On était à
Festival Sur Les Pointes 2019, énergique et alternatif

Vitry-sur-Seine n'est pas la destination la plus sexy pour passer le dernier week-end de mai, mais grâce à la programmation de la 11ème édition du Festival Sur Les Pointes, nous n’avons pas pu résister à l’envie de poser nos bagages dans le 94 et d’aller à l’assaut d’un événement qui pique notre curiosité.

Jour 1. 19h07, premiers pas au Kilowatt

Nous plantons rapidement nos tentes avant de prendre le chemin des deux énormes cheminées de l’ancienne Centrale EDF de Vitry-sur-Seine, là ou le festival est installé depuis deux ans. Nous profitons des 10 minutes de marche pour observer ce paysage très urbain qui à première vue ne vend pas du rêve : en tant que bons campagnards on en arrive presque à se demander ce qu’on est venu fouiner dans cette zone industrielle de la banlieue parisienne. Mais une fois à l’intérieur du site, nos doutes s’évaporent aussitôt : trois chapiteaux, un bal monté, des constructions en palette, des guirlandes, de la verdure, des toilettes sèches, une taille humaine…nous sommes dans une ambiance récup’ et guinguette qui dénote franchement avec ce qu’on vient de traverser. Après renseignements auprès de bénévoles nous apprenons que ce lieu, appelé le Kilowatt, accueille des événements toute l’année et hormis quelques installations destinées principalement au festival, la plupart sont permanentes. En tous cas on ne risque pas de manquer des concerts car toutes les scènes sont à proximité.
 

20h01, des bières complètement Barge

Sous un des trois chapiteaux se trouve un bar vers lequel nous nous accoudons pour commander une bonne bière artisanale. Si toutes les bières du festival proviennent de La Barge, la brasserie locale, le choix est tout de même assez conséquent et les prix relativement corrects. On ne s’en prive pas mais pour ceux que le houblon rebute, il y a aussi du Ricard et un Ti-Punch qui permettent facilement d’aller tutoyer les anges. Si les quatre bars parsemés sur le site, ont largement de quoi combler la soif des festivaliers, notre instinct de morfal aguerri nous dit qu’en revanche, seulement trois food-trucks pour tout le festival c’est un peu juste. Nous décidons donc de nous restaurer avant que les stands soient pris d’assaut, l’offre étant limitée nous nous rabattons par dépit sur une barquette de frites à la sauce ciboulette et à la sauce au bleu. 


22h03, une bonne portion de punk

 

Pour notre premier concert, rendez-vous sous le Chapiteau Marcel Paul où se produit Demi Portion. L’artiste originaire de Sète n’est pas forcément le rappeur français le plus connu, en témoigne la foule devant assez clairsemée, mais il est assurément l'un des plus talentueux. On adhère à cette vision du rap, respectueuse de l’héritage des anciens et à cette prestation sincère et bienveillante. Le mec est content d’être là et si on en croit les sourires figés sur les visages des festivaliers il n’est pas le seul. On enchaine directement sous le Chap’Kilowatt , la scène principale du Festival Sur Les Pointes, avec le rap potache à l’esprit kepon des Svinkels. Comme à son habitude, Gérard Baste et ses comparses foutent un zbeul pas possible, d’autant plus que le public est réceptif à leur délire. Le punk qui sommeille en nous est bel et bien réveillé. 
 

00h04, n'as-tu jamais dansé avec le Diable au clair de lune ?

En parlant de punk, nous constatons en nous baladant sur le site qu’ils sont assez nombreux ce soir, venus se mêler à un public plus familial composé majoritairement de trentenaires. Il faut dire que la programmation est très axée rock ce vendredi. Beaucoup sont venus voir le gros morceau qu’est Le Bal des Enragés, supergroupe composé des membres de groupes de Tagada Jones, Parabellum, Lofofora, Loudblast, Punish Yourself, Black Bomb A et AqME. Que du beau monde pour pogoter, slamer et brandir des 8-6 géantes, et même si nous ne sommes pas des fans inconditionnels du genre, il faut avouer que le show est assez impressionnant. 


