On était à
Marsatac, en t-shirt dans les étoiles

Finis les Docks des Suds, terminée la version Nîmoise, Marsatac change d’univers en 2014 et s’installe pour trois soirées à la Friche Belle de Mai. Une aire de jeux immense au cœur de Marseille, une programmation résolument electro et une température à faire pâlir des Belges en plein été : retour sur deux soirées dans l’univers étoilé de Marsatac.

Vendredi 26 septembre, 22h, arrivée tardive à la Friche

Il y a un peu plus d’un an on quittait les Docks des Suds tard dans la nuit, ou plutôt tôt le matin après deux jours de festival de très haut niveau. Depuis l’annonce du programme, l’impatience nous guettait mais aussi la curiosité : à quoi va ressembler Marsatac pour son retour à la Friche ? Comme l’an dernier l’entrée est soignée, signalétique immanquable et néon rouge : on y est. Le public arrive au rythme des transports en commun, l’entrée se fait sans encombre et on se retrouve rapidement proche de la scène du Cabaret. Quelques minutes de marche, une traversée de couloirs illuminés, et on se retrouve en « haut » prêt à entendre notre premier concert de la soirée. Les traversées sont longues, le weekend va être sportif !

22h30, Gringe et Orelsan lâchent leur flow, Pone s’occupe des basses

Forcément à arriver si tard on ne verra pas Skip the Use et on ratera même quelques morceaux des Casseurs Flowters (photo). Dans une Cartonnerie loin d’être pleine, l’accès proche de la scène est rapide. Avec le flow ravageur que l’on connait, et qui fait le succès de leur album, les Casseurs enchaînent les tubes à vitesse grand V : Regarde comme il fait beau, la mort du disque, Change de Pote, Geenje et Orlselane, Bloqué… Le duo joue avec le public qui connait les titres par cœur et qui prend un plaisir certain à reprendre le refrain de Saint-Valentin en cœur. Fidèle à lui-même, Pone nous fait une demo de milieu de show, prouvant, si c’était nécessaire, qu’il est encore parmi les meilleurs scratcheurs de la planète. De gros soucis de son gâchent cependant une partie du concert et certains morceaux sont presque inaudibles

23h30, « regarde y’a un mec qui mixe sur un toit »

L’heure pour nous de prendre notre première pinte. A trois euros le demi et cinq la pinte l’hésitation n’est pas longue. D’autant plus qu’avec cette arrivée tardive on a à peine eu le temps de faire un tour du propriétaire. Direction la Red Bull Music Stage Academy avec une pause sur le chemin devant un Dj perché sur un toit balançant du Major Lazer. Surprenant, mais parfait pour faire un break avant de traverser les longs couloirs. On réalisera bien plus tard qu’il s’agit là de la scène des Planches.

00h10, Jazz, soul, électro, dubstep : Gramatik, le grand mix

Court passage devant Djel feat K-Méléon, et mise en route pour le concert que l’on attend le plus aujourd’hui : Gramatik (photo). Tout débute en douceur pour le Slovène accompagné sur scène par un saxophoniste. Des sonorités Jazz et blues, des mélodies qui swinguent, on est entre C2C et Parov Stelar avec quelques pointes d’electro et de trip hop en plus. Le concert monte tranquillement en puissance et après Superstition de Stevie Wonder tout s’accélère. Les rythmes soul laissent place à un son hip-hop pour terminer avec des sonorités bien plus brutes et dubstep, sans pour autant perdre ce fil rouge jazz. Le juste milieu parfait entre tous les styles est trouvé, et c’est là où le dj montre tout son talent : savoir jouer avec presque tous les styles sans se planter. Beaucoup ont essayé, lui y arrive.

