On était à
Jazz à Vienne 2022 : l’édition de l’engouement pour Cybèle

Enfin le grand retour de Jazz à Vienne, le festival des plus belles stories Instagram de couchers du soleil de France. Malgré une très belle programmation payante, toujours convaincante et de plus en plus éclectique du côté du Théâtre Antique, entre soirée Afrique, soirée soul, soirée blues ou soirée explosive... C'est finalement la belle scène gratuite Cybèle et les concerts et activités annexes qui ont véritablement conquis nos cœurs : entre expositions, projections, brunch, sieste musicale ou encore soul train... Voici nos quelques journées et soirées passées dans la belle ville de Vienne. 

Jour 1. Jeudi 30 juin. 18h34, un théâtre haut en couleurs

Embarquement immédiat pour la planète jazz sur le quai F de la gare Part Dieu. Depuis le centre de Lyon, on accède au festival Jazz à Vienne en moins de 30 min de TER et un tarif préférentiel est proposé aux détenteurs d'un pass pour la soirée. Ce soir, de grosses gouttes tapent contre les vitres du train, mais nous sommes bien équipés et prêts à en découdre avec le déluge pour notre retour sur les lieux qui symbolisent pour nous le début de l'été. A 5 minutes de marche depuis la gare de Vienne nous retrouvons le Théâtre Antique dans lequel nous savourons des concerts exceptionnels depuis un paquet d'années déjà. Quand on prend un peu de distance, on s'aperçoit que nous l'avons jamais vu aussi coloré que ce soir. Une magnifique palette de parapluies et d'imperméables multicolores donnent un spectacle digne d'une color party.

C'est Nate Smith qui ouvre le bal ce soir. Le batteur américain impressionne par son incroyable talent et nous asperge de fusion de jazz, de pop et de hip hop, mais le spectacle manque globalement de peps. Avec ce temps maussade et l'enchaînement d'averses qui s'abattent sur nos têtes et s'engouffrent dans nos imperméables, on aurait aimé se réchauffer avec des sons encore plus punchy.

22h40, au soleil, sous la pluie, on est heureux avec Jamie

Ce n'est pas sans difficultés que Jamie Cullum arrive enfin à fouler la scène de Jazz à Vienne. Après deux annulations en 2020 et 2021, cette année c'est la malédiction de la pluie qui s'abat sur lui. Mais rien n'entâchera ces émouvantes retrouvailles avec la dynamite britannique. Dans la fosse, dès le début du concert (et de la première averse donc...) quelques malins s'aventurent à ouvrir leurs (immenses) parapluies. Ils sont vite rappelés à l'ordre par les festivaliers qui ne voient plus la scène mais aussi par l'artiste qui lance un vote à main levée "pour ou contre le parapluie". Ce sera donc visibilité et pneumonie pour tous, et tant mieux !

Le spectacle s'intensifie crescendo et se finira au sec, et au taquet avec un public qui saute et chante à pleins poumons, un pianiste qui court dans tous les sens, distribue de l'énergie à la pelle, monte sur son piano, envoie les fleurs et les déclarations d'amour telles des colombes sur un public déjà fou amoureux. 

Avec tous ces papillons dans le ventre, on se fait avoir par le dernier train qui, certes, nous dépose bien à la Gare de Perrache mais qui ne nous permet pas ensuite d'avoir le dernier métro pour aller rejoindre nos lits et rêver de Jamie.

Jour 2. Vendredi 1e juillet. 20h25, le soleil est de retour en Isère

Première étape de notre périple du soir, la scène gratuite Cybèle où on découvre le concert très dansant de Badjogo Pamela, qui enthousiasme petits et grands avec son afrobeat mais surtout sa belle humeur. A Cybèle, tout est mis en place pour que les personnes à mobilité réduite puissent aussi bien profiter du spectacle et on cède le passage sur l'estrade à plusieurs fauteuils. Bon point pour l'accessibilité !

