On était à
Nuits Sonores, la techno rencontre la disco sous le soleil

Les Nuits Sonores, ses jours, ses nuits, ses Extra! gratuits, ses soirées spéciales, son ambiance, ses rencontres... voici ce qui nous fait revenir comme par magnétisme tous les ans en terres lyonnaises fin mai, quand le soleil fait lui aussi son grand retour. 2019 ne fait pas l'exception, c'est gonflés à bloc et avec un programme prévisionnel impossible à tenir qu'on se lance dans la gueule du loup, pour une semaine loin du travail, et encore plus loin des soucis. Cette fois-ci encore, on vous raconte nos déambulations.

Jour 1. Mardi 28 mai. 21h30, coup de foudre d'entrée de jeu

Les Nuits Sonores n'ont pas encore officiellement débuté, mais ce soir on a le droit à une mise en bouche spéciale, tout en douceur et en humour, à l'Audotorium avec le chanteur-compositeur-pianiste canadien Chilly Gonzales et ses deux invités. C'était le premier nom annoncé pour cette 17e édition du festival lyonnais, le premier concert sold-out, mais aussi l'un des plus surprenant au sein d'une programmation qui met l'accent sur les musiques électroniques. Le concert commence dans la pénombre avec la présentation de son dernier album Solo Piano III, notre voisin tient environ 3min avant de s'endormir au doux son de son piano. Nous on profite de cette note planante pour laisser derrière nous cette (très) courte semaine de travail et ses soucis avant de se lancer dans le marathon festif qui va durer jusqu'à dimanche. La deuxième partie du concert sera bien plus punchy : on y retrouve avec joie l'humour qui fait la renommée du canadien : entre reprises de Nirvana, rap sarcastique et foutage de la gueule de Drake, on est comblés. Ca y est, les dès sont lancés.

Jour 2. Mercredi 29 mai. 23h39, état des lieux d'entrée

Arrivée pour la deuxième année consécutive aux Usines Fagor-Brandt pour les fameuses Nuits. Pleins de confiance, on croit guider toute notre troupe de 'petits nouveaux' à travers les différentes halles de l'immense lieu, sauf que bien entendu, les emplacements des scènes, des foodtrucks et autres bars ont bougé depuis l'année dernière pour permettre une circulation plus fluide sur le festival, et c'est réussi. Premier arrêt, le stand cashless, où va recharger de quoi s'abreuver tout le weekend, le tout en un temps record et avec la gentillesse et bonne humeur des bénévoles. Bon point numéro 1. Première pinte de blanche en main, on se retrouve un peu par hasard devant la nouvelle scène, installée au coeur du site, et pilotée par Boiler Room. Derrière les platines on découvre le phénomène Deena Abdelwahed et ses sonorités électro-orientales happantes. Alors qu'on avait prévu de se poser à l'arrière de la salle pour papoter, on se retrouve très rapidement projetés sur la piste de danse, nos corps peinant à résister à une longue séance de déhanchement les yeux fermés. Ca plane déjà.

00h35, le peuple veut taper du pied

On suit le mouvement jusqu'à la Halle 1, déjà bien prise d'assaut par les festivaliers. On se retrouve sur le côté de la scène, derrière un immense poteau en béton. On n'y voit pas grand chose de plus que la fine silhouette de James Blake (photo) assis derrière son synthé dans un long manteau noir. L'ambiance est froide, on peine à se mettre dedans, et malgré tout le bien qu'on a entendu de l'artiste en amont de sa prestation aux Nuits Sonores, ça reste assez éloigné du genre de concert avec lequel on aurait se mettre en jambe pour un début de soirée. C'est donc accoudées au bar qu'on suivra le live de façon (trop) distraite, en prenant le temps de faire des rencontres et lever quelques coudes.
Heureusement, la soirée va pouvoir reprendre de plus belle sur la même scène avec l'arrivée du prodigieux Jon Hopkins, qui nous en met plein les mirettes et les oreilles avec un set survitaminé avec une belle dose d'effets scéniques envoûtants et stimulants. Nos pieds décollent doucement du sol, la chaleur monte à la tête, les cheveux se collent aux visages... Ca y est, les Nuits Sonores, on est à fond dedans.  