01h50, une moitié de Dirtyphonics pour un demi show

On se lasse très rarement de Dirtyphonics (photo), on a même tendance à aller les voir à chaque passage en festival, un peu comme une valeur sûre aux heures tardives pour être certain de rester éveillé. Depuis qu’un des membres a quitté le groupe on s’attend à voir un trio sur scène, mais ce soir ils ne sont que deux. Et soyons clair, Dirtyphonics à deux ce n’est pas Dirtyphonics à quatre. Les sons sont toujours aussi ravageurs, surtout les extraits de leur album Irreverence comme No Stopping Us avec Forreign Beggars et Los Angeles avec Modestep, mais le duo peine à emmener le public. Le show est efficace certes, mais bien trop décousu. Le duo avait peut-être déjà la tête à leur tournée américaine…

3h00, déflagration avec Figure

Ça va crescendo ce soir : rock, hip hop, electro, dubstep… Le line-up est parfaitement organisé pour monter en puissance. Après les pauses bières et discussions philosophiques dans les toilettes sèches en carton avec quelques marseillais –« je te dis que si il pleut les toilettes se décomposent » « mais non ils ont prévu », on va littéralement déposer notre cerveau devant Figure (photo). On s’y attendait, c’est le show violent du weekend. Un dubstep grinçant, des basses lourdes à en faire trembler le sol et des mélodies toutes aussi violentes les unes que les autres. C’est puissant, c’est violent, c’est trash, c’est parfait à 3h. Protections d’oreilles indispensables.

3h55, la température ne veut plus descendre

Figure nous a simplement épuisé. Mais on prend nos dernières forces pour voir notre premier concert de la soirée dans le Cabaret, et le dernier pour ce soir. Tels des saumons remontant le courant on croise des centaines de personnes se dirigeant dans le sens inverse pour les locaux Tambour Battant. L’avantage de faire un festival fin septembre à Marseille c’est qu'à 4h du matin la température est acceptable en t-shirt. L’inconvénient c’est que les salles sont des vraies fournaises, et ça se vérifie une fois de plus avec Virus Syndicate (photo). Trois Mcs, un Dj, de la grime dubstep et des flows qui ne s’arrêtent jamais, le concert est lui aussi explosif et conclut de belle manière ce premier soir.

Samedi 27 septembre. 21h30, instant hors du temps au Magic Garden

Vieux Port, Mucem, Cannebière et même le Velodrôme, la visite de la cité phocéenne nous fait, aujourd’hui encore, arriver bien tard à la Friche. Sur le chemin de Shit Robot on est interpellé par cet endroit étrange qui fait des bulles. Le Magic Garden (photo) est un mini havre de paix au milieu du brouhaha ambiant du festival. Quelques arbres, des chaises longues, un peu de musique et le tour est joué. Lancé au défi par quelques marseillais, on s’attaque à un match de PES 2004 sur Playstation 1 devant une télé à tube cathodique. Oui on fait un match de football en festival, on est à Marseille quand même !

22h30, la magie Trentemøller

Comme hier avec Gramatik, on est impatient de revoir Trentemøller (photo) qui nous avait surpris aux Nuits Sonores. On arrive donc tôt devant la scène pour ne pas manquer une seconde. Le groupe arrive sur scène pendant que la Cartonnerie se remplit. Le Danois aux cheveux longs se la joue dandy rock n’roll avec son chapeau. Il est accompagné cette fois encore de son groupe. Tout démarre tranquillement avec Still on Fire et Shade of Marble. Sauf qu’on le sait, avec le Danois la douceur est passagère. Le show va rapidement monter d’un cran, et au fur et à mesure que la salle se remplit le rythme va s’accélérer jusqu’au superbe Silver Surfer, Ghost Rider Go !!!. Un final en apothéose pour ce qui restera comme le plus beau live du weekend.

00H00, retour vers le futur avec Superdiscount

Etienne de Crecy et ses copains sont de retour avec Superdiscount 3 (photo). Plus de visuels que lors de leur passage à Europavox en mai dernier, plus d’expression sur scène, le trio fait le job en distillant quelques perles parmi lesquelles le nouvel extrait du prochain album « Night (Cut the Crap) ». Le son est à la fois rétro et futuriste, retour gagnant pour le trio.

