On était à
Field Day : East London en fête

En fuyant la canicule parisienne le temps d’un weekend, nous sommes partis voir ce que nos voisins d’Outre-Manche avaient dans le slip en matière de festival, et on était assez surpris de découvrir une ambiance très différente de celle de par chez nous. Pour bien s’échauffer pour l’été, on a passé quelques jours au pays où le festival est une tradition familiale, du côté du fameux Field Day à Londres.

Jour 1. 16h03, Walking on sunshine

C’est dans un double-decker à l’impériale rouge que commence notre aventure sur le sol britannique en ce samedi après-midi : le before, il est là. Ca boit, ça piaille, ça fait des rencontres et ça laisse ses déchets trainer partout. Visiblement aujourd’hui, tout est permis. Le festival se déroule tous les ans depuis 2007 au coeur de Victoria Park, gigantesque parc public aux immenses pelouses paisibles en apparence. Pas de carte ni de programme distribués à l’entrée, il va falloir se fier aux instructions des panneaux qui trônent au centre du site ou imprimer sa propre documentation. Pas forcément évident au départ quand on prend conscience de l’immensité des lieux. Sur la pelouse de la grande scène, Eat Your Own Ears, Toumani Diabaté et son frère Sidiki ensorcellent les plus étourdis par le soleil avec des koras, semi-harpes, semi-luths africains. Une douceur.

17h15, une découverte bien fraiche du Greenland

On empoigne rapidement une bouteille de bière chaude de 33cl et une cannette cidre aux fruits des bois qui nous coûtent un petit rein : un peu plus de 12€ les deux, le tout sans eco-cup et avec une lenteur qui n’est pas habituellement propre à nos voisins aux chapeaux haut de forme. On décide d’aller voir ce que donne le B2B entre Ben Klock et Marcel Dettmann (photo) sous le chapiteau Bugged Out!, du nom de la fameuse soirée électro au XOYO, night club londonien. Partis pour un bon set de 2h30 les deux compères préservent visiblement le gros son qui pète pour une heure plus tardive de l’après-midi. On se lasse assez vite, d’autant plus que le son est vraiment mauvais et un brouhaha assez insupportable règne sous le chapiteau. On passe donc juste à côté sous le chapiteau du pub de Dalston, le Shacklewell Arms, où on se réjouit de découvrir LA Priest qui à lui tout seul gère tous ses instruments pour nous emporter dans un univers des plus envoûtants. Il sera à Dour en juillet, un concert à surligner dans ses petits papiers.

19h02, le public, un artiste à part entière

Sur la grande pelouse, Todd Terje (photo) se fait un peu attendre pour au final passer une petite partie de son live à ne pas trop se préoccuper du public et balancer du son tranquillement dans son coin avec ses compères les Olsens. Les londoniens qui avaient envie de danser improvisent alors un deuxième spectacle dans la fosse et entament le concours de celui qui va passer sur le grand écran de la scène en criant plus fort que les autres. On décide donc de se balader un peu dans le coin et on fait la rencontre d’une multitude de pipelettes, ravies de partager une bière et quelques impressions sur le soleil exceptionnel de la capitale. Big up donc à John photographe désabusé de la Fashion Week, au monsieur qui adore faire des câlins et à Ross, qui nous conseille passionnement des cocktails à la noix de coco.

20h15, réunion tupperware sous le chapiteau

L’endroit est déjà bien blindé et il faut se battre pour passer sa commande au bar. Nous loupons donc le début du concert tant attendu de Chet Faker et le chapiteau est déjà pris d’assaut quand nous tentons de nous frayer un chemin. On ne voit pas grand chose à la scène assez mal éclairée et on n’entend quasiment que les conversations détendues du public autour de nous. Ce n’est qu’à la fin du live, quand les obsédés des selfies en série décident tout bonnement de quitter les lieux qu’on découvre enfin Chet à son piano et qu’on peut enfin vivre un moment de suave mélodie. Mais la faim se fait déjà grandement ressentir et nous tombons épris d’un coup de foudre de l’assiette de tajine d’agneau revisitée au stand de gibier grillé (photo). Si il y a bien un endroit où on ne fait pas n’importe quoi avec l’appétit des gens en festival, c’est ici ! La sélection de stands est énorme et bien qu’on aimerait tout déguster il faut faire des choix cornéliens.

22h03, Londres veut danser !

S'il y a bien une artiste dont nous avions hâte de découvrir l’univers scénique ce weekend, c’est bien FKA Twigs (photo) qui se produit sous le chapiteau de Crack Magazine. La toute jeune diva nous engourdit par sa sublime voix mais a relativement mal choisi sa setlist, ce soir, un peu trop écléctique pour le grand public. Un set expérimental qui décourage rapidement la fosse qui se vide aux ¾ avant la fin de la prestation. Nous nous rabattons donc sur le live déjà bien rôdé de Caribou qui n’ont pas besoin d’en faire trop pour enthousiasmer le public britannique dont ils ont déjà gagné le coeur il y a fort longtemps. La sortie du festival se fait tout en douceur et alors qu’une grande partie des festivaliers se dirige vers les fameuses afterparties dans les pubs du coin, nous galérons pour retrouver un bus pour rentrer, démunis de toute indication signalétique alors que les rues des alentours sont fermées à la circulation.

Jour 2, 15h40, DIIV indice 30

A notre grande surprise, on découvre à notre arrivée que le festival a bien rétréci depuis la veille. On perd environ 3 scènes et une bonne partie du public du samedi. Mais on est loin d’être déçu, bien au contraire ! Plus de place pour danser, moins de queues et des chapiteaux dégagés pour une meilleure vue des scènes, pile ce qu’on recherchait ! Il faut savoir que les britanniques sont plus adeptes du pub que des festivals les dimanches, tradition oblige ! On tombe alors par hasard sur le concert de DIIV (photo) sur le main stage, et leur petite pop rock new yorkaise et leurs bouilles timides ont de quoi nous faire craquer alors qu’on se tartine de crème solaire sur la pelouse (oui, oui, à Londres).

