On était à
Festival du Bout du Monde 2022 : à la pointe du bonheur !

Il s’est passé cinq ans depuis notre dernière exploration de la Presqu’île de Crozon. Cinq ans…autant dire une éternité ! Nous avons tellement hâte de retrouver le Festival du Bout du Monde. Que ce soit la programmation variée et métissée ou l’ambiance festive typiquement bretonne, notre première fois avec le Boudu avait été mémorable. Retrouverons-nous les mêmes sensations lors de ce premier week-end d’août ? 

Jour 1. Vendredi 5 août. 15h36, plus c’est long…

Le débarquement à Crozon se déroule sans accrocs, aucun problème pour garer notre bolide ou s’installer sur le camping. Tout est à proximité, y compris la Prairie de Landaoudec, le lieu des festivités. D’ailleurs nous foulons son herbe assez rapidement, du moins ce qu’il en reste, les grosses chaleurs n’épargnent malheureusement pas la Bretagne. En réaction, le Boudu a multiplié les points d’eau et les brumisateurs sur tout le festival (photo). Bonne initiative, l’eau c’est vital, mais la bière c’est sympa aussi, même si nous avons un doute sur ses vertus hydratantes. Nous partons donc troquer nos euros contre des tickets boissons. Après trente minutes à attendre et à converser avec les festivaliers dans la file, nous obtenons nos petits bouts de cartons à 1 euro 30 pièce, cela nous a paru long mais quand nous nous retournons et observons la queue derrière nous, on relativise pas mal. 

18h04, 3 scènes 3 ambiances

C’est bien plus fluide pour se faire servir des pintes, quelques gorgées de Coreff plus tard nous sommes d’attaque. Le Bout du Monde dispose de trois scènes : la grande Scène Landaoudec et deux plus petites, le Cabaret de Seb (sous Chapiteau) et la Scène Kermarrec. C’est sur cette dernière que l’on entame notre série de concerts avec Lass, le nouvel ambassadeur de l’Afropop. Une musique dont on ne connaît pour ainsi dire… rien ! C’est la force première du festival, la diversité d’artistes et de styles venus du monde entier. En tous cas c’est péchu et ça nous met directement dans le bain. Grand changement d’ambiance avec Thiéfaine sur la Grande Scène. Le chanteur est en tournée acoustique avec ses musiciens et revisite ses titres phares en version plus épurée. Le public est attentif, mais cela reste trop sombre pour nous. Nous sommes à la recherche d’une proposition plus solaire, c’est chose faite avec Thomas Kahn (photo) et sa soul moderne et énergique sous le chapiteau du Cabaret de Seb.

20h41, chalouper avec Gaël Faye 

Il est déjà l’heure de la tête d’affiche que l’on attend le plus de cette soirée : Gaël Faye (photo). C’est le dernier concert de la tournée du rappeur et il a l’air de se sentir comme à la maison. Il salue même un copain d’enfance parmi les milliers de festivaliers présents devant la Scène Landouadec. Au-delà de sa plume, subtile et touchante, l’artiste communique énormément avec son public et celui-ci lui rend bien. Ça danse, ça chante, ça saute, ça chaloupe et ça fait de ce concert une totale réussite. On se remet comme on peut de nos émotions et on file sous le chapiteau pour faire la connaissance de la chanteuse Liraz. Il s’agit d’un mélange entre de la pop iranienne et de l’électro de Tel-Aviv, qui renvoie directement aux racines de l’artiste. Née en Israël, ses parents ont fuit l’Iran avant la Révolution Islamique de 1979, inutile de préciser que cela à fortement influencé ses chansons, qui au-delà du message féministe, sont un véritable symbole de réconciliation culturelle et de liberté. 

