On était à
Jardin du Michel, une édition 2016 bien arrosée

Pour la douzième édition du Jardin Du Michel, on craignait quelques complications suite aux intempéries qui ont précédé l’ouverture… Equipement de choc sur le dos, direction Bulligny. Même pas peur ! Avec une équipe du festival qui a su réagir face à la situation, nous avons pu fêter dignement le premier week-end de juin.

Jour 1. 16h11, la gadoue, la gadoue, la gadoue hou la gadoue

De la route nous accédons très facilement au champ qui fait office de parking pour toute la durée de l’événement. Jusque là aucun problème. Pour se garer c’est une autre histoire : la pluie a transformé le terrain en énorme pataugeoire boueuse et nombreux sont les festivaliers à s’embourber sous le regard amusé de ceux qui ont déjà réussi à trouver une place. Heureusement, certains ont un élan de solidarité et poussent les voitures bloquées dans la boue. La situation est plus amusante qu’autre chose, on est déjà dans l’ambiance, tout va bien ! Sur le chemin du campement, on remarque qu’il y a des tentes et des véhicules stationnés un peu partout, parfois complètement à l’arrache. Il faut savoir que 48 heures avant l’ouverture du festival les organisateurs n’étaient pas sûr de maintenir le camping officiel à cause des risques liés aux pluies de la semaine passée. Bref, on ne perd pas trop de temps et après s’être installé et équipé de nos plus belles bottes nous arrivons sur le site, boueux lui aussi.

17h47, faites nous voir la p’tite sœur

Au vu de l’heure, l’arrivée des gens se fait timidement, on en profite pour aller à une des banques du festival pour se procurer une carte mastermich, principal moyen de paiement du site sur lequel on crédite la somme que l’on souhaite. Après un petit spectacle musical en plein air, nous rejoignons Victoria+Jean sur la grande scène La pop un peu barrée que nous propose le groupe n’est pas si mal mais ce n’est franchement pas notre came, on se lasse assez vite. On se dirige alors vers la nouvelle scène du Jardin Du Michel qui se trouve sous un chapiteau et que l’on a repéré quelques minutes plus tôt pour se prendre une bière au bar. De la pils ou de la 8-6 au choix, rien de bien folichon mais ça permettra quand même de nous faire patienter pour La P’tite Sœur. Les lorrains n’ont pas eu beaucoup à faire pour conquérir le public avec ses chansons festives dans la grande lignée des Amis de ta femme, un autre groupe local. C’est convivial, drôle et à la fin tout le public fait une chenille géante, il y a pas à dire c’est une belle entame pour la suite du programme.

20h04, JDM pluvieux, JDM heureux

Nous voici devant Dubioza Kolektiv. Une à une les gouttes d’eau nous dégoulinent dans le dos et nous pataugeons dans la gadoue. La pluie est bien là, le temps est pourri mais la foule et la prestation toute en couleur des bosniaques tranche radicalement avec le ciel gris. La bonne humeur est parsemée un peu partout et les gens sautent dans la boue sous le rythme des musiques balkaniques. Quel beau spectacle. Et ce n’est rien comparé au combat de boue auquel on assiste à la fin du concert. Regarder des festivaliers en slip lutter dans la boue puis un autre les rejoindre complètement nu, ça vaut toujours le détour ! Il est temps de nous remettre de nos émotions nous allons donc vers les stands de nourriture. Il y a plus de choix pour les bières mais très peu de spécialités lorraines, on aurait bien mangé une quiche, un pâté ou une tarte à la mirabelle. Dommage ! On se tournera sur des tartes flambées et des frites « classiques » mais bonnes. On se pose tranquillement en écoutant au loin les sons reggae de la Flying To Jamaïca Party qui se déroule dans la Cabane du Michel, la scène alternative du festival.

22h23, Manu Tchao !

