On était à
Les Z’Eclectiques Collection Automne, un joyeux bordel pour fêter la vingtaine

Depuis 1998, les Z’Eclectiques font figure d’exception dans le paysage des festivals français. En proposant quatre éditions par an, une à chaque saison, le festival offre l’opportunité de découvrir des têtes d’affiches françaises et internationales à l’automne et au printemps, et des artistes moins connus, pour des éditions plus intimistes l’été et l’hiver. Le 17 novembre, lors de la collection “automne”, 7500 personnes se sont données rendez-vous à Chemillé pour la soirée principale d’une vingtième édition encore très réussie. 

Samedi 17 novembre. 14h05, un camping en novembre, une bonne idée ? 

Pour cette édition automnale, le festival propose un camping gratuit pour les festivaliers, équipé de sanitaires. C’est en réalité un petit champ herbeux situé à moins de dix minutes à pied de l'entrée du festival. En tant que bons vrais festivaliers on saute sur l’occasion et on installe nos tentes quechua dès 14h. On aurait aimé dorer au soleil une bière à la main, mais on avait oublié un petit détail : nous sommes au coeur du mois de novembre et le thermomètre annonce une température de 4 degrés pour la nuit à venir. Heureusement, l’apéro nous réchauffe un peu et au fur et à mesure que la soirée avance on voit arriver quelques courageux (ou quelques fous) qui, comme nous, ont opté pour l’option camping polaire. 

 

19h10, on commence directement avec une tête d’affiche

Après une légère attente à la fouille, on pénètre dans le théâtre Foirail, ce grand bâtiment d’une capacité de 7000 personnes qui accueille deux des trois scènes du festival. Il n’est que 19h mais le public est déjà venu en masse pour acclamer le premier artiste de la soirée sur la scène Zic Mac, et on comprend bien pourquoi : c’est Thérapie Taxi qui ouvre le bal. On est d’ailleurs un peu surpris de voir le groupe parisien, pourtant tout en haut de l’affiche, programmé aussi tôt. Peu importe, ça ne semble pas déranger les trois compères, notamment le chanteur, très en forme.  On a beau les avoir croisé sur la route des festivals tout l’été, le show est toujours à la hauteur et le public déchaîné. D’autant plus qu’une réédition de leur dernier album est sortie la veille et qu’on a le droit à quelques nouveaux morceaux en exclusivité. 

20h30, 40 min pour une barquette de frites

On commence à avoir un petit creux et on décide de laisser momentanément la scène principale et Feu! Chatterton pour rejoindre le chapiteau adjacent, où se situe la seconde scène ainsi que l’ensemble de l’espace bar/restauration. Deux sortes de bières artisanales locales ainsi qu’une petite sélection de vins, accompagnés de fromage ou de saucisson, sont proposés aux festivaliers. 3 food-trucks, dont un végétarien, proposent des mets eux aussi issus de producteurs locaux, dans une démarche de développement durable qu’on apprécie beaucoup. Tout ça nous fait saliver mais on va vite être refroidis au moment de prendre nos commandes : les bénévoles peinent à faire payer les festivaliers, une queue interminable se met en place devant chaque bar et on est contraint d’attendre 40 min pour une barquette de frites ! Cette année, le festival a abandonné son mode de paiements par jetons et propose aux festivaliers de payer directement en carte bancaire ou en utilisant une carte cashless ou une application mobile. C’est sûrement plus pratique, mais là ça vire carrément au fiasco quand on nous annonce après tant d’attente que finalement les paiements par carte bancaire ne fonctionnent pas… 

21h45, les Balkans s’emparent de Chemillé 

Heureusement, du côté des scènes les artistes assurent le show et on retrouve les déjantés Soviet Suprem sur la scène Namas Pamos. Le plus soviétique des groupes français convie le public à participer à une improbable fête des Balkans dans une bonne humeur contagieuse. Tout le monde semble à la fois heureux et surpris de se retrouver au milieu de cette pagaille et les festivaliers se prennent au jeu à crier “Au goulag !”, à lever le petit doigt en l’air ou à improviser des pas de danse traditionnels des pays de l’Est. Une dizaine de personnes montent même sur scène pour le grand final. C’est loufoque, déjanté et frais, on adore. 

22h40, le showman entre en scène 

Du côté de la grande scène, c’est la tête d’affiche de la soirée qui s’empare du micro : Bruxelles arrive à Chemillé avec Roméo Elvis, une des grande révélations rap de ces dernières années. Et autant dire qu’il n’est pas venu là pour faire dans la dentelle. C’est une véritable bête de scène, un showman hors-pair. Il prend la guitare pour interpréter ses musiques les plus douces, balance un medley des hits de Lomepal ou Damso, invite Thérapie Taxi sur scène pour interpréter leur “Hit Sale” et enchaîne pogo sur pogo dans une ambiance survoltée. Et, en bon belge qui se respecte, il n’hésite pas à balancer quelques piques sur la victoire de la France à la coupe du monde. Tss...

