On était à
Reggae Sun Ska, le festival Rastafari

Pour sa 18ème édition, le Reggae Sun Ska a fait appel à de grands noms pour motiver ses troupes de fidèles à revenir. En mutation après deux éditions compliquées, entre annulation et déménagement, le festival rempile pour sa deuxième année sur le campus de Bordeaux-Pessac. Des rayons de soleil aux gouttes de pluie, on vous raconte nos trois jours de festival avec dreads, sarouels et joie de vivre.

Jour 1. 19h46, c’est bien Kro cher

Après un petit tour de Tram bordelais, nous voilà arrivés sur les terres du Reggae Sun Ska, depuis deux ans à 20 minutes au sud de la capitale girondine, sur un campus universitaire . Nous rentrons assez vite pour découvrir les lieux : les deux scènes principales, la “One Love” et la “Natty Dread”, sont côte à côte et s’enchaînent l’une après l’autre, comme au Hellfest, Garorock ou Papillons de Nuit. Alors que Winston McAnuff & Fixi sont sur la One Love, on décide de passer par la case bar avant de profiter de la fin de leur concert. On doit d’abord faire le plein de tickets, et toper des gobelets consignés. Il nous faudra 3 tickets pour une pinte soit 6€, ce qui fait quand même cher la Kro. On pourra quand même trouver du vin et des mojitos sur le site. Quoi ? Enfin du Rhum en festival ? Pas trop vite Lucette ! “Seulement” 15% d’alcool dans ces semi-virgin tout prêt de la marque Cheery Rocher, également à 3 tickets. Les festivals français possèdent des licence 3, pouvant aller jusqu’à 18 degrés. CQFD, et bien joué pour la diversité.

20h37, Dreads au vent

Taïro (photo) fait son entrée sur la Natty Dread. La position des scènes permet un enchaînement efficace des lives, ce qui n’est pas pour nous déplaire. On entend au micro un “ Est-ce que vous connaissez le Reggae français ?!”, la foule hurle en réponse, et c’est parti pour le show du french Reggae lover. Bonne weed, Une seule vie … Avec une voix puissante et les dreadlocks dans le vent aquitain, il mélange humour et passages coquins pour des ballades en rouge, vert et jaune.

22h28, au paradis des basses

Malgré la bonne prestation d’Asian Dub Foundation sur le One Love, avec son flutiste de folie enchaînant les solos de BeatBox à la flute traversière, l’envie de découvrir l’ensemble du festival nous pousse à bouger vers une plus petite scène. Sans compter les zones autour des deux campings, le festival est au final pas si grand que ça. La machine reggae est finalement à taille humaine, avec une grande allée principale facilement traversable, comprenant pleins de petites zones pour se poser au sol. L’ambiance est bien différente de l’autre côté, sur le dub Fondation (photo) : trois gros blocs de sound système entourent des festivaliers en trans. Les basses sont à percer les tympans, même le sol ne s’en remet pas. Peu importe, on se laisse très vite emporter dans ces vibes soniques et puissantes.

23h51, tout le bonheur du monde

De retour sur les deux grandes scènes, on arrive pile pour le début du concert de Sinsémilia (photo). Les festivaliers sont présents et dansent, quand d’autres profitent du concert posés dans l’herbe. Le groupe reprend pas mal de leurs vieux titres des années 2000, des plus roots au plus commerciaux. On a quand même quelques trous de mémoire sur les paroles, et on a comme l'impression de ne pas être les seuls. Mais le public sera surtout réceptif sur les titres engagés anti-FN et anti-douane. Chanteurs et musiciens semblent hyperactifs sur scène. Un bon moment visuel et musical. Alpha Blondy enchaîne sur la scène voisine. C’est reparti pour une heure de show avec le chanteur ivoirien, alternant textes en français, anglais, avec textes engagés comme sa chanson Jérusalem. Nouveau beau moment de paix et fraternité, comme ce festival sait en créer des dizaines.

1h37, Sound System dépendance

En passant dans l'allée principale, on arrive devant la petite scène du Showcase. Volodia (photo) est au micro et alterne entre impros et compos dont il a le secret. Avec Scars et Kenyon ils se passent successivement le “mike”. On profite avec sourire de cette ambiance hip-hop, musique frère du reggae sur le festival. On se fait un dernier tour à la Dub Foundation, où Panda Dub Meets Tetra Hydro K s’enflamment pour finir cette journée. On a rarement écouté aussi fort du reggae dans notre vie, même si la musique s’arrête après qu’un festivalier ait grimpé sur l’engin. Moments amusants, et la musique reprend ses droits. On ne s’arrêtera plus jusqu’à la fermeture du festival.

Jour 2. 18h07, come to Reggae Rain Ska !

De retour sur les lieux du festival, on débarque sous une pluie torrentielle. Sans pression et motivé, rien ne nous arrête, une pinte et nous sommes d’attaque. Le festival n’est plus en campagne, mais l’herbe est verte, un peu boueuse, et le lieu est pas mal boisé. Le Raggamuffin peut toujours respirer. Nous retournons d’emblée à la Dub Fondation pour apprécier le set de Dubmatix. Les festivaliers sont là à jumper dans la boue, certains sont même pieds nus. On a chaussé de notre côté nos plus belles bottes. A l’égyptienne, en avant en arrière, l’ambiance est là et on se soutient malgré ce temps de chien. On apprendra aussi que Charlie Chaplin a dû annuler sa prestation. Sale temps !

20h23, le poulet c’est bondé !

Après ces nombreux efforts, notre ventre crie famine. Du côté des stands de nourriture, à gauche des deux grandes scènes, on a un large choix entre produits du terroirs ou cuisine du monde. Crêpes bretonne, burgers maison, divers kebabs et autres plats des antilles ou africains. Nos papilles s’arrêtent sur un tendre poulet tandori. Il y a du monde, mais pas grave : le jeu en vaudra la chandelle, on est requinqué. A peine quelques morceaux en bouche et la pluie s’arrête. Que demande le peuple ? On part sur la Natty Dread voir Broussaï. Le groupe français, déjà à son cinquième album, et son duo de chanteurs, est bien motivé à faire bouger la foule venue en nombre les voir.  

21h43, Matis Yaahou !

Matisyahu (photo) débarque sur la One Love avec un public bouillant qui reprend ses titres les plus connus. Avec son style vestimentaire qui ne se rapproche pas vraiment du coin, il reprend même une musique de Bob Marley. Il ne sera pas le seul. Finalement, chaque artiste passé sur la One Love s’est permis une reprise du Bob, telle une incantation au Dieu du genre.

22h42, vous êtes fatigués ?

Transition entre les deux scènes, un combat de “on n'est pas fatigué” démarre. On sent bien que la fin de la pluie est synonyme de re-motivation du côté des festivaliers. On se laisse porter par l’ambiance générale d’une scène à l’autre. D’abord les anglais de Black Roots, avec 35 années au compteur, puis Stephen Marley et son incroyable voix rappelant celle de son père, puis Biga Ranx, ce petit jeune qui monte en flèche et balance un flow ravageur. Du reggae efficace et pur qui nous maintient jusqu’à une dernière session de Sound System à la Dub Foundation vers 1h20. Peu de temps après, l’humidité et les concerts ont eu raison de notre énergie. Ça tombe bien, le festival ferme bientôt ses portes. Bonne nuit !

Jour 3. 18h26, sec et heureux

Plus une goutte de pluie à l’horizon, et la bonne humeur générale redouble d’intensité. Comme tous les jours, les festivaliers campeurs ont pu s’échauffer sur la scène Dub University, où chaque jour une plage de 4h de son était offert à des asso ou labels locaux. Banzaï Lab, Cubik Prod et Bass Day étaient les heureux élus pour 2015. Même si le camping n’était pas en pleine verdure landaise, l’ambiance “apéro” était elle bien au rendez-vous. Notamment avec les concours de pétanque organisés. De retour de notre côté sur notre Dub Fondation favorite, on retrouve Volodia endiablé en train de mettre le feu.Avancé dans la foule, il n'arrête jamais de chanter ou parler pour enjailler les troupes. La soirée commence bien.

19h38, hello Sun

Le soleil est là. Le Reggae Sun Ska porte enfin bien son nom ! On profite, on bronze posé dans l’herbe. On ne boude pas notre plaisir durant ce moment de détente avec une musique parfaitement raccord venant de la Natty Dread orchestrée par Meta And The Cornerstones. La musique porte notre esprit vers l’ailleurs, et nous encourage à la sieste spirituelle.

22h17, tout pour être dans le style

Le réveil sonnera plus vite que prévu. Arrive Mr Vegas, hurlant à gorge déployé, cet abonné aux bonbons au miel qui laisse nous fait fuir la zone, nous faisant marcher le plus loin possible de sa scène. On passe par divers stands vendant de quoi utiliser son origan au mieux, et de quoi se mettre dans l’ambiance en vert jaune et rouge sur le dos, au fameux Shop’Magie. Plus loin, des groupes de festivaliers jonglant avec des Bolas et autres instruments de cirques.

22h53, Papy du reggae

C’est un grand monsieur du reggae qui arrive sur la One Love. Jimmy Cliff (photo) est bien là, devant nos yeux écarquillés. A 67 ans il bouge comme un jeune homme, avec plusieurs levés de jambes par dessus la tête. Cette voix unique de reggae jamaïquain ensorcelle nos dernières heures de festival. Il se permet même de faire son titre Akunamatata. On ne s'y attend pas, nous sommes ravis. S'enchaîne pour clore ce festival le groupe américain tant attendu Groundation. La voix aïgue du chanteur traverse la plaine du Sun Ska pour ce dernier concert. Harrison Stafford s’était même permis un showcase surprise dans la journée, pour le plus grand bonheur des festivaliers surpris sur le moment. A peine 1h du mat’ passé, nous voilà reparti dans le train-train de nos vies, après trois jours d’un festival reprennant des couleurs.

Le Bilan

Côté concert 

La confirmation
Jimmy Cliff et sa grande classe sur scène

La claque
Stephen Marley, parce qu’un Marley au reggae Sun Ska, ça n’a pas de prix

La deception
Mr Vegas, trop énervé ce monsieur

Côté festival

On a aimé :
Un grand nombre de choix de nourriture
L’organisation qui permet de ne pas attendre entre les concerts, ni aux bars, ni aux stands.
L'accessibilité en transport en commun
- Le sound system Dub Fondation, du reggae puissance 1000

On a moins aimé :
Le prix de la bière, 6€ la pinte de Kro ...
La fin à 2h du matin. Trop tôt !
Le manque d’abris quand il pleut

Conclusion

Difficile sera le retour à la réalité après ces trois jours. Ce monde parallèle reggae nous aura envouté de ses parfums de paix et d’amour, tout en proposant une programmation des plus efficaces. 40 000 festivaliers étaient à la cool, pour une orga qui résiste tant bien que mal à sa crise, bien loin des 80 000 festivaliers de 2012. Il n’en a pas pour autant perdu son âme de festival à bonne humeur, dont on a hâte de voir le visage l’année prochaine.