De retour pour sa troisième édition, le festival Climax attaquait la rentrée avec un programme chargé : food trucks vegans, bières artisanales, conférences, toilettes sèches et une grosse programmation. On vous raconte nos trois jours, entre concerts dansants et sensibilisation écologique.
Jour 1. Jeudi 7 septembre.17h21, petit tour du propriétaire
C’est sous un ciel toujours aussi capricieux à Bordeaux, pouvant illuminer votre journée trois heures tout comme vous déprimer le reste du temps, que l’on arrive sur la rive droite de la ville. Le tram nous dépose à quelques pas du Parc Palmer, lieu de futurs tremblements et sonorités. On passe les fouilles et on est très vite accueilli par plusieurs petits groupes de bénévoles souriants sur notre chemin, soucieux de vérifier que l’on ne soit pas perdu. Arrivés très tôt, nous ne faisons pas la queue pour rentrer et découvrons le fameux parc, décoré de structures en bois (photo) un peu partout, de guirlandes, disposant d'un un mini skate-park, un village ONG…
18h09, j’ai demandé à la lune
Nos marques prises, il faut bien évidemment aller charger nos bracelets, le cashless étant l’unique mode de paiement du festival. Encore une fois, pas d’attente étant donné notre arrivée anticipée. Avec de l’argent plein le cyber-espace, on décide de partir se rassasier avant de commencer les hostilités. On se dirige vers le bar prendre une pinte de bière « La Lune », une bière artisanale brassée aux Chantiers de la Garonne (photo), par des brasseurs de Darwin. Très bonne, surtout pour 6.50, on ne la quittera que très peu ce week-end, étant l’unique choix de bière pour l’événement. Le serveur nous gratifie d’un dab sans raison et on prend la direction du stand qui sera probablement le plus populaire du week-end, celui des frites cheddar supplément bonne humeur par le serveur, déclaré officiellement l'homme le plus cool du Climax.
19h01, premier grand saut pour nos oreilles
Le ventre plein, on est enfin prêt à aller profiter des premiers concerts qui commençaient à 19 heures. On se pose dans l'herbe à la scène du théâtre, deuxième des trois scènes du festival et on découvre Moloch/Monolyth. Les festivaliers arrivent petit à petit (photo) et le groupe nous jouera leurs morceaux pendant une trentaine de minutes. C’est sympa mais on n’est pas totalement conquis. La bonne découverte sera Part Company, passant juste après et nous offrant un show d’une heure dont leur morceau Birthday, assez intense, mélange pop/rock à l’image du genre du groupe.
20h43, c’est un cadavre exquis ?
Crédit photo : Fabien Cottereau
C’est à présent le baptême de la scène principale, Palmer de son doux nom et c’est Peter Doherty qui a la tâche d’ouvrir le bal. On assiste alors à une composition improbable, Peter Doherty bien sûr, sûrement alcoolisé et qui lance son micro dans le public, avec à ses côtés un rappeur anglais – qui est cet homme ? – qui balançait parfois son flow, un violon que certains festivaliers s’accordent à dire qu’il n’est pas forcément juste et un clavier avec très peu de notes. Ce mélange surprenant a pourtant fait le café, la foule commençant à se rassembler et à bouger en cœur.
21h32, j’ai dit les mamines en l’air
Nuit tombante, on se dirige à nouveau vers une scène théâtre déjà comble, pour assister au show Charles X, véritable pépite : pas de danse maîtrisées, mélange R’Nb et hip-hop avant de partir sur une version acapella de Stand By Me par Ben E.K ing. Tout le monde se met à chanter dans la foule et à aussi à lever les mains, y compris notre très jeune voisine du devant (photo), perchée sur des épaules et un casque sur les oreilles. Le Climax sait prendre la jeunesse au berceau et ce n’était pas rare de voir des enfants. On se remet de nos émotions et on repart pour une autre fraîcheur musicale : La Femme. C’est assez compliqué d’évoquer l’univers du groupe mais en tout cas, il sait nous prendre avec lui et faire danser tout un public sur son électro pétillante et sur des titres à présent classiques comme Sur la planche ou Où va le monde.