03h40, embuscade techno-industrio-trancendante 

On s'apprête à quitter les lieux, déjà bien lessivées par la soirée, quand on se fait happer par le chant industriel des sirènes émanant de la Halle 2. Sur scène, le français I Hate Models, caché par son masque, envoie du gros sale au rythme des effets de lumière qui nous aveuglent. Dans la fosse, une horde bouillante et sur-motivée se trémousse de toutes parts, les bras en l'air, les sourires figés. On se laisse prendre au jeu, et on se laisse emporter par la foule jusqu'au centre de la salle, où on finira par définitivement dépenser les dernieres onces d'énergie encore en stock dans nos corps. 

Jour 3. Jeudi 30 mai. 17h15, une après-midi sucrée

Nous débarquons (littéralement) cet après-midi à Confluence avec la navette fluviale qui relie le nord de Lyon à ce nouveau quartier en pleine ébullition. On a rendez-vous à la Sucrière, ancienne usine à sucre nichée sur les Docks, avec sa vue imprenable sur la Saône depuis la terrasse du club le Sucre, pour le Day 2. Un état des lieux s'impose : 3 scènes, deux en extérieur et une couverte sur l'esplanade bétonnée. Roi Perez s'attelle à l'échauffement techno des premiers arrivés dans la Salle 1930, tandis qu'à l'extérieur Yu Su (photo) bombarde de sa house joyeuse et délicieuse sous les sunlights lyonnais. L'endroit est parfait, il y a largement la place pour se poser au soleil mais aussi pour circuler sans encombres entre les différentes scènes. La dégaine casquette-crème solaire type "touriste allemand" est de rigueur, avec une petite touche folichonne de paillettes et autres sacs à dos en peluche à l'effigie de Pikachu, de licornes et autres créatures improbables.

18h37, il est l'heure de danser

On opte ensuite pour un passage sur le rooftop du Sucre, et un petit Ricard pour rafraichir nos corps déjà bien stimulés par le début de l'été et les dancing floors. Depuis les escaliers métalliques, on peut faire coucou à nos potes qui ont choisi cet après-midi de se dorer la pillule sur la croisière dansante de Lyon City Crunch, Le Love Boat. Le programme des Nuits Sonores et de ses off est si riche qu'on ne cessera de croiser des connaissances tout le long du weekend prolongé.
Au rez-de-chaussée, on a rendez-vous avec le (trop) modeste Ben UFO (photo) qui embarque l'ensemble de la foule dans une belle union dansante dès les premieres notes. Il y a v'la la place pour faire des démonstrations de ses plus beaux moves dans cette salle abritée du soleil, dans laquelle les artistes sont placés au beau milieu du dancefloor, et ça fait du bien. Pour ne pas perdre la motivation et de la bonne humeur, nous décidons de rejoindre The Mauskovic Dance Band dans la salle du club au dessus de nos têtes. Le groupe hollandais de cumbia afro-psyché nous fait voyager vers des contrées tropicales et en fermant les yeux, on pourrait presque croire que nos pieds s'enfoncent dans du sable chaud. 

21h05, groove before beats

Petite halte du côté de la poignée de foodtrucks installés dans la cour à l'arrière du grand bâtiment, nous optons pour un banh mi veggie et sa dose de frites qu'on dégustera sur les grandes tablées en bois posées tout près des quais, en compagnie de festivaliers bien plus jeunes que nous... Comme à peu près l'ensemble de nos compères de la journée. Le running order de la fin de la journée provoquera en nous quelques dilemmes : qui choisir entre la curatrice de la journée Peggy Gou qui mixe dans la salle à l'intérieur, ou partir à la découverte de GE-OLOGY, le pote de Tupac ? Ayant déjà croisé le chemin de la patronne de la journée, c'est sur ce dernier live qu'on posera notre dévolu, et sans regrets. 2 heures de disco, funk, hip-hop mélangés à de l'électro et de la house, on est décidément pulversiés dans le groove ultime. 
Pour rendre les choses plus pratiques et pour finir cette soirée, nous avons pris des places pour la soirée spéciale au Sucre organisée par Radio Meuh! et qui débute juste après la fin des festivités de l'après-midi. Pour faire la fête, sans perdre de temps, n'hésitez pas à nous demander conseil. 

