On était à
Terres du Son: la folie est dans la prairie

Pour ses 10 ans, le festival Terres du Son nous a mijoté une programmation de folie. Entre Woodkid et Détroit, Breton, M et les groupes tourangeaux on a passé un week-end à slalomer entre les trois scènes et au-delà. On vous raconte tout par ici.

Jour 1. 21h30, Arrivée en terre inconnue

Arrivées à 21h30, notre bolide se gare près des tour bus d’artistes. Après 3h30 de route depuis Paris, nous voilà enfin à Tours, pour la 10e édition du festival Terres du Son. Une découverte pour nous, attirées par une programmation alléchante et la tournure éco-responsable de l’événement.

21h45, Les délicats Cats On Trees VS l’électro survolté de Nasser

Cats on Trees (photo) faisait partie de nos groupes valeurs sûres de ce vendredi. On les avait déjà vu au Festival Chorus en début d’année, on savait donc à quoi s’attendre: deux sur scène, l’une au piano et l’autre à la batterie, leur son se révèle bien calé pour ce début de soirée. Ils nous ont même étonné au niveau de leur scénographie, bien plus conséquente que la dernière fois: des triangles lumineux les accompagnent cette fois-là. Ça leur rajoute de la prestance sur scène. Bien joué.

On continue sur la prairie, histoire de faire le tour de tout le domaine et à quelques enjambées de là on fait une halte du côté du Chapitô. Une scène en forme de chapiteau (comme son nom l’indique), où se produisent les membres du groupe Nasser. Après la pop mélancolique de Cats On Trees, leur électro nous booste un grand coup. On ne les connaissait pas et ils envoient du bois. Le public est conquis, nous aussi.

22h45, Un show trop millimétré pour Woodkid


Il est 22h45 et on attend la prestation de Woodkid (photo). Ce qu’on attend surtout de lui en live, c’est d’en prendre plein la vue. Ses concerts étant réputés pour leur jeu de lumière et la mise en scène, pour entrer dans son univers. Difficile de ne pas vibrer face aux enceintes, de ne pas être pris dedans. La voix de Yoann vacille quelque fois, mais on lui pardonne. Il est maître de sa scène, tout est bien ficelé. Justement un peu trop. Les avis sont partagés pour les festivaliers: certains sont conquis, d’autres regrettent ce manque de prise de risque, pas une seconde n’est laissée au hasard, en effet. Ce que l’on a vu à Tours est sans doute la copie conforme de ses autres concerts en tournée. On aurait bien aimé l’orchestre symphonique mais bon, faut pas rêver. Le plaisir fut quand même pris.

00h30, Hip-Hop électro avec St Lô

De retour au Chapitô on retrouve St Lô qu’on avait déjà croisé au festival MaMA 2013. De la fumée s’élève du crâne de la chanteuse brookelynaise, Walidah , qui rajoute un effet mystique à ce groupe d’électro hip-hop. Un trio détonant qui n’a pour instrument sur scène que des machines et la voix soul/r’n’b de sa chanteuse.

1h15, Breton séduit la grande scène

Après Woodkid, c’est au groupe Breton (photo) de faire son entrée sur la grande scène. Son chanteur, charismatique joue de son charme à travers quelques phrases en français parfaitement maîtrisé. Et en temps que chauffeur de festival on peut difficilement faire mieux. Leur set commence d’ailleurs comme à Beauregard avec Pacemaker et ses violons carrément envoûtants. Il invite la foule à danser , taper des mains, faire savoir de sa présence et ça marche à tout les coups, pour avoir une public réuni et chantant en choeur sur la bombe electro-pop Envy

