On était à
La Meuh Folle, quand les Mines réveillent Alès

Depuis 13 ans, les membres du Cercle des élèves de l’Ecole des mines d’Alès se renouvellent pour faire perdurer un festival, la Meuh Folle. Pas moins de 8 000 joyeux drilles sont venus profiter de cette nouvelle édition entre rock, reggae et dub. 

Jour 1. 20h06, accueillis par les gagnants du tremplin

Après avoir poussé les grandes portes du parc des expositions, nous voilà dans l’antre des festivités. À première vue, c’est un peu froid et surtout très vide mais vu le nombre de festivaliers qui attendent dehors, on peut se dire que ça ne va pas durer. Sur scène, The Mitchi-Bitchi BAR (photo) commence tout juste à jouer. Les gagnants du tremplin profitent de cette belle tribune pour délivrer un show appréciable qui fait monter la température. Avec leur musique jazzy des années 30 et leurs costards qui sentent le bourbon, on se laisse prendre au jeu et on swingue près du piano-bar.

20h44, une scène, des bars et un village d’artisans

On profite de cette ambiance décontractée pour faire un tour des lieux. Ce n’est ni plus ni moins qu’un grand hangar sous sept mètres de plafond, qui se prête difficilement à l’aménagement. Les organisateurs ont fait de leur mieux pour le rendre attrayant, mais la décoration reste insuffisante pour lui donner une touche originale et symbolique. Plusieurs bars et un snack se partagent de grands espaces, différents stands accueillent des artisans locaux (bijoux, instruments de musique, vêtements…), des associations comme Amnesty International, et enfin un petit coin chill-out permet de profiter des concerts à l’écart. Rien de bien sorcier mais de quoi s’occuper entre les concerts.

21h38, une idole entre sur les planches…

Ça crie, ça hurle… Naâman (photo) semble s’être créé une communauté fanatique - plutôt féminine - insoupçonnée. L’Alborosie français débute son concert devant un public conquis dès les premières notes, qui ne fait que reprendre ses principales chansons. C’est toujours aussi plaisant de le voir et on observe un jeu scénique, une vraie prestance, un lien fort avec le public… Le petit est devenu grand, mais garde les pieds sur Terre. À 27 ans et avec le succès de son dernier album Rays Of Resistance, on peut être assuré d’un bel avenir pour cet artiste. Rebel for life !

23h53, du luxe sur scène

La tête d’affiche de la soirée est là, prête à bondir sur scène ! Deluxe (photo), les petits protégés de Chinese Man à la longue moustache, triomphent partout en France avec de nombreuses dates complètes. Au vu de leur prestation, on peut dire que le succès est mérité. Leur style varie entre le hip-hop, le funk et l’electro : le genre parfait en festival. Ils enchaînent les titres dans une ambiance survoltée et démontre toute leur capacité à faire bouger le public. Leur dernier L.P. Stachelight et leurs premiers tubes se marient parfaitement dans un set énergique. C’est réglé comme du papier à musique, le son est bon (quoiqu’un poil trop fort), c’est entraînant… Que demander de plus ?

01h32, l’ambiance se calme et s’adoucit

Djamanawak (photo) ou l’ovni de cette fin de soirée. Alors qu’on aurait pu s’attendre à un artiste électro en vogue pour clore cette première journée, la Meuh Folle fait dans l’originalité en invitant un groupe aux accents jazz, transe et rock fusion. On se pavane dans un doux rêve qui calme les esprits et détend l’atmosphère. On entend parfois un peu d’Archive, un peu des Doors ; les gens dansent et profitent gaiement de ce dernier concert du vendredi soir. La foule se fait de plus en plus éparse, mais le groupe réussit a enveloppé les couche-tard dans son univers particuliers. C’est sympa et assez inattendu, on aurait peut-être préféré prolonger la fête, mais il est bien l’heure d’aller dormir… À demain.

Jour 2. 20h18, retour au parc des expositions sous une pluie battante.

Le bâtiment de 4 400 m² attend son public pour enivrer cette deuxième et dernière journée de festival. Les concerts n’ont pas débuté et avec notre connaissance des lieux, on en profite pour se rendre directement au stand de nourritures, après avoir échangé nos écus en jetons. Et oh’ surprise, alors qu’on pensait payer 6 euros un sandwich saucisse / ketchup avec du pain rassis, les bénévoles nous proposent un menu pour 2,5 € – voire 2 € avec le tarif dégressif des jetons – composé d’un tiers de pizza ou d’un hot dog, une barquette de frites et un cookie ou une crêpe. Avec une bière à 2,5 euros. Bref’ le bonheur de tout festivalier qui aime se rassasier la panse, et se rafraîchir le gosier ! On a en bien profité et on s’est régalé avant de découvrir le premier groupe.

