On était à
Nuits Sonores 2022 met la capitale des Gaules en ébullition

Après une édition 2021 atypique et "covidée", Arty Farty a remis le couvert du 25 au 29 mai 2022 pour renouer avec l’esprit véritable des Nuits Sonores. Avec des Days aux usines Fagor-Brandt et des Nights au Sucre et à la Sucrière, le plus grand festival électronique de Lyon nous a permis de retrouver l’expérience festivalière citadine et fiévreuse qui a fait sa légende. Accrochez vos ceintures, on décolle au pays du beat.

Jour 1. Mercredi 25 mai. 18h30, Fagor, terrain de jeu des Lyonnais 

Nous arrivons tôt aux usines Fagor-Brandt. Bien que familières du lieu, nous avons hâte de découvrir les changements mis en place depuis l’année dernière. Arty Farty a pensé les espaces de manière à offrir une déambulation festivalière optimale. Côté chill, nous retrouvons un espace extérieur aménagé de transats, de grands bancs et de tables permettant de se retrouver à l’air frais en toute convivialité. Cinq espaces bars, dont un bar à vin, ont été mis en place à la fois à l’intérieur et à l’extérieur pour éviter de trop longues queues. Côté fête, nous retrouvons la scène live et 360°, et notons l’apparition d’une troisième scène, la scène SoundSystem. Plusieurs petits stands notés parmi les nouveutés : Brew Your Sound, un atelier sérigraphie ou encore le Social Corner et l’espace de prévention. 

Chauffées à blanc par cette redécouverte, direction le stand Cashless afin de récupérer le Saint Graal : la carte NS. En ce tout début de festival, l’espace est hélas submergé par les festivaliers et 30 minutes nous seront nécessaires pour atteindre le guichet. On commence doucement alors à réaliser… Tout ce monde, on le retrouvera certainement au bar. Bingo, s’en suivent 30 minutes de queue pour avoir nos deux premières mousses entre les mains. On se console tout de même à l'idée que l’on aura plus besoin de passer par le guichet, la recharge pouvant se faire directement depuis le site du festival.

19h30, le live, le 360° et le SoundSystem 

Nous arrivons sur la scène Live pour la fin de Teto Preto qui envoûte la foule avec un mélange parfait entre musique électronique et musique brésilienne traditionnelle. La scène Live, située en plein milieu d’un hangar, est la plus grande des trois scènes. Au style industriel, elle fait le charme des Usines en lui redonnant ce nouveau visage. Niveau son, nous notons cependant que les aigus ont bien du mal à se faire entendre, ce qui est fort dommage pour les groupes mêlant voix et basses.

Dans la salle 360°, on découvre un véritable chef d'œuvre de scénographie avec sa toile géante tendue autour du DJ booth, enveloppant la foule avec l'univers des artistes. La salle tient ses promesses auditives avec un son franchement mieux réglé que l’année précédente. Nous y retrouvons Amazondotcom qui nous plonge dans un univers chaotique mêlant images entêtantes et beats déstructurés.

On arrive pile à temps pour le début du set de BADSISTA du côte de la petite dernière, la scène Soundsystem qui recrée un dancefloor urbain, à l’air libre. Impossible de résister au mélange de sonorités funk, house et hip-hop. Malheureusement la scène est placée derrière un léger promontoire nous empêchant de voir les artistes sur scène lorsque la foule est trop concentrée et en prenant un peu de distance les basses des scènes Live et 360° se mêlent au son de la scène Soundsystem, gênant l’écoute selon les endroits. 

21h passées, nous accueillons Amélie Lens et son set sombre et parfaitement maîtrisé. L’enchaînement des gros kicks ravit le public qui tape le sol sur 20 centimètres. Une seule autre chose grondera plus fort que les drops d’Amelie Lens : nos estomacs. Nous nous mettons en quête de nourriture.

22h, direction la cantine

A la cantine de jour, Le Cousu, nous sommes accueillies par les grands sourires des bénévoles. 100% végétarienne, la carte nous surprend par la présence moindre d’allergènes. Pour nous ce sera un burger végé avec des nachos nappés de cheddar fondu, pour un total de 14 euros par personne. Un menu au prix relativement élevé, mais qui aura le mérite de pleinement nous contenter.  

Durant notre pause, les bénévoles de Safe Women Walk Lyon viennent à notre rencontre. Elles nous informent sur la présence de l’asso et expliquent le but de leur action : proposer aux festivalièr·es une organisation qui mutualise leurs trajets retours. Une initiative safe qui est grandement la bienvenue, et que nous saluons. Nous donnons notre contact ainsi que notre quartier de retour afin de pouvoir être répertoriées dans leur base d’infos.

Qui va là ? Ça semble être la digestion. Nous décidons de profiter un peu de l’ambiance du festival depuis les transats situés à l’extérieur. Les néons et lumières colorées installés partout donnent au site un aspect onirique, permettant au public une immersion totale dans l’ambiance Nuits Sonores. La foule est remontée à bloc et l'excitation est perceptible dans les conversations et les visages. Les plus déterminées qui souhaitent démarrer à fond se dirigent doucement vers la Sucrière. Pour notre part, nous prenons le chemin du retour.