00h30, Fakear fait craquer le Cabaret

Pas le temps de terminer le show des vétérans de la French Touch, l’avenir nous attend : Fakear lance son set dans la plus petite des salles, le Cabaret. Le live débute en douceur à coup de mélodies orientales. Le Caennais récite ses titres, machines en avant devant un public de plus en plus compact. La foule s’est passée le mot, ce show là il ne faut pas le manquer ! Et à en croire le monde qui tente de pénétrer la petite salle (photo), sans succès pour la plupart, l’info est bien passée. Imperturbable, Fakear continue son live maîtrisé comme si il avait dix ans de tournées et tente de nous faire voyager avec lui. Malheureusement, l’appel de l’air aura été plus fort que les basses du Norman, et c’est vers une autre scène que l’on voyagera…

02h00, Gesaffelstein, la valeur sûre

Enième traversée de couloir (photo), on ne les compte plus, et on retrouve Claptone sur la scène Redbull. L’Allemand au masque d’oiseau (horrible disons-le) et au chapeau haut de forme nous transporte dans son ambiance house/ funky envoûtante. Les montées sont parfois un peu longues mais les basses raisonnent parfaitement. Là aussi la salle est remplie, tout comme pour Gesaffelstein qu’on croise une fois de plus à la Cartonnerie. Le Dj parisien toujours aussi nonchalant fume presque autant de clopes qu’il passe de tubes : Aleph, Hate or Glory et évidemment Pursuit font bondir le public. Gesaffelstein est une valeur sûre, on ne s’en lasse pas.

03h30, Have a break, have a kebab

Les indénombrables allers et retours, les heures passées à danser… ça creuse ! L’heure pour nous de faire un break restauration. Nourriture thaïlandaise, crêpes, hot dog… notre choix se porte vers la food truck bio et ses Kebab bio ! On en profite d’ailleurs pour jeter un œil aux stands de prévention. Tout y est, même la possibilité d’un dépistage du VIH ou le service Wimoov qui met en contact les passagers « arrosés » et les conducteurs en état de conduire (et non l’inverse…). Belle initiative.

05h00, Au revoir la Friche

Les jambes sont lourdes et vient le temps de la fin. Après un passage sur le set electro-house de Tiga, le Canadien faisait là une de ses rares apparitions française, on termine la soirée en traversant pour la dernière fois les longues allées de la Friche vers la scène RedBull. Concert final avec le set puissant et techno de The Driver & Electric Rescue jusqu’à 6h de matin. Le soleil va bientôt se lever, et nous on en profite pour aller se coucher la tête encore dans les étoiles marseillaises.

Côté concert

La perfection
Trentemøller qui a sans aucuns doutes produit le live du weekend

La claque
Gramatik, envoûtant, dansant, tout y est.

La valeur sûre
Gesaffelstein toujours aussi bon

La violence
Figure est prêt à tout casser sur son passage,

La déception
Dirtyphonics, pas aussi percutant à deux qu’à quatre

Côté festival

On a aimé:

- L’immense espace de Friche, les longs couloirs, les sens de circulation, tout est fluide et organisé pour éviter les mouvements de foule entre les scènes : quel confort !
- Les tramways toute la nuit et les bus qui amènent vers Aix
- Le Magic Garden et faire un PES 2004 entre deux concerts : ça n’a pas de prix
- Wimoov qui met en lien les conducteurs et les passagers

On a moins aimé:

- Les goodies distribués par le sponsort de bière : ce n’est tellement pas l’esprit Marsatac
- Fakear programmé dans la plus petite des salles aurait mérité mieux

Conclusion

Même si le lieu n’est plus le même, rien n’a changé à Marsatac. Modèle d’organisation, le festival a parfaitement trouvé ses marques dans une magnifique Friche Belle de Mai. Avec ses grands espaces le confort y est maximum pour profiter de l’excellente programmation de cette année. Les têtes d’affiches ont été au niveau, les noms moins clinquants tout autant. Reste maintenant à savoir si l’an prochain le festival s’installera une fois encore à la Friche, ou s’il sera une nouvelle fois contraint de se déplacer. Une chose est certaine, ce festival a quelque chose de particulier, et c’est bien le seul à pouvoir prolonger l’été jusqu’à fin septembre.

 

Récit et photos: Quentin Thomé