Tous les ans vers juillet, la forteresse de Petrovaradin à Novi Sad en Serbie se transforme en champ de bataille. Tous les Festivals vous emmène en Serbie : un billet avec camping à 80€ seulement pour une programmation qui valait son pesant d’or, de Prodigy à Atoms for Peace. Soleil de plomb, amitiés éphémères et intenses, concerts post-levé du jour, une semaine de dingue que l’on vous raconte au jour le jour.
Mardi 9 juillet, 14h05 : Départ en bus depuis Budapest
Une fois n’est pas coutume, le festival commence par un bus. Le Exit propose des navettes depuis plusieurs villes (Belgrade, Zagreb …) pour une vingtaine d’euros. Ambiance calme au départ mais qui se chauffe petit à petit. Après une heure de douane entre l'Union Européenne et la Serbie, les bières commencent à sortir, les premières discussions se font. Le festival est déjà lancé.
20h14 : Découverte de notre résidence principale
Plus d’une heure d’attente devant les portes, et nous voilà avec le bracelet « Exit camp » autour du bras. Surprise : un camping pas très grand où il est facile de trouver une place . On découvre un petit endroit au cœur des tours de béton de Novi Sad, entre le centre sportif de la ville et le stade de foot de la 3ème équipe du pays. Pas très sexy mais original. Un rassemblement de tentes à visage humain, où l’on commencera vite à connaître tout le monde.
Mercredi 10 juillet, Day 0 - 13h32 : Premiers regards vers la forteresse
Après avoir savouré un burek – tarte au fromage fétiche des serbes au petit déjeuné - au marché de Novi Sad, on décide d’aller chercher nos bracelets avant la foule du soir… 40 minutes à pied depuis le camping ! Le campement a changé de place par rapport à l’année passée, où il était au bord du Danube. On se dira qu’on prendra le bus la prochaine fois, mais tous les soirs l’ivresse nous poussera pour une fois à faire du sport. La découverte de la forteresse au loin laisse déjà rêveur.
15h10 : Plage toute génération à Novi Sad
Direction la plage de Novi Sad pour un peu de repos. On y retrouve les festivaliers bracelets au bras, mais surtout les habitants de Novi Sad, deuxième ville de Serbie après Belgrade. De 7 à 77 ans, c’est l’heure de la sieste sur les pelouses, malgré les sons club house lancés depuis les bars.
18h44 : DJ set au cœur du camping
Au milieu du camping se trouve le Green Village : des poufs vert et jaune géants, des parasols … et vers 18h30, un DJ. Tous les soirs, il balancera du gros son très clubbing pour réveiller le camping. Particularité : il n’a qu’un bras, et mixe comme s’il en avait trois. Le type s’appelle Matt Howes. Des filles distribuent des bières aromatisées au pamplemousse, d’autres une sorte de cidre très « pommisé ». Elles ne sont franchement pas recrutées sur leur CV. La soirée commence bien.
23h00 : Première nuit chic & disco
Le Exit a choisi le disco pour lancer les hostilités : Nile Rodgers avec le groupe Chic. Les classiques disco scintillent, de David Bowie à Diana Ross. Retour dans les années 80 avec l’énergie étonnante que dégage Rodgers. "Every body dance" ! Le bassiste de Chic, Jerry, nous a fait rêver avec ses solos de basse. Un peu de dubstep ensuite avec Xilent pour le premier défoulement du festival.
Jeudi 11 juillet, Day 1 - 14h25 : Pivo un jour, pivo toujours
14-15h, c’est à peu près l’heure de la première bière. Pivo en serbo-croate. Seulement 160 dinars sur le camping, soit 1,50€, et encore c’est cher pour le pays. Ca sera 190 au festival : l’inconvénient c’est qu’on voit souvent les derniers hectolitres d’une pinte nous tomber sur la tête. Au campement, il propose également des cocktails, entre 3 et 5€. On ne va pas se plaindre.
17h10 : L’orage sous un chapiteau
La pluie se met à tomber en trombe. Ca arrivera quelques fois, et ça fait du bien. Beaucoup se retrouve alors sous le chapiteau au milieu du camping. Autour de la table, deux français, un anglais, un néerlandais, une grecque, une polonaise, un australien, un gallois, quelques serbes et un texan. Le melting Pot du festival dans toute sa splendeur. A noter, la moitié des festivaliers sont serbes, mais la force du Exit est d’être fait pour tous. Dominance très anglo-saxonne certes, et pratiquement aucun français : nous n'en avons rencontrés qu’une dizaine sur tout le festival.
