On était à
Les Artefacts, quand le Zénith de Strasbourg devient festival

Un petit voyage vers la capitale des cigognes ? Trois soirées, trois thèmes pour un festival porté par son affiche, Prodigy et Parov Stelar en tête. On s’attendait à un festival d’avril sans saveurs dans un Zénith impersonnel, on a eu le droit à un petit échauffement de trois jours à Strasbourg pour la saison estivale.

Jour 1. 18h01, Du Tram au Subways

Jour pluvieux, chargé de nuages menaçants. 15 minutes de Tram A depuis le centre, 10 bonnes minutes à pied avec seulement une dizaine de festivaliers, et nous voilà devant l’immense bâtiment rétro-futuriste orange du Zénith de Strasbourg. Un endroit loin du centre, et pratiquement désert, on craint le pire.  

Très bonne surprise dès l’entrée, on doit échanger nos euros contre des jetons, un esprit festival dans un Zénith qui nous plaît bien. Le concert de The Subways (photo) a déjà commencé on file y assister. Un rock qui fait (re)pousser de plus belle notre acnée, comme sur leur tube Rock’n roll Queen, avec une belle énergie parfois trop locasse du chanteur Billy Lunn. On s’en lasse vite, avec un public mou du genou qui n’arrange rien.

18h52, l’heure de la récré

On ne fait pas long feu dans le salle. Jeunes punks, petites minettes excitées, vieux loubards et jeunes couples aux noces de coton, le public est multiple ce soir. On en profite pour découvrir le Dock Promenade à l’extérieur. Un DJ balance du son commercial pour quelques démonstrations de skaters sur une rampe géante. Ce qui nous intéresse est derrière : une salle de jeux gratuite sous un chapiteau, avec baby-foot et jeux vidéos rétro, allant de Super Smasch Brosch sur Nintendo 64 à Crazy Taxi sur DreamCast.

20h14, au temple de la panse

Retour à l’intérieur, pour écouter le groupe californien Rival Son. Une sorte de revival d’un rock années 70 plus FM, avec un chanteur au costume ultra coloré mimant les vocalises d’un Jimmy Page version Led Zep’, accompagné de Rabbi Jacob au clavier et d’Hercule Poirot à la basse.

Notre quête de nourriture fut rapide et couronnée de succès : un chapiteau énorme se dresse hors du zénith pour nous proposer un festin fait de kebab, frites, tartes flambées … on se partagera un grand hot-dog à 4,50 jetons entre merguez et knack, la saucisse star du coin. Une vraie odeur de festival se dégage.

21h39, des airs de déjà vu

Au tour des globes trotteurs Shaka Ponk (photo) d’ambiancer la salle : un show programmé au millimètre, à voir au moins une fois si ce n’est pas déjà fait. Même avec la folie de Frah, la magie a du mal à opérer lorsqu’on les a déjà vu, avec un sentiment d’essoufflement et un manque de spontanéité. 45 minutes de changement de plateau avec la plateforme jeux vidéos fermée, c’est long. On se dégustera des beignets de pois chiches indiens en attendant. Et à trois jetons le demi de Heineken, on a déjà presque les poches vides.

Enfin débarque The Prodigy : ça déménage, avec le souffle des basses qui hérisse nos poils. Breathe, Nasty et Omen pour les trois premières, du lourd pour les festivaliers restés, sans trop de pogos. Le défi, vis à vis du Sziget et du Cabaret Vert, était d’intégrer les nouveautés de leur The Day is my enemy sorti il y a deux semaines. Pari réussi ! 20 ans et une énergie toujours intacte pour te faire suer sur ton voisin. La paire de boules-quiès était essentielle. Surtout pour ces quelques p’tits bonhommes venus avec leur papa.

Jour 2. 18h46, apéro bucolique

Arrivée plus tardive pour ce samedi : le tram est bondé d’ados la bouteille déjà à la main. Ca drague, ca chante, ca fait tomber ses bonbons à la vosgienne, une vraie atmosphère de fête pour une moyenne d’âge tombée en dessous des vingt ans. On avait prévu notre coup avec quelques canettes pour profiter de cet été avant l’heure, en se posant sur les pelouses fleuries devant le Zénith.

20h37, debout de la fosse aux gradins

Après avoir profité des derniers rayons, on arrive pour la dernière demi-heure de The Avener. Un Zénith plein à craquer pour ce petit gringalet devenu star de l’électro made in France. Dj set classique, sympa pour débuter notre soirée.