Jour 2. Jeudi 26 mai. 17h30, du maté au soleil

Aux Usines Fagor-Brandt, nous commençons doucement en prévision du marathon qui nous attend cette semaine : un maté frais, le beau soleil de fin de journée et des flux de festivaliers qui arrivent tout de couleurs sapés et hauts en paillettes. Attirées par les basses profondes s’échappant de la salle 360°, nous découvrons Zero Crossing Point accompagné d’Adrien Bardet en charge des visuels. Le set est marqué par des basses industrielles et ambient, pour un résultat très hypnotique. Les visuels mêlés à la musique offrent au public une expérience dark et puissante.

Direction ensuite vers la scène live sur laquelle nous retrouvons QuinzeQuinze et sa musique céleste. Entre les influences polynésiennes, le hip-hop et la dance music, QuinzeQuinze jongle avec les thématiques musicales et nous livre un concert aux sonorités planantes et aériennes, presque psychédéliques. La concentration de la foule nous empêchera de rejoindre la scène Soundsystem et les basses de la salle 360° parasitant le son, nous nous rabattons sur la scène Live et la fabuleuse Lous and The Yakuzas qui arrive dans l’enthousiasme de la foule et des chants en chœur. Alternant les titres phares et moments d’échange avec le public, la rappeuse a su nous conquérir, dans une ambiance mélancolique, bercée par des influences rap, trap et pop.

19h45, parenthèse douceur

Côté buvettes et cantine, les bénévoles sont surchargés et la foule se presse dans de longues files d’attente. Les jauges du public étant bien plus élevées que lors de l’édition précédente, nous ne nous étonnons pas. Nous tirons donc un trait sur la bière pour cette fois. 

A l’extérieur nous découvrons le corner Brew Your Sound, un petit stand permettant d’écouter au casque des cassettes préparées avec des artistes du festival, via des lecteurs cassettes vintage. Les bénévoles nous expliquent le concept avec le sourire et nous offrent une cassette à chacune à la fin de notre écoute. Nous repartons avec nos petites mixtapes bien rétro en guise de très chouette souvenir. 

21h, la frénésie

Reposées, repues, abreuvées, nous sommes prêtes à attaquer les choses sérieuses. Nous nous arrêtons à la scène 360° pour le set de Danny L Harle qui nous retourne le cerveau. Entre la drum and bass, la rave et le gabber, ses kicks ont fini de chauffer le public avant l’arrivée de VTSS. Cette dernière enchaîne d’ailleurs rapidement avec un set maîtrisé, entre l’EBM, la rave et le gabber. Ça pique fort, et on adore ça. 

Jour 3. Vendredi 27 mai. 19h40, on chauffe la machine

Troisième jour ! Nous arrivons en vétérantes aux Usines Fagor-Brandt et allons immédiatement nous ravitailler en maté, car aujourd'hui il nous faudra un maximum d’endurance ! Première étape, Boy Harsher et sa darkwave si familière sur la scène live. Nous nous laissons emporter par sa performance sombre et viscérale. Le public est au rendez-vous, on retrouve les fans du groupe en front row, en osmose parfaite avec la musique résonnante. 

La cantine est une nouvelle fois prise d'assaut, et le burger est victime de son succès. Nous optons alors pour une salade de taboulé avec trio de falafels et pour un bagnat végé : un repas léger et énergétique en prévision d’une nuit de fête. 

Sur la scène 360, nous sommes attendues par Meuko! Meuko!. Les images brumeuses et sombres, mariées à l’univers polyrythmique de l’artiste, produisent une ambiance glaçante dans cette chaude soirée. On se laisse porter.

21h45, déambulations inter concerts 

Du côté du stand de merchandising, nous sommes ravies de noter le même concept qu'en 2021 : les festivaliers peuvent s'essayer à la sérigraphie sur des invendus des années précédentes, des vêtements du Secours Populaire ou encore leurs propres vêtements. L’atelier est géré par l’Atelier Chalopin : un atelier associatif, artisanal et artistique dont l’objectif est de faire pratiquer et découvrir la sérigraphie au plus grand nombre. 

Nous ne pouvons pas résister longtemps à l’appel des basses de la scène Soundsystem située juste à côté et sur laquelle Cera Khin vient de commencer son set. Mêlant acid, gabber et hardcore, le set sombre et puissant fait trembler la terre sous les pieds des festivaliers qui ne demandaient que ça. Ils ont été servis.

23h, en expédition vers la Sucrière 

C’est le cœur battant au rythme des kicks que nous décidons de nous diriger vers la Sucrière pour attaquer la Night With Helena Hauff. Le déplacement n’est pas très long (quelques arrêts de tram à peine), et l’ambiance est à la fête durant tout le trajet avec des festivaliers euphoriques. A notre arrivée sur le site, nous tombons nez à nez avec une énorme file d’attente devant les entrées... 