23h32, le PK express
Emportés par le show précédent, on en oublie d’anticiper la foule qui allait se ruer pour voir Isaac Delusion. Un peu trop loin pour en profiter pleinement, on décide de visiter les toilettes du festival, de découvrir le verre de rouge et de se positionner au premier rang pour le final Paul Kalkbrenner (photo). Le producteur et DJ arrive aux alentours de minuit, toute la zone est remplie de festivaliers. C’est vraiment LA tête d’affiche de cette soirée. Paul K est assez connu pour proposer des sets parfois posés et d’autres plus dansants. Et on est ravis de voir qu’il est parti sur l’option deux d’entrée : à peine les premières notes jouées, on pose immédiatement son cerveau sur le côté et on laisse le corps faire le reste avec des festivaliers en transe, sur un mapping en fond juste hallucinant. Réussite pour les oreilles et pour les yeux, on repart aux alentours de 2 heures, tout content de notre première journée, la pluie ayant en plus décidé de nous laisser tranquilles.
Jour 2. Vendredi 8 septembre,14h27, notre cerveau rejoint la partie
Pour notre deuxième jour au Climax, on s’arrête quelques arrêts de tram plus tôt. Non on ne décide pas déjà de fuir, on se rend tout simplement sur l'un des lieux importants du festival, la Halle Basse Darwin (photo) pour l’une des conférences proposées par le festival autour du thème de l’alimentation : Pour une alimentation solidaire // Quand notre alimentation a le goût des autres. Deux heures intenses mais enrichissantes, traitant de la chute du nombre d’agriculteurs face à l’augmentation des consommateurs, de l’équilibre quantité/qualité et des liens à tisser entre les villes et les campagnes pour une meilleure alimentation. La conférence est super, tout comme le cadre de Darwin et on repart assurément moins bête. On en profite pour visiter le quartier, recouvert de fresques et graffitis puis on prend la direction du Parc Palmer.
18h21, je mange vegan et toi ?
On ne l’a pas mentionné pour la première journée mais à la vue de la sensibilisation mise en place par le festival autour de notre alimentation, il était improbable de voir un burger avec un steak de « nos régions », avec un bœuf tué en Hongrie, un trajet sur toute l’Europe et une conception française. Non ici, la horde de food trucks nous sert des plats vegans, et alors ? Beaucoup sont venus avec des préjugés alors que les plats étaient pour la plupart tous très bons. Que l’on soit amateurs de viande rouge ou non, le Climax était justement une belle façon de découvrir de nouvelles saveurs. On se prend donc un falafel pour 7 euros qui cependant ne risquait pas de nous étouffer et on repart pour une session d’aller-retours entre la scène du théatre et la scène Palmer.
20h23, « Un bon voyage »
On prend notre petite dose d’indie pop britannique avec The Kooks (photo) sur la scène principale. Enchaînant leurs classiques comme des chansons plus récentes, alternant émotion et show énergique, le groupe donne du plaisir et n’oublie pas de laisser chanter les festivaliers à l’unisson sur Seaside. On se remémore nos bons souvenirs mais pas trop longtemps non plus, pour aller assister au concert de Polo & Pan. Un « Bon Boyage » nous est lancé cash et en effet, on est tout de suite transportés, enivrés sur un fond aquatique et de sirènes. Peu de temps après le début du concert, deux femmes les rejoignent pour onduler et hypnotiser un public qui se déchaîne et les imite à leur tour sur leur titre Canopée. « Jacques a dit, soyez heureux » lâchent-ils pendant le concert. C’est le cas, un vrai moment de communion qu’on n’a pas spécialement eu lors des concerts précédents.
22h10, Franz Ferdinand featuring Zinedine Zidane
Il est temps de retrouver une autre affiche du Climax, l’immense Franz Ferdinand (photo) pour un concert qui sent bon le rock britannique. Le groupe à peine arrivé, le public s’exclame et hurle. Public qui notons-le a vu sa moyenne d’âge augmenter d'un coup : les groupies principales ont plus de trente ans cette fois-ci. Mais c’est bien toute la foule qui se lâche, y compris notre voisine de devant qui se déhanche à tel point qu’après 2-3 coups de boule évités, on s’échappe un peu plus loin pour danser tranquillement et ne pas finir blessés. Blague à part, c’est compréhensible à la vue du show qu’on nous propose et on ne va pas se plaindre de voir autant d’énergie dans le public.
