On était à
Festival Reperkusound, déferlement de basses énervées sur le Double Mixte

Reperkusound au Double Mixte à Villeurbanne est l'un des gros rendez-vous électroniques de l'axe rhodanien. Pour sa 14e édition, le festival a prévu une programmation d'une violence inouïe entre DJ sets, lives et concerts. On vous raconte trois soirées de confirmations et de découvertes.


Jour 1. 23h22, une dose de grosse techno pour la mise en jambe

Après une demie heure de marche et une attente quasi nulle aux portes du festival, nous faisons un tour du Double Mixte pour repérer les lieux et surtout prendre connaissance des ordres de passage des artistes. Après un petit apéritif bien appréciable, nous nous retrouvons parachutés sur la Main Stage, où Helena Hauff (photo) envoie une techno bien saturée qui tape à 135 BPM. L'artiste ne mixe que sur vinyles et vogue de bangers en morceaux plus deep et psychés. On la surprend parfois à passer du breakbeat et de l'acid. Les bulles et la mousse qui arrosent régulièrement le public font un peu kitsch, mais l'effet est présent. Seul problème de ce genre de sets : les DJ programmés à la suite ont bien du mal à suivre la cadence. Sam Paganini et Len Faki peinent à garder notre attention avec leur style minimal et très progressif.


02h26, Vladimir Cauchemar franchit les limites du respect avec sa tracklist

On circule difficilement en ce premier jour de festival au Double Mixte, en particulier à l'extérieur. La foule est très jeune, mais surtout très compacte. Rendez-vous sur la Solar Stage avec Vladimir Cauchemar (photo). Le swag est palpable avec ses Air Max 90 Infrared et son masque intégral tête de mort (qui ne l'empêche a priori pas de tirer sur sa cigarette électronique). À notre arrivée, il lâche son fameux titre « Aulos » puis enchaîne sur un afrobeat énergique. Le son groove bien, le DJ tient la bonne recette pour faire danser son public et on sent qu'il anticipe bien les réactions de la salle. Il passe quelques remixes de tubes des années 2000, balance aussi une version exclusive du dernier titre de PNL « Au DD » et bien sûr le rework d'Aulos avec 6ix9ine. Pour nous, c'est une belle surprise, on retournera le voir à l'occasion !


03h22, clôture du premier soir à gros coups de kicks

On se déplace ensuite sur la Moon Stage pour écouter Omiki par curiosité, mais on n'est toujours pas convaincu par la psytrance qui nous donne l'impression d'entendre inlassablement la même rengaine. Dans la salle, on se croirait en pleine mangrove tant l'air est chaud et moite. On se prend donc une petite pause avant de retourner sur la Main Stage pour Paula Temple (photo). Le son est lourd et mental, les morceaux s'enchaînent vite, lightshow et visuels suivent à merveille la performance. L'artiste est à l'aise, la foule réagit très bien à son set, s'exprime à chaque breakdown savamment amené. La salle est pleine, on a du mal à se faufiler dans un endroit confortable, mais une fois calés, on se régale en profitant du set et de la bonne humeur ambiante. Après le départ de Paula, on décide de regagner nos pénates à pied, parce qu'on est pas des p'tites caisses et que ce n'est encore que le premier soir.
 

Jour 2. 00h01, Neurokontrol enflamme la Solar Stage

Pour le deuxième jour, on choisit de faire notre fracassante entrée un poil plus tard et on se retrouve un peu par hasard téléportés derrière la Solar Stage, qui accueille ce soir-là une programmation 100% hardtek et frenchcore. Le deal est assez clair : balancer du gros kick énervé sur des tempos démentiels. Et ça marche, la salle est déjà pleine à craquer, le public connaît les morceaux et chante sur les breakdowns amenés par Neurokontrol (photo). Il est d'ailleurs un peu différent de la veille: toujours très jeune, en plus grand nombre, plus alerte et plus atypique. En fait, il y a des armées de coreux et de babos qui nous font profiter de leurs treillis, masques affublés de têtes de mort et autres sarouels. En attendant Rakoon, on part faire un tour sur la Moon Stage, où Mahom nous pose avec ses vibes très chill. On sent que le sound system de cette stage est calibré pour du dub et ça fait plaisir. Petite surprise néanmoins et pas mauvaise, il finit sa performance avec une violente track de hardtek. De fait, le sound system a un peu de mal à suivre, mais l'effet est bien présent sur le public. On sent d'ailleurs dans tous les sens du terme qu'on est bien un jour de 4/20...


