On était à
Jazz à Vienne, les théâtres de tous les possibles

Jazz, funk, groove, électro : Jazz à Vienne ouvre l’été par deux semaines de soirées explosives dans son Théâtre antique, suivies d’afters au-delà de minuit dans un autre théâtre plus intimiste. La 37ème édition du festival marque le passage au cashless et l’amélioration des navettes jusqu’à Lyon la voisine. On se met à deux voix cette année pour vous raconter cette énorme fête à la renommée internationale.

Jour 1. Lundi 3 juillet. 17H00, par le festin musical alléchés

Après une année entière sans sortir des salles parisiennes, Jazz à Vienne sonne pour l’amatrice de festivals de jazz, l’heure des concerts au grand air ! C’est peu dire que l’on arrive, dans la chaleur, quatre jours après l’ouverture, affamés de groove à respirer sous les étoiles. En relisant le programme alléchant durant le trajet en train, on ne compte pas rationner notre appétit : le festin s’annonce pantagruélique. Notre hôte dans l’appartement de laquelle on a réservé un lit nous a préparé les coussins Jazz à Vienne vendus 5 euros (photo), indispensables pour amortir les aspérités des pierres du Théâtre Antique. Nous voilà parés pour le régal musical.

20H30, premier coucher de soleil en jazz spirituel

Le public afflue au Théâtre Antique. Environ 700 places sont réservées aux entreprises partenaires devant la scène mais on peut attendre s’y glisser après les premières notes si les rangs ne sont pas complets. Un verre de vin rouge, voilà ce qu’il nous faut en attendant, l’occasion de constater que le passage cette année au cashless se fait fluidement (photo). Les newsletters explicatives régulièrement adressées par le festival étaient pédagogiques. C’est Benjamin Tanguy, le coordinateur artistique du festival, qui introduit les concerts. Sous un soleil rougeoyant s’élèvent les accords spirituels du quartet de Pharoah Sanders, portant la barbe blanche cérémonielle, symbole de sagesse d’un pharaon. Le légendaire saxophoniste s’assied certes entre ses interventions mais ne nous semble pas aussi fatigué que notre équipe l’avait constaté aux dernières Nuits Sonores de Lyon. L’émotion est là lorsque résonne The Creator Has a Masterplan.

22H10, des stars sous les étoiles exactement

La nuit est tombée, on ajoute un sweat alors que la grande scène se pare de ses feux; ça circule dans les rangées, les pintes se rapportent par quatre. L’hommage à John Coltrane se poursuit par la rencontre entre le pape de la techno Jeff Mills (photo) et le très expressif Emile Parisien embarquant tout son corps avec son saxophone. Le mélange de la machine et de l’organique s’avère racé, tout en finesse, passant d’une ambiance electro liquide et sax feutré à des effets de batterie augmentée. Ultra classe, on a adoré. Les écrans géants encadrant la scène zooment ensuite sur les visages de Archie Schepp et Nasheet Waits, le furieux batteur que l’on avait adoré au festival Sons d’Hiver. Le languissant et totalement planant Blasé, un morceau de 1969 chanté ce soir par Marion Rampal, nous emporte. Shabaka Hutchings, notre héros saxophoniste londonien qui clôturait l’an dernier Jazz à Vienne, les rejoint pour un morceau.

00H12, à la poursuite du héros dans l’intimité de la nuit

Sorti de la grande scène à minuit et moins de 15 minutes après sur la scène intimiste du Club de Minuit : il l’a fait, Shabaka Hutchings, et nous aussi on l’a suivi d’un théâtre à l’autre. Les afters au-delà de minuit, en accès gratuit dans le petit théâtre à l’italienne de Vienne, sont rapidement complets. On se place au choix autour de tables bistrots en parterre ou sur deux étroits balcons. Envoûtés jusqu’à 1H30 du matin par Shabaka & The Ancestors, on profite d’une proximité qui n’a pas de prix avec le groupe autour de Shabaka au saxophone et d’un exceptionnel chanteur sud-africain (sur la droite de la photo). “In the burning of the republic of the mind, we need new people, we need new hymns”. Ses incantations répétées à l’infini sont complètement addictives et appellent à la conscience “The power is in the people”.

Jour 2. Mardi 4 juillet. 17H25, sous les feuillages l'électro jazz

Les feuillages accablés de chaleur des arbres de Cybèle camouflent les treillis des militaires qui patrouillent armes en bandoulière…: on n’oublie pas. C’est ici sous une grande bâche blanche que se succèdent des concerts en accès libre toutes les après-midis. On y découvre le duo électro jazz Watchdog (photo), attirés par le fait qu’il soit labellisé Jazz Migration, un dispositif d’accompagnement de jeunes artistes français repérés. Elle aux claviers, lui à la clarinette nous font passer d’une ambiance boîte à musique d’antan à des sonorités électro sombres et saturées. Un duo à suivre.