C’est l’heure de la grosse tête d’affiche de ce vendredi soir : Manu Chao. Curieux de voir ce que cela peut donner on se faufile entre toutes ces personnes, pour beaucoup venues spécialement pour lui. Mais avant on a droit à la présence d’activistes sur scène, invités à prononcer un discours contre le projet d’enfouissement des déchets nucléaires sur le site de Bure, situé non loin de Bulligny. On retrouve le côté altermondialiste que tout le monde attend à un concert de Manu Chao. L’attention est louable. C’est avec près de trente minutes de retard que le concert aura lieu... et ce pendant 2h30 ! On ne l’arrêtera plus. Les fans sont surement aux anges, pas nous. Bien que l’on ne boude pas notre plaisir à l’écoute de Clandestino ou Je ne t’aime plus c’est bien trop long et répétitif. Au bout d’une heure on part avec l’impression d’avoir entendu la même chanson du début à la fin. On rejoint une nouvelle fois le chapiteau pour la Hip-Hop Don’t Stop Party. L’odeur d’origan, les mecs en tactel et ceux qui portent une casquette nous mettent définitivement dans l’ambiance pour se trémousser sur le set de hip-hop old-school de DJ Natik. On s’éclate bien mais nous sommes fatigués. Un détour au bar et nous repartons vers le camping en faisant l’impasse sur Rone. Il est 2h30 du matin.

Jour 2. 16h44, on dirait que ça te gêne de marcher dans la boue

Après l’apéro, à base de fuseau lorrain, le saucisson local, la glande et la pluie passagère nous décidons de faire un tour du le camping. Sur le chemin, on aperçoit un stand de bières locales – alors qu’il n’y en a aucune en vente sur le site - puis l’on croise un organisateur muni d’un mégaphone qui nous prévient qu’en raison des orages le département est en vigilance orange et l’accès au site décalé d’une heure. Par rapport aux éditions précédentes, on sent qu’il y a moins de monde présent sur le camping. La pluie et la boue sont évidemment les principaux responsables et l’ambiance en pâtit un peu même si cela permet d’organiser des concours de ventriglisse. On jette un œil sur les sanitaires et les toilettes - où l’ont ressort plus sale qu’en y entrant- et aussi sur les drapeaux du camping : la Belgique, la Franche-Comté et les Vosges sont représentés mais qu'en est-il de la Bretagne ? On avait déjà constaté l’absence de nos camarades bretons au Rolling Saône. Après s’être arrêté à un camion pizza pour acheter une magarita bien trop petite et bien trop chère nous nous dirigeons vers le festival pour le début des hostilités.

19h10, banjo, pogo et bug informatique

Les concerts débutent avec « seulement » une demi-heure de décalage, les organisateurs ont réussi à ne pas trop chambouler le programme malgré la menace d’orage permanente. La cabane du Michel est tout de même fermée car située sur un terrain sensible. A peine arrivés nous allons au bar pour nous abreuver avant qu’il n'y ait trop de monde. Et là c’est le drame : un bug informatique a touché plusieurs des cartes mastermich depuis hier soir et il faut les débloquer. Nous n’étions déjà pas fan de ce concept, et cela conforte notre idée. On attendra près de 20 minutes avant qu’une personne vienne nous aider à acquérir le Saint-Graal. L’occasion de discuter avec les bénévoles parfois un peu largués mais toujours souriants. Ce petit contretemps n’entache en rien notre joie de découvrir le groupe Steve’N’Seagulls (photo) qui se produit sur la grande scène. On n’est pas déçu ! Le look kitsch et redneck des finlandais – mention spéciale au pantalon tortue ninja - nous séduit d’emblée. Les reprises des grands classiques du rock à la sauce banjo, mandoline, contrebasse et accordéon sont vraiment rafraichissantes. Le public est ravi, on en redemande. Rur la deuxième scènee, c'est le rock couillu de Dirty Deep qui s’occupe de foutre le dawa sous le chapiteau. Pogos et slams sont évidemment de la partie et nous on commence à avoir un gros coup de cœur pour cette nouvelle scène.

