On était à
Festi’Val de Marne : Ce qu'il ne fallait pas rater

Le Festi Val de Marne, c’est soixante-dix artistes dans vingt-deux villes du département. Un véritable marathon où tous les styles de musique sont représentés. On n’a pas pu tout couvrir. On a ciblé les soirées les plus prometteuses pour vous les raconter.

Mercredi 9 octobre :  Vague de chaleur sur Vitry-sur-Seine

La soirée s’ouvre en douceur avec la prestation de Mounawar. Ce chanteur comorien est un des artistes « premier pas » du festival. Ces nouveaux talents sont invités à jouer trois titres avant les premières parties.  Il n’en fallait pas plus à Mounawar pour nous ensorceler avec sa musique, mélange de funk et d’afrobeat.

Ensuite, place à René Lacaille. Le vieux barbu arrive sur scène en béquilles et nous raconte ses dernières mésaventures comme à des vieux copains. Avec son fidèle accordéon, et ses trois percussionnistes (tous des Lacaille), René est bien décidé à nous faire quitter nos confortables sièges de théâtre. On ne saisit pas tout aux paroles en créole mais on sait qu’il est l’heure de danser. Les sonorités et les rythmes métissés nous font voyager jusqu’à sa Réunion natale. Pendant l’entracte, en bons festivaliers, on file au bar. Sauf qu’ici, l’ambiance est plus au jus d’abricot qu’aux grosses pintes de bières. Le public de cette soirée est un mélange entre des trentenaires bien rangés et des sexagénaires motivés. Tous sont impatients d’écouter la star de la soirée, Rokia Traoré.

Elle arrive sur la scène à peine éclairée pour nous bercer de sa voix envoûtante. Sa musique mêle les sonorités des musiques traditionnelles du Mali à des accords de pop rock plus occidentale. Crâne rasé, robe de soirée, silhouette frêle et énergie débordante, cette femme dégage un savant mélange de force et de fragilité. Une élégance rare. Elle enchaîne les titres, souvent en bambara, un peu en français. Chaque morceau monte en puissance pour arriver à des titres très rock. On n'entend plus le n'goni sous les riffs de guitare électrique. Le concert se termine en beauté par quelques pas de bootyshake des deux choristes. Le public est debout et tape des mains quand les lumières de la salle se rallument. Une prestation pareille valait bien le déplacement (soit un bus, un tram et deux métros pour le retour à la maison).

Vendredi 11 octobre : Une station, deux soirées, deux ambiances

Deux jours plus tard, c’est RER D, direction Alfortville. Chez TouslesFestivals, on est trop fort, on a appris l'ubiquité ( soit la faculté d’être à plusieurs endroits simultanément) et toi un nouveau mot. Démonstration.

On doit être à 20h à la "Salle de convivialité" d'Alforville, pas loin du chemin de la Déportation. Dis comme ça, ça ne vend pas du rêve mais on tenait vraiment à voir la rapeuse Pumpkin. On nous avait dis beaucoup de bien de sa prestation au dernier Printemps de Bourges et on l'a manqué de peu à la fête de l'Huma. Cette fois, c'est elle qui nous fait attendre quarante minutes. Chignon, grosses lunettes et pull flashy, la jeune fille débarque sur scène avec le même look que tes copines de classe. Mais micro à la main, elle ne ressemble à personne d'autres. Cette jeune femme impose son propre style : un son hiphop electro, des jeux de mots corrosifs et efficaces.

Changement de décor, non loin de là, le concert de Stéphan Eicher va commencer au Théâtre Claude Debussy de Maisons Alfort. On quitte les casquettes pour les cheveux gris. Avant le concert, un gentil message nous demande de ne pas prendre de photos du concert. Monsieur Eicher a ses exigences. C’est qu’il nous a prévu du grand spectacle. Quatre excellents musiciens sur scène jonglent avec les instruments, du trombone aux percussions, de la basse à la contrebasse. Nos oreilles sont ravies. Après les nouveaux titres, le public réclame "Pas d’ami comme toi". Stéphan oublie les paroles, se trompe dans les accords mais tout le monde reprend les refrains avec lui. Grosse ambiance chez les quinquas.