Jour 4. Vendredi 31 mai. 16h45, nous la bâtirons d'amour, notre place au soleil

La 3e journée de la grosse fiesta débute pour nous avec un Extra!, le programme gratuit des Nuits Sonores. On se donne rendez-vous sur la place Sathonay, sur la presqu'île, dans le centre-ville de Lyon, pour la day-party "Si Sathonay qu'à Moi", organisée par l'association Le Paradox et qui mêle dj sets et gros tournoi de babyfoot. La place grouille de monde, interdite aux voitures ce jour et les fêtards sont posés de part et d'autre sur les terrasses des cafés, sur les trottoirs, les marches et pour les plus téméraires devant la scène secouant leurs bassins sur des rythmes disco-tropicaux, une petite bière achetée chez l'épicier du coin en main. La météo est toujours au beau fixe et c'est la réunion administrative de tous les groupes de potes qui font leurs plannings pour la soirée qui arrive. On dirait que le tout Lyon a posé ses congés aujourd'hui, vous avez vu quelqu'un dans les bureaux vous ?

00h45, le grand maître du son et lumières

De retour aux Usines pour la Nuit 3, en désormais grands connaisseurs des lieux, on empoigne notre pinte et plein de confiance on court vers la scène Boiler Room où joue le collectif Camion Bazar, qui nous a offert un réveil des plus colorés l'été dernier au Château Perché. Et là, c'est le déchantement total pour nous. La halle est surblindée, on arrive à peine à avancer de 2 mètres depuis l'entrée, la foule en délire nous empêchant quelconque percée ambitieuse. Il faut dire que ce soir il y a bien plus de monde que lors de la Nuit 1, et décidément on a tous coché les mêmes cases en termes de lives. Ca nous apprendra à arriver après l'heure, comme des fleurs... On anticipe donc pour ne pas se retrouver déçus pour notre concert phare du vendredi, nous avons nommé master Richie Hawtin (photo). On se retrouve quand même très loin de la scène, mais qu'importe, tant qu'il y a de la place pour jumper. Le Canadien pose une techno de puriste qui fait tantôt planer et tantôt équarquiller les yeux, et son impressionant show lumière immersif va très rapidement rendre la foule délirante. Pas besoin de stupéfiants pour ce live, la transe est dans l'air.

04h10, laissez passer le patron

Laurent Garnier, le parrain des lieux, la coqueluche des lyonnais, l'intemporel, l'irremplaçable, prend (enfin) les manettes de la Halle 1. Des ballons en forme de coeur sont suspendus dans les airs, les festivalières perchées sur les épaules de leurs potes, toutes les mains levées en l'air, tous les t-shirts à terre... pour un set de 2h avec prolongations, non refusées par un public en transe. Et on voudrait qu'après cette explosion de tête et de genoux on tienne encore deux jours ? Ça se profile mal.