30 minutes chrono pour recharger nos poches de jetons et nos verres de bière, dont 20 utilisés dans la queue pour les chiottes. A peine le temps de se faufiler vers le coeur du public que Parov Stelar (photo) et sa bande entrent en piste : 1h30 de danse non stop aux rythmes des cuivres et de l’électro swing. 3, 4, 5 fois en live, la recette marche à chaque fois. On découvre de nouvelles chansons, ça danse debout comme des fous de la fosse aux gradins.

23h45, p’tit sax et oeil hypnotique

Après une tarte flamblée qui l’était un peu trop, et quelques parties enflammées de Mario Kart sur Game Cube, on se dirige vers Bakermat. Des facilités qui séduisent le jeune public présent, usant du sax comme d’un instrument commercial. Un Guetta nouveau genre, le sourire les bras en l’air.

Pour le finish, un oeil multicolore nous absorbe vers la salle. Joris Delacroix (photo) se joue de ses pads, claviers et autres instruments, sous cette pupille nous hypnotisant tel le serpent Khâ vers sa tisane électro nuit calme. Par moments les basses redémarrent pour te garder en vie ... on sera relâché vers les 02h20.

Jour 3. 15h45, le Zénith perd son festival

Il fait beau, il fait chaud. On se verrait bien à buller dehors. Pas beaucoup de monde dans le Tram, la plupart des festivaliers viennent en vélo. Mais dimanche, c’est festival, et on avait une revanche à prendre au baby. Manque de bol, tout est déjà en train d’être démonté à notre arrivée. Plus de baby, plus de jeux, plus de stands nourriture. On est dépité par cette sensation de fin avant l’heure. La salle est à moitié fermée par des rideaux noirs pour les dernières notes de Theodore, Paul & Gabriel. C’est pourtant une journée familiale par excellence. On se remontra le moral avec une glace. Oui, les enfants sont pas contents.

16h47, sieste dans les gradins

On décide de se poser dans les gradins pour la douce et timide Emiliana Torini. Elle nous berce dans un demi-sommeil. Ce sera bientôt l’heure du café pour se requinquer. La surprise viendra de Cats On Tree (photo). D’un duo pop classique aux dernières Solidays, ils transforment leur live en une belle osmose lumineuse, énergique et musicale. Le groupe jouie désormais d’une certaine maturité, accompagné par trois violons et un violoncelle sur scène.

19h54, le retour de ces dames

On attendait impatiemment le retour d’Izia (photo) sur scène. Une fougue et une jeunesse dorénavant maîtrisées, dans un live moins fringuant mais plus construit. Son virage pop divise, avec un manque clair de gros riffs de guitare et d’envolées vocales de la fille Higelin. Mais une chose reste : les sourires et le pep’s de sa joyeuse bande, et l’énergie depotante de la chanteuse.

Selah Sue pointe elle aussi le bout de son nez. Vous devriez la croiser cet été, sauf si vous vivez dans la grotte de Lascaux. La Belge souriante et aguichante sait y faire. Un talent vocal magnifique, notamment quand elle joue de son ragga. Mais des chansons plus douces peinent à nous emporter totalement.

Coté concert

La recette absolue en festival
Parov Stelar, impossible de ne pas danser et bouger ses fesses. 

20 ans de plus et pas une ride 
The Prodigy, toujours autant de décibels dans tes oreilles

La bête de scène
Izia, moins de rock mais toujours autant d'énergie

La surprise
Cats on Tree, une belle maturité trouvée

Côté festival

On a aimé :
Un véritable espace nourriture, avec des choix pour tous les palais et toutes les bourses.
Des choses à faire entre les concerts : babyfoot, jeux vidéos, démonstration de skate … le Zénith s’anime.
Des concerts copieux d’1h15 à 1h30 qui peuvent justifier un prix élevé des billets, entre 35 et 40€ la soirée.
Une navette pour te ramener au centre de Strasbourg, au poil.

On a moins aimé :
Très peu de prises de risque sur la programmation, avec des machines qui marchent (Parov Stelar, Prodigy, Shaka Ponk) et des découvertes laissées pour les plus petites salles.
Disparition de toutes les activités le dimanche. Mais pourquoi ? Les enfants n’ont pas pu en profiter jusqu’au bout … et nous non plus !

Conclusion

Les Artefacts nous ont fait sentir un avant-goût des festivals d'été, une belle performance pour un rendez-vous organisé autour d'un zénith d'habitude froid et sans identité. On espère pour l'année prochaine quelques découvertes d'artistes et un petit grain de folie supplémentaire. 

Récit et photos : Victoria Le Guern et Morgan Canda