Au même moment, Biga Ranx fait hocher les casquettes et danser les blousons à Alfortville. Le jeune Mc français est une boule d’énergie et c’est communicatif. Il balance un son mêlant reggae à la jamaïcaine et hiphop américain. Lorsqu’on quitte l’ambiance survoltée du concert, on trouve le calme troublant des rues d’Alfortville. Alors on songe au titre du dernier album de Biga Ranx «  Good morning midnight » et on a hâte de poursuivre la soirée à Paris.

Samedi 12 octobre : La journée des artistes indé

Un jeune au manteau de cuir nous accueille à l’Espace Robespierre de Ivry-sur-Seine : « Ici c’est la rencontre entre ceux qui ont pleins de projets mais pas d’argent ». Nous voilà à la Journée des Initiatives Musicales Indépendantes (JIMI), qui existe depuis 2007 et fait partie intégrante du festival. Des tables sont dressées pour des labels, des prods et des radios. Tous indé. On croise des débats bien peu animés et des espaces de rencontres déserts. Dehors, des collectifs de graffeurs taguent un logo improvisé pour l’événement. Quelques rues plus loin se trouve le Hangar. Toute la journée des artistes indé s’y produisent. On arrive pour écouter Mat3r DolorosA : un mélange d’électro progressif et de hip-hop. On découvre aussi le quatuor très coloré, Lolito, entre chanson française et riffs de guitare. Dommage que le public n’est pas été au rendez pour cette belle après-midi de découvertes.

Mardi 15 octobre : Rap français et poésie ont rendez-vous à Fontenay

Troisième soirée, RER D. On commence à bien connaître le Val-de-Marne. On descend à Fontenay-sous-Bois pour le concert d’Oxmo Puccino. La première partie est assurée par Rocé. Ce rappeur propose des textes intelligents portés par un flow impeccable. Comme il le dit lui même dans un titre , c’est « l’un des seuls trentenaires à rapper comme un adulte ». Seul avec son MC, Rocé occupe la scène. Toute la salle adhère aux titres « En apnée » et « Assis sur la lune ». Petit bémol pour les instrus. On n’est pas fan des bruits de guns à répétition. Lumière noire. « Bienvenue sur Puccino Air line » annonce une voix sensuelle. On embarque pour un concert de rap mais avec quatre musiciens à bord. Des beaux jeux de lumière viennent ajouter encore un peu de poésie aux titres du rappeur. Oxmo se fait séducteur, penseur puis révolté. Au final, on passe une excellente soirée.

Côté concert:

La découverte:
Pumpkin: La jeune rappeuse déborde d’énergie et de talent.

La surprise:
Biga Ranx: On ne connaissait pas ce jeune mec qui impose un son reggae unique et redoutablement efficace.

La claque:
Oxmo Puccino et ses musiciens: ses titres prennent une autre dimension sur scène. Un grand moment de rap et de poésie.

Côté festival:

On a aimé:

- Le mélange des styles. Du rock, du reggae, de la variété, il y en a eu pour tous les goûts.
- Le prix des concerts: 12 euros. On est loin des tarifs des Zenith et ça fais du bien au portefeuille.
- Le prix des boissons: 2 euros la bière. Les branchouilles des festivals parisiens n’y croiront pas.

On n’a moins aimé:

- Le manque d’un esprit “festival”. On a plus eu l’impression d’assister à une succession de soirées sans lien entre elles. L’absence d’un billet valable plusieurs jours y est sûrement pour beaucoup.

Conclusion

On regrette déjà la fin du Festi’Val de Marne. Des salles pleines, où l’on croise tous les âges et tous les styles, des artistes confirmés et de belles découvertes à seulement 12 euros, ça devrait juste être toute l’année.

Récit et photos : Céline Martel et Morgan Canda