On était à
Pitchfork festival : une cinquième en orbite

Le Pitchfork festival version parisienne a confirmé ce weekend sa place parmi les festivals incontournables de l’automne. Avec une programmation plus qu'excitante, retour sur nos trois jours de festival sous la Grande Halle de la Villette. 

Jour 1. 19h30, Un festival qui commence beaucoup trop tôt

Lorsque nous arrivons sous la Grande Halle de la Villette, les concerts ont déjà commencé depuis plus de deux heures. Les deux scènes sont face à face et l'on jouera au yoyo entre les deux pendant tout le festival. Un peu frustrant de louper les premiers noms. Nous entamons cette soirée avec Ariel Pink et sa pop psychédélique. Ce songwriter de Los Angeles nous dépeint un monde parallèle dans lequel il n’est pas facile de pénétrer. Pour mieux s’acclimater, on file s'abreuver. Avec modération, la pinte de bière est à 7 euros. Mais l’offre est multiple : bière, vin, thé glacé, limonade. Et avec les nombreux bars prévus, il y a très peu d’attente avant d’être servie.

21h58, plaisir régréssif au Playground

Le groupe suivant nous emballe peu, on préfère attendre l’arrivée de Deerhunter (photo). Pour patienter, on fait un tour au Playground, soit la version hypster des terrains de jeux de notre enfance. On teste les balançoires suspendues sous les arches métalliques de la Grande Halle. Qui peut résister à ce plaisir si régréssif ? On s’inscruste dans un match de ping pong à douze. Il est temps d’entamer une nouvelle partie de chasse avec Deerhunter. Le groupe d’Atlanta nous offre un rock psychédélique un poil dérangé, à l’image de son leader, Bradford Cox qui semble possédé sur scène.

23h03, la berceuse de Beach House

Il était encore tôt quand le duo de Beach House (photo) a entamé ses morceaux mélancoliques. Une pop sombre jusqu’au gothique. L’émotion est là mais l’acoustique de cette grande salle au haut plafond n’est pas des plus adaptées. Pas de grande révélation pour ce soir, une soirée pour s’échauffer. Pour les plus motivés, l'after party se déroule à quelques centaines de mètres au Trabendo. 

Jour 2. 20h58, l’heure de notre premier coup de coeur

Le deuxième jour promet, avec l'impatience du live de Tom Yorke. Les festivaliers sirotent, discutent, se prennent en photo sur les pavés extérieurs de la halle, pendant que les premiers groupes de la soirée animent l'intérieur. On alterne entre la violence d'un rock expérimental de Health et la douceur angélique de Rhye. Pas tellement envoûté, on en profite pour manger un bout dans un des différents food truck aux odeurs alléchantes pour nos narines, un peu moins pour nos porte-feuilles. Kurt Kile ayant déjà terminé son live à notre retour en selle, c'est le groupe Battles qui suit. Un nom de groupe qui définit bien leur rock, un combat entre des rythmiques complexes et des sonorités tribales. On débranche le cerveau et on profite.

21h53, il est là ! Calme toi!

Nous n’étions pas déçus il y a quelques mois d'apprendre que Bjork laissait sa place de tête d’affiche du festival à Thom York (photo), l'un des membres de Radiohead. Sa performance est une ascension de la mélancolie qu’on lui connaît à une transe épileptique qui nous a tous surpris. Beaucoup disent que cette métamorphose est l’oeuvre de Nigel Godrich, talentueux producteur qui l’accompagne. On partage notre enthousiasme avec nos voisins, des anglais, des hollandais, le Pitchfork est un vrai carrefour européeen ! 

23h28 C’est l’heure de faire la fête.

Après un dernier passage au bar, c'est l'heure du dernier concert. La Halle est toujours bien remplie pour le deuxième passage au Pitchfork très réussi de Kieran Hebden, aka Four Tet (photo). Il a trouvé la formule magique, celle de la bonne musique qui fait danser sans tomber dans la facilité. Après tous ces groupes mélancoliques, qu’il est bon de se déhancher le coeur léger!

Jour 3. 21h07, les masques d’Halloween resteront au vestiaire

Déception à l’arrivée, les masques ne sont pas autorisés en cette nuit d’Halloween! Tous les loups garous, les Franckenstein et autres têtes en caoutchouc sanguinolentes doivent être laissé au vestiaire. A défaut de trembler de peur, on espère frissonner de plaisir avec la programmation de cette troisième nuit. Les débats ont été ouverts par la soul de Curtis Harding, maquillé aux couleurs de l'enfer pour l'occasion, et Father John Misty et sa folk. Le premier bon moment de la soirée est marqué par l'arrivée sur scène au son queenisque We are Champions de Run the Jewels. Dernière date d'une longue tournée pour ceux qu'on avait déjà croisé au Lollapalooza à Berlin et à l'Outlook en Croatie : EL-P et Killer Mike réussissent à faire bouger les premiers rangs avec leur hip-hop de feu et l'énergie necessaire pour augmenter les watts dans la Halle de la Vilette. 

22h53, Ratatat, ils divisent pour mieux régner

On passe notre tour pour Spiritualized, pour attendre le duo suivant. Personne n’est ressorti avec le même avis. Mais pour nous, les new-yorkais de Ratatat (photo) nous ont offert du grand spectacle pour les yeux et les oreilles. Les projections visuelles immenses qui entourent la scène nous hyptonisent complètement, tout comme les têtes de lion qui s’animent sur les riffs de guitares. Des lasers traversent la Grande Halle et ondulent au-dessus des spectateurs. Du grand spectacle on vous dit !

03h17, la récompense !

Beaucoup d’électro sans grande cohérence ou subtilité pendant cette soirée nous ont presque donné envie de rentrer nous coucher, avec Hudson Mohawke et John Talabot b2b Roman Flügel. Mais heureusement on a tenu le coup et le jeu en valait bien la chandelle. Laurent Garnier (photo) avait la lourde tâche de clôturer le festival et il fut à la hauteur. De la pure techno, un Dj hors pair, l’essence de la fête et du clubbing. On repart de nos trois jours de festival les genoux en compote, mais heureux d'avoir pu profiter une nouvelle fois de ce rendez-vous devenant petit à petit incontournable sur la scène parisienne. 

Le Bilan

Côté concerts

La tête d’affiche qui assure
Laurent Garnier, le maître de la techno

Le grand surprenant
Thom York qui va au-delà de nos attentes

La belle découverte
The Battles, et leur musique inqualifiable

Côté festival

On a aimé :

- Une programmation éclectique : les noms les plus excitants dans tous les domaines pop, hip-pop, rock, électro
- Un lieu exceptionnel, de beaux décors
- Un festival vraiment international

On a moins aimé :

- Le prix des places et des consommations
- La guerre pour rentrer chez soi le samedi à 5h depuis Porte de Pantin

Conclusion

Même si le public est parfois sur la réserve, le Pitchfork est un festival qui creuse son lit dans la capitale. En cinq années, il est devenu un rendez-vous incontournable de l’automne pour des amateurs de musique pointue venus de toute l’Europe. 

Un récit de Céline Ma
Photos : Vincent Arbelet pour le Pitchfork Music Festival