23h00, en face c’est pas Jacques Martin, c’est pas Jacques Brel, c’est Jacques Auberger
On laisse ce bon vieux Alex Kapranos finir son show et on repart pour une enième fois un peu plus bas sur la deuxième scène. On aurait aimé rester un peu plus mais un des noms qu’on attendait le plus pour ce Climax commençait déjà à se préparer : le déjanté Jacques (photo). Déjà présent sur scène, la casquette qu’il porte sera très vite enlevée pour laisser place à la coiffure propre au personnage, rasé en plein milieu. L’artiste amuse déjà la foule, propose du air guitar sur les musiques au loin de Franz Ferdinand, s’allonge sur scène, prend le téléphone d’un festivalier, écrit avec et lui re-balance. Puis c’est le début du boum-boum, du show Jacques et sa musique atypique : l’artiste nous sort une raquette de badminton, un jouet en forme de poulet qui couine, et d’autres objets farfelus pour reprendre toutes ces sonorités en bonne techno pour un public en transe et qui bouge bien la tête.
00h35, la danse inachevée
Après plus d’une heure passée beaucoup trop vite avec Jacques, il est temps de participer au deuxième final du Climax. On se prend en vitesse une bien maigre crêpe italienne pour 6 balles et on arrive tout au fond d’une scène principale remplie. Kungs (photo) commence son set et met tout le monde d’accord, petits et grands dansent à n’en plus finir sur des reprises de Justice, Rihanna ou sur un Rhythm of the Night à l’ancienne. Et d’un coup, quand on commence à prendre son pied, on se sépare de façon assez brusque avec un simple «goodbye». Cette petite déception ne gâchera pas le show et de toute façon, la pluie décide enfin de se déchaîner pour la première fois, histoire de rentrer trempés. Soucieux de suivre une autre conférence le lendemain, on ne prend pas la direction du Club qui proposait un after du festival.
Jour 3. Samedi 9 septembre, 14h15, jour, pluie, jour, pluie …
On revient au même endroit que la veille, sous la pluie cette fois, pour une nouvelle conférence : Pour une alimentation équitable // Vers une justice alimentaire mondiale. On fait bien d’arriver en avance, le grand hangar (photo) qui accueille l’événement est rapidement rempli et les derniers arrivés se retrouvent debout. Dans leur malheur on est quand même contents : cela témoigne de la belle mobilisation. Les acteurs plantent le décor : 9 milliards d’humains sur Terre en 2050 mais 800 millions de personnes souffrant de la faim aujourd’hui. On nous explique alors les défaillances du système alimentaire actuel avec un José Bové intenable, à la fois sérieux et drôle quand il faut. « Il faut se battre mais le faire avec plaisir, joie et détermination » déclare-t-il. Conférence finie et encore une fois enrichissante, on repart pour ce dernier jour sur la rive droite.
17h07, on continue la mobilisation
On arrive une nouvelle fois un peu en avance ce qui nous permet d’aller nous documenter et discuter au village ONG (photo) que l’on peut retrouver tout de suite en arrivant au festival. L’idée est sympa de le placer à l’entrée pour le mettre en lumière mais il est à notre goût rapidement délaissé par les festivaliers qui se rendent dans les autres lieux. On se prend ensuite le burger vegan du festival pour 9 euros et qui est encore une fois assez insuffisant bien que bon et on part pour de nouvelles aventures musicales.
18h27, Omar Souleyman 1000 - Evelyne Dhéliat 0
La pluie commençait à faire son apparition et à être pénible quand Omar Souleyman (photo) est venu lui mettre un uppercut bien placé pour qu’elle disparaisse. C’est sûrement LA révélation du festival, à peine arrivé sur scène, les premiers rayons de soleil apparaissaient, comme dans un film. La foule s’immerge tout de suite dans cette électro-dabkeh, tape des mains, essaie des pas de danse très oriental à l’image du DJ et sa tenue. On continue de faire monter la température au concert suivant d’Amadou & Mariam. On reprend avec eux C’est chaud, on bouge avec tout le public sur des percus africaines et on s’exalte. Quand un grand nombre de personnes commencent à se diriger vers la scène principale pour Morcheeba, on préfère de notre côté se rendre pour la première fois sur la troisième petite scène, la scène Nova, pour découvrir DJ Supermarkt. Aucune déception tant les sons étaient dansants et nous rappelaient l’été. On tape du pied avec une cinquantaine de personnes, même sous la pluie parce qu’on n’est pas en sucre ici. Bon, quand celle-ci est de plus en plus insistante, on se pose quand même sous un arbre à attendre qu'elle s'arrête.