21H50, la french touch du jazz au théâtre antique

Au Théâtre antique où on opte ce soir pour les chaises installées dans la fosse, on continue en électro-jazz avec le trio du pianiste Yaron Herman dont les compositions décoratives et les voix superflues nous laissent hélas froids. Anne Sila la chanteuse au crâne rasé (photo) nous cueille ensuite par son plaisir manifeste à scatter et la simplicité dans sa posture, par sa version jazz poignante du poème Demain dès l’aube et par les paroles de Tends moi les bras. Trop court : le public siffle parce qu’on nous refuse un deuxième rappel. Il est 23H, Emile Parisien complètement habité par le jazz-rock du mythique groupe Weather Report, s’est entouré pour le faire revivre d’un groupe solaire dont Paco Séry à la batterie et Mino Cinelu aux percussions qui mettent le feu dans le public. Le groupe envoie fort avec une grosse section rythmique et l’apport d’un Vincent Peirani charismatique à l’accordéon qui insère un jeu ultra rapide d’une modernité totale. Assurément le choc jazz du festival.

Jour 3. Mercredi 5 juillet. 15H50, solo au musée

La chaleur cogne fort à Vienne dès le matin. Crème solaire sur les épaules, on traverse le pont sur le Rhône (photo) jusqu’au musée gallo-romain. Pour la fraîcheur qui y règne, mais surtout pour “les Muzaïques”, concerts en accès libre. Cet après-midi on découvre le solo de clarinettes de Elodie Pasquier. Au milieu des mosaïques et des pavements qui recouvraient le sol des maisons romaines, la jeune femme partage quelques explorations free jazz devant un public de curieux.

22H15, le show pop de l’été

Embouteillage dès 19H15 au Théâtre Antique saturé, plein à craquer, il faut s’armer de patience pour circuler. On grimpe jusqu’aux rangées les plus en hauteur comme le demandent les bénévoles mais le soleil écrasant nous tape sur la tête en haut de la colline, alors on redescend en fosse. Autant d’efforts pour finalement s’ennuyer ferme hélas avec Stacey Kent. Du jazz de bar d’hôtel, qui nous incite à aller boire un deuxième verre de vin, en constatant que les services de secours ont déjà pris en charge en brancard deux spectateurs, effet de la chaleur ou de la foule. Les 7500 spectateurs sont réunis pour Jamie Cullum (photo) dont c’est la 3ème venue : “Vienne we are old friends now!”. Dans son grand show il jazzifie des hits pop : il passe de Please Don’t Stop The Music de Rihanna à un standard du jazz What a Difference a Day Makes, reprend Everybody Loves The Sunshine de Roy Ayers, saute dans la fosse, grimpe sur son piano, puis transforme What Do You Mean de Justin Bieber en version acoustique.

00H10, déchaînés, les Japonais de minuit

Minuit moins le quart, l’heure pour nous d’opter pour le théâtre de minuit, attirés par la découverte de Tri4th, cinq Japonais déjantés que Jazz à Vienne propose pour la première fois en Europe et en France. Costume noir et cravate blanche (photo) ces swing kids allument le public dès le premier morceau en excès de vitesse. Un pianiste sur-boosté, un contrebassiste dont l’instrument électrifié est ultra stylisé, un trompettiste qui mène le jeu en kimono et sandales tradi, un batteur véloce : leur débauche d’énergie du groupe fait sensation dans le public.

Jour 4. Jeudi 6 juillet. 20H30, dans le bayou de Vienne

Après une journée caniculaire étouffante, la moindre affluence (4500 personnes) conjuguée aux nuages rendent l’atmosphère bien plus respirable au Théâtre. Une festivalière de Lyon nous explique ses astuces pour se garer dans la ville saturée. Notre hôte nous avait confirmé que pour les résidents de Vienne, bouger sa voiture au-delà de 18H en période de festival c’est l’assurance de ne plus retrouver de place. MR Sipp, diminutif de Mississippi, ouvre la soirée blues de sa guitare puissante très amplifiée. Très tranquillement il descend jouer dans la fosse puis monte dans les rangées (photo). Succès garanti, le public l’acclame debout. Kenny Neal ensuite, originaire de Louisiane, déroule des slows option harmonica. Un rythme bien trop lent pour nous mais on lui reconnaît une voix à tomber, rocailleuse à souhait.