20h57, bonjour les bouchons d’oreille…

Et Ciao Tympans (photo) ! C’est au tour du fameux « groupe festif et engagé local » de faire son apparition. On ne l’avait pas vraiment vu venir et pourtant c’est son tour. Vous voyez ce genre de groupes à la Babylon Circus, Les Caméléons, La Ruda avec des paroles à la Tryo. Ça sent le ska et le rock, ça donne à la fois envie de danser et de s’engager dans une association militante. C’est vu et revu, c’est stéréotypé et sans trop d’originalité. Mais on est là pour s’amuser et Ciao Tympans réussit son pari. On se met à sauter, se bousculer gentiment et on oublie que ce n’est que le début d’une belle soirée. Même si on ne retiendra pas leur nom, on se souviendra les avoir déjà vus.

22h38, A.S.M. : Alès Saute et se Murge !

Les internationaux d’A State of Mind avec Green T et Funk. E Poet en leaders (photo) sont venus en découdre avec le public français qui leur rend si bien. Il faut dire que c’est grâce au producteur Wax Tailor et ses singles Positively Inclined / Say Yes que leur carrière a réellement explosé. Devant la scène bondée, des cris et des applaudissements répondent aux beats et aux flows du groupe du hip-hop ! L’entrain est communicatif et le courant passe. Les membres d’ASM délivrent ce qu’ils ont de meilleur et se révèlent comme un groupe à suivre pour de nombreux festivaliers. Ici, on entend « franchement, c’était mortel… », là, on murmure « une claque, une révélation, c’était génial » et on susurre « j’prendrai bien une autre bière » (ça c’était sûrement tiré d’une autre conversation). Bref’ rien à redire et pour ceux qui ne connaissent pas : allez jeter une oreille au dernier opus The Jade Amulet.

23h44, « Non, non, non, le reggae n’est pas mort… » chantait Regg'Lyss.

C’est au tour d’un petit groupe encore peu connu, qui peine à tourner, de monter sur scène : Danakil (photo). Faux ! Danakil est aujourd’hui la référence de la scène reggae française ; partout où on va, ils sont là… Que celui qui ne les a pas vus en concerts lèvent la main, sauf si vous avez vécu dans une grotte ces huit dernières années. Déjà venu en 2010, le groupe est ici comme à la maison devant un public totalement acquis. Cette date représentait pourtant une nouvelle aventure, puisque accompagnés de l’inséparable Natty Jean : Balik et sa troupe sont venus présentés leur prochain album prévu pour la fin de l’année. Testant de nouveaux titres, ils enchantent aussi leur auditoire avec des musiques cultes. Pour tout vous avouer, on a dû mal à s’en séparer. De festivals en festivals, on les voit et pourtant on ne s’en lasse pas. Le jeu de scène est toujours impeccable, le rythme oscille entre les racines du reggae, le dub posé et le roots endiablé : c’est toujours aussi plaisant. Aujourd’hui la communion avec le public est à son apogée et le prochain album devrait être un franc succès.

01h32, « Après avoir fait pipi, j’irai voir Kanka. »

Nous y sommes, nous voici au huitième et dernier groupe de cette treizième édition de la Meuh Folle ! C’est au tour de Kanka (photo) et son électro dub-steppa bien particulier d’entrer sur scène. Il installe ses platines en moins de 5 minutes, sans décors, ni accessoires, ni fioritures, ni rien en fait… Et le voilà lancé dans un set d’une heure, sans daigner lever la tête ou faire un petit signe de main envers son public (mais ça, ça ne change pas). On l’apprécie avant tout pour ses qualités musicales et ses capacités à distiller des sonorités venues de divers horizons. Bien sûr, sa façon d’être froisse de nombreuses personnes et c’est malheureux pour son image, mais franchement : je crois qu’il s’en contrefout !

Le Bilan

Côté scène

Hip-hop et respect
A State of Mind, du pure flow anglais avec une énergie débordante

Le groupe qui nous suit partout
Danakil, leur prochain opus renouvellera (enfin) leur set

Les maîtres de la scène
Deluxe, ils soignent leurs prestations scéniques autant que leurs moustaches

Un avenir prometteur
Naâman, déjà présent dans la cour des grands, coming soon dans la cour des rastafaris

Côté festival

On a aimé :
- Le son bien dosé, sans aucun Larsen et nos oreilles en sont ravies
- Le prix des consommations, un menu ou une bière à 2 € : avant, c’était possible que dans nos rêves
- Un lieu bien adapté à l’événement, les 4 000 personnes par soir ne se marchaient pas dessus
- Le village d’artisans et d’associations qui permettait de varier ses activités
- Les horaires de passage globalement bien respectées et cohérentes

On n’a moins aimé :

- Les files d’attente à l’extérieur pour récupérer les bracelets
- La pauvreté des transitions scéniques puisque aucune animation n’était prévue
- La sécurité un poil trop tendue et visible (les festivaliers sont là pour s’amuser, messieurs)
- Les denrées / boissons industrielles, une bière locale aurait été la bienvenue

Conclusion

Et voilà, un nouveau chapitre pour le Cercle des élèves de l’École des mines d’Alès vient de se terminer. Les membres de cette association ont travaillé une année durant sur ce projet et ils sont récompensés par une franche réussite : deux soirées complètes, des artistes à la hauteur qui ont respecté leurs réputations, avec des litres de bières d’écoulés et des festivaliers heureux.

Récit et photos de Pierrot Navarrete et Bethy Nagel