23h07 : Le Dog a encore frappé
Les premiers concerts sont à 20h, les gros noms vers 23. Le groupe Bad Copy chauffe les esprits avant la star, avec un refrain qu’on nous traduit : « Est-ce que c’est de l’amour ou de la bière ? ». Arrive le maître, Snoop Dog ou Snoop Lion. Micro doré, le rappeur enchaîne ses tubes planétaires dans une ambiance de feu, de California Girl à Drop it like it’s hot. L’enfant du rock que je suis est déchaîné. Snoop Lion apparaît quelques fois, mais c’est surtout le Dog que les gens veulent voir. En plus, le gars a vraiment l’air de prendre son pied en Serbie
02h31 : Fatboy Slim loin de la retraite
On l’attendait. On n’a pas été déçu. Le vieux de 50 balais est toujours dans le coup : un mix de plus de deux heures sans interruption jouant avec son électro old school et quelques nouvelles tendances. Il est en trance, en bermuda et chemise à carreaux – look avec lequel tu lances la chenille normalement -, danse et saute dans tous les sens sans lâcher sa platine. L’acoustique de la Dance Arena est énorme, sans parler du décor. Les animations derrière le DJ assurent, on est vraiment envoûté. Les classiques de Fatboy Slim arrivent sur la fin, Right Here Right Now ou Rockafeller remixés à la sauce Exit. Du très grand live électro.
5h15 : Reggae morning
Après un retour sur la grande scène sans conviction, on termine la soirée sur du son reggae. Un DJ qui lance des classiques devant une centaine de festivaliers. L’ambiance reste tonique malgré cette fin de soirée. Quelques mots pour la fin : « Good Morning. Legalize Ganja Weed ! ». On prend note et on va se coucher.
Vendredi 12 juillet, Day 2 - 12h47 : Viandes qui grillent, toilettes qui déchantent
Notre stand préféré au camping : bœuf (pljeskavica pour les intimes), poulets, porcs, lards, et saucisses grillent devant nos yeux. C’est alléchant et pas cher. Un petit tour mérité vers midi. Au festival pendant la nuit, ça sera pizza, KFC (oui oui) ou chinois. De quoi mettre en rogne notre transit : les toilettes du camping étant ce qu’elles sont, une rencontre du 4ème type, il fallait jouer entre la plage, la piscine et celle du supermarché. A la différence, les douches étaient vraiment bien.
22h45 : Rakia en tube, mais sans essai
Direction le festival avec Ben & Jess, un couple d'australien en plein tour d’Europe à vélo. Comme tous les soirs, toutes les filles de Serbie se sont données rendez-vous pour vendre des tubes à essai de Rakia (on apprendra plus tard que c’est un réseau). Cette « boisson » made in Balkans s’approche des 70-80% d’alcool pour un lavement jusqu’aux fesses. Pas une bonne idée d’en prendre au moment où ton sang est déjà bien rempli.
23h30 : The Sanglant Prodigy
Le bordel puis l’horreur. Gros son, des spectateurs à n’en plus finir – le Exit réalisera d’ailleurs son record de fréquentation de la Main Stage -, pour une scène bien trop petite. Ca secoue dans tous les sens, impossible de kiffer la musique. Cela devient une question de survie : Prodigy se transforme dès les premières chansons en pogo géant. Ils ont joué leurs classiques, mais on ne sait pas trop quand et comment. Assez violent, coups de coude, lèvres ouvertes, après quatre chansons c’est le moment de bouger. Habitués des concerts à émotion, il fallait être sous substance ou bourré de testostérone pour apprécier.
02h35 : Silent Disco, le passage obligé
Après un DJ Fresh peu convaincant, et une fatigue dû à Prodigy, on se balade : la forteresse regorge de recoins avec des scènes, des douves à la cour intérieure. Latino, r’n’b, métal, il y en a vraiment pour tous les goûts. On choisit le Silent Disco : chacun porte un casque, avec deux choix de pistes pour deux DJ. La battle peut commencer, de System of a Down à Elton John, le sourire sera de vigueur jusqu’à 4h. Pour la fin, de la drum and bass de qualité sur la grande scène avec The Prototypes.
Samedi 13 juillet, day 3 - Vers 9h : Tente position thermostat 12
Nouveau réveil à 140 degrés. Comme tous les jours, direction le chapiteau central pour finir la nuit. Coup classique, à l’ombre : beaucoup de campeurs ne prennent même plus la peine de revenir dans leur tente au retour du festival vers 7-8h.
15h50 : Serbian Drift sur le Danube
Nos voisins australiens du camping nous proposent un tour vers une plage « sauvage ». Pile en face de la forteresse, la vue est superbe. L’état de la plage lui, moins. L’idée du jour, le Serbian Drift : se laisser porter par le courant très fort du Danube sur 1 km. En revenant, on découvre le supermarché du coin : des stands géants de bières et de salamis. God save Serbia.
23h45 : Atoms for peace en fermant les yeux
Ils ne feront pas de date en France, mais il était au Exit : 45 min de retard quand même. Tom Yorke, chanteur de Radiohead, accompagné de Flea le bassiste des Red Hot. Un son psychédélique, réfléchi du début à la fin, des accords tout en finesse. Très proche de Radiohead en fait, un concert à faire assis en fermant les yeux.