On décide de se laisser tenter par un the glacé maison et un sandwich végé du stand de restauration locale, où 6 chefs de restaurants viennois proposent de grands plats dans de petits bocaux consignés. Malheureusement l'enthousiasme redescend devant les longues queues et les process semblent bien plus pénibles qu'au Théâtre Antique... Le temps d'arriver à la caisse, le thé est déjà englouti et... le sandwich est en rupture de stock. Après tout ce temps perdu on se contentera d'une barquette de frites d'Isère à la va vite, emballées dans un papier compostable cependant, pour ne rien rater du spectacle principal, là-haut, vers le tant attendu coucher du soleil, bien au porgramme ce soir.

On y découvre James BKS, qu'on a énormément vu passer sur les affiches des festivals de l'été, en première partie. Le fils de Manu Dibango, bien qu'entouré d'une équipe au dynamisme sans faille, ne réussit malheureusement pas lui non plus à nous emporter dans son énergie. Il faut dire qu'après deux ans de pandémie, on a un max de foumis dans les pieds et qu'on a besoin d'être lourdement trémoussés. On admire donc le spectacle de haut, dans les gradins, plus passionnés par le couple fou amoureux qui s'enlace devant nous que par le concert.

22h36, Angélique Kidjo la cheffe d'un orchestre de stars

Angélique Kidjo chante, Angélique Kidjo danse, Angelique Kidjo fait son stand-up, et elle est simplement magnifique et en pleine forme. La diva aux 5 Grammys sait s'entourer, comme nous le prouve le fin gratin d'invités, les uns plus talentueux que les autres, de ce soir : on découvre ainsi le chanteur Jeangu Macrooy du Suriname qui a su réchauffer l'ambiance plus que de raison avec une voix et un déhanché qui ne risque pas de quitter nos souvenirs, Imany qui déclare de retour sur son festival préféré, mais nous ressort son répertoire de reprises qu'on avait malheureusement déjà eu du mal à adopter l'an dernier. Heureusement, c'est quand les deux divas s'unissent sur une chanson que la magie opère réellement à travers leurs 1001 contrastes et une majestueuse sonorité de voix ensorcelantes. Débarque ensuite sur scène le guitariste cubain Joel Hierrezuelo, timide mais brillant, puis enfin la chanteuse nigériane Yemi Alade qu'on découvre les étoiles dans les yeux ce soir et avec laquelle Angélique Kidjo semble avoir tissé une complicité sororale. Un concert sans pauses, bourré d'émotions, une diva qui est comme chez elle et qu'on souhaite voir et revoir à l'infini.

Jour 3. Mercredi 6 juillet, 17h43, Vienne tout de jazz vêtue

Alors qu'on sort de la gare de Vienne, on tombe nez à nez avec une fanfare qui défile dans les rues et sur les terrasses de la ville, bondées par ailleurs. Ce qui est particulièrement appréciable ici tous les ans, c'est la façon dont la ville entière vibre au rythme du festival. Des rues décorées par des vinyles accrochés aux arbres, des programmations gratuites et intimistes dans les différents bars et restaurants, des expositions dans des lieux inattendus...

Si on s'est perdu dans la capitale de l'Isère, on ne peut néanmoins pas passer à côté de l'événement. On embarque une petite pinte de IPA du côté de Cybèle où on retrouve les copains et où on tombe nez à nez avec des artistes programmés à l'affiche festival profitant des lieux en toute décontraction, avant de remonter les quelques mètres qui nous séparent du théâtre pour entrer dans la vif du sujet.

20h51, salut toi, jeune trentenaire !