Jour 2. Samedi  6 août. 13h33, prêts pour la Plage du Fret

On se réveille tranquillement sur le camping familial, un brin plus calme que celui des fêtards, qui ont d’ailleurs bien profité de leurs retrouvailles avec le Boudu hier soir. De notre côté nous n’avons pas fait de vieux os, nous sommes rentrés après le rock psyché de The Limiñanas et les espagnols de Festucs, Julian Marley, dernier artiste de la soirée ; n’ayant pas réussi à capter notre attention. Du coup nous sommes plutôt en bonne forme. Suffisamment pour aller marcher une vingtaine de minutes jusqu’à la plage du Fret (photo) pour se rafraîchir, celle-ci étant la plus proche du festival. Sans grande surprise la température de l’eau est assez froide (nous sommes dans le Finistère ne l’oublions pas) et finalement peu de festivaliers osent se mouiller. Certains préfèrent faire bronzette ou massacrer/revisiter les classiques de la chanson française notamment « Les Rois du Monde » de la comédie musicale Roméo et Juliette.

16h48, le Boudu c’est le Phare-Ouest

L’escapade maritime faite en début d’après-midi ne nous empêche pas d’être présents tôt sur le site du Bout du Monde. On en profite pour parcourir les différentes décorations du festival, qui font évidemment la part belle à l’Océan. Au niveau de l’aménagement, il semble quasiment identique à nos souvenirs. On ne décèle pas de réelles nouveautés et honnêtement on voit mal comment le Boudu pourrait faire mieux sur ce point. Les 20 000 festivaliers quotidiens ne se marchent jamais dessus, et ce malgré les gros mouvements de foule entre deux concerts, qui génèrent de gros amas de poussière avec l’aide du vent et de la sécheresse (photo). Cela donne l’impression de se retrouver dans un Western ! Bon c’est un Western particulier où l’on croise plus de festivaliers déguisés en crabes, en bigoudens ou en marins que de cow-boys, mais un Western quand même !

22h56, tout le monde debout… là-bas !

Nous tentons d’aller au Cabaret de Seb pour voir le concert de Debout le Zinc mais le chapiteau est blindé on ne peut pas y accéder. On décide de retenter notre chance un peu plus tard dans la soirée (photo). Car oui, au Bout du Monde les artistes programmés sur les petites scènes jouent en simultané et à deux reprises à deux horaires différents. Plutôt intéressant pour ceux qui veulent tout voir, même si ces concerts ne durent que 40 minutes. On a d’ailleurs un peu de mal à comprendre pourquoi un groupe de la trempe de Debout sur le Zinc ne joue pas sur la Scène Landaoudec. Selah Sue et Bernard Lavilliers eux n’ont pas ce souci, ils sont tous les deux programmés sur la Grande Scène. Pour la belge, qui vient de sortir un nouvel album cette année, c’est un bon show, sans fausses notes et quant à Bernard Lavilliers, qui suit juste après, c’est un habitué, ça fait 5 fois qu’il vient jouer ici et en 22 ans, il incarne parfaitement l’esprit du Boudu, à savoir les Musiques du Monde et l’atmosphère familiale bienveillante qui plane sur la Prairie Landaoudec.

 00h59, faim de soirée des enfers

La faim se fait sentir, et on quitte poliment Bernard pour faire le tour des stands de nourriture. On the Road Again pour faire saliver nos papilles, la cuisine proposée est comme la programmation musicale : très métissée. On peut s’envoler vers les Antilles, Madagascar, le Brésil, l’Angleterre, l’Asie ou même rester en Bretagne. On choisit la facilité en s’arrêtant aux burgers. Mal nous en a pris, ce n’est pas terrible et très peu garni, on voyage plus au LIDL qu’aux States. Fort heureusement, notre déception gustative sera largement rattrapée par les autres stands, notamment celui de fromages et charcuteries, qui une fois la nuit tombée, devient un vrai dance-floor en envoyant des tubes des 80’s aux festivaliers attendant leurs assiettes. Le reste de la soirée est également de bonne facture avec Debout sur le Zinc (que l’on réussit enfin à voir), le duo mexicain Rodrigo y Gabriela, impériaux avec leurs guitares acoustiques et surtout Antti Paalanen sur la scène Kermarrec (photo) véritable révélation pour nous. Il s’agit d’un accordéoniste finlandais à la voix puissante, gérant seul tous les instruments et faisant de son accordéon une véritable machine sortie tout droit des enfers, envoyant des sonorités techno et métal. Bluffant.

