On était à
Hellfest, un paradis en enfer

Tout le monde devrait poser sa tente un jour du côté du Hellfest. Même sans forcément apprécier la musique métal, l'état d'esprit et les décors uniques des lieux sont inclassables dans l'univers des festivals français. On vous emmène trois jours du côté de Clisson entre forêt magique, rôtisserie de l'enfer et groupes de légendes. 

Jour 1. 21h20, Mission, trouver une place

On arrive aux abords de Clisson. Personne sur la route, tout le monde est déjà arrivé. Iron Maiden raisonne au loin, pour notre plus grande peine. Une déception très vite enrayée par les deux buts de l'Equipe de France de foot et la place trouvée pour notre voiture près des vignes de la région nantaise. Le deuxième round est ensuite de trouver une place au camping. On s'installe et déjà une première bière offerte. Ca sent bon.

23h19, Passage des portes de l'enfer

On passe enfin les portes du Hellfest (photo). On entre dans un autre monde, le décor est somptueux et très recherché. Presque chaque élément du festival a sa structure tout droit venue de l'enfer : tête de mort, corbeaux, flammes, c'est de loin le numéro 1 en France là dessus. Première pinte, à un prix correct de 5 euros, mais première déception : les verres ne sont pas consignés, obligation de les acheter.

23h19, Slayer balance du bois

Direction la Main Stage. La deuxième. Oui car il y a deux main stage côte à côte : plus simples pour que les têtes d'affiches s'enchaînent. Leader à la barbe de père Noel et chevelure de Gimli, c'est le groupe californien Slayer (photo) qui entre en scène. Du métal brut de décoffrage qui fait plaisir aux puristes. Une des références du trash métal avec Metallica. Fin de concert et très vite les odeurs de viandes grillées nous emmènent vers le coin restauration, où l'on se permet de prendre un hamburger du sud-ouest avec bonus chorizo.

00h06, Au choix : Valley, Temple et WarZone

Après la petite soeur, on va découvrir les autres scènes. D'abord la Valley avec Electric Wizard (photo). Intro longue, recherchée, ambiance plus calme. On apprécie plus le son. Du côté de la Temple, le son est beaucoup plus black avec Enslaved. Comme les main stage, la scène Altar est juste à côté et se prépare pour la suite. On ne reste pas et allons totalement de l'autre côté, direction la Warzone. Plutôt calme avec Kvelertak. S'il y avait une Warzone, cela serait plutôt du côté des toilettes dans le festival. On se termine sur la main stage avec les mexicains de Death Angel. Entre temps, on va poser quelques affaires dans des casiers : 27 euros les 3 jours ! On était habitué à un forfait compris dans le prix du billet.

02h32, DJ et cracheuse de feu au Metal Corner

Le festival se vide mais l'ambiance reste. Au Metal Corner, juste avant l'entrée du camping, les bars restent ouverts jusqu'à 4h, et un DJ balance du son plus commercial. Enfin ça reste du métal, pas de Gilbert Montagné en vu. Arrivent sur scène trois femmes très peu vêtues avec des batons en flamme, les spectateurs bien éméchés sont ravis de voir ce spectacle de fin de soirée. Vers 3h30 on se dirige vers notre tente pour notre première nuit.

Jour 2. 8h12, Réveil dans les flammes du camping

Difficile de dormir beaucoup en camping de festival. On entend déjà des "apéros" raisonner, et le soleil nous fait mijoter dans notre tente. On se bouge avec encore des cernes sous les yeux. Pause pipi - facile pour les hommes, plus compliquée pour les femmes - et direction la douche. Située à l'entrée du camping, la queue est énorme. On en restera aux lingettes.

09h43, Balade paisible dans les rues de Clisson

"Une ville envahie par les satanistes". Impossible de dire ça après y avoir fait un tour. La ville est paisible. Certes les trottoirs sont remplis de voiture, de tables de camping et de chaises. On croise une grand-mère qui apporte de l'eau à un groupe d'espagnols campant devant chez elle. Beaucoup de volets sont quand même fermés, mais des stands bière ou crêpes se sont installés un peu partout. Après une petite balade bucolique de 20 min, on débarque devant l'endroit le plus prisé de la ville : l'hypermarché. A l'entrée, une bouteille gonflable géante de Jaggermaster est installée. Les allées du magasin sont pleines, les promos sont de sorties. Pack de bières et sac isotherme en main, l'équipement est au complet.