Jour 2. 18h00, La dream pop de Boys In Lilies

Une fille membre d’un groupe jouant en festival est très rare, rien qu’à checker la programmation des meilleurs événements, elles n’ont que très rarement la première place. Et c’est là que Boys In Lilies nous titille : enfin un groupe de fille ! Bon, il y a aussi un gars dans le groupe , avouons-le. Mais rien que sur le papier ce groupe nous fait plaisir. D’ailleurs pour leur musique on restera aussi. Une dream pop mélancolique très planante, parfaite pour commencer tranquilement ce deuxième jour de festival. L’atmosphère est encore très calme, ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose car l’avant de la fosse reste accessible. Les gens écoutent religieusement, ondulent du bassin tranquillement. Les filles du groupe ont la voix douce, chantent en choeur, c’en est presque aérien. Une critique à émettre: le jeu de scène des deux filles qui chantent à l’unisson et se donnent le change avec un large sourire, et statiquement,  nous ferait presque penser à un “girl-band” à la L5. Ces chanteuses méritent mieux que cette mauvaise comparaison, et auraient tout intérêt à s’affirmer plus dans leurs personnalités respectives. Verdict Final ? Convaincantes. Tout est bien pesé.

19h00, Hip-hop folklorique chez Barcella

Barcella s’amuse avec la foule à coup de phrases impossibles à prononcer du type “les chaussettes de l’archiduchesse” ou “le chasseur sachant chasser”. On s’y essaye avec plaisir mais non sans difficulté . Le public lui aussi se prend au jeu et les trois quarts ne réussiront finalement pas à prononcer les dernières phrases , un semi-echec mais avec le sourire, et c’est le principal.

19h30, petite balade dans le village

Le festival ne s’arrête pas à la frontière de sa prairie et les festivaliers logeant au camping l’ont bien compris car avant d’arriver sur le site il y a tout un univers à traverser. De la scène Chapitô au village des festivaliers, notre balade commence avec la rencontre d’un artiste présent à l’entrée du festival. Son crédo c’est la sculpture. On aura pas l’opportunité de voir le résultat fini mais tout ce travail fait sous les yeux du public est bien sympa à regarder. Un peu plus loin c’est une petite scène que l’on trouve , où se produit pour l’heure le duo Jolivet -Thousseau et leurs instruments africains trafiqués à l’électronique. En continuant sur le site on croise des enfants qui se baladent autour d’un jeu d’échec à leur taille, installé dans la cour du chateau. Un peu plus loin se sont des cours de Zumba qui sont donnés sur une scène à hauteur du sol.

20h45, Les énergiques Sarah W Papsun

Bombe rock, les Sarah W. Papsun (photo) font danser le Chapitô. Déjà vu en concert sur d’autres événements, l’incroyable prestance du chanteur nous étonnera toujours. Réuni sous leur W emblématique, ils arrivent comme à chaque fois à s’accaparer un public qui les découvre pour la plupart. Sur un set sans pause mais tout en énergie. Le batteur, Guillaume de Tonquedec, ancien Airnadette, Jérémie Python aux synthés, Romain Roza à la basse, chaque musicien a sa propre personnalité et chacun s’éclate sur scène. Mention spéciale pour Germain Perinet, le guitariste. Il volerait presque la vedette aux autres, tellement il se kiffe sur sa guitare, nous fait des acrobaties improbables, monte sur la sono devant la scène, pour montrer quel bon guitariste il est. Interview de ces grands déchaînés à venir...

22h00, -M- et ses groupies

Matthieu Chedid prend du plaisir chaque seconde sur scène, y’a pas à discuter là-dessus. Et c’est ce qui fait que le public l’adore. On notera quelques moments dingues qui nous ont fait vibrer: quand il laisse la place à ses musiciens pour nous faire un medley rock’n’roll à base de Killing In The Name Of des RATM, ou encore Jump Around de House of Pain: “ O.K., à 4, j’veux voir tout le monde jumper comme des oufs ! ”, et c’est le moment qu’on attendait pour se défouler histoire de récupérer quelques centimètres autour de nous. Car oui, la fosse pour -M- (photo) a réuni 15 000 personnes, un peu TROP fanatiques, du genre à péter un câble pour garder leur place, à la limite d’être irrespectueux. Plus rien n’existe quand Matthieu est là… Autre moment alléchant: Matthieu qui nous fait des petits solos de guitare pendant “ Je dis aime ”, jusqu’à jouer avec ses dents. On avait jamais vu ça et c’était juste excellent.

