On était à
Rio Loco, océan de musique à Toulouse

Le Rio Loco commence à avoir de la bouteille. Pour sa 23ème édition, il célébrait les îles de l'Océan Indien. En plein cœur de Toulouse, on a eu l'occasion de découvrir ces musiques que même FIP diffuse rarement. Maintenant qu'on est rentré tout courbaturés, on vous raconte ces quatre jours de fête au bord de la Garonne.  

Jour 1. 17h59, prêt pour le coup d'envoi du festival

On se trouve face à la Garonne, étendus sur l'herbe de la prairie des Filtres. Pour l'occasion, le lieu bien connu des toulousains est transformé en un immense village-festival. Il fait assez lourd. Tout autour de nous papillonnent beaucoup d'enfants et de familles. Très rapidement, deux musiciens accompagnés de trois clowns, tous malgaches, séduisent le public tout entier. Au Hellfest, on aurait entendu des «à poils !», ici l'humeur est au «maman, maman, est-ce qu'on peut monter sur scène ?».

19h45, la première demande de rappel de la soirée

Le soleil nous tombe enfin dessus. Devant la scène Village, on se retrouve complètement emportés par l'énergie folle de Saramba (photo). Les trois chanteuses du groupe enflamment littéralement le public à coup de jeux de jambes et de déhanchés hallucinants. Après une bonne heure de set, on se retrouve à scander avec toute la foule «Indray ! Indray !», pour demander en malgache au groupe de revenir mettre le feu.

22h04, la première des têtes d'affiche tient toutes ses promesses

On n’a toujours pas trouvé le temps de se reposer, et c'est tant mieux. Cette nuit nous dormirons sur de vrais matelas, luxe du festival urbain, alors nous ne nous ménageons pas. L'heure est au règne de Danyel Waro (photo) : entre un hommage à Mandela et des revendications pour la cause créole, la star de la soirée fait briller la grande scène Pont-Neuf pour la première fois de la soirée. Autour de nous, on entend parler créole, malgache, français, anglais. Quel bonheur de se noyer dans ce bouillon culturel.

00h18, l'ultime folie

Après 6 heures de danse en continue, nos corps tirent dans tous les sens. Pourtant, le regroupement de Skip&Die et Lindigo (photo), n'a pas fini de faire se remuer la foule. L'égérie du groupe assène un coup final au public en ôtant son haut. Le groupe livrera son dernier titre en plein dans la foule. Nous n'en pouvons plus, et pourtant tout le monde ovationne les artistes et les appelle encore et encore pour un ultime assaut. Les régisseurs finiront par ranger le matos sous les huées d'une foule conquise par un set explosif.

Jour 2. 19h03, hangover ensoleillé

Il fait encore tellement chaud aux bords de la Garonne, que nous nous sommes joints à la foule amassée aux coins d'ombres de la prairie. On a bien du mal à se remettre de l'exceptionnelle soirée de la veille. Le mauricien Menwar récupère un public d'humeur champêtre. On finira tout de même par se laisser entraîner par la bonne humeur contagieuse du groupe. Même si on ne résistera pas à la tentation de s'affaler sous un arbre au bord du fleuve.

22h29, poésie quand tu nous tiens

Deux scènes se disputent nos regards. D'un côté, Ann O'Aro crée une atmosphère toute douce face à un public tapi dans l'herbe qui part à la recherche des premières étoiles. Sur la grande scène, Grèn Sémé (photo) délivre aussi des textes poétiques mais avec plus d'énergie. De notre côté, on ne sait trop quoi choisir, alors on alterne tout en terminant nos bières, qui se négocient entre 3 et 4 euros le demi.

00h21, tout le monde se réconcilie en dansant

Après une journée moins rythmée que la veille, on s'est laissé avoir par les rythmes festifs de Jaojoby (photo). On en voit de toutes les couleurs, que ce soit sur scène ou autour de nous. La prairie est pleine. Encore une fois se fait remarquer l'un des gros atouts du festival, un public très diversifié. En communion avec le groupe, tout le public entre dans la danse.