Jour 3. Dimanche 7 août. 11h06, et la magie opéra…

La nuit a été plus calme sur le camping, à croire que tout le monde s’est réservé pour le concours de déguisement, véritable institution du Bout du Monde. Les nombreux festivaliers assis sagement (plus ou moins) en attendant le défilé, nous aiguillonnent dans ce sens. Comme à l’accoutumée les participants redoublent d’imagination pour convaincre le jury : crevettes, moules, fruits de mer, ninjas, fées, Scooby-Doo, royalistes, Alice aux Pays des Merveilles, Michou (le directeur de cabaret pas le Youtubeur), une Céline Dion un peu déglinguée (notre préférée) et la grande gagnante : La Kantafia (photo). Il faut dire que la candidate, affublée d’une grande robe bleu nuit et d’une coiffure en choucroute a surpris tout le monde en chantant un magnifique air d’opéra. Elle a tellement bien réussi son coup, que les organisateurs lui ont même proposé, en plus d’avoir son pass pour l’année prochaine, de chanter sur une des scènes le jour même. Belle histoire, qui résume parfaitement la bienveillance du festival.

19h27, j’vis toujours des soirées crozoniennes…

Cette année on a décidé de tester le système de navettes (payantes) mis en place pour rejoindre certains points d’intérêt de la Presqu'Île de Crozon (endroit magnifique au passage). Nous choisissons d’aller à la plage de Morgat, histoire de se dorer la pilule sur une belle étendue de sable et profiter de l’air marin. C’est apaisant. Après un retour épique, ponctué de divers chants dans le bus, nous sommes de retour pour le concert de Gaëtan Roussel (photo). Ils sont nombreux devant la Scène Landaoudec pour applaudir le chanteur de Louise Attaque, qui alterne des morceaux solo et des morceaux du célèbre groupe tels que Léa, les Nuits Parisiennes ou J’t’emmène au vent, repris en chœur par tout le public. La foule est intergénérationnelle, on pourrait se dire que c’est parce que l’on est dimanche mais non c’est depuis le vendredi que l’on voit énormément de familles déambuler sur le site y compris sur le camping. C’est une autre particularité du Boudu de proposer un festival où les plus jeunes sont les bienvenus, un espace « La Lolotte » leur est même dédié.

21h24, … et j’aimerais vivre des soirées brésiliennes

Nous passons à la Scène Kermarrec pour écouter Bel Air de Forro, une fusion de musiques dansantes brésiliennes et de musiques bretonnes. C’est original et sympathique, en tous cas assez pour pousser l’expérience à fond en allant au « Terra Brasil », le stand brésilien du Boudu, pour éveiller nos papilles en écoutant de la samba. Quelques minutes de queue plus tard on a notre dû et l’on se pose tranquillement sur une des nombreuses tables de pique-nique disposées sur le site (photo). Nous avons tout l’espace nécessaire pour déguster notre Feijoada et notre poulet mariné. Il faut dire que la plupart des festivaliers sont devant le concert de Simple Minds, encore une tête d’affiche qui a eu son heure de gloire dans les années 80 et que nos parents écoutaient dans la voiture. On pourrait facilement se rapprocher mais l’on préfère tendre une oreille et écouter au loin afin de se préserver pour les derniers concerts.

23h42, un final en fanfare !

Gallowstreet (photo) est l’avant-dernier groupe à jouer sur la Grande Scène. On ne connaît absolument pas mais quand on voit les 8 musiciens entrer en scène, avec leur saxos, trompettes, trombones et tubas, on sait que ça va nous plaire. Les fanfares de cuivres ça nous donne toujours une envie irrépressible de danser, surtout que ce brass band néerlandais ajoute une petite ambiance electro « club » à ses morceaux qui n’est pas là pour nous déplaire. Un des meilleurs concerts du week-end !

