On était à
Les Nuits Secrètes : une dose d’amour à toute épreuve

Cette été encore, les campagnes d’Aulnoye Aymeries ont vécu au rythme des Nuits Secrètes. Electro, rap, reggae et rock, le festival proposait une programmation ont ravi les oreilles des festivaliers parfois timides jusqu’au bout de la nuit. Entre déception et fascination, nous vous racontons ces trois merveilleuses nuits. Promis, cette 16e édition n’aura plus aucun secret pour vous.

Jour 1. Vendredi 28 juillet, 21H54, entre enthousiasme et faux espoirs

Après quelques bouchons sur la route, nous arrivons enfin à Aulnoye Aymeries dans des parkings mis à disposition des festivaliers dans le centre ville. Chargées comme des mules, nous partons en quête de l’entrée du festival : après quelques égarements, deux jeunes festivalières nous indiquent la route pour le camping. Vingt bonnes minutes de marche plus tard, nous pouvons enfin poser nos tentes. Sur le terrain de foot qui sert de campement, les campeurs sont beaucoup moins nombreux que prévu. De notre côté, nous sommes contraintes de rester au camping ce soir car les bracelets pour les concerts ne sont plus donnés après 22h.

Mais notre déception laisse rapidement place à la bonne humeur grâce à nos voisins de camping qui sont en réalité... l'ensemble du camping au vu du peu de campeurs présents ! Cela crée une ambiance plus que conviviale. Certains habitués nous confient n’avoir jamais vu un camping aussi vide. Si les années précédentes deux terrains étaient nécessaires pour accueillir plus de 1000 festivaliers il ne faudra cette année que la moitié d’un terrain de foot. La faute à l’augmentation des prix, ou au mauvais comportement de certains festivaliers durant les années précédentes ? Quoi qu’il en soit, les habitués de la première heure sont bien présents pour faire vivre le camping à coup de percussions jusqu’au bout de la nuit.

Jour 2. Samedi 29 juillet, 14H02, un trop plein de vide persistant

Après une nuit de sommeil bien méritée, nous ouvrons notre tente sur un camping toujours aussi vide. Un gentil bénévole vient alors nous dire bonjour. Ce sont les agents secrets qui s’occupent du bien être des campeurs et pour être honnêtes nous aimons nous faire bichonner ! Nous remercions donc Seb de s’être occupé de nous et de nous avoir fait remarquer que nous dormions dans une tente penchée. Ce bénévole passionné nous en apprend davantage sur les Nuits Secrètee et c’est la larme à l’oeil qu’il observe ce camping si vide après dix ans de service. C’est malgré tout une ambiance conviviale et bon enfant qui prime et que nous retiendrons. Les festivaliers profitent du soleil en ce deuxième jour et nous sommes tous aussi soudés que la veille, proximité oblige.

17H03, à la conquête de la vie nocturne

Nous décidons de partir tôt pour enfin découvrir le site du festival qui nous a tant manqué la veille. Nous découvrons les petites rues marchandes d’Aulnoye Aymeries en nous rendant à l’entrée du festival. Ici c’est bien toute la ville qui vit au rythme des Nuits Secrètes. D’ailleurs, une rue donne sur la grande scène et il est donc possible de regarder les concerts gratuitement. Mais c’est devant la plus petite scène, l’Eden (photo), que nous débutons ce festival. Cette scène atypique grâce à son architecture crée un cadre intimiste. A côté, un coin d’herbe et des stands permettent de flâner au soleil. La foule est encore timide à cette heure pour Rocky. Nous décidons de faire un petit tour des stands et nous craquons pour un Coca bien frais à 2,50€. Comme beaucoup d’autres festivals, les Nuits Secrètes ont adopté le système du Cashless mais une carte rechargeable à un euro a remplacé le célèbre bracelet à puce. Reposées et rafraichies, nous partons à la conquête de la grande scène à seulement cinq minutes de la petite : pratique !  

18H05, à table !

Mais voilà que nos estomacs crient famine et les différents stands de nourriture africaine, mexicaine, indienne et autres pizzas nous mettent l’eau à la bouche. C’est au détour d’une caravane tout droit sortie de la Route 66 que nous craquons pour un hamburger à 8€. La garnison imposante et les produits faits maison nous font un peu oublier le prix. Juste à côté au stand de crêpes nous craquons pour une simple crêpe emmental à 4€ tout de même. Le temps est triste et les festivaliers peu nombreux. Dans le Nord nous sommes pourtant habitués aux caprices du temps, qu'est-ce qui ne tourne pas rond aujourd'hui ? 