23h30,  Fakear, l’électro à la sauce orientale

Des jeunes producteurs qu’on suit de près, Fakear (photo) fait parti de nos petits chouchous. Et sur scène il se fait plaisir autant qu’il nous en donne . Ses beats électro à tendance orientale font danser une foule réunit devant la scène Biloba. Ses sets nous surprennent à chaque fois et c’est sans doute parce qu’il improvise sur chacun de ses titres. On arrive à reconnaître quelques sonorités comme son tout dernier titre La Lune Rousse ou sur Morning In Japan. Petit bonus sur sa dernière tournée: Fakear est accompagné sur quelques dates par une chanteuse, O’Kobbo, qui associe sa voix au rythme du producteur. Son dernier EP s’appelle Sauvage et le public l’était totalement. D’ailleurs son set a duré 15 minutes de plus que prévu et personne n’est parti avant la fin, preuve d’un set réussi.

00h45: Gramatik continue à ambiancer la prairie

On enchaîne deux artistes électro, pour le plus grand plaisir de tous les fêtards présents sur place. Avec Gramatik (photo) on continue à kiffer notre soirée, d’une scène à l’autre. Le petit plus qu’on adore: l’un d’eux a ramené une trompette et se balade partout sur scène avec. La classe. Notre soirée n’est pas prête de se terminer.

2h00: Bombay Show Pig casse l’ambiance

Après notre lancée électro, les Bombay Show Pig (photo) nous font rapidement redescendre. Mal placé au niveau de la programmation, le groupe a du mal à s’imposer devant un public parti pour s’ambiancer sur des musiques électroniques. Devant nous se produit plutôt un groupe résolument rock à cheveux longs et batterie frappant fort. À une autre heure ça aurait pu passer, mais là notre journée se termine sur une petite touche négative, dommage.

Jour 3. 17h30, Variété française avec Gaétan Roussel

La boue a commencé à bien imbiber la prairie alors qu’on arrive pour le concert de Gaëtan Roussel (photo). De lui on connaît surtout le projet Louise Attaque et les titres qu’il jouera pour nous sur la scène Ginkgo: Help Myself (Nous ne faisons que passer) et la fameuse reprise de Vanessa Paradis, Il y a. Au final des reprises il en fera pas mal dont une de Bashung et une autre d’un artiste dont on oubliera le nom. Quoi qu’il en soit on passe un bon moment avec un Gaëtan Roussel en pleine forme qui fera aussi chanter son public sur Inside Outside, aidé par les deux choristes qui l’accompagnent sur scène.

18h00, G. Bonson, groupe d’after

La pluie a commencé à tomber sur le festival et s’est donc tout naturellement qu’on se tourne vers le Chapitô, la seule scène couverte, où se produit le duo G.Bonson. (photo) Groupe calé pour un afterwork, ou pour l’heure du goûter comme ce jour-là. On se dodeline gentiment, un verre de cidre à la main. Pépouze. Pour la suite, on connaît le show et le public est là. Sans surprise, le groupe John Butler Trio met l’ambiance. Après les avoir vu sur deux autres festivals cette semaine on s’en lasse toujours pas. D’autant que pour une fois John enlève le chapeau.

22h00, Détroit, les écorchés vifs

Il est 22h et John laisse place à Bertrand Cantat et ses musiciens sous le projet Détroit (photo). L’ex leader de Noir Désir prend place devant ses fans noyés sous des trombes d’eau, la plus grosse pluie de ces trois jours. On attend que ça se calme un peu avant d’intégrer la fosse. Quelques titres de Détroit, comme Le creux de ta main, mais aussi quelques bons cultes de Noir déz: Un autre jour en France, À ton étoile, Le Vent nous portera, Comme elle vient, Tostaky, Le Fleuve, Lazy… Les fans inconditionnels chantent par coeur, et une autre partie de la foule à l’air un peu statique. Ca change de l’ambiance fanatique à la Cigale il y a un mois ! Mais petit à petit, l’ambiance de la foule monte, et Bertrand sait faire le show. Grande prestance, il affiche un grand sourire, s’éclate avec ses musiciens, danse, jusqu’à se fouler la cheville à la sortie de scène. Beau moment, tout simplement.