11h04, nombre de festivaliers impressionant

Les premiers concerts résonnent au loin. Le métalleux est un lève-tôt. Le camping est animé, et s'étend sur 10 hectares. La billetterie est déjà complète depuis 5 mois, et l'on attendait plus de 45 000 festivaliers par jour, soit plus que les années précédentes. Il y a quatre zones, totalement pleines, et beaucoup de tentes sont restées le long des routes. Le festival est très propre contrairement à d'autres. On se pose devant notre tente pour notre déjeuner : "bon appétit!" nous lance la majorité des campeurs de passage. L'ambiance est conviviale, on partage les premières bières de la journée. Echauffement enclenché.

12h23, Sieste et digestion bruyante

On croirait qu'il est déjà 17 ou 18h. Mais non, on est à la mi-journée, le festival est plein, et les concerts battent leur plein. On se pose dans la forêt au coeur du lieu pour dormir un peu, à l'ombre. Les gens mangent, font la sieste, discutent, se rencontrent. Des odeurs de résine enfument l'endroit enchanté surtout par la poussière du sol. Au loin, on entend du Led Zep'. Jimmy Page serait de la partie ? Sur la grande scène, quatre filles reprennent les tubes du groupe mythique. Avec du métal dans tous les sens, notre sieste est très vite écourtée. Il est seulement 13h, et il faudra tenir jusqu'au bout.

14h23, les papys font de la résistance

Les sourires se font légion sur les visages : c'est l'un des moments de l'année. Surtout chez nos vieux adorés. Ils ont vu Deep Purple ou Black Sabbath à leur début, les veinards. Et ils en redemandent. Du haut de nos 23 balais, on se sent jeunes. Mais pas de clash des générations, on est tous là pour vivre un événement hors du commun.

16h45, la scène qui fait parler la poussière

On arrive sur la fin de We Came as Romans, un groupe qui a des touches de Linkin Park ou Thirty Seconds to Mars. Le soleil est ultra puissant, la chaleur étouffante. Pour ne pas finir comme des homards, on va se réfugier à l'ombre. On revient pour les français de Dagoba. Les mecs sont chauds, et font monter la sauce avec leur hard métal. Ca pogote dur, la poussière s'élève telle une tornade au dessus de la foule. La suite est plus nostalgique avec Status Quo, groupe très attendu par son public. Fini le métal, place au classique rock comme In the Army Now et son leader très british. 

19H23, Carnivores à tous les étalages

A table ! On opte pour l'option Ribs : 12 euros l'assiette bien fournie. La nourriture est assez chère sur place, de 8€ le hamburger à 3€ la petite barquette de frites. Compliqué de se faire un repas à petit prix. Mais la diversité est au rendez-vous : viande d'Argentine, poulet fermier, spécialité hongroise, tartine gourmande, pizza, crêpe, plats mexicains ou thailandais. La viande est à l'honneur avec notamment "la rôtisserie de Satan" où des boeufs tournoient devant des murs de braises. Mieux vaut ne pas être végétarien ici, même si quelques wraps ou bagels sans viande apparaissent par-ci par-là. 

20h23, Soulfy do brazil

On se pose près des main stage avec une bière. Hatebreed termine son concert, avec des bons riffs très rythmés. Les brésiliens de Soulfly (photo) prennent la suite. Le leader aux dreads géantes, Max Cavalera, arrangue la foule et fout l'ambiance comme jamais. On est loin de la lambada. Le métal est très recherché et fait plaisir aux puristes. Du trash métal qui s'écoute. 