01h43, destination Balkanie

On profite de l'achat d'un bokit sur l'un des stands food, pour réfléchir à l’utilité des cash/cards que l’on a échangé contre des espèces tout à l’heure : si on peut tout payer par CB pourquoi s’embêter à passer à la banque chercher un autre système de paiement dématérialisé ?
Retour pour nous au Chap’ Marcel Paul pour finir notre soirée avec Dubioza Kolektiv, un de nos groupes balkaniques chouchous. Leur musique festive, allant du reggae, au dub en passant par le ska et le rock, parvient (presque) à nous faire oublier la fatigue et les courbatures accumulées mais nous n’aurons malheureusement pas la force et l’énergie nécessaire pour survivre à l’after DJ organisé après les concerts. C’est donc vers 3h du matin que nous retournons sur le camping un peu penaud, en nous disant qu’après une bonne nuit de sommeil nous pourrons réaliser une plus belle performance que ce soir.


Jour 2. 10h08, les princes de la ville… et du camping 

Le camping du festival est en fait le stade de rugby de Vitry-sur-Seine, aménagé pour l’occasion…enfin "aménagé", c’est vite dit. Hormis deux toilettes et deux douches à l’entrée il n y a strictement rien. Et encore les douches sont froides car selon un bénévole : « il fallait choisir entre le café chaud et les douches chaudes ». On ne comprend pas trop la logique mais on boit volontiers le café qui nous est proposé. Il y a peu de campeurs par rapport au nombre total de festivaliers, ce qui ne veut pas dire que l’ambiance n’est pas bonne ! Ca fait passer le temps en jouant au badminton ou au mölkky ou à ce jeu obscur consistant à lancer une chaussette près d’une canette de Coca…fascinant !


16h39, c’est l’amour à la plage

Nous avons donc suivi les conseils de Rim-K en faisant un détour chez Golbasi, un des meilleurs kebabs de Vitry puis nous allons directement sur le festival qui a ouvert au public à 16h. Quelques stands supplémentaires sont ouverts par rapport à la veille, nous pouvons notamment jouer à des jeux en bois et à des vieux jeux d’arcade en attendant les concerts qui démarrent assez tard. Entre deux averses orageuses, nous profitons d’une accalmie pour aller se détendre à la plage, petite bande de sable située à côté du Chap’ Marcel Paul. Des bouées, des transats, du Ti-Punch et un DJ qui passe des sons old-school, si on ne tient pas compte des deux énormes cheminées sur le côté qui nous rappelle bien la spécificité du lieu, l’illusion est parfaite ! En plus le soleil repointe enfin le bout de son nez, que demande le peuple ? Il y a l’air d’avoir plus de monde que la veille sur le site, direction donc le Chap’Kilowatt histoire de trouver une bonne place pour le premier concert de ce samedi.


20h02, Picardia Independanza et samedi à Bamako

Ce sont les Fatals Picards qui ouvrent le bal, on connait bien le groupe aux textes drôles, parfois mélancoliques mais aussi engagés politiquement. Vitry-sur-Seine étant une ville communiste depuis 1925 et le chanteur étant né dans le Val-de-Marne, on peut dire qu’ils sont venus en terrain conquis. Le public connait leurs « tubes » par cœur et semble apprécier les chansons du nouvel album Espèces Menacées. Il faut dire que les Fatals envoient tout sur scène, y compris des licornes gonflables. Plus tard sur cette même scène, l’ambiance sera plus douce et métissée avec Amadou & Mariam qui veulent chauffer le public à base de « ça va Ivry ? ». Loupé. Mais c’est pas loin. Hormis cette approximation géographique vite corrigée, on doit avouer que c’est plutôt pas mal et plus énergique qu’on aurait pu le penser. L’apothéose étant évidemment « Le dimanche à Bamako » dernière chanson qui nous met littéralement en transe.


23h16, Oasis is good

Les festivaliers sont moins nombreux mais les files d’attente pour les food-trucks restent abusivement longues. On avait prévu le coup en prenant nos sandwichs maison, que la sécu a voulu nous confisquer un peu plus tôt dans la journée, mais on se désole de voir aussi peu de choix au niveau de la nourriture, malgré l'apparition d'un 4ème stand thaïlandais (en rupture de stock dès 23h). On ne s’attarde pas plus sur ce point et nous filons vers l’Oasis. L’Oasis n’est pas un mirage, loin de là, il s’agit d’un ancien bal monté qui officie désormais comme salle de spectacle permanente pour le Kilowatt. A l’intérieur donc un bar vintage qui, si on regarde en hauteur, affiche une belle bécane et deux magnifiques boules à facette. C’est ici que plusieurs groupes du festival sont programmés, notamment les Waykiki Boys, groupe de cumbia péruvienne qui joue actuellement, mais aussi les after du festival.


1h33, pas si impressionnante cette Cadillac

Si le concert de l’Entourloop nous a fait bonne impression, nous sommes plus mitigé sur Cadillac au Chap’Marcel Paul. Nous avons voulu laisser une chance à l’ex-Stupeflip et, bien que la prestation ne soit pas ratée, la sauce ne prend définitivement pas avec nous, ni avec d’autres d’ailleurs, au vu de la foule devenant de plus en plus éparse au fil des morceaux. L’artiste ne s’y trompe pas d’ailleurs : « Vous-êtes de moins en moins nombreux c’est bon signe ! » Retour sur la grande scène avec Vandal qui se produit en même temps. L’un des ambassadeurs de la hardtek fait des émules c’est indéniable, on sent le plancher du dance-floor vibrer sous les sauts des festivaliers, pour peu que l’on soit adepte de boom-boom il y a de quoi s’éclater et brûler des calories. On finira notre samedi en faisant des allers-retours entre Contrefaçon, groupe electro-techno à la visu irréprochable, qui conclut la soirée sous le Chap’Killowatt et Voilàaa Sound System à l’Oasis qui lui va nous faire danser sur des rythmes funk jusque tard dans la nuit.


Le bilan

Côté concert

La touche hip-hop
Demi Portion et Svinkels, Wow wow wow, Vitry Yo Vitry Yeah !

Les barlous
Le Bal des Enragés, sortez les 8-6 il fait trop dark dans nos têtes

Le groupe venu de l’Est
Dubioza Kolektiv, et ses sons balkaniques qui nous font (presque) danser jusqu’au bout de la nuit

Les espèces menacées
Les Fatals Picards, un groupe toujours aussi drôle et engagé, à voir sur scène

Les rois de la teuf
Vandal et Contrefaçon, boom-boom dans les oreilles

Côté festival

On a aimé

- Le site du festival aménagé sur une ancienne centrale EDF, un site à taille humaine avec une belle déco maison
- L’atmosphère bon enfant, un public et des bénévoles bienveillants
- L’Oasis, le bal monté du festival à l’ambiance vintage qui nous a particulièrement séduit
- Les bières locales ainsi que le reste des boissons du festival, bonnes et peu chères
- Les toilettes sèches, plutôt nickel sur l’ensemble du festival

On a moins aimé 

- L’offre plus que limitée en nourriture
- Le principe de la cash/card, où est l’utilité ?
- Le manque d’activités à faire avant les concerts
- Les sanitaires du camping : 3 toilettes et 3 douches (froides) c'est trop peu

Infos pratiques

Prix de la bière
Entre 6 et 8 euros la pinte de bière locale

Prix de la nourriture
8 euros le bokit,7 euros la galette saucisse, 3 euros 50 la barquette de frites

Prix de festival
Pass 3 jours : 65 euros sur place

Camping
Gratuit à 500 m du festival

Transports
Pour les franciliens
RER C à 10 min à pied, RER D à 20 min à pied
En voiture : 1h30 de Reims, 2h de Troyes, attention pas de parking !

Conclusion

Avec le Festival Sur Les Pointes nous démarrons de bien belle manière notre tournée des festivals 2019. Hormis quelques couacs, l’organisation de l’assoce Kipik est bien rodée. C’est tout de même la 11ème édition de ce festival qui enfonce le clou et semble avoir trouvé son identité. Mais le véritable tour de force c’est d’avoir réussi à créer un lieu culturel alternatif de premier ordre sur cet ancien site industriel de Vitry-sur-Seine. Malheureusement, la centrale EDF étant dans un long processus de déconstruction, nous ne sommes pas à l’abri à ce que le Kilowatt et le festival déménagent de nouveau d’ici quelques temps. 
 
Récit et photos de Josselin Thomas et Fanny Frémy