23h30: Sapiens Sapiens et Les Voleurs de Swing

Arrivées sous le chapitô on se retrouve face à Sapiens Sapiens. Ils sont deux et ils défoncent tout. Calées sous le chapitô, on a même plus la place de se mettre devant, avec tout le public qui y danse déjà. Leurs samples propulsent tout le monde dans une torpeur sapiens-ienne. On écoutera leur EP avec plaisir d’autant qu’il est en téléchargement gratuit. Néanmoins nous on aime bien voir qui joue réellement et par manque d’espace on décide de se diriger vers la scène Biloba pour un autre groupe qu’on ne connaissait pas du tout: les Voleurs de Swing.

Dès qu’il y a un instrument à vent, voir plusieurs, sur scène nous on est fan. Et Les Voleurs de Swing n’échappent pas à la règle. Le groupe arrive même à nous surprendre. Sous leurs airs de hobbits ils font swinger la foule avec brio avec un héritage bien pesé d’Europe de l’Est. Le plus bien sympa: à la fin de leur concert le groupe fera monter sur scène tous les bénévoles présents dans le coin pour un remerciement collectif sur tout leur travail fourni depuis le début de l’évènement. Par leur entrain et ce mélange entre instruments traditionnels et typés rock, ces gars seront notre révélation tourrangaienne de cette édition.

00h45, Vitalic enflamme le dancefloor

Déjà vu au Printemps de Bourges 2013 et aux Vieilles Charrues, Vitalic a encore une fois ramené tout un arsenal de machine avec lui. De notre côté on dansera au milieu du public, à moitié en train de glisser dans la boue. C’était la première fois qu’on voyait le titre “La Mort Sur Le Dancefloor” et vu la petite bombe que c’était on a pas été déçues.

2h00: Les déjantés de Salut C’est Cool

Pour finir sur un show mémorable on ne pouvait pas rêver mieux que Salut C’est Cool. Ce groupe, c’est limite plus des comédiens que des musiciens. Ils sont là pour tout retourner, plus que pour jouer de la musique. D’ailleurs on en verra un, une fois, passer aux platines. Ils chantent - pas très bien, avouons-le -, mais la musique est secondaire quand on fait passer des branches à travers le public sous la punchline “Je suis une fleur. On les verra aussi se scotcher avec des gens du public montés sur scène. Original. On avait jamais vu ça et leur set nous laisse un très bon dernier souvenir de ce festival.

 

Côté scène

La claque
Sarah W Papsun petite bombe française prête  à exploser partout où il y a une scène.

La bête de scène
M: grand guitariste, il nous donne tout avec tant de facilité.

La découverte
Les voleurs de Swing ,grosse surprise locale aux accents folklos

Le retour gagnant
Détroit: évidemment, le grand retour tant attendu pour les fans de Bertrand Cantat, après tant d’années d’absence. Toujours aussi charismatique, ses chansons n’ont pas pris une ride.

La déception
Bombay Show Pig, du rock après de l’électro-dance... Pas terrible.

Côté festival

On a aimé :

- le village, les produits locaux, le sourire des bénévoles
- le cadre: une prairie au milieu des vignes et des pommiers

On a moins aimé :

- les jetons non-remboursables
- la queue interminable pour aller aux toilettes

Conclusion

Pour notre première visite à Tours on n'aurait pas pû rêver mieux. Une programmation où se croisent des artistes locaux avec des bêtes de scènes, de l’électro au reggae, ils y en avaient pour tous les goûts. De découvertes en valeurs sûres on gardera un bon souvenir de ce festival perdu au milieu de la campagne tourangelle. Seules nos chaussures repartiront avec une bonne dose de boue, de quoi bien les baptiser pour les prochains évènements.


 

Récit et photos : Cécile Nougier et Juliette Ortiz