16h45, une comédie canadienne

Après avoir été plus captivés par les chaises volantes qui attirent les fameux adeptes de selfies que par le concert un peu trop férocement débridé des canadiens Viet Cong, on se décide plutot pour le bar à cocktails (photo). Un Apollo Gin Smash, fait par les minutieuses mains et l’attendrissant sourire des barmans de Street Feast, plus tard, on se pose devant le three man show délirant de Mac De Marco qui font les pitres jusqu’à la dernière note pour ce qui sera le dernier live de leur tournée. Alors qu’on s’apprêtait à découvrir le stand type chalet en bois de Jaegermeister pour y écouter les locaux Whilk and Misky on se retrouve à faire une queue interminable et louper l’intégralité du concert.

18h03, une douce mélodie coincée

On se consolera alors sur la scène du Moth Club, qui encore hier s’appelait autrement. Il faut le dire, l’orga a bien brouillé les pistes en ce deuxième jour en changeant l’emplacement des scènes et en les renommant. C’est là qu’on a enfin la chance de voir notre premier concert de Jane Weaver (photo), douce anglaise blonde qu’on avait découvert à la radio française avec son dernier single Don’t Take My Soul. Une très belle voix et un super groupe plein de promesses quelque peu freiné par une certaine timidité de la scène et une rigidité quasiment irritante de la chanteuse. En attendant le prochain concert, on s’offre une tournée bien méritée de Redchurch Paradise Pale Ale, houblon du quartier, et on découvre le place to be de la journée, à savoir la petite scène Red Stripe ou un DJ inconnu au bataillon mixe un mélange de dub, reggae et funk et une horde de joyeux lurons danse sous le soleil comme si c’était la dernière fois.

19h22, Pat & Cheese

C’est Mister Baxter Dury (photo), le dandy trentenaire à la voix irresistible, qui se saisit du micro par la suite dans le chapiteau derrière nous et il ne lui en faut pas beaucoup pour nous faire tomber comme des mouches sous son charme et son humour décontracté mais classe. Et voilà qu’on chante Happy Soup à tue tête sans honte comme de vraies bonnes groupies. Pour nous remettre de ces émotions, nous engloutissons un bon mac & cheese presque maison en écoutant Patti Smith et ses chansons toujours révolutionnaires au loin. Pas trop de notre génération mais bel et bien de celle du public poivre et sel de ce dimanche.

20h36, le finale très rock

En recherche d’émotions fortes, nous opterons de poursuivre la soirée avec des guitares qui grincent fort et de la fumée à gogo : découverte de Savages (photo) au Shacklewell Arms. Du rock du vrai, du post-punk et du gros son, interprété par quatre nanas toutes de noir vêtues et menées par Jehnny Beth, l’élégante motarde aux cheveux courts qui n’hésite pas à se lancer dans le public pourtant pas très nombreux.

Nous finirons enfin notre périple musical londonien, churros au en main, devant le concert de Ride, groupe de rock shoegaze emblématique britannique, dont tout le monde connait les paroles, sauf nous. Tant pis, on avait la bouche pleine de chocolat et de pâte à choux mais on est très amusés par le déchainement des plus grands fans devant la grande scène. Ca danse encore un peu partout alors que nous nous frayons un chemin entre les cadavres de bouteilles de vin en plastique et que nous quittons les lieux pour rejoindre une dernière fois notre cher bus rouge. So cliché.

Côté concerts 

La découverte
LA Priest, un petit magicien solo qui fait planer

La confirmation
Baxter Dury, un sacré personnage qui sait attirer tous les regards

Les meufs qui déboitent
Savages, des nanas qui ne font pas semblant quand elles ont une guitare en main

La déception
FKA Twigs, un set plus adapté à un live en petit comité de fans qu’à un festival.

Côté festival 

On a aimé :
Des DJ qui nous gardent dans l’ambiance entre chaque concert
Un temps magnifique. A Londres, on n’aurait pas pu rêver mieux !
Le choix côté food trucks est un sauvage concurrent à la chocolaterie de Charlie. Et grand bonus, beaucoup de stands locaux, de l’Est londonien.
Un choix de bières pression qui fait saliver et pâlir les plus éclectiques des festivals belges. Prend ça dans les dents la Jupiler !

On a moins aimé :
Pas de personalité esthétique du festival. Ca aurait pu être le Lovebox ou autre qu’on n’en se serait pas forcément aperçu.
Le mauvais son, sous tous les chapiteaux. Alors en effet on est en pleine ville, mais c’est pas une raison pour faire saigner les oreilles des voisins avec un son grésillant à souhait.
Pas de tri, pas de recyclage et des poubelles dont les gens se servent très rarement tout compte fait.
La bière du sponsor Red Stripe est sold-out en une ½ journée. Absurde, dites-vous ?

Conclusion

Les anglais vivent la culture des festivals bien différement de nous autres, les Frenchies. Pour nos voisins, ces événements sont l’occasion rêvée pour sortir sa plus folle tenue et laisser son empreinte sur un blog mode mais aussi faire des rencontres et passer une journée avec ses potes. Alors qu’on est ici plus tatillon sur la qualité du son et les performances visuelles de nos vedettes préférées, les anglais cherchent quant à eux une super ambiance et de la bonne humeur. Et pourquoi pas ! Les places early bird pour l’année prochaine sont déjà en vente, il ne reste plus qu’à parier sur la même méteo.