00h20, le calme avant la tempête 

La présence des trois scènes oblige les horaires à se chevaucher et les artistes à jouer simultanément, on regrette d’ailleurs un peu le choix d’avoir placé Roméo Elvis en même temps que PLK, autre jeune talent du rap en devenir. On assiste quelques minutes à son concert, l’un de ses tous premiers en festivals, et le public, extrêmement jeune, pogote dans tous les sens et prend son pied là aussi. Sur la scène principale, la tempête Roméo Elvis laisse place à un tout autre style avec le jeune duo Agar Agar. Elle est au chant, lui aux machines, et la magie opère : le duo propose une performance envoûtante avec ses mélodies synth-pop. La scénographie aussi est millimétrée avec des jeux de lumière projetés sur de gigantesques bonhommes gonflables. C’est magnifique même si à cette heure tardive on a un peu l’impression que l’ambiance redescend après les performance survoltées des rappeurs.

1h30, des pogos jusqu’au bout de la nuit 

Mais le calme n’est que de courte durée car sous le chapiteau, c’est Bagarre qui prend d’assaut la scène Namas Pamos. Les 5 fous furieux chantent à tour de rôle et se relaient à la batterie ou au clavier pour proposer une performance explosive. De gigantesques cercles se créent au milieu de la foule, on a même droit à un mur de la mort. Pendant ce temps sur la grande scène, le patron de la soirée débarque enfin : sous son fameux masque de carnaval, Boris Brejcha, le roi de la “high tech minimal” assure un closing à la hauteur des attentes. Comme à son habitude, le DJ allemand ne joue que ses propres productions et chacun de ses kicks transperce le public. L’ambiance dénote totalement avec le reste du festival, et les pogos laissent place à des âmes seules, dansant les yeux fermés au rythme des basses. Sa techno enivrante résonnera dans le théâtre jusqu’à 3h du matin, nous laissant rejoindre le camping après une soirée riche en émotions. 

Le bilan

Côté concert 

Le patron
Boris Brejcha, on ne pouvait pas rêver mieux pour un closing

La bête de scène
Roméo Elvis, quand il finit torse-nu c’est qu’il a envoyé du lourd

Les bourrins
Bagarre, nos jambes se rappellent encore des pogos

Le concert “On sait pas ce qu’on fait là mais on adore”
Soviet Suprem, on aimerait aller plus souvent au Goulag avec eux

Côté festival

On a aimé
- une programmation très éclectique allant du reggae à la techno en passant par le rap et la pop 
- le choix d’avoir privilégié des produits locaux pour encourager l’artisanat de la région
- le système son et lumière de bonne qualité sur les trois scènes 
- le chapiteau, où sont centralisés les bars et l’espace restauration, avec de grandes tables où se reposer entre deux concerts
- des prix dans l’ensemble très abordables pour la nourriture et la boisson 
- le système de navettes qui permet aux festivaliers d’assurer leur arrivée et leur départ du festival en toute sécurité 
- la gestion des blocages du 17 novembre par l’organisation, qui a fait son maximum pour assurer la venue en temps et en heure des festivaliers en navettes

On a moins aimé
- les horaires qui se chevauchent sur les deux scènes principales, obligeant les festivaliers à des choix pas toujours évidents (deux rappeurs programmés à la même heure ?)
- le manque de décorations 
- le système de paiement à revoir absolument : une queue interminable aux bars et aux food-trucks, des problèmes de carte bancaire… 
- des sanitaires trop peu nombreux pour le nombre de festivaliers présents
- un temps d’attente parfois très long à l’entrée du festival qui a empêché certains festivaliers de voir Thérapie Taxi

Infos pratiques

Prix de la bière 
2,70€ le demi et 5,40€ la pinte de bière locale

Prix de la nourriture 
5,20€ l’américain-saucisse, 2,60€ la barquette de frites

Prix du festival
32€ la soirée, camping gratuit 

Transports
1h10 de Nantes, 35 min d’Angers
Le festival propose des navettes à 6 € permettant de rejoindre le festival depuis plusieurs villes (Nantes, Angers, Cholet, Saumur, la Roche sur Yon…)

Conclusion

Pour ses 20 ans d’existence, les Z’Eclectiques a assuré un anniversaire à la hauteur des espérances. Malgré un problème d’organisation aux bars qui a légèrement terni la fête, le festival a pu compter sur sa programmation sans faille pour offrir des performances de haute volée et de grands moments au public. Comme à chaque saison, les festivaliers sont venus nombreux et l'événement affichait encore une fois complet, preuve que même au coeur du mois de novembre un festival d’une telle envergure peut exister. Le rendez-vous est déjà pris pour la prochaine saison ! 

Photos et récit : Maxime Thué