19H10, Her pour réchauffer les coeurs

Une éclaircie apparaît comme par magie pour accompagner le live de Her (photo). Si pour les jeunes bretons, “all I need is five minutes”, il nous en faudra bien moins pour tomber littéralement sous le charme des musiques apaisantes du groupe. Le public semble transcendé par la voix somptueuse du chanteur, et rentre petit à petit dans son intimité. Ce dernier n’hésite pas à se confier sur la lutte contre le cancer que mène son ami et membre du groupe, mais aussi sur ses deux ans de mariage : “j’espère vraiment que ça va donner des idées aux amoureux qui hésitent encore”. All you need is love, donc !

19H50, Jacquouille la fripouille

Le soleil revient. Il faut dire que le site des Nuits Secrètes est mille fois plus agréable ainsi. Bénévoles et festivaliers profitent de ce début de soirée pour flâner dans l’herbe, chanter, se restaurer ou encore danser. Nous optons pour un retour sur l’Eden, définitivement sous le charme de cette nouvelle scène ! Nous arrivons devant Jacques : OVNI de la musique au crâne rasé, il nous fait autant rire que danser. C’est la première fois que nous assistons à une ovation devant un verre d’eau ou encore un extincteur. Mais détrompez-vous, bien plus que de la décoration ces objets sont de véritables instruments pour lui. Des “Jacquouille” ou encore des “on t’aime Jacques” bien virils retentissent à quelques centimètres de nos tympans. A seulement quelques mètres de la scène un festivalier slamme sur une bouée encouragé par Jacques lui-même tandis que le public rit aux blagues de l’artiste. Une performance totalement déjantée qui nous a fait le plus grand bien. 

20H32, danse mystique et crinière dorée

La foule se donne rendez-vous sur la grande scène. Le ciel bleu et la nuit qui tombe font écho au décor et aux costumes de Camille (photo) et ses choristes et musiciens. Ce cadre poétique laisse place à une performance originale. Deux festivalières sont invitées à monter sur scène pour danser la fameuse bourrée à deux temps. Si certains festivaliers reprennent en choeur les chansons de l’artiste nous entendons un “toi aussi tu es venu pour Julien ?” à notre gauche. Et oui, ce n’est autre que Julien Doré qui joue après Camille. Le dialogue entre la chanteuse et son public s’établit à tel point que l’artiste finit son concert en entonnant “Aulnoye-Aymeries” repris par le public de longues minutes encore après la fin du concert. Il faut dire que cette chanson créée sur mesure pour les Nuits Secrètes reste en tête.

Mais que le public se rassure il aura autant d’occasions de pousser la chansonnette devant le concert de Julien Doré. L’homme aux boucles d’or sait parler aux femmes venues nombreuses et il ne faudra pas attendre longtemps pour que trois d’entre elles montent sur scènes déguisées en pandas. L’artiste est généreux, enchaîne les titres et motive le public tout au long d’une performance maîtrisée. Malheureusement, nous sommes contraintes par des impératifs personnels de rebrousser chemin. Nous loupons Superpoze, Azur et Pfel. D'ailleurs, nous n’avons eu que d’excellents échos sur cette fin de nuit à Aulnoye-Aymeries. Les boules...

Jour 3. Dimanche 30 juillet, 18H12, départ sous un soleil de plomb

La programmation de ce dimanche ensoleillé nous met d’ores et déjà en haleine. Avant un bon repas pour tenir le choc, il nous faut recharger notre cashless. Un jeune homme nous propose une alternative : une app (LyfPay pour les petits curieux) en guise de cashless et valable pour tous les festivals. Nous hésitons mais les trois euros offerts nous font craquer et il faut dire que nous adhérons à cette appli ! Côté buffet, nous décidons de varier un peu et après une très longue hésitation avec les spécialités africaines c’est l’indien qui l’emporte. Riz épicé, poulet massaï, curry de légumes, chips de lentilles… C’est finalement avec un samossa, deux assiettes de boulettes de soja et des potatoes que nous repartons manger dans l’herbe de l’Eden pour la modique somme de 13€. Une montagne de copeaux de bois près de l’Eden nous empêche de nous asseoir pour déguster tranquillement notre repas. Nous profitons de cette pose pour nous renseigner sur les Parcours Secrets, spécialité musicale du festvial, mais les seuls départs sont à 19h et 20h. Dommage, nous prenons ça comme une invitation à revenir tenter l’aventure l’année prochaine !

19H10, Vous reprendrez bien une dose d’amour ?

Un des inratables de ce dimanche si prometteur à notre sens était Cigarettes After Sex (photo). Nous nous plaçons devant l’Eden pour satisfaire nos oreilles (et nos yeux il faut bien le reconnaître). Même si le groupe propose des musique très très calmes nous ne nous attendions pas à un public aussi dissipé. Le brouhaha de la foule recouvre presque la douce voix mélancolique du chanteur. Les festivaliers devant nous passent le concert dos à la scène, trop occupés à raconter leur vie. Fans inconditionnelles que nous sommes nous rejoignons les fidèles des premiers rangs. La proximité entre le public et les artistes que permet l’Eden est réellement un point fort. On aurait presque l’impression que le chanteur nous regarde dans les yeux. Pas que ça nous dérange... 