21h46, Deep Purple entre formol et grand rock'n roll

Première légende du soir, Deep Purple (photo). Les vieux arrivent sur scène. Le début est un peu mou, le public se chauffe un peu. C'est surtout les musiciens qui vont faire monter la mayonnaise. Ian Gillan est éteint, n'arrive pas à pousser la voix, et sort dès qu'il n'a pas à chanter. Ils laissent alors l'opportunité aux autres de se surpasser. On en prend plein la tête, notamment sur Hash. Roger Glover le bassiste au célèbre bandana a le groove impeccable, et Don Airey au clavier nous fait des merveilles. 

23H03, Aerosmith au meilleur de sa forme

Les légendes se suivent et ne se ressemblent pas. Place à Aerosmith (photo). Tiré jusqu'au cou, coké jusqu'aux genoux, Steven Tyler est chaud comme de la braise incandescente. Il court et saute dans tous les sens, il aurait fallu un compteur à kilomètre sur scène. Le guitariste Joe Perry enchaîne les solos, et aime se coller au mur d'amplis. Le concert est une suite innarrêtable de tubes, des très rock au plus mélancoliques. Tout le monde pousse la voix sur I don't wanna miss a thing. Trois mecs costauds et barbus se tiennent bras dessus dessous et chantent en coeur. Des gros nounours on vous dit. Au rappel, Steven se met au piano pour Sing for the moment. Les gars auraient pu continuer pendant une semaine. 

01H21, Fin de vie et apéro nocturne

Les jambes sont lourdes. Les ampoules font mal, sans parler des coups de soleil. Le dernier groupe du soir arrive sur scène : Avenged Sevenfold. Les flammes explosent sur scène, nous, on décide d'aller se poser à notre tente. Ca trinque dans tous les sens, la soirée est loin d'être terminée. 

Jour 3. 09h34, Réveil avec des croissants

La nuit fut courte, et le réveil ensoleillé. Des jeunes bénévoles tombent devant notre tente et nous proposent des viennoiseries. Après avoir mis nos déchets dans les sacs de tri donnés par l'organisation, on empacte nos affaires pour tout ranger dans la voiture et profiter à fond du dernier jour au Hellfest. De loin les premiers concerts commencent déjà, il n'est que 10h30. 

12h22, au temple de la consommation

Après manger dans le centre de Clisson, on s'arrête enfin dand le coin merchandising. L'espace est géant. Deux grandes tentes accueillent le "Xtrm Market", où l'on peut trouver la totale des produits dérivés de l'amateur de métal. T-shirt à l'effigie des groupes, pin's, bandeaux, des créations originales autour de l'univers gothique et même de quoi se déguiser en chevalier ou en elfe. Mais la nouveauté se trouve dehors, avec une allée style Warfest investie par des marques ultra connues. Le décor est superbe, entre un King Kong sur un immeuble pour Decibel Rebel ou une chaussure géante pour Dr Martens. Impossible de ne pas consommer dans ce temple de la publicité. 

15h24, Tagada Jones met la France à l'honneur

Il est tellement difficile de trouver un point d'ombre au calme que l'on choisit le mouvement. D'abord sur la main stage 2 avec Power Wolf, du métal symphonique. L'artiste échange généreusement avec le public, la scène est déjà blindée. La suite se fait du côté de la Warzone avec les français de Tagada Jones (photo). Espace comble jalonné de joyeux pogos. L'ambiance vaut le détour pour ce groupe punk métal. Une necessité s'impose : il nous faut de l'eau. Quelques points sont répartis dans l'enceinte du festival, avec beaucoup de monde. 

18h12, Altar vs. Temple

Il était temps que l'on aille se faire des concerts sous l'énorme chapiteau qui contient deux grandes scènes : Temple à droite et Altar à gauche. Il fait déjà plus frais à l'intérieur. On arrive pour le début d'Equilibrium, pour un métal aux accents celtiques et chevaleresques. Le public est à fond, encore plus survolté qu'à l'extérieur. Dès les dernières notes, The Black Dahlia Murder prennent la suite de l'autre côté. Pas de pause au Hellfest. C'est tout de suite plus violent, du hard métal que beaucoup sont venus chercher ici. 