21h02, nuits de boue

C’est déjà l’heure d’Hubert-Félix Thiéfaine. Il faut avouer qu’on n’est pas très féru du chanteur parolier à la base. On était ressorti de sa prestation au Cabaret Vert un brin déprimé. Mais là il s’est passé quelque chose de magique. On ne sait pas si c’est le soleil couchant, les gens qui font les cons dans la boue ou les paroles poétiques et mélancoliques qui nous touchent particulièrement. Le contexte fait parfois beaucoup. Pour conclure le public reprend en choeur "La fille du coupeur de joints", un des plus beaux moments du festival, assurément. Le concert fini, toujours pas de pluie, la météo semble être clémente avec le JDM. Tant mieux. Un hot dog fermier et un cornet de frites plus tard nous voici devant Patrice. Comme à son habitude l’artiste allemand se donne à fond et sait y faire avec le public. On apprécie pas mal la good vibe qu’il nous envoie mais après une bonne demi-heure on entend le chapiteau au loin s’animer et on s’en va voir ce qui se trame.

23h37, la boom de fin de soirée

Le groupe Old School Is Cool étant annulé à cause d’une perturbation du trafic de la SNCF c’est Gérard Baste (photo) et sa clique, programmés initialement à la Cabane du Michel à un horaire plus tardif, qui se produisent sous le chapiteau. Une décision qui nous enchante car le rappeur accompagné de son comparse Xanax, de son DJ Dr Vince et de Waxx à la guitare, balance du lourd. Pas de doute Gégé envoie le pâté ! Le Prince de la vigne comme il se définit lui-même propose du rap dans la forme et du punk dans le fond, il enchaîne ses morceaux solos et les classiques des Svinkels pour notre plus grand plaisir. Ca réveille le punk en nous : on saute, on pogotte et on jubile car Gérard se met en slip sur le dernier morceau.
C’est déjà la fin de la soirée, clôturée par
Pfel & Greem la moitié du groupe C2C qui balance un set agréable, assez hétéroclite, mais sans jamais parvenir à nous charmer totalement. De retour sur notre campement on se met autour du feu, entretenu par un ami, bûcheron dans l’âme. On discute de tout et de rien, on boit, et on chante jusqu’à tomber de fatigue.

Jour 3. 18h22, Ne pas manquer le dernier train

Dernier jour, on se lève tôt, on prépare nos affaires et on va sur le site dès l’ouverture pour prendre le temps de flâner sur le festival et profiter des quelques rayons de soleil du week-end. Tout le long de la route, on remarque des poubelles et des déchets étalés un peu partout. On a connu plus écolo. Entre les bars à vins, les stands de nourriture africaine, de pâtes fraiches, de crêpes et le bar à tattoo, le JDM est plutôt bien fourni malgré le manque de spécialités régionales. Après avoir écouté le show énergique de D-Track, un groupe de rap de Metz, proclamant que "le 5-7 c’est la Juve, le 5-7 c’est la Squadra" nous sommes prêts pour Last Train. Le groupe originaire de Mulhouse, qu'on avait déjà vu au Rolling Saône un mois auparavant, est fidèle à lui-même et livre un bon son rock brut pour les truands. Le guitariste balance des gros riffs, le chanteur avec la clope au bec se la pète légèrement, balance la basse dans le public à la fin du concert… ça c’est du rock ! Même si une personne du service technique viendra récupérer l’instrument juste après. Faut pas déconner hein. 

19h15, le calme avant la tempête

Il est l'heure de rejoindre Biga Ranx. Loin du cliché habituel du rasta-man dreadeux fumant de la ganja, on a ici un artiste au look BCBG affublé d’un joli petit costard qui propose un reggae avec quelques sonorités électros bien senties. Cela reste du reggae mais nous sommes agréablement surpris. Nous partirons peu de temps avant la fin affamés, assoiffés et souhaitant dépenser nos derniers euros restant sur la mastermich. Notre faim nous amène jusqu’à l’Africa Miam repéré quelques heures plus tôt. Le poulet mafé et  les bananes plantain à la sauce tomate font le bonheur de nos papilles. En revanche pour étancher notre soif, on se contentera d’un Ice-Tea. Boire ou conduire il faut choisir comme diraient nos amis du stand de prévention. Après avoir repris quelques forces, nous sommes au taquet pour finir le festival en beauté.