Et dès notre arrivée, ça nous frappe. C'est nous ou le son est super mauvais ce soir ? De là où on est posté, on n'entend presque pas les voix. Pourtant, le batteur californien Louis Cole donne tout sur ce show, et on est plutôt surpris de le retrouver en première partie de soirée. Aux côtés d’un guitariste, un bassiste, un saxophoniste et deux choristes, il sautille de batterie en micro, en synthé, avec un pantalon camouflage improbable et une humilité incroyable. Malheureusement en plus d'un son qui laisse à désirer, le concert est saccadé de pauses qui font retomber l'ambiance, et l'enchaînement chanson entraînante-chanson douce nous donne rapidement le tournis. 

En faisant le point sur nos voisins de fosse, on ne peut que remarquer que le public du théâtre respecte un dress code très précis ce soir : petit bermuda beige, petites baskets de skate, tshirt blanc et casquette de trucker. Aucun doute, on est bien sur la soirée jeune hipster dynamique du festival.

23h05, la fine limite entre le génie et l'excès

Dans le public, les peignoirs en tout genre sont eux aussi de mise ce soir. C'est la marque de fabrique de la tête d'affiche de la soirée et décidément à Vienne il ne manque pas de fans. Il faut définitivement être un féru d'electro et de trips barjo pour savoir savourer le spectacle déconcertant de l'ovni Marc Rebillet à sa juste valeur. Nos voisins de fosse ne cessent de s'exclamer et de s'extasier : "il est complètement fou, c'est vraiment un génie ce mec !".

Un avis qu'on ne partage malheureusement pas totalement. On sera rapidement agacé par la trop fréquente ponctuation "bitch" en ses fins de phrases ou encore des transitions un peu farfelues (c'est de l'impro, on en convient), le dress-code slip-soutif, les feux d'artifice dignes de Tomorrowland, ou encore la douche de champagne dans la fosse. Une chose est néanmoins certaine, ce n'est pas ce soir qu'on va s'endormir sur la pierre chaude du Théâtre Antique. A l'attaque, « The Romans are coming! »

Jour 4. Vendredi 09 juillet 2022. 18h45, l’ambiance de Cybèle

C’est à Cybèle que l’organisation du festival a concentré ses efforts cette année. Par l’aménagement, le mobilier, la multiplication et la qualité des offres de restauration et de boissons. Plus aucun temps mort, grâce à l’émission de radio quotidienne intercalée vers 18h15 entre deux concerts gratuits. Cybèle apparaît comme l’épicentre du festival. Aujourd'hui, on y teste enfin l’un des bocaux préparés par les restaurateurs locaux (9,50 euros pour le quinoa poulet mariné), à restituer dans l’un des points de recyclage de Cybèle dont on salue la signalétique immanquable. Les équipes de restauration et du bar sont au charbon  - gros succès des hots-dogs, frites et glaces - tandis que Skokiaan Brass Band swingue, en fond sonore. Les jeunes femmes du stand de Vienne Condrieu Agglomération nous offrent un gobelet que l‘on remplit à la fontaine à eau, LA nouveauté qui permet d’économiser de l’ordre de 35.000 bouteilles en plastique durant 15 jours de festival. Via un QR code on peut voter pour le futur nom de l’eau potable du territoire : Cybel’Eau ? Aqua Livia ? (du nom du temple d’Auguste et Livia situé au cœur de la cité gallo-romaine) … le résultat des votes sera annoncé à l’issue du festival.

00h40, Cy-belle by night

Le Théâtre Antique déroule sa soirée jazz new generation. Le jazz électro mâtiné de samples du duo de producteurs Blue Lab Beats avec leurs invités soufflants, ouvre un copieux triple plateau anglais et américain. Le jazz métissé de dub de Nubya Garcia, qui présente son album « Source », nous envoûte alors que la nuit tombe. Si la scène semblait trop vaste pour le duo d’ouverture, elle est occupée à plein par la charismatique saxophoniste londonienne en costume rouge, dansant avec son saxophone aux côtés d’une équipe de compétition : le pianiste Joe Armon-Jones au meilleur de sa forme, Daniel Casimir à la contrebasse et Sam Jones à la batterie. Splendide set, intense, captivant.

Robert Glasper conclut la soirée. Introduit par son DJ Jahi Sundance – et comment résister au « Me, Myself and I » de De La Soul ! - le claviériste fait son entrée avec Burniss Travis à la basse et Chris Dave à la batterie. En format restreint trio, Glasper ne déroule pas « Black Radio III » (son dernier album studio au line-up digne d’un festival à lui tout seul) mais se laisse griser par l’improvisation, étirant à l’envi des morceaux traversés d’emprunts (Nirvana par ci, Erykah Badu par là). Une performance qui à notre sens pêche par la piètre qualité vocale du natif de Houston au Texas … dont le Tshirt « Bettison, Long, Lott, Lowe, Newsum, Samples, Smith » suscite notre curiosité [Ndlr : Il s’agit de sept artistes afro-américains qui ont travaillé la relation entre l’art et les conditions d’habitat, en achetant une vingtaine de maisons d’un quartier désinvesti de Houston.]

Après minuit, quelle ambiance à Cybèle ! La pierre s’est parée de couleurs pourpre, la jam de musiciens dont le saxophoniste Léon Phal (photo) attire les danseurs autour du kiosque. La bonne ambiance, à l’air libre, fait concurrence au DJ set de Souleance confiné à l’intérieur du Club. « Cybèle, the place to be » nous souffle un ami avec lequel on boit un dernier verre.

Jour 5. Samedi 10 juillet 2022. 11h30, entre jazz, courgettes et culture

Samedi matin, les étals de fruits, légumes et fringues du marché de Vienne occupent les rues, animées par les cuivres du groupe Soopa 5, grâce au projet « jazz sur la ville » du festival. On se dirige vers l’église Saint-André Le-Haut, privatisée par le festival le temps de trois expositions (gratuites). La première illustre les quarante ans de Jazz à Vienne, la deuxième l’histoire de la batterie à La Nouvelle-Orléans, la dernière aborde la question de la représentation des femmes à travers les pochettes de vinyles jazz.

A 18h00, au théâtre de Cybèle, le festival nous convie à la première de l’expérimentation d’une innovation portée par une start-up suisse. Durant 25 minutes un set ambient et electronica est joué en direct par des artistes à Vienne et des artistes du festival de Montreux dont le saxophoniste Léon Phal. La technologie mise au point, à savoir la synchronisation audio faible latence, leur permet d’improviser en temps réel.

21h30, coucher de soleil au Théâtre Antique

A 19h00 la foule compacte de Cybèle s’ambiance avec la Soul Train party. Alpha à l’animation et Michel Platine (pourquoi pas !) …. aux platines. Au Théâtre Antique la programmation appelle davantage à la sérénité. Entre jazz, ambient, musique cinématographique, le concert de Portico Quartet suspend le temps. Au coucher du soleil, après une ascension vers le sommet du site (photo). Là où l’on peut contempler la boule de feu orange vif et la mise en lumière pourpre de la scène.

Jour 6. Dimanche 11 juillet 2022. 12h00, jazz au musée

C’est un succès à midi pour la proposition de jazz au musée. L’accès au vaste jardin du musée gallo-romain de Vienne est gratuit et l’on peut se désaltérer au stand de boissons, toutefois les places ombragées sont réservées au public ayant réservé en nombre la formule brunch égyptien à 15 euros. Passés les réglages d’organisation et si l’on fait abstraction des bavardages, on se laisse porter par le jazz oriental tissé par Mohamed Abozekry, virtuose du oud natif d’Egypte, d’abord en solo oud et voix, puis en quintet (photo) avec notamment Mark Priore au piano et Rhodes.

A Cybèle, où l’on se pause ensuite pour déjeuner et bouquiner avec une bande-son soul, on écoute à 15h le quintet Note Bene, lauréat du tremplin Crest Jazz Vocal 2019.

21h00, bisous bisous 

Soir d’affluence au Théâtre Antique pour le triple plateau New Orleans. La famille des cuivres est à l’honneur, au creuset du funk, du blues et des influences caribéennes. On s’attend à ce que cela joue fort, très fort. La fosse est passée en configuration debout. « Showtime! bisous bisous ! » : les hostilités sont ouvertes par James Andrews, le trompettiste et chanteur invité du groupe Just About Fun'k'. Lui succède le chanteur Big Chief Juan Pardo, couronné d’une spectaculaire coiffe de plumes rougeoyantes. Un des bénévoles de l’équipe en polo rose (l’équipe en charge de l’accueil des personnes en situation de handicap) assure le ravitaillement des premiers rangs en bouchons d’oreille.

Après le sextet Dirty Dozen Brass Band, c’est à 23h, dans la nuit noire, que Trombone Shorty fait une entrée fracassante, tout de blanc vêtu. La fièvre s’empare instantanément du Théâtre Antique éclaboussé par la puissance sonore. Dix artistes entourent la tête d’affiche et bête de scène, à savoir le groupe Orleans Avenue, rejoint à la fin par James Andrews, grand frère du tromboniste et chanteur dont le vrai nom est Troy Andrews. Un show hautement instagrammable lorsque Trombone Shorty descend dans la foule, lorsqu’il entame des joutes avec le sax tenor, lorsqu’il se fait chef d’orchestre ou plutôt « dompteur du band » dos au public. Et puis de la pure virtuosité avec un mémorable duo trombone - basse. Il est minuit quinze lorsque résonne le tube « Come Back » issu du dernier album « Lifted » : « Since you’ve been away / I’ve been hurting ». 

Le bilan

Côté concerts

Notre crush de toujours : Jamie Cullum

Le quartet de compét’ : Nubya Garcia quartet

La grande siva aux mille pouvoirs : Angélique Kidjo

La bande-son d’un coucher du soleil : Portico Quartet

La bête de scène : Trombone Shorty

Côté festival

On a aimé

- L’amélioration continue de l’expérience festivalière avec une nouvelle offre de restauration et de boisson en collaboration avec les fournisseurs et restaurateurs locaux, une réflexion poussée sur le zéro déchet (y compris grâce aux fontaines à eau) et l’accessibilité au festival
- Les sites équipés de brumisateurs
- Toujours ce syst-me de prise de commande des boissons dans la queue aux bars du Théâtre Antique, qui fluidifie parfaitement les afflux d'assoiffés 
- Les tarifs préférentiels pour les billets SNCF, pour éviter de venir en voiture, se farcir les bouchons, se galérer au sommet de la montagne puis chercher sa voiture pendant de très longues minutes dans le noir du côté des habitations (comment ça "ça sent le vécu" ?)
- Des plateformes PMR accessibles et très bien placées 

On a moins aimé : 

- Deux fontaines à eau au lieu d’une sont nécessaires au Théâtre Antique au regard de la file d’attente
- Un service parfois (très) lent aux stands de Cybèle aux moments de rush

- En 2023, des améliorations pour la sécurité des déplacements au Théâtre Antique ?
- Un public parfois très bavard et peu concentré sur les concerts

Infos pratiques

Prix des bocaux de restaurateurs locaux : 9,5 euros
Prix du vin : à partir de 3,5 euros
Prix du café : 1,5 euros
Transports : à 20 minutes en TER de Lyon 

Conclusion

Engagé dans la transformation responsable de son organisation et de son événement, Jazz à Vienne a obtenu la certification ISO 20121 « management événementiel responsable » pour sa politique de développement durable. Aux manettes du festival, une génération consciente des enjeux œuvre pour faire évoluer, sur le long terme, l’expérience des festivaliers. C’est à Cybèle que la transformation fut la plus manifeste en 2022.

Récit et photos : Alice Leclercq, Anja Dimitrijevic