On était à
Fête du Bruit, bal de pointures au finistère

Les artistes du cru 2016 ont fait cocher la date du festival sur beaucoup de calendrier. En passant cette année au format trois jours, le festival a confirmé son ambition de ramener toujours plus de monde à Landerneau, avec une programmation de haut rang, pour espérer se hisser dans les rendez-vous de l’été. Un pari presque réussi.

Jour 1. 21h21, rien ne sert de courir...

Arrivée tardive dans la commune de Landerneau après une longue route très encombrée. Quand on va assister à un festival sur le weekend de la mi-août, il vaut mieux ne pas habiter trop loin, détail d’une importance cruciale à retenir pour l’an prochain. On retire nos billets et on file vers la scène, il est déjà beaucoup trop tard pour aller s’installer au camping. Mieux vaut se dépêcher pour voir au moins la fin de Garbage (photo), qui offre encore un rock pêchu malgré le coup de vieux physique des membres du groupe. Dans la continuité des éditions précédentes, le festival de Landerneau propose une unique et grande scène. L’avantage est qu’il est possible d’assister à tous les lives si jamais le besoin s’en fait sentir. Avec des entractes de 15 ou 20 minutes, il est même possible de se restaurer ou se désaltérer. Le site est simple : en forme de rectangle, la scène est située à une extrémité et les stands de nourriture à l’autre bout. L’entrée du festival, les bars ainsi que les sanitaires sont situés sur les longs côtés. Cette année encore il nous faut acheter des tickets boissons à 1,30€ l’unité si l’on veut déguster un demi ou un verre de vin à 2,60€.

23h03, de l’aventure à l’hystérie

Le public est multigénérationnel lorsqu’Indochine (photo) prend place sur scène. Le groupe évoluant autour du chanteur et leader Nicola Sirkis tourne depuis bientôt 40 ans et a encore de quoi faire chanter ses fans de tous les âges. La foule est dense et scande les tubes les uns après les autres tout en sautant partout. Les Bretons ont de l’énergie à revendre, les sourires sont scotchés sur tous les visages, la formule est efficace et l’ambiance au rendez vous. Entre projections multiples de confettis, guirlandes et de ballons de baudruches géants, entrecoupés de passages câlins dans la fosse pour le chanteur, ce premier soir à la fête du bruit nous fait oublier la fatigue et la pénibilité du voyage pour parvenir jusqu’à la pointe du Finistère. Après 1h30 de concert, Indochine nous quitte pour laisser la place à Mass Hysteria, pour du bon gros métal hurlant. Depuis le Download, en passant par Garorock et le Chien à Plumes, ils confirment une nouvelle fois leur forme olympique. Ce n’est pas un mais trois circle pits que les membres du groupe vont former devant la scène, avec la coopération d’une équipe de sécurité efficace sur tous les fronts. Entre hommage aux victimes du terrorisme, perte de voix du chanteur et public féminin invité à danser sur scène, notre soirée se poursuit sur une note d’excellence et d’énergie pure. On a moyen envie d’aller se coucher après une première soirée aussi furieuse, mais c’est fini pour ce soir. Et vu qu’on a la flemme de déplier la tente à 2h du mat, pour nous ce sera camping dans la voiture.

Jour 2. 14h38, la chaleur au rendez vous

Après une grasse mat’ au frais, il nous faut aller faire quelques emplettes pour la suite des réjouissances. La ville ne manque pas de supermarché où l’on trouve tout ce qui nous est nécessaire. Après un solide lunch, on a quand même envie d’aller s’installer au camping. Et c’est une mauvaise surprise qui nous attend là-bas: une queue de plus de 30 mètres s’étend en plein cagnard, pour entrer dans un camping/stade de foot totalement dépourvu d’ombre. On change d’avis direct, la voiture hôtel nous convient bien mieux. On n’aura pas d’attente et on peut la garer au frais. On prend quand même les bracelets du camping pour pouvoir bénéficier des sanitaires en dur, à savoir les vestiaires du terrain de foot, un peu juste pour les milliers de campeurs présents. On prend alors une douche malheureusement brûlante avant de se diriger vers le site du festival, à une vingtaine de minutes de marche.