Jour 5. Samedi 1e juin. 15h05, Food Bar'ket, la clinique des gueules de bois

Notre fraîcheur du matin est très relative à ce stade. Dans nos têtes, les 5 neurones restants se passent tous le même message : "MANGER". Direction donc le 7e arrondissement, pour l'Extra! Food Bar-Ket, sa vingtaine de foodtrucks, son stand de café artisanal et ses vins nature (ceux qui ne donnent pas mal aux crâne, petit miracle de la vie). L'effet est immédiat, on se rue sur tout ce qui passe sous nos yeux avant de rassembler nos victuailles sur l'une des grandes tablées posées chaleureusement sur la place Saint-Louis : nachos, guacamole, toastie, falafels, nouilles, jus de mangue, macha latte, gâteaux orientaux, on a très clairement craqué nos sous-vêtements devant l'offre culinaire salvatrice qui s'est ouverte à nous. Malheureusement, un invité surprise s'est glissé parmi nous par fourberie alors qu'on dévorait notre banquet : ce bon vieux "coup de soleil", qui nous aura dévoré la peau mais aussi le peu d'énergie que nous avions réussi à accumuler. Pour la soirée de ce soir, ça semble franchement compromis. Une coupe (de vin A La Natural), et au lit !

Jour 6. Dimanche 2 juin. 14h45, le jour du skateur

Pour s'achever une bonns fois pour toutes, après une bonne nuit de sommeil réparateur, direction les Halles du Faubourg pour un dernier Extra!. Il fait très précisément 32 degrés à l'ombre, et on nous refuse l'entrée avec notre gourde d'eau fraîche. Même lorsque nous proposons de la vider. Les gestes écoresponsables et l'instinct de survie ne sont visiblement pas développés de la même façon chez tout le monde. Tant pis donc pour l'Extra! "Gueule Dub" qui nous faisait de l'oeil, on va se rabattre sur celui organisé dans le skate park Blandan à 5 minutes à pieds de là. Et somme toute, bonne idée ! Sur place on découvre un chouette tournoi de skateboard, des falafels (encore et toujours), des bières extra fraîches fournies par la brasserie lyonnaise Ninkasi et un set electro et dub pour un dernier chill des Nuits Sonores 2019. Quand on vous dit qu'on fait les meilleurs choix... Allez, sur ce, on va hibernet pour nous régénerer ! 

Le bilan

Côté concerts

Les formules sûres
Jon Hopkins et Ben UFO, on y va les yeux bandés

Le live qui tabasse
I Hate Models, on ne peut pas résister à l'appel de la rave

Et la lumière fût
Richie Hawtin, un show éblouissant et hypnotisant

La découverte
Ge-ology, la baguette magique du groove

La crème SPF 30
Mauskovic Dance Band, qui eut cru que le soleil venait des Pays-Bas

Côté festival

On a aimé

- Les Days, une découverte pour nous et un format idéal pour notre début de trentaine.
- Les Extra!, gratuits et éparpillés sur l'ensemble de la ville : l'occasion de découvrir de nouveaux spots, de nouveaux gens, de nouveaux artistes et de noir Lyon sous un nouvel angle.
- Aux Usines, la rapidité du service au bar, au stand cashless et à l'entrée, peu importe le jour et l'heure.

On a moins aimé

- La foule aux Usines le weekend. Des queues pour les WC, des scènes bondées, pas de place pour se poser... - L'accès tout de même assez compliqué aux Usines quand on n'habite pas dans le coin, notamment pour quitter les lieux avant le 1e métro.

Infos pratiques

Prix des boissons
Bière : la pinte de blanche 1664 à 7€
Bouteille d'eau : 2€

Prix de la nourriture
Sandwich falafel : 5€
Bahn Mi : 7€
Wok : 10€

Prix du festival : 
Nuits : 39€ / Days : 27€ / Pass 3 nuits : 96€ / Pass Nights & Days : 164€

Conclusion

Les Nuits Sonores, on vous aura laissé un bataillon de neurones, un nombre d'heures incalculables de sommeil, toute l'énergie de nos jambes et la blancheur de notre peau, mais vous nous aurez une fois de plus offert des souvenirs inoubliables, des sets de haute volée et un paquet de nouveaux titres dans notre playlist de l'été. Un festival urbain, mais qui a tout d'un événement international incontournable, et un rendez-vous qu'on espère bien remettre en 2020 pour la 18e édition.

Récit : Anja Dimitrijevic 
Photos : Nathalie Kapagiannidi, Anja Dimitrijevic