01h22, des lives à couper le souffle

Des petites mains s'affairent sur scène pour préparer la venue de Rakoon (photo). Le son ne s'arrête que 5 minutes, la transition est efficace. L'artiste n'est pas ici pour rigoler, la reprise des basses est instantanée et le volume semble avoir légèrement augmenté, ce qui n'est pas pour nous déplaire. Sa détermination est totale, il mixe tout en jouant de la guitare, ses transitions sont travaillées et il saupoudre le tout de performances vocales rappelant le son d'un digeridoo. On se trouve dans un format hybride entre DJ set et concert, pour une performance vraiment unique qui fait réagit la salle. Plus tard, arrive La P'tite Fumée, qui donne un live bouillant et technique : le groupe sait s'adapter à un public qui attend du gros kick/bass. On prend une grosse claque devant l’énergie des musiciens et du set, c’est assez impressionnant !


03h12, la Solar Stage est définitivement la bonne option pour ce soir

On arrive au début du set du maître de la frenchcore, Le Bask (photo). Le tempo est toujours aussi furieux sur la Solar Stage et les tracks s'enchaînent vite. Si le DJ est un ancien du game et qu'il délivre toujours ses classiques, sa sélection est résolument moderne et on y trouve le genre de pépites qu'on ne déniche que sur Soundcloud après quelques longues heures à dig. On est convaincu, ici, un artiste comme Le Bask aurait pu passer sur la scène principale, mais le choix de le placer avec le reste de la programmation hardtek/frenchcore est judicieux. L'ambiance est quelque peu collé-serré mais vraiment unique sur la Solar. La scène principale est d'ailleurs moins enflammée en cette fin de deuxième nuit et manque clairement d’énergie. Sur la Solar, Radium prend les rennes pour toujours plus de frenchcore. On se réveille un peu, même si il a parfois tendance à pousser ses gains trop forts, saturant le son de façon pas toujours très agréable pour nos petites oreilles. 


Jour 3. 23h52, « Chrysler tout diamanté »

En ce troisième soir, la Solar Stage n'est pas pleine à craquer comme la veille, mais l'ambiance est là et le public de Biffty (photo) est bien présent, et varié ! Comme d'hab, les festivaliers connaissent tous les refrains par cœur, scandent les punchlines avec le rappeur et pogotent déjà à cette heure. Certes, ce n'est pas du metal, mais le son s'y prête bien, en particulier lorsque l'artiste choisit de jouer « Festival » et hurle à tue-tête « J'fous l'bordel en festival ! » Si l'ambiance est déchaînée, on sent quand même qu'on est dans un événement à forte dominante électronique et la salle est bien moins saturée que les précédents jours à la même heure. Mais cela n'est pas pour déplaire, on respire un peu et la performance nous met bien en jambe pour la suite.


00h13, pérégrinations au sein d’une horde de russophiles

En tant que fervents amateurs de slav squat, on ne peut absolument pas rater Little Big (photo). Dès notre arrivée résonnent les hymnes classiques du groupe sur des productions drum'n'bass et techno endiablées. La foule est extrêmement compacte et on se met au défi de la traverser entièrement de droite à gauche de la salle. Selon l'endroit où l’on se trouve, la voix de la chanteuse a parfois du mal à trouver sa place dans le son. Elle est très compressée, couverte par des basses très fortes et des aigus très saturés, ce qui gâche un peu notre plaisir. A l'extérieur, il y a un peu moins de festivaliers et leur nombre est plus adapté au Double Mixte.