16h35, la patience s’amenuise

Les concerts commençaient à 15h cet après midi avec un certain Rotor Jambrek, mais ce warm up a lieu un peu trop tôt pour nous, et on rate un peu le coche. Et c’est encore une mauvaise surprise qui nous attend aux portes du festival lorsque nous nous décidons à bouger : toutes les entrées sont bloquées au niveau des fouilles, avant même l’entrée du festival, sans explication aucune. On comptait arriver pendant le concert de Salut C’est Cool, mais avec 1h d’attente en moyenne pour pouvoir accéder au site on rate complètement les jeunes technoïdes. C’est sur le concert des Casseurs Flowters que nous parvenons enfin à entrer dans l’arène. La colère et la frustration s’exprime chez les festivaliers, et à juste titre. Mais la mauvaise humeur s’oublie vite quand on arrive devant les deux rappeurs et leur flow qui pulse malgré la chaleur torride.

19h08, la douche froide

On s’éloigne de la scène pour aller siroter un mojito à 3,90€ et profiter du concert de Damian “JR Gong” Marley (photo) assis dans l’herbe derrière la régie son, où un écran géant nous permet de regarder pépouze le concert sans bousculade aucune. On préfère prendre des forces avant la soirée assez conséquente qui s’annonce, et nous nous dirigeons donc vers les stands de nourriture. Notre choix s’oriente vers une barquette de tartiflette où le reblochon semble avoir été remplacé par de la crème fraîche sans saveur aucune. Pas terrible mais au moins ça tient au corps. La fin du concert reggae sonne et ça, ça veut dire que les Cranberries vont arriver. Nous nous pressons donc vers le devant de la scène, impatients de voir ce groupe qui a su traverser les décennies sans se ternir. Et là c’est carrément la douche froide, The Cranberries sont annulés, Dolores O’Riordan s’étant blessée au dos elle a dû être rapatriée d’urgence en Irlande. C’est la plus grosse déception du festival. On ravale nos larmes devant Rotor Jambreks, le one man band qui avait entamé ce samedi sur scène et qui accepte très courageusement de refaire un concert le même soir devant un public tristoune.

22h44, les bouchées doubles

Un tel désappointement est un défi à relever pour les artistes qui vont suivre, il faut sauver la soirée à tout prix. Deluxe entre alors en piste avec tenues bariolées et moustaches fièrement affichées et le public, de bonne composition, répond présent. On swingue, on chante et on tape des mains et la sauce prend de nouveau. Les plages horaires prévues pour chaque groupe sont longues et laissent le temps à tout le monde de profiter pleinement de chaque concert, d’autant plus lorsque l’un d’eux est annulé. Les DJs de Birdy Nam Nam qui prennent le relais réussissent encore une fois haut la main le pari de faire de leur set un succès. C’est un régal pour les yeux par leur visuel hypnotique et leur électro qui sait se renouveler album après album, malgré le départ de DJ Pone. On termine ce soir avec Pfel & Greem, les échappés de C2C qui feront bouncer les plus enragés jusqu’à plus de 3h du mat avec leur remix consensuels. Après toutes ces émotions il est temps d’aller dormir.

Jour 3. 13h08, vagues de chaleur chaloupantes

Nous retournons vers le camping pour tâter l’ambiance et faire une petite toilette. Celui-ci étant dépourvu d’espace chill ou restauration et muni d’un unique minuscule stand de boisson énergisante bretonne, nous n’y ferons pas long feu. D’autant plus que les sanitaires, où l’attente monte à 20 minutes pour aller juste aux toilettes, sont noyés dans une soupe peu ragoutante d’eau stagnante marron. Un coup de raclette et un peu d’entretien n’aurait pas été de trop devant l’étendue de l’utilisation massive des vestiaires. C’est donc dans le vieux Landerneau, situé à quelques dizaines de minutes de marche que nous irons déguster une salade, tout en observant la beauté des monuments. Cette petite escapade bienfaitrice nous permet de recharger les batteries pour arriver sereinement à 15h30 dans l’enceinte du festival, sans attente aucune. Nous passons devant Rose Mary and the Ride sans nous arrêter vraiment, mais nous recevons les Naives New Beaters avec toute l’attention qu’ils méritent. Il est tout juste 16h mais ces derniers ont réussi à rameuter un public conséquent malgré la chaleur. Ca chaloupe un max avec leur pop rock novatrice et leur style touche à tout.

17h52, toujours plus de rock

La foule s’intensifie encore pour des pontes du rock à la française, No One is Innocent. Le groupe n’a rien à prouver à personne et pourtant il donne encore et toujours tout. Le concert envoie clairement le pâté mais le public de manière général reste gentillet. En même temps il est à peine 18h, on est au troisième jour, la chaleur est omniprésente et les festivaliers s’hydratent davantage à la bière qu’à la limonade. A ce rythme difficile de tenir le cap. On voit de plus en plus de gens allongés, endormis ou comateux, en plein milieu du site. Davantage aussi d’interventions des secouristes qui eux gardent la pêche et le sourire. Dub Inc arrive sur scène et c’est à ce moment que nous allons prendre des forces pour le restant de la soirée du côté des stands de nourritures. Notre choix se porte sur une belle portion de paella royale à 7€ qui se révélera tiède et un poil fadasse. On se réconcilie avec une délicieuse crêpe au caramel beurre salé à 3€ en dessert. Au niveau des concerts, ce dimanche après-midi se révèle être un sans faute.