A l'intérieur, nous sommes soulagées de découvrir des toilettes sèches parfaitement propres et avec une file d’attente relativement rapide pour le nombre de festivaliers : + 1 pour les vidanges à venir, et c’est donc l’esprit libre que nous pouvons découvrir les lieux. La scène, située en plein milieu de la Sucrière et de la foule, est surmontée d’immenses triangles composés de néons qui s’illuminent au rythme de la musique. Le lightning est lui aussi tout aussi impressionnant et nous offre un vrai ballet de lumières et de laser : parfait pour accompagner le set de Nite Fleit qui commence doucement à chauffer la foule.

0h30, Lyon - Berlin - Détroit 

Nous découvrons un espace extérieur garni de longues tables, de bancs et de foodtrucks pour offrir un petit moment de redescente aux festivaliers. Nous retrouvons aussi avec plaisir les néons jaunes et roses qui font la particularité de l’ambiance lumineuse des Nuits Sonores. Au loin, les basses qui nous appellent; Le pilier de la techno berlinoise Marcel Dettman et Dj Stingray 313 commencent en effet à envoyer leurs premiers kicks à un public en feu, sous un jeu de lumière énervé. 

happées par les rythmes écrasants des deux djs, nous restons scotchées aux caissons jusqu’à l’arrivée de Helena Hauff qui balance un set entre post-punk techno et electro de Detroit. Sa précision et ses inspirations acid house et EBM finissent de faire danser le public jusqu’au bout de la nuit. Les festivaliers les plus déterminés naviguent avec la Sucrière et le Sucre, situé sur le rooftop du bâtiment.

Jour 4. Samedi 28 mai. 19h, la bienveillance et l'inclusivité à l'état pur

On commence la journée au social corner, un espace qui promet bienveillance et inclusivité. Nous tombons sur un atelier proposé par le Café Rosa, un lieu féministe et inclusif lyonnais, pour sensibiliser le public aux questions de genre et d’invisibilisation du drag king dans les milieux queer et drag. A travers un quiz animé par un présentateur Drag King, les festivaliers sont invités à s’affranchir des normes de genre et à échanger sur les thématiques LGBTQIA+. L’espace est un véritable safe place qui nous remplit de bonnes vibes. 

En suivant la foule, nous arrivons alors aux pieds du Mainline Magic Orchestra, un quatuor au sein duquel chaque membre est paré d’un costume triangulaire blanc. Véritable représentation humoristique, leur concert nous présente des hommes venus de l’espace qui se transforment très vite en surhommes musclés, le tout au son d’une house entraînante. Fascinées, étonnées, puis convaincues par le spectacle, nous sommes happées jusqu’à la fin du concert. 

22h15, acid rain over Lyon

Sur la scène live, Ceephax Acid Crew & C-Men sont armés de boîtes à rythmes et synthés, et livrent au public une acid bio, à l’ancienne, comme on ne peut pas en écouter souvent. Sur la scène 360°, nous découvrons Palms Trax qui séduit le public avec une house teintée d’acid et et des basses joyeuses et rythmées. Bien que charmées par le set qui se déroule sous nos yeux, nous nous dirigeons vers la scène live pour conclure cette expérience des Nuits Sonores par le set des légendaires BICEP. Parfaite conclusion de ce dernier Day, BICEP enchante la foule et la propulse définitivement dans l’espace.

Le Bilan

Côté concerts

Le cathartique

Amélie Lens et ses kicks sombres et énervés.

Le plus étonnant

Mainline Magic Orchestra qui aura su amener de la joie et une bonne dose d’humour

Celui qui a mis tout le monde d’accord

Lous and The Yakuzas qui a su faire chanter la foule en choeur

Côté festival 

On a aimé : 

- La carte végé et gourmande
- L’ambiance doux rêve halluciné
- La full accessibilité PMR
- TCL au rendez-vous pour gérer les transports de festivaliers
- Les toilettes sèches
- Un festival safe : affiches, bénévoles, stands de prévention, ateliers, etc...

On a moins aimé : 

- Les files d’attente interminables aux toilettes et aux bars
- Les prix élevés des boissons et de la nourriture
- Le réseau quasi inexistant : nombreux sont ceux qui n’ont jamais retrouvé leurs potes
- La qualité sonore, variable selon les scènes et les concerts

Infos pratiques 

Prix des bières : entre 7€ et 8€
Prix de la nourriture : entre 7€ et 11€
Prix du merchandising : entre 8€ pour un tote bag et 30€ pour une veste
Prix du festival : Pass Days : 109€ / Days : 34€ tarif plein ou 29€ tarif réduit / A night with… : 29€ tarif plein ou 24€ tarif réduit

Conclusion

Entre éditions annulées et une dernière au format covidée, Lyon n’avait pas connu la véritable effervescence des Nuits Sonores depuis plusieurs années. Une formidable vague de réjouissance a déferlé sur la métropole à l’occasion de cette édition 2022, laissant entrevoir la saison estivale arrivante. Cette semaine aura été une bulle hors du temps, faite de découvertes musicales et humaines, d’artistes passionnés et d’initiatives créatives engagées, et surtout la crème de la crème de la scène électro et indépendante. On ne se lassera donc jamais de voir ce spectacle magnifique d’une foule habitée par la musique.

Crédit photos : Sanam Aleboyeh