22H50, le choc Soul imprévu du festival

On recharge sans temps d’attente notre carte cashless pour un verre de Syrah servi dans un ecocup consigné en forme de flûte à champagne. Par rapport aux verres en plastique de l’année dernière, ça change tout. La fosse se remplit soudain complètement pour les Vintage Trouble, quatre musiciens de Los Angeles portant veston et cravate que nos équipes avaient déjà pu voir aux Transmusicales 2015 et au Hellfest 2016. On est dans la Soul et le rock’n’roll sudiste, servis par Ty Taylor dont l’amplitude vocale rivalise avec le charisme. Il arpente la scène magnifiée par le jeu de lumières, multiplie les acrobaties et les renversés avec son micro, traverse la fosse, parcourt les rangées à 180 degrés avant de finir à genoux sur scène. A minuit, le groupe fait s’allumer les lumières des téléphones (photo). Pas envie d’after après cette Soul puissante et mémorable.

Jour 5. Vendredi 7 juillet. 19H00, la perle se cache dans une cour

On débute à 17H30 dans les jardins de Cybèle avec Foehn Trio, un pianiste, un contrebassiste et un batteur basés à Lyon. Leurs compositions instrumentales, enregistrées et inspirées par Chamonix, respirent un jazz moderne en recherche constante de la mélodie. Super découverte. On poursuit par le festival dans une grande cour apaisante où “Lettres sur cour” propose lectures d’auteurs et musique. La chanteuse Leila Martial et le violoncelliste Valentin Ceccaldi (photo) suspendent le temps d’une heure la frénésie du festival, tant leur duo touche en plein coeur. Commençant comme un poème venu du froid, la langue de Leila mute en onomatopées qui font d’elle un elfe de contrées fantastiques, au corps expressif, qui souffle “Let me freeze again to death”. Distorsions et jeu avec la pédale d’effets subliment leur composition inspirée de l’Eve de Jérôme Bosch. Tant pis si on arrive en retard au Théâtre: ce soir la perle d’émotion du festival se cachait ici.

20H45, a bailar au Théâtre antique

Le temps d’arriver, le Théâtre est déjà rempli d’un public de tous âges pour la soirée cubaine (photo). “On va danser et célébrer la vie” ambiance Angélique Kidjo la chanteuse béninoise, qui rappelle les liens entre musique afro-cubaine et africaine. L’étoile invitée est le new-yorkais Pedrito Martinez, machine de guerre des percussions. Coincés à l’entrée de la fosse, on n’a qu’une visibilité limitée sur la scène mais nos voisins font le show en dansant la salsa sans faillir de toute la soirée. Le pianiste Roberto Fonseca ensuite, entre latin jazz et afro-mambo, continue d’emporter le public, invitant sur scène la jeune Daymé Arocena puis le patriarche du Buena Vista Eliades Ochoa. Nous ce que l’on retiendra c’est le solo de piano mélancolique à souhait qu’il étire au maximum au beau milieu du concert, avant le retour des percussions et des cuivres.

01H30, la transe sud-africaine dans la chaleur de la nuit

On part se poster au balcon du théâtre de minuit pour la transe des Sud-Africains BCUC (photo) annoncée comme une des claques du festival. Les lourdes frappes aux trois tambours donnent l’intensité de l’expérience tribale. Les chants lancinants répétés à l’infini sur la ligne de basse, les cris de colère des chanteurs qui rebondissent non stop sur scène, revêtent une force libératrice : le public debout hurle aussi. “No religion can change us. No government can divide us”. Jowee Omicil vu au festival Jazz à Saint Germain des Près est invité pour ajouter son saxophone, tandis qu’un des chanteurs se retourne face aux tambours comme s’il se faisait dresseur de percussions, dompteur de déflagrations. Énorme. Dans une fosse qui pourtant était une véritable étuve nous dira notre hôte qui y dansait.

Jour 6. Samedi 8 juillet. 20H35, dans la limpidité crasseuse

La limpidité crasseuse qualifie la “patte” de Prince, selon Juan Rozoff interviewé dans le film “Mon Prince est parti” projeté au cinéma à 16H30. Crasseuse c’est aussi notre état quand on arrive au Théâtre après une journée gluante qui rend le jean poisseux sur la peau, l’orage espéré n’étant pas survenu. L’heure et demie d’attente nécessaire pour s’assurer une place assise centrale sous la régie passe agréablement à bavarder avec une festivalière si passionnée qu’elle achète 2 fois l’abonnement 7 soirées dès décembre, pour assister aux 14 soirées. Crasseux enfin comme le plaisir insolent qu’on prend au funk bien gras de Juan Rozoff (photo), en costume léopard comme sa guitare customisée. Hommages à Prince croisent nouveaux titres avec même un mash-up sur Light My Fire. Chorés, humour, accélérations de tempo brutales : tout est en place.

23H00, la magistrale synthèse funk - rock

Fracassante est l’entrée de Troy Andrews alias Trombone Shorty (photo) et son groupe de cuivres d’une puissance dingue. Leur funk syncrétique fusionne rock et hip-hop dont Troy qui n’a que 31 ans adopte la gestuelle, dans une