3h58 : Feu d’artifice sur la Dance Arena
Après un tour dans le festival vers la scène fusion, Chase & Statuts nous remotive sur la main stage : dubstep très rythmé, et remix de classiques comme Flux Pavillon ou Nero. La suite se passe sur la Dance Arena. C’est Steve Angello qui performe. Il enchaîne après David Guetta et Mark Knight. Du lourd, le show est spectaculaire : en 30 min, à peu près trois PIB de la Serbie passent dans les feux d’artifices et confettis. Ce n’est pas notre style, mais vu l’ambiance de malade, on ne peut qu’apprécier.
Dimanche 14 juillet, day 4 - 14h : La piscine pour notre salut
Dernier jour à Novi Sad. Ca sent la fin mais la motivation reste forte. On veut profiter de la soirée, alors on se cale à la piscine. On grille littéralement sous le soleil serbe. Comme à la plage, un DJ ambiance l’endroit. On réussira à dormir ensuite dans nos tentes, prêt pour un dernier round.
01h30 : SBTRKT, transcendance à l’état pure
On loupe Nick Cave, Rudimantel annule au dernier moment, on se retrouve sur le DJ set SBTRKT. On voulait les voir : la transcendance absolue. Cela commence en douceur, ses basses intenses remues tous nos organes. Avec son masque africain seul et concentré sur ses platines, son électro lente s’active petit à petit pendant 1h30 avant d’exploser sur Wildfire. Un vrai régal pour les oreilles.
02h45 Diplo, la claque du festival
On s’avance au plus prêt de la scène pour la suite : encore un set, celui de Diplo. Il s’amuse : il enchaîne les titres, remixés à la sauce trap et dubstep. En moyenne un morceau toutes les 30 secondes, pas le temps de souffler. On entend surtout du Major Lazer, Whatch out for this, Get free ou Pon de floor. Il se permet même un Harlem Shake géant. Sans doute le meilleur set du festival avec celui de Fatboy Slim.
05h15 Le banquet final
Sur la main stage, on croise Ben et Jess perdus deux jours plus tôt sur Prodigy. Quelques mètres plus loin, c’est nos voisins australiens et néo-zélandais qui débarquent, les deux Chris, Rory, Pip et Schwell. Carolina la polonaise n’est pas loin, Eline l’hollandaise photographe non plus. Puis Mickel et Sébastien, anglais et gallois, se joignent à la scène. Sans oublier Jessy le canadien que j’avais retrouvé ivre mort dans ma tente le deuxième jour. On se croirait au festin final d’Astérix et Obélix : tous devant la même scène, sur le set de Redlight, bière en main, sourire aux lèvres. Dans un dernier élan pour le finish du Exit Festival.
Côté concerts :
La claque :
Diplo : Son DJ set au millimètre, entre trap et dubstep d’une richesse rare.
La confirmation :
Fatboy Slim : Mix hallucinant de deux heures pour un son pur et sans bavure.
L’unique :
La Dance Arena : Acoustique et cadre de fou à te faire aimer le concert de David Guetta.
Le sourire :
Niles Rodgers avec Chic : Disco pure souche et énergie positive qui ont lancé les festivaliers pour la suite.
La déception :
The Prodigy : Trop de monde, du pogo à tous les étages, impossible de kiffer le concert sans drogue dur ou sang serbe.
La découverte :
SBTRKT : Montée en puissance transcendante d’un DJ set qui fait vibrer tous tes organes.
Côté festival :
On a aimé :
- Aucun français pratiquement, le dépaysement est complet.
- Ambiance camping à taille humaine, on connaît très vite tout le monde, et on paye très vite une bière à son voisin.
- Le prix de la bière, 1 € dans la ville, un peu moins de 2 € dans le festival.
- Un festival qui ferme à 8h du matin, de quoi ne plus avoir envie de dormir.
- Les concerts durent deux heures voir plus. De vrais concerts quoi.
- 20 scènes qui permettent une programmation très éclectique.
- Une entrée rapide sur le site.
- Un festival à la fois pour les serbes et les étrangers.
- Un accueil des serbes parfois lent mais très chaleureux.
- Les filles serbes, tout simplement les plus belles d’Europe.
- Pouvoir se baigner dans le Danube. Avant qu’on puisse se baigner à côté de Rock en Seine …
On a moins aimé :
- 40 minutes de marche pour aller du camping au festival, vraiment trop.
- Impossible de dormir après 9h du matin, même encore saoul.
- Toujours trouver des plans B pour ne pas aller aux toilettes du camping.
- Un line up très riche, mais la frustration d’avoir loupé les ¾ de la programmation du festival trop chargé.
- Beaucoup trop de DJ au détriment de vrais groupes, notamment sur les petites scènes.
Le Conclusion
Un cadre unique dans une forteresse, une acoustique magique et enivrante, une ambiance monstre mais à taille humaine : la Serbie vous tend les bras pour 2014. Les groupes et DJs semblent survoltés à jouer ici, tout comme les festivaliers qui bougent leurs corps jusqu’à 7-8h du matin. Le Exit, peu connu en France, mérite sans problème sa place parmi les meilleurs festivals d’Europe.
Récit : Morgan Canda
Photos : Jaufret Havez / Eline Burmanje / Exit Festival (facebook) / Kombini