La Ferme électrique, c’est un jeune festival qui réunit une centaine de bénévoles, environ 500 spectateurs et une cinquantaine d’artistes et de techniciens. Né d’une bande d’amis musiciens et techniciens du son, il incarne « l’esprit ouvert et rock’n’roll ». Nous étions à sa 6ème édition, à Tournan-en Brie, on vous raconte ce qui fait de lui un événement à part dans le paysage des festivals.
Jour 1. 15h30, arrivée au camping
Après un périple dans les transports en commun et des trains supprimés pour cause de canicule, on arrive enfin à Tournan, en banlieue parisienne. Après une petite marche, nous voilà au camping encore peu sollicité. Des bénévoles souriants nous aident à installer et à planter la tente. Le site se compose du minimum vital : deux toilettes et deux cabines de douches avec une bonbonne d’eau à remplir. On apprécie les quelques tonnelles qui nous permettent de mettre notre tente à l’ombre.
17h30, début des hostilités
Le premier concert, Sweep Me Off, vient tout juste de commencer. Intrigué par la déco vintage dès l’entrée, on décide de se balader dans la cour de cette ferme aménagée pour l’occasion. Au centre, et un peu partout, des dizaines de fauteuils, canapés et tapis nous tendent les bras. On se sent comme chez soi. On s’y cale pendant qu’un orchestre où plusieurs générations se mélangent, mené à la baguette par un chef d’orchestre et un chanteur groove habillé dans un costume imitation serpent. A la fin du set on part à la découverte de la plus petite scène : elle se trouve dans une grange où joue Joey Molinaro, un violoniste déchaîné et torse nu. La performance est intéressante mais la chaleur nous fait quitter la salle pour visiter le site du festival plus en profondeur.
19h25, la chapelle vaudou
Si on ne peut pas rater les innombrables fauteuils qui nous appellent à la farniente, des petits recoins cachés nous offrent bien des surprises. On découvre une sorte de chapelle vaudou avec différents claviers et pianos accessibles aux festivaliers. La déco est un peu glauque mais on adore : des poupées et vyniles accrochées au plafond, des abats-jours, des objets dispersés un peu partout, l’endroit est digne d’un cabinet de curiosités. Juste à côté on trouve aussi un photomaton et les photos des festivaliers finissent par s’afficher sur un grand écran dehors. Derrière ce dernier on entend déjà les fougueux Ropoporose jouer. Alors que l’on va se placer devant pour sentir vibrer nos oreilles, les moins résistants à la chaleur peuvent suivre le concert à l’entrée de la salle sur des vieilles télés des 90’s.
22h45, hypnotique Chassol
La nuit vient de tomber et c’est au tour de Chassol (photo) de jouer sur la scène extérieure du festival. Claviers au bout des doigts et accompagné par son batteur, ils composent par dessus des vidéos prises lors de leur voyage en Martinique. On y voit un carnaval, des scènes de rue et de vie, des enfants, un rappeur, une dame plus âgée qui chante... Les sons des bandes vidéo et des instruments live se répondent avec brio. On reste scotchés pendant tout son set au milieu des festivaliers qui apprécient cet interlude de musique posée.
1h15, repos au boudoir des canapés
Après avoir assisté au show de Costes & Fantazio et entendu des punchlines qui résonnent encore dans notre tête du genre « nous on peut pas vivre sans alcool et sans drogue », on est un peu perplexe. On va donc se réfugier dans un nouvel endroit encore, et cette fois couvert, le paradis des canapés, avec en prime un babyfoot. Une atmosphère idéale pour tester la bière de Brie, proposée sur le site à 4€ les 33cl.
Jour 2. 07h30, les joies du camping
Direction la douche sous une chaleur matinale déjà bien présente. L’eau est fraîche et nous donne un coup de boost pour commencer cette deuxième journée. A côté de ce point d’eau on a le plaisir de trouver un stand petit dej’ mis à disposition pour les festivaliers. On se laisse tenter pour quelques brioches et un café à 1€, avant de partir à pied direction le centre ville. A 10 minutes du camping on découvre le joli centre-ville de Tournan-en-Brie, où les festivaliers ont déjà investi les terrasses avec un café. Sur l’une d’elle se trouve une scène aménagée où on assiste vers midi au concert bluegrass de John Matthews and The Old Time Band (photo), en faisant trempette les pieds dans la fontaine.
17h25, ça recommence
La découverte des lieux n’est pas encore terminée. Pour accéder à la petite scène, une grangé raménagée, on doit passer par une grande pièce où sont exposés des sérigraphies d’artistes. Un graffeur est même présent sur place avec son atelier pour poser en live sur nos t-shirts et tote bags un logo créé à l’occasion du festival, pour un prix libre. Les festivaliers arrivent doucement, en même temps que le soleil après une après-midi moite et pluvieuse.
18h45, Battle de batterie
Après cette découverte direction la grande scène où se produit un trio en costume blanc moulant : c’est Barberos (photo), des fous furieux de la batterie. Face à face, deux batteurs semblent faire un combat de rythmiques, assistés par un troisième luron au synthé. On a chaud pour eux mais on reste pour l’énergie extraordinaire et les rythmiques démentielles.
20h30, Pause poulet et portefeuille
On décide de se diriger vers l’un des deux stands de bouffe proposé. Pour ce soir, ça sera deux pilons de poulet caramélisés au miel, ketchup et frites maison : un régal ! Pour digérer on fait un tour au fabuleux stand de merchandising. Un vrai marché de découvertes, entre les vinyles des musiciens du festival, les revues, les fanzines d’artistes… On achète pour la modique somme d’1,50€ un carnet vierge fait main, avec des pages multicolores issues de la récupération. Il y a aussi des bacs avec CDs et vyniles distro, comme ceux de Molar, Motor Books & Psycho Zines.
22h30, entre coup de coeur et dégoût
Fini de flâner, on reprend une bière pour assister au show de Peter Kernel. On nous l’avait fortement conseillé, et on n’est pas déçu. Sur scène un trio composé d’une bassiste qui nous rappelle Melissa Auf Der Maur dans Hole, du guitariste chanteur, et d’un batteur qui se la joue Johnny Greenwood avec ses cheveux. Difficile de décrire le style, mais l’atmosphère qu’ils proposent nous fait penser à du Sonic Youth. Un très bon moment rock’n’roll. Quelques heures plus tard, on assiste au show de Mother Fakir (photo). C’est plus une performance “artistique” que musicale. Le monsieur s’enfile des fils dans les joues, coud sa bouche, se passe des hameçons sur les tempes, et produit des sons assez durs à supporter en faisant vibrer les cordes. Certains partent de dégoût, d’autres curieux restent, nous on ne comprend pas vraiment l’intérêt.
2h15, ça sent la fin
C’est The Telescopes qui vont clôturer le festival. Le son ultra-méga-noise nous oblige à mettre les bouchons. On se pose sur les canapés, on vibre comme sur les sièges massants de chez Nature & Découverte et on se croirait dans le Space Mountain. On n’ose pas en sortir de peur de ne pas pouvoir tenir debout. Enfin le son s’arrête, et il faudrait déjà repartir. Ce n’est pas sans compter une dernière surprise : la mini-boîte de nuit (photo). Bienvenue au Rubis, le plus petit espace possible pour danser, avec une capacité de 15 personnes, et même un vigile à l’entrée. On est les survivants de cette dernière nuit, et on s’amuse follement avec la boule à facette et les maracas.
Côté scène
Le mec flippant
Mother Fakir et sa performance façon atelier de couture sur son visage
La valeur sûre
Chassol envoûtant, palpitant
Les fous furieux
Barberos et leur performance batterie/synthé tout en énergie
Le coup de coeur
Peter Kernel, le bon trio rock’n’roll
Les tueurs de tympans
The Telescopes. Plus noisy, tu meurs.
Côté festival
On a aimé :
- L’accueil des bénévoles, leur coup de main pour monter la tente
- La déco, complètement dingue
- Les installations sorties d’un autre monde, le stand de sérigraphie, les fanzines indépendants
- La qualité sonore des concerts, un son pas trop fort
- Les frites faites maison, les prix doux
On a moins aimé :
- Le demi à 3€, pas de pinte.
- Le manque de choix en alcool
- Les toilettes rapidement très sales du camping, on vous passe les détails
- Le brumisateur géant qui ne fonctionnait pas (sauf celui pour les artistes et bénévoles)
Conclusion
Aux premières éditions, le festival n’accueillait qu’un public de musiciens avertis et mélomanes. C’est au fil des éditions que le festival a fini par toucher un public plus large, avec un goût particulier pour la scène garage, noise et rock’n’roll. La philosophie de l’événement, en toute modestie, est de proposer une scène underground en accord avec la capacité d’accueil du lieu et de ses moyens. La décoration, issue de la récupération dans un squat, crée aussi l’univers et contribue à l’identité à part du festival : un festival pour les passionnés de musique par des passionnés de musique.
Récit : Juliette Ortiz, Cécile Nougier
Crédit photos: Juliette Ortiz, Dominique Bourdin (Chassol, Barberos, Mother Fakir), François Nemeta