De nombreuses personnes désertent la Prairie Landaoudec mais nous trentenaires, nous sommes toujours là, nous sommes fatigués, nous en avons plein les jambes et plein le dos mais nous sommes là biens vivants. On va puiser nos dernières énergies pour Blutch, qui est le dernier artiste programmé. C’est un jeune du cru, originaire de Brest qui vient conclure avec brio cette édition du Bout du Monde en proposant une musique électronique suave presque organique, accompagnée d’une visu captivante et onirique. C’est beau, parfois poétique, parfois dynamique et ça montre une autre facette de l'électro.

Le bilan 

Côté concerts

La bête de scène

Gaël Faye, qui nous aura bien fait chalouper

Le choc des cultures

Liraz, mix réussi entre pop iranienne et électro israélienne

La découverte nordique

Antti Paalanen, avec son accordéon venu tout droit des enfers

Le gendre idéal

Gaëtan Roussel, impeccable, le chanteur brasse toutes les générations

Les showmans

Gallowstreet, le brass-band néerlandais qui a su nous faire danser malgré la fatigue

La petite douceur de fin de festival

Blutch, un gars du cru qui propose une musique électro suave et envoûtante

Côté festival

On a aimé :

- L’ambiance toujours au top, à la fois festive, familiale et bienveillante

- L’aménagement du site, joli, espacé, ombragé et évidemment la proximité avec la mer

- La programmation alternant têtes d’affiche et musiques du monde, on y trouve des pépites

- Le concours de déguisement, véritable tradition du Boudu 

- La proximité entre les parkings, le camping et le site du festival

- L’offre culinaire très conséquente…

On a moins aimé :

-…mais la qualité est inégale selon les stands, c’est parfois cher pour ce que c’est

- Le faible choix en bières et cidres artisanaux, on ne représente la Bretagne que par Coreff et Loïc Raison, quelle déception !

- Le manque de toilettes, malgré plus d’urinoirs féminins mis en place

- Les files d’attente pour les tickets boissons le vendredi

Infos pratiques

Prix des boissons

Le ticket boisson est à 1 euro 30

Bière, cidre, soft (de base) : 2 tickets soit 2 euros 60

Autres bières et cidre : 3 tickets soit 3 euros 90

Prix de la nourriture

Frites : 4€

Galette Saucisse : 5 euros

Rougail Saucisse : 10 euros

Colombo de Poulet : 10 euros

Feijoada : 12 euros

Prix du festival 

Pass 3 jours : 78€

Camping 

Camping gratuit pour les détenteurs d’un billet

Transports

En bâteau : Au départ de Brest, 9 euros et 30 minutes de trajet

En train : 18€ l’aller/retour pour les festivaliers, au départ des gares de toute la Bretagne (sous certaines conditions) jusqu’aux gares de Brest ou Quimper.

En voiture : 50 min de Brest et de Quimper (60 km environ) / 3h00 de Rennes / 6h30 de Paris

Navette intra-presqu’île mise en place par Breizh Go : 2 euros par trajet

Conclusion 

On va être bref, le Bout du Monde est un festival à part. Quand l’organisation a dû faire face à un gros souci technique le vendredi, certains ont dû attendre jusqu’à 3h pour être servi en tickets boissons, et pourtant il n y a eu aucun débordement. En 3 jours, on a vu des gens dans l’excès (c’est inévitable dans ce genre de rassemblement) mais aucune prise de tête. Nous n’avons vu que des sourires et de la bonne humeur. Rien ne pouvait empêcher les quelques 60 000 festivaliers (dont 90% de fidèles) de fêter leurs retrouvailles avec le Boudu. C’est un événement intergénérationnel où tout le monde se côtoie, une parenthèse enchantée où il n’est pas rare de voir des familles entières devant un concert. L’amour de ce festival se transmet depuis 22 ans maintenant, et encore longtemps on l’espère ! Que l’on puisse continuer de transmettre à notre tour.

Récit de Josselin Thomas et Fanny Fremy

Photos de Josselin Thomas