21h41, bienvenue dans la jungle urbaine
Place à l’une des dernières têtes d’affiche du festival, le S-Crew (photo). On arrive à se placer tout devant, sous une pluie incessante et toujours plus intense quand la scène prend une couleur rouge flamme pour réchauffer les milliers de personnes présentes. Les 4 parisiens débarquent, les gens hurlent et ne sont pas prêts de s’arrêter. Le groupe alterne entre des morceaux de leur collectif et des solos du dernier album de Nekfeu et nous réserve aussi des surprises avec la présence de Doum’s de l’Entourage, de S-Pri Noir et Nepal. C’est l’un des concerts les plus intenses, le groupe lance pogo sur pogo, la scène crache des flammes et ils finissent par surfer sur la foule en bateau gonflable ou dans d’immenses bulles. Pas déçus et le dos cassé, on court ensuite pour un autre groupe très attendu.
23h01, « D’aucuns ont des aventures, Bon Entendeur EST une aventure »
Scène théâtre, à peine le temps de se placer au fond pour dégager un périmètre de danse que Bon Entendeur (photo) balance la mythique punchline de Dujardin dans OSS 117. La foule en oublie qu’elle est trempée, à tort parfois à la vue des glissades involontaires sur les pentes de boues mais le live est si intense que le reste importe peu. Quand on nous place le remix de Le temps est bon d’Isabelle Pierre, on pourrait même danser par -50 degrés. Un combo électro, variété française et punchlines de personnalités françaises pour 1h30 de plaisir. Donnez-leur la scène principale !
00h31, Un final mi-chaud, mi-froid
On se rend aux toilettes une dernière fois avant le final. Le principe des toilettes sèches ne semblait malheureusement plus être respecté vu l’odeur. Place donc à Fakear (photo), autant le dire tout de suite, c’était bien mais on n'y a pas trouvé ce petit quelque chose d'incroyable. Accompagné par des instrumentalistes, son set est plaisant, pas transcendant. C’est peut-être parce qu’on venait de bouger pendant 1h30 avec Bon Entendeur et qu’on espérait voir quelque chose d’aussi intense et bougeant. Tant pis, ça ne vient pas gâcher notre plaisir et on décide de terminer ce beau week-end en allant à un after avec des festivaliers plutôt qu’au Club, histoire d’avoir un peu de convivialité. Il terminera à pas d’heure pour changer …
Le bilan
Côté concerts
Le rayon de soleil
Omar Souleyman, incontestablement la belle surprise du Climax
Le vrai pote
Jacques, c’est quand tu veux pour une bière
Les ambianceurs
S-Crew, on a encore un peu mal partout
Le plus beau final
Paul-K, un show tout en couleur
Les punchlines dansantes
Bon Entendeur, qui pour nous a volé la vedette à Fakear
Côté festival
On aimé :
- Les conférences, un plus incontestable et enrichissant
- La bière brassée du terroir, vendue au même prix qu’une Kro par certains festivals
- La programmation, à la fois grand public mais avec des pépites parsemées à l’intérieur
- Le temps d’attente, on n’a quasiment jamais attendu durant le festival, même dans les moments de rush
- L’emplacement, le lieu était idéal que cela soit pour les conférences et les concerts
On a moins aimé :
- Le peu de choix de boissons au bar, bien que bonnes
- Le manque d’un camping propre au festival pour créer plus de liens et de convivialité
- Le prix des plats vegans, il manquait une tour eiffel et on était à Paris
- Le non-respect des toilettes sèches le samedi, pour une découverte nasale surprenante
Conclusion
Le Climax a tenu toutes ses promesses musicalement avec des découvertes et des confirmations qui nous ont fait oublier la pluie qui n’a finalement pas été si imposante. On a réellement apprécié sa sensibilisation à travers le village ONG, l’alimentation vegan et surtout les conférences. Il faut arrêter avec cette fâcheuse tendance d’utiliser la volonté de sensibiliser le public de l’événement pour le bâcher à coup de « c’est un festival de bobo-bordelais ». Ce week-end là, on a bougé avec des gens en k-way et bottes, pas des personnes en fourrure et chaussures de ville. On est d’accord que les prix sont globalement trop excessifs mais on a bien bougé et notre rentrée a commencé idéalement.
Récit : Camille Mazelin et Jean Peyron
Photos : Camille Mazelin