Jour 3. 19h14, c'est le week-end

Le Rio Loco est ce qu'on appelle un festival urbain. Comme tous ses semblables, il rassemble beaucoup plus de monde les jours de week-end. On ressent une vraie différence dans l'atmosphère qui nous entoure. Face à nous, les 13 femmes du groupe Deba chantent et dansent ensemble. On se laisse complètement envoûter par leurs voix et leurs mouvements. Une grande fête se prépare sur la Prairie.

20h49, le soleil se couche sans nous

Pour une première en trio, Labelle a conquis le public. Les trois musiciens livrent une musique électronique qui intègre dans son travail de vrais instruments. C'est même bien plus rythmé et lourd que ce que l'on attendait en ayant lu en diagonale le programme. Dans cette ambiance proche de la transe, le soleil se couche sur notre gauche. Le cadre dans lequel se déroule ce festival ressemble à un beau conte de fées.

22h40, nous danserons le ventre vide

Nous commençons à empiler les concerts les uns sur les autres, avec une grande joie, mais nous avons faim. Alors que le Koool Kreol Konektion termine son set inédit en Europe, nous partons à la recherche du Graal. Tout semble si appétissant, mais les tarifs sont trop élevés pour nous, festival calibré pour les familles oblige. Nous nous satisfaisons de biscuits secs pris en urgence, et attendons la maison pour une orgie de riz.

00h01, prendre du recul

Alors que les festivaliers sont tiraillés entre les pas de danse de Wawa sur la grande scène et le rock brut, presque punk, des Dizzy Brains, nous préférons prendre du recul. On choisit de sortir de la prairie pour se percher sur le pont à quelques centaines de mètres plus loin. On y découvre une petite vie annexe du festival. On y danse et on profite des morceaux que l'on y entend. Au passage, on en prend plein les yeux.

Jour 4. 17h24, à la recherche de l'ombre perdue

Alors que le soleil cogne très fort sur nos têtes, nous partons à la recherche de coins d'ombre pour éviter l'insolation. Les différents arbres de la prairie abritent déjà les festivaliers par dizaine. On choisit de s'éloigner encore un peu plus loin dans le village et on tombe sur les stands de jeux épargnés par le soleil. L'occasion pour nous de découvrir différents jeux traditionnels, comme l'awalé (photo).

20h38, « non les braves gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu'eux »

Pour finir le festival, on se laisse porter tout au long du concert-fleuve de l'Afrique Enchantée. On retrouve sur scène entre autres Danyel Waro, Christine Salem, et Ann O'Aro qui accompagnent cette émission radiophonique légendaire. Tandis que les analystes politiques sont en train de s'exciter du haut de leurs plateaux télé, l'immense troupe d'artistes signe une reprise brillante de l'immense classique de Brassens. Nous sommes complètement séduits.

Le bilan

Côté concert 

Le patriarche
Danyel Waro, qui de plus emblématique pour porter la cause créole ?

Le live incendiaire
Skip&Die vs Lindigo, personne n'a su retourner la prairie comme eux

Les fédérateurs
L'Afrique Enchantée, de 7 à 77 ans, venez découvrir les musiques de l'Océan Indien

La surprise
Labelle, une baffe à laquelle on ne s'attendait pas

Côté festival 

On a aimé :
- Une vraie ambiance de festival en plein centre-ville
- La proximité avec les artistes : discuter avec eux en sortie de scène, danser avec Danyel Waro dans la fosse
- L'ouverture du festival aux enfants et aux familles : ça fait du bien un public qui se mélange
- Le mélange des disciplines : des concerts, une exposition photo, du dessin, du cirque
- Un festival dans lequel on fait des découvertes grâce à une prog thématique

 On a moins aimé :
- Trop peu de choses à moins de 9-10€ : on aurait bien aimé se manger un plat version océan indien
- De l'eau vendu à 2 euros par endroit, alors qu'il faisait un véritable cagnard

Conclusion 

Les organisateurs du Rio Loco ont réussi leur coup. En plein centre de Toulouse, ils ont fait de la prairie des Filtres un véritable îlot de l'océan indien. On ne s'étonnera alors pas des 75.000 entrées qui ont été vendues durant les quatre jours. Quelle route prendrons-nous l'année prochaine ? Personne ne sait. La seule de nos certitudes est que les musiques du monde seront encore une fois à l'honneur.

Un récit de Valentin Chomienne
Photos de Marion Elluin