20H19, que la foule soit

Après une fin d’après-midi timide les festivaliers affluent. Il faut dire que la programmation prévoit du beau monde ce soir et la bonne humeur est de mise. Le lieu et le beau temps ont déjà un goût de nostalgie mais pas de temps à perdre ! Mat Bastard (photo) commence déjà à faire trembler la foule sur la grande scène. L’ex Skip the Use ne se ménage pas : “les Nuits Secrètes envole-toi !” Les festivaliers bondissent et vont de gauche à droite. Des chaussures perdent leurs propriétaires, des embouteillages entre les slameurs se créent... Le chanteur parle à son public, et son franc parler nous fait exploser de rire ! Les retardataires sont invités à rejoindre les premiers rangs pour danser. Personne n’est laissé de côté et encore moins les personnes à mobilité réduite présentes dans un espace réservé. Le chanteur disparaît quelques temps pour réapparaître à leur côté, et ça nous a fait quelque chose. C’est le genre de concert qui passe beaucoup trop vite.

21H57, au service de la paix

Mais il n’y a aucun répit pour le public des Nuits Secrètes car vient l’heure tant attendue par tous les fans du groupe emblématique de reggae : Dub Inc (photo). La foule porte leur logo sur des T-shirts en tout genre, pour certains achetés quelques heures plus tôt. A l’image du concert précédent, paix, amour et union seront les mots clefs durant cette heure de reggae music. Les paroles engagées des deux chanteurs résonnent dans les coeurs du public : couleurs de peaux, religions, sexualités et modes de pensée différents, peu importe ! Beau message pour un public de tous les âges. Deux petites filles se déhanchent d'ailleurs à nos côtés : décidément le public des Nuits secrètes est increvable !

23H02, derniers émois

Emues mais aussi lessivées par cette heure intense, nous nous octroyons une pause méritée, ainsi qu’une petite bière à 2,75€ pour se désaltérer avant d’enchaîner avec Chinese Man et Tale of Us. C’est l’occasion pour nous de dire au revoir à la grande scène et à l’Eden lors de deux concerts de choix. Chinese Man d'une part nous fait voyager dans une performance aussi bien visuelle qu’auditive. Tous nos sens sont en éveil et il est impossible de rester immobile devant cette énergie communicative. Encore demandeuses de sensations nous avons juste le temps de voir la fin de Tale of Us sur l’autre scène. Une chose est sûre, quitter un festival après ce marathon de concerts est une épreuve difficile et le retour à la réalité l’est encore plus.

Le bilan

Côté concerts

Le bon copain
Mat Bastard, un franc parler et une énergie qui nous ont régalées

Le fédérateur
Dub Inc, un trop plein d’amour à en faire des câlins à son voisin

Le petit coup de coeur
Her, sa voix de velours nous aura fait fondre

L’original
Jacques, pour son crâne tondu et son univers décalé

La maîtrise
Chinese man, un pur régal autant pour les yeux que pour les oreilles

Côté festival

On a aimé :
- La nouvelle scène : l’Eden promet un cadre intimiste entre un artiste et son public.
- La variété des stands de nourriture proposée aux festivaliers.
- La diversité de la programmation : les festivaliers n’ont eu que l’embarras du choix
- Le son : c’est bête mais après avoir fait quelques festivals cet été, la qualité du son des Nuits secrètes nous a semblé parfaite.
- La proximité entre les deux scènes qui permet de ne pas perdre de temps et d’être efficace.
- Les vans et caravanes acceptés au camping qui permettent un confort à tout épreuve pour les festivaliers qui en ont marre de la traditionnelle tente.

On a moins aimé :
- La billetterie qui ferme à 22h...
- Le manque d’herbe : s’asseoir sur un bord de route devant la grande scène nous a fait regretter la verdure.

Conclusion

Cette 16e édition des Nuits Secrètes était riche en émotions. La diversité de la programmation et de ses têtes d’affiche contrastaient avec un “trop plein de vide” pour citer certains bénévoles. Un camping délaissé laisse une impression d’essoufflement du festival. Quoi qu’il en soit les festivaliers repartent avec des étoiles plein les yeux et des souvenirs plein la tête. Amour, convivialité et bonne humeur sont les maîtres mots de ce festival qui a encore tant à offrir aussi bien musicalement qu’humainement.

Un récit de Lorena Caniaux
Photos de Fanny Blin