19h35, A la mode de chez nous 

Vous l'aurez compris, on ne vient pas en blanc au Hellfest. Les plus classiques auront des t-shirts de leurs groupes favoris, avec la date des tournée dans le dos. Iron Maiden et Black Sabbath remportent la palme cette année. Mais l'univers métal regorge de vêtements en tout genre, allant jusqu'au gothique et fétichisme. On croise également du plus classique, chevaliers ou personnages de BD. On l'avoue, on a aussi vu des hommes tout nu. La kekette à l'air quoi, tranquille dans le festival. 

20h43, En promenade avec Soundgarden

Avant d'attaquer les gros morceaux du soir, on goûte à l'assiette du stand chinois. Notre intestin grêle n'ira décidément pas au paradis. On arrive sur la fin de Behemoth, visage peint en blanc, et du son qui réveille tes voisins. La suite c'est sur la scène principale avec Soundgarden, notamment connu pour Black Hole Sun. Un rock très doux par rapport à la prog' du festival, leurs chansons rock seraient presque des ballades. Pour Emperor, on ne bouge pas. Et on s'asseoit. On les entend de loin, sans un geste, pour être aux premières loges des patrons du jour. 

23h06, Black Sabbath en maître des lieux

Ca sent le fauve. Ca se tasse prêt de la main stage 1, et l'on entend beaucoup d'anglais venir aux premiers rangs. Lorsqu'Emperor termine son set dans un fumée et des flammes que l'on voit de loin, la tension est à son comble. Quand Black Sabbath (photo) arrive sur scène, c'est l'explosion dans la foule. Les gars ont la classe, et dégagent une intensité rock innimitable. Ozzy Osbourne n'a peut-être pas la même fougue que dans les 70's, mais il tient le coup, et se tient figé comme un roc à scruter 50 000 personnes. Le son est pur, et les jeunes comme les vieux kiffent ce moment magique. Paranoïd clôt l'histoire de ce Hellfest 2014 pour nous. Il est temps de rentrer avec les cornes du diable dans le coeur. 

Le Bilan

Côté scène

Le moment d'histoire.
Black Sabbath, le rock heavy métal à l'état brut pour un concert unique.

La bête de scène.
Soulfly, énergie électrique du métal brésilien.  

La déception.
Ian Gillan, Chanteur de Depp Purple. Plus de carburant dans le réservoir contrairement à ses musiciens.

Le showman.
Steven Tyler, chanteur d'Aerosmith. Energie halluciante pour un live très haut débit.

Côté festival

On a aimé :

- Ambiance incomparable, inter-générationnelle, avec des sourires sur tous les visages croisés.
- Une programmation impecable et de haut niveau, de classique rock à black métal avec 80 concerts par jour.
- Le décor superbe des lieux. On est dans un autre monde. 
- Bière au prix abordable et du choix dans les boissons.
- La propreté du site et la responsabilité des festivaliers, aussi bien au camping que dans Clisson.

On a moins aimé :

- Beaucoup de choses "en plus" payantes, alors que le prix de la place était déjà très élevé : pas de verre consigné, consignes pour affaires payantes.
- Plus de billet vendu et même espace que les années passées. Un festival trop plein.
- Pas de quoi manger un bon repas sans se ruiner, même si la diversité des plats était au rendez-vous.
- Pas assez de douches ni de toilettes sèches pour les campeurs.
- Les concerts commencent un peu trop tôt. Dur d'être opérationnel à 10h30.

Conclusion

Vous aimez les festivals ? Zéro a priori à avoir, il faut venir une fois dans sa vie du côté de Clisson. Pour cette 9ème édition du Hellfest, l'ambiance était hors du commun entre jeunes métalleux prêt à pogoter et vieux loubards du rock à la nostalgie rayonnante. Des légendes étaient de passage sur scène, et tous les types de rock-métal se partagaient le micro pour trois jours dans la poussière et la chaleur de Loire-Atlantique. Vous êtes prevenus : il vous reste un an pour vous laisser pousser la crinière et venir passer trois jours en compagnie du diable de la musique.