues auraient reçu des projectiles. Pour les vigiles le discours est clair il ne faut “rien casser ici. C’est devant la Mairie qu’il faut manifester”. Le parti pris est clair, ils soutiennent leur employeur, le géant des festivals Live Nation, et rejettent la faute sur le nouveau maire élu en mai dernier. D’après eux la commission de sécurité serait arrivée “trop tardivement”.

21h20, les contre-soirées s’organisent


Sur les parkings face au Parc les festivaliers présents s’organisent. Comme eux, on cherche un plan de secours. Le temps pour nous de boire quelques bières avec des Bordelais et des Nîmois venus pour l’occasion, avant de repartir en direction de Montpellier dans l’espoir de trouver un plan de secours. Les infos fusent sur les réseaux sociaux, certains seraient à la Villa Rouge, d’autres au Brake Club. On se motive pour la Villa Rouge qui semble proposer Tale of Us, Savant et Alésia, mais la vingtaine d’euros demandée nous refroidit. La soirée nous a déjà coûté cher.

22h10, arrivée à Montpellier

Sans la moindre idée de ce que nous réserve la soirée, nous débarquons à Montpellier. Garés près du Corum, le Palais des Congrès de la ville, nous décidons d’y jeter un oeil : les costards semblent être de sortie ! Avec notre attirail de festivaliers, nous faisons clairement tâche dans ce qui ressemble à un gala d’école, mais nous prenons quand même quelques minutes pour décider du reste de la soirée en mangeant quelques petits fours. Les textos fusent, tout le monde cherche un plan de secours. Bières dans un bar ? Mojito dans un autre ? La soirée s’annonce longue …

23h20, l’accueil montpellierain

C’est finalement dans un appartement à une dizaine de minutes à pieds que nous continuons la soirée grâce à des amis, d’amis d’amis … Une trentaine de personnes est déjà sur place, tous devaient aller à I Love Techno. Déçus mais pas abattus, les gens sont bien décidés à faire la fête. Les déguisements sont de sortie : une licorne, un dragon, un zèbre, Lilo & Stitch, un panda … La musique n’est pas à la hauteur mais l’ambiance est là, les gens défilent dans le salon, on y passera notre soirée.

Dimanche 10h00, l’heure du bilan


Le réveil est difficile. On aurait pu voir Garnier, Kalkbrenner et Andy C, on a finalement écouté Alphonse Brown au milieu de Daniel Avery, House of Pain, Boys Noize et Die Antwoord sur des enceintes de PC. Venus de loin pour cet événement, nous repartons avec un sentiment amère d’énorme gâchis.

Reste maintenant à savoir quelles sont les réelles raisons de l’annulation. Tous les sons de cloches ont été entendus. D’après le quotidien local Midi Libre les sorties de secours auraient posé problème, poussant la commission de sécurité à donner un avis défavorable. Le maire de son côté se défend derrière cette commission évoquant sa responsabilité en cas de problème. Armel Campagna, à la tête de Live Nation France, ne comprend pas cette décision comme il l’explique au quotidien: "Ça fait trois ans que l'on fait ça dans ces halls, il n'y a jamais eu de souci, cette année on a doublé les effectifs d'agents de sécurité, de médecins, on a fait tout ce que l'on pouvait... Et on nous a fait croire qu'il n'y aurait pas de souci...  C'est un échec total."

On peut quand même s'interroger sur Live Nation, organisateur du festival et habitué aux grands événements, comme le Main Square d’Arras et les plus grands festivals d’europe (Werchter, Leeds, Reading…). L’événement devait accueillir 35 000 personnes, soit 7 000 de plus que l’année passée. Les normes de sécurité ne sont plus les mêmes. Comment ont-ils pu pécher dans l’organisation d’un tel événement ? A moins que, comme on a pu l'entendre, cette décision ne soit issue une volonté politique d’interdire un des plus grand rassemblement techno d’Europe.

L’événement semblait avoir passé un cap cette année, dépassant même les ventes de la version belge, véritable institution. Tout repart donc à zéro pour les organisateurs qui, en quatre ans, sont passés de 15.000 festivaliers aux 35.000 attendus en 2014. La confiance est en tout cas perdue pour les gens présents à cette soirée qui a tourné au fiasco. I Love Techno France s’en relevera t-il ? Avec Live Nation derrière il n’y a pas de doutes, mais probablement pas à Montpellier ...

 

Récit de Quentin Thomé.