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Rencontre avec Arnaud Velvelovitch, programmateur du Sonic Visions

Réputé pour son essence pas chère et ses cigarettes bon marché, le Luxembourg est un pays où beaucoup y passe, sans s’y arrêter plus que le temps de remplir le réservoir et le coffre de tabac, de bouteilles et de chocolats. Pourtant, depuis 2008, le Sonic Visions s’installe à la Rockhal pour proposer un festival entre conférence et concert. Rencontre avec Arnaud Velvelovitch, programmateur de la Rockhal et du festival. 

La première chose qui nous surprend quand on regarde le programme, c’est d’y découvrir une soirée entièrement dédiée au métal

C’est une vraie volonté de notre part, cela faisait un bout de temps qu’on envisageait de dédier une soirée au métal. Depuis plusieurs années on a intégré des artistes du style dans notre programme, avec plus ou moins de succès, là on fait une soirée entière pour deux raisons : le première c’est que ce style est très populaire sur le territoire, que ce soit au Luxembourg, dans l’Est de la France ou en Allemagne. On a une vraie scène métal et on a envie de soutenir ces artistes, de leur offrir une vitrine. La deuxième raison c’est que mon co-programmateur est de ce monde, il connait bien cet environnement, c’est donc très simple pour nous.

D’autant que c’est très rare de voir du métal dans ce type de rendez-vous qui mêle pro et public…

Oui il y a peu d’événement de ce type dédié à ce style de musique très particulier. C’est un style qui a une histoire avec ses propres codes, ses propres règles. C’est un style populaire qui est loin d’être mort et c’est aussi une des rares esthétiques à vendre encore des magazines et des cds.

Donc des conférences y sont aussi dédiées ?

Il y a des vrais sujets en lien avec le métal, des sujets bien particuliers qui méritent d’être discutés. Les autres événements professionnels, en plus de ne pas s’y intéresser, ne trouveraient pas de réponses. Nous on a fait le choix de supporter cette esthétique en lui dédiant une journée complète, en faisant venir des organisateurs d’événements métal, des groupes, des collectifs. On verra dans les années qui suivent comment cette journée va évoluer.

Ca contraste pas mal avec le reste de la programmation du coup…

Oui c’est hyper contrasté. Mais le mix des cultures est très intéressant. C’est bien de voir des vestes en cuir avec des gens moins dans cette vague qui sont venus écouter Jose Gonzales ou Aaron.

Pour être honnête, on connait le Sonic Visions depuis très peu de temps. Pourquoi il est si peu méconnu en France alors qu’il est à quelques kilomètres ?

L’événement est très populaire au Luxembourg, mais aussi en Angleterre, en Allemagne, en Belgique. Sur le territoire français on n’a pas vraiment de visibilité, mais c’est un territoire déjà riche en festival, surtout à cette période. Le Luxembourg a ceci-dit une communauté francophone très présente. Dans la salle de la Rockhall on programme 200 concerts à l’année, il y  en a à peu près 70 qui sont francophones. On a beaucoup de lorrains et des gens de l’Est de la France qui viennent. On a besoin du public français pour créer ce mix des cultures dont on parlait avant. On est un petit pays, c’est notre savoir-faire que de faire rencontrer différentes nationalités.

Pour en revenir au concept, c’est un festival de conférences et de musique. Une sorte de MaMA version Luxembourgeoise ?

On n’a pas de modèle de référence, nous on s’est adapté par rapport à des besoins. On n’est pas un lieu de rendez-vous pour l’industrie locale contrairement au Mama. Par contre, on veut créer quelque chose de diffèrent. Notre approche est plus pour donner des outils de réflexions aux artistes, de leur faire rencontrer les bonnes personnes. Au Luxembourg il n’y a pas d’industrie de soutien, mais énormément d’artistes avec du talent. On est vraiment là pour leur donner une vitrine et les aider, car vivre en tant qu’artiste ici c’est difficile, la plupart partent à Paris, à Londres ou à Berlin.

Il y a des artistes Luxembourgeois que vous avez soutenu et qui fonctionnent bien maintenant ?

En ce moment on a Mutiny on the Bounty qui fonctionne très bien et qui commence à percer en France. On a une scène qui plait beaucoup à l’Angleterre. Le nombre d’artistes peut sembler anecdotique mais comparé à la taille du territoire c’est assez significatif.

Quand on regarde le programme de ces dernières années tu as aussi fait pas mal de grands noms avant qu’ils ne percent…

Le festival on ne le travaille pas en tant qu’événement. On a une salle à l’année. Du coup on peut se permettre de prendre des risques en se disant qu’un artiste, peut être inconnu maintenant, a un vrai potentiel à être programmé. Donc on s’est retrouvé avec des Benjamin Clementine, des Girls in Hawaii, des Kate Tempest… Et donc souvent avec des artistes qui vont faire l’actu les années qui suivent.

Donc cette année tu mises sur qui ?

Cette année il y a Haelos, ils jouent un peu à la Jungle, il y a un potentiel incroyable. Tous les titres sont des potentiels tubes. On a Alex Vargas qu’on a vu en Angleterre au printemps dernier, il est incroyable. Son album sort qu’en 2016, on a beaucoup d’attente en lui. On a Rag’n’Bone Man, dans le style hip hop anglais, il a un groove incroyable. Il est entre le soul blues et le hip hop et il a une capacité à faire de la pop. L’album ne sort que l’an prochain, il est complet partout en Angleterre. En artistes francophone on a 3Somesisters. Il y a un projet qui sort de l’ordinaire et c’est inclassable, c’est là où c’est intéressant de les programmer. Là on dit au public : vous allez voir quelque chose, vous ne savez pas ce que c’est, mais vous allez forcément aimer ! On programme aussi Son Lux, Josef Salvat et Algiers qui cartonnent en ce moment.

Du hip hop au rock en passant à la pop, vous n’avez pas de limites de style ?

On essaie de faire un évènement avec un beau projet artistique, peu importe la couleur musicale du groupe, si on sent un potentiel on le contacte.

D’ailleurs quand on se penche sur le programme, il y a pas mal d’artistes anglais

Oui, c’est un pays hyper international, il y a énormément de sociétés installées ici… On a un vivier d’étranger et beaucoup de britanniques ou d’américains. Du coup on essaie aussi de leur proposer un programme qu’ils connaissent. On sait que le hip hop old school marche très bien par exemple.

Pour terminer, tu peux nous décrire l’atmosphère de Sonic Visons

Ca dépend de la programmation, c’est pas forcément une grande fête comme les festivals d’été, mais il y a une très bonne ambiance avec des gens qui viennent vraiment pour la musique. Des gens qui viennent de loin, d’Allemagne, de Belgique, de Paris… Ils se mélangent tous et se mélangent avec le public local, les étudiants ça fait un beau mix. Le line-up est fait de telle manière que l’ambiance monte crescendo dans la journée, ca monte en puissance au fil des concerts !

 

Festival Sonic Visions, du 12 au 14 novembre au Luxembourg
Avec: Aaron, Haelos, Alabama Shakes, Black Box Revelation, Death Cab For Cutie, Jose Gonzales, Shining, Algiers, Son Lux, Michael Kiwanuka, Mutiny in the Bounty, 3Somesisters, Rag'N'Bone Man, Alex Vargas...
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