21h02, un iguane sauvage apparaît

C’est avec une grande émotion que nous nous approchons de la scène afin de voir une des légendes du rock, le formidable Iggy Pop. Et quand ce dernier entre en scène, tout sautillant courant, frétillant en chantant I wanna be your dog, c’est un soulèvement de nos coeurs de rockeurs. C’est avec joie que nous hurlons les refrains des tubes de ce presque surhomme. Iggy a beau se faire vieux, sa voix est là, intacte, et sa présence scénique ainsi que sa générosité nous font proprement vibrer. Entre tubes du passé, passages dans la fosse et titres de son nouvel album Post Pop Depression, l’incontestable et incontesté magicien du genre nous fait profiter pleinement de sa seule date en Bretagne. A peine le temps de se remettre de nos émotions que le groupe suivant nous en apporte de nouvelles. C’est les non moins connus membres de Skunk Anansie qui prennent le relais sur la scène qui aura décidément vue du beau monde jouer des riffs enflammés sur ses planches. Et dès le début c’est déjà n’importe quoi, la chanteuse Skin, qui soit dit en passant n’a pas pris une ride, se jette dans la foule dès la deuxième chanson. Tout le concert se poursuit avec le même punch, sur une vibration qui aura résonné fort et loin ce soir-là.

00h29, le bouquet final

Dire que Die Antwoord était très attendu est un doux euphémisme. Avec une soirée musicalement explosive, le public était juste déchaîné en voyant arriver sur scène les membres du groupe. Avec un show calibré au millimètre, les Sud-africains étaient de toute façon sûrs de faire péter les scores. Avec deux danseuses et des tenues différentes à presque chaque chansons, tout est réglé comme du papier à musique, tellement que ça manquerait presque de spontanéité un peu freaky. En tout cas on en prend pleins les mirettes et peu importe la fatigue, il est impossible de rester de marbre devant ce spectacle. Le show terminé, c’est une grande partie du public qui s’en va regagner ses quartiers alors que le festival n’est pas fini. En effet il reste le groupe nantais Von Pariah à découvrir sur scène. Nous regardons avec plaisir les premiers morceaux du groupe qui a la lourde tâche de passer après un groupe monstrueux. Et on peut dire qu’ils s’en tirent bien grâce à la motivation sans faille des Bretons qui savent montrer comment on fait la fête chez eux. Nous faisons un passage rapide au stand prévention et c’est avec un sans faute que nous pouvons sereinement reprendre la voiture et sortir de Landerneau et de son joyeux bordel pour dormir au calme.

Le Bilan

Côté concerts

La légende rock
Iggy Pop, l’iguane fait toujours mouche

Les valeurs sûres
Die Antwoord, Indochine et Iggy Pop, trois têtes d'affiche qui tiennent leur rang

L’ambiance furieuse
Mass Hysteria, l’un des groupes qui a retourné l’été

La frustration extrême
The Cranberries, on les veut l’an prochain

Le tube de l'été
Naive New Beaters, taillé pour mettre l'ambiance en festival

Côté festival

On a aimé :
Les plages horaires, enfin un festival où les artistes ont le temps de faire plaisir
La disposition des différents stands bar/bouffes et des sanitaires, optimale
Une scène unique, donc pas de concerts qui se chevauchent, on ne rate rien du spectacle

On a moins aimé :
Le manque d’orga face à l'affluence du samedi
- Le camping dépourvu de stands ou espace chill, les sanitaires pas entretenus
-
 Les déchets omniprésents sur le site du festival, pas assez de points poubelles

Conclusion

Pour sa 8ème édition, le festival de Landerneau nous a régalés avec une programmation irréprochable. Malgré l’annulation à la dernière minute des Cranberries, tout le monde a su mettre du sien pour garder la soirée sur pied. Il faudra néanmoins être vigilant pour les éditions suivantes à ne pas miser exclusivement sur la programmation mais soigner aussi l’organisation selon les flux des journées et pourquoi pas enrichir le camping de quelques stands ou chill out.

Un récit de Solenne Guellier
Photos de Matthieu Lebreton