01h27, entre live psytrance et session retrogaming

Avec le live de Hilight Tribe (photo), on oublie rapidement la fatigue car l'efficacité bien connue du groupe est au rendez-vous. On a à faire à un live instrumental soutenu par un gros kick/bass psytrance qui galope. Les ventilateurs font flotter les cheveux des deux chanteurs, donnant un côté 80's assez comique à la performance. La foule est littéralement en « trance », si on peut se permettre le jeu de mots. On en profite aussi pour tester plus en profondeur la zone gaming "Arcade Legends", située un peu en retrait sur la Main Stage. On n'attend pas une éternité pour pouvoir s'assayer aux bornes d'arcades mises à dispo et parmi ces dernières, il y a du choix, surtout pour les nostalgiques de retrogaming !


03h40, une Main Stage furieuse pour célébrer la fin du Reperkusound

On se rend à la performance de Salut C'est Cool (photo). Comme à leur habitude, les mecs sont totalement zinzins. Cette fois-ci, ils se baladent en toute sérénité en Velov' sur la scène. « Techno, toujours pareil, boum boum dans les oreilles », on connaît les classiques et le public chante tout au long des morceaux, toujours en grande forme après 3 jours des festival ! Puis arrive Noisia, plus précisément Thys et Martijn, deux des trois membres du groupe. Grosse drum'n'bass, c'est une énorme cerise sur le gâteau pour cette fin de Reperkusound. Le mix est habile, élitiste, le son loud, la sélecta pointue et fournie en dubplates. Le set accélère, les transitions ne se font pas attendre et les deux DJ's nous transportent d'une vibe à l'autre sans crier gare. De notre côté, on a déjà beaucoup vu Noisia, mais ils arrivent encore à nous stupéfier. On sait qu'on restera jusqu'à la dernière seconde sur la Main Stage. On y est encore, d'ailleurs, scotchés.
 

Le bilan


Côté concert

La révélation
Vladimir Cauchemar, les bangers et les remixes qui font groover un max

La découverte
La P'tite Fumée, une formule hybride déchaînée entre DJ set et live instrumental

Le mollasson
Sam Paganini, ça sent vraiment le réchauffé et ça manque cruellement de punch

La valeur sûre
Noisia, un set drum'n'bass équilibré et bien amené qui clôt à merveille le festival


Côté festival

On a aimé

- Le son généralement très bien réglé sur chaque scène par rapport à leurs programmations respectives
- La cohérence de la programmation
- Un public qui s'est bien tenu malgré la saturation et le manque de place à l'extérieur
- Des lightshows très efficaces
- Un cadre propice aux rencontres
- Une bonne signalétique : des pancartes en hauteur, aucun risque de se perdre !
- Une circulation à sens unique sur la Main Stage, prévenant la saturation de son entrée malgré le monde

On a moins aimé

- La circulation difficile à l'extérieur, en particulier les deux premiers jours
- Le cruel manque de points d'eau, il n'y a littéralement que les toilettes de la Main Stage
- Le gros problème de température sur la Moon Stage, c'est une véritable étuve
- Le prix de la nourriture


Infos pratiques

Prix de la bière
3,5 € le demi, 6,5 € la pinte

Prix de la nourriture
10 € le burger frites, 5 € la crêpe

Prix du festival
36 € la soirée, 93 € le pass 3 jours

Transports
Terminus de la ligne 4 du tram lyonnais, à une vingtaine de minutes du centre de la ville.


Conclusion

C'est une 14e édition réussie pour le festival Reperkusound. La programmation fait plaisir et laisse la place à de la musique électronique qui tape, des grosses basses et s'affranchit de tout élément EDM ou pop. Même si le public est très jeune et dense, il sait se tenir et finalement, on arrive toujours à trouver une place dans l'herbe pour s'asseoir et se reposer un peu. On ne sait pas vraiment si la zone « Arcade Legends » a eu le succès escompté, mais sa présence était en tout cas fort plaisante. On se reprend des places pour l'année prochaine ?

Récit : Théophile Robert
Photos : David de Matos