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Burning Man : comment est érigée la ville éphémère de Black Rock ?

Le Burning Man Festival est ce grand carrefour artistique organisé chaque année dans le désert de Black Rock au Nevada. Une ville éphémère est créée, portée par des milliers de festivaliers durant plus d'une semaine, puis sans laisser aucune trace, elle disparait. Cette année, le Washington Post consacre une infographie nous dévoilant la façon dont est organisé ce mythe des festivals. 

A la manière de l'exode, l'expérience Burning Man se vit d'abord par une traversée du désert, des heures durant dans le sable et la chaleur, jusqu'à accéder à une ville éphèmère, évanescente et utopique, où l'homme célèbre la création artistique. Sur plus d'une semaine, des milliers de festivaliers défilent dans les rues du Burning Man, à coup de performances artistiques, de déguisements fantasques ou de nudité, jusqu'à l'embrasement d'un totem géant, un colosse en bois "de huit pieds de haut" à l'effigie du festival, plongeant son visiteur encore plus loin dans l'iréel. «The Burning Man est Disneyland en sens inverse. . . Woodstock a tourné à l'envers », déclarait le cofondateur Larry Harley au San Francisco Chronicle en 1996. Ajourd'hui, le Burning Man s'est imposé comme un fantasme pour tous les amateurs de festival. Mais comment est organisé l'évènement et qui sont les "brûleurs" du Burning Man ?

Burning Man, ville fantôme 

Là où nous poserions notre tente au détour d'un petit carré de sable, c'est une véritable ville organisée et structurée, avec des routes et des emplacements délimités, qui est mise à la disposition des festivaliers. Grâce à des images satellites, le journal américain The Washington Post a dévoilé les coulisses du montage du festival, nous permettant de comprendre un peu mieux l'apparition et la disparition de cette ville fantôme. Capturées par l’entreprise DigitalGlobe, ces images ont été prises au cours de l’édition 2017. Comme le note le journal, le Burning Man“laisse le désert exactement comme il était, sans aucune trace de son apparition”

Journée du 31 juillet 2017, quatre semaines avant l'ouverture du festival, les organisateurs commencent à faire apparaitre les premières lignes de Black Rock City. 

Une semaine après, le 5 août, un périmètre en forme de pentagone est crée et les routes commencent à se délimiter. 

Le 13 août, les premières rues circulaires apparaissent. Et le 25 août, deux jours avant l'ouverture du festival, celles-ci sont parfaitement dessinées, créant la forme d’un amphithéâtre romain. Nommées d'après leur position horaire de "2:00" à "10:00",“le nom des rues en forme d’anneau change chaque année”, explique le Washington Post.

Le 28 août, durant l'exploitation du festival, “The Man”, le totem en bois brûlé chaque année à la fin des festivités, trône au centre de la ville. 

Cette dernière photo est prise le 9 septembre, soit cinq jours après le festival, et “pratiquement rien ne subsiste, les routes tracées commencent à disparaître d'elles-mêmes dans le désert”, observe le Washington Post. Parmi les 10 commandements du festival, le Civisme en 6ème position s'attache à avoir un comportement respectueux des autres et le 7ème s'intitule "Ne laisser aucune trace lors des évènements"

Qui sont les "brûleurs" du Burning Man ? 

Chaque année, des enquêtes sont réalisées avec l'aide de nombreux volontaires, dans le but de "rencenser les participants de la ville de Black Rock". Ce recensement se fonde sur des informations démographiques et témoignages des "brûleurs" de l'évènement. Selon le Washington Post "Les données sont collectées en deux phases : l'une est une enquête qui est distribuée au hasard aux participants entrant dans Black Rock City, et l'autre est une enquête en ligne qui sort après le festival pour tous les participants." En 2017, plus de 9 000 festivaliers ont répondu à l'enquête en ligne, et celle-ci a chiffré une moyenne de 77,1% de Blancs,  11,4% d'Asiatiques, 5,6% de Noirs, 1% d'Hispanique et 4,9% de Latinos. Même si en 2017, la majorité des burningmaniens étaient donc de couleur blanche, depuis 2013 le nombre d'hispaniques, latinos, noirs et asiatiques auraient largement augmenté. "La raison pour laquelle la diversité raciale est faible chez Burning Man a fait l'objet de nombreuses discussions ces dernières années. On dénote près de 80% des participants venant des États-Unis en 2017 et près de 50% des brûleurs étant âgés de 25 à 34 ans". 

Depuis plusieurs années, le Burning Man est devenu l'endroit hype où aller passer ses vacances en festival. Élites et célébrités y assitent de plus en plus chaque année, mais même si cela en fait déchanter quelques-uns, Kathy Baird, "brûleuse" régulière depuis 8 ans, déclarait pour le journal "Peu importe qui vous êtes et d'où vous venez, j'espère que vous pourrez vivre une expérience comme Burning Man… et être un meilleur être humain grâce à votre séjour là-bas". Soit, mais il reste vrai que le Burning Man coûte cher. En 2017 "plus de 75% des brûleurs ont dépensé plus de 1 000 dollars (à l'exclusion du coût des billets)". 

Le Burning Man est devenu une référence en matière de festival. À Washington, des documents d'art et d'histoire du Burning Man sont présentés à la galerie de Renwick du Smithsonian, dans une exposition titrée "No Spectators" elle-même reprise du diction originel du festival : participation active pour tous. Mais en dépit de cet engouement, certaines polémiques se soulèvent depuis quelques années. Selon l'hebdomadaire LA Weekly, basé à Los Angeles, le Burning Man est "mauvais pour l'environnement". De même que le journal d'information en continu le 20 Minutes notait en 2017 "de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer les dérives du Burning Man : déchets abandonnés sur le site malgré l’interdiction, empreinte de carbone, perte de l’idéal des débuts… La mort d’Aaron Joel Mitchell vient tragiquement s’ajouter à cette sombre litanie." Après avoir recensé plus de 70 000 participants l'année dernière, l'amplitude du Burning Man échappe à propres organisateurs, devient imprévisible et le 7ème commandement semble de plus en plus dur à respecter. Finalement, le succès d'un festival qui se veut communautaire ne relève t-il pas de son aptitude à rester à échelle humaine ? 

Crédit Photo : Capture d'écran du Washington Post/DigitalGlobe