21h31, une ambiance de feu

La tête d’affiche hip-hop du festival et de ce dimanche c’est bien Nekfeu. On était curieux de voir ce que pouvait donner le jeune rappeur en live. Les premières notes de Mardin Eden résonnent et le voilà qu’il jaillit des flammes pour entonner son refrain. La foule est en délire, même si une grande partie est composée de jeunes filles, il y a aussi de vrais amateurs de rap. Pour sa tournée Nekfeu semble avoir fait les choses en grand, le show est très travaillé. La visu et les jeux de lumières sont incroyables, on a pas souvenir d’avoir vu un tel déploiement de moyens pour un concert de rap. S’ajoutent à ça des danseurs et différents membres de 1995 et du S-Crew qui viennent prêter main forte à l’artiste qui enchaîne ses tubes. Un show rôdé, semblable à celui du Chorus, qui se termine par un lâcher de confettis et de serpentins et par un bain de foule sur un bateau gonflable. On peut ne pas apprécier le style mais il faut reconnaître qu’on a surement assisté à un des plus beaux concerts de cette édition en termes de mise en scène.

23h20, il faut cultiver son jardin

Puisqu’il n’y a toujours pas eu de pluie depuis hier on décide de se poser sur un coin d’herbe en attendant le dernier concert du festival. Au bout de trois jours de festoche on ressemble à des légumes pleins de terre dans un potager… en même temps on est au Jardin du Michel, quoi de plus normal ? Les DJ de Gramatik font leur entrée en scène et nous gratifient d’un bon set électro avec une visu aux petits oignons. On remarquera qu’un des DJ sort sa guitare pour nous balancer quelques riffs tandis que l’autre continue à mixer. On adhère complètement. Mais la fatigue nous gagne, l’envie (et le besoin) d’une douche se fait pressante et nous avons encore de la route avant de retourner dans nos doux foyers. On quitte le JDM une demi-heure avant la fin en s’énervant une nouvelle fois sur tous les déchets qui jalonnent notre parcours. Mais en se remémorant déjà le week-end de folie que l’on vient de vivre.

Le Bilan

Côté concert

La performance live
Nekfeu avec un vrai show à l’américaine

La déception
Manu Chao, un concert trop répétitif et trop long

La bonne surprise
Steve’N’Seagulls, leur dégaine et leur reprise rock ont fait mouche

La meilleure boom
Gérard Baste, ça change de celle de Sophie Marceau

Les beaux moments
Dubioza Kolektiv & Thiéfaine qui prouvent que musique et boue font bon ménage

Côté festival

On a aimé :
- L’ambiance bonne enfant sur l’ensemble du festival malgré la gadoue
- La prog' de bonne qualité dans l’ensemble
- L’organisation du JDM qui a réussi à s’adapter pour maintenir l’événement malgré les menaces d’intempéries
- Le site en lui-même assez aéré pour ne pas se marcher dessus
- La nouvelle scène sous le chapiteau, une ambiance incroyable s’en dégage

On a moins aimé :
- Le choix limité de bières et de spécialités lorraines
- Le bug informatique qui nous a empêché d’utiliser notre carte mastermich pendant quelques minutes
- La mastermich en elle-même, on préfère largement les jetons ça évite les erreurs
- La gestion des déchets sur le site et les environs

Conclusion

Malgré la boue et les intempéries précédant cette 12ème édition, ce JDM 2016 est une franche réussite. On a frôlé la catastrophe avec les vigilances oranges annoncées mais finalement le ciel a était relativement clément ce week-end. Chapeau à l’organisation du festival qui a réussi à maintenir l’événement et ne pas créer la cohue sur le site du festival et sur le camping. Résultat, le JDM a pu accueillir 20 000 festivaliers de venir danser et s’amuser comme il se doit sur une programmation variée et de qualité. Au cours des années il a su évoluer en proposant des nouveautés tout en gardant son identité.

Un récit de Josselin Thomas. 
Photos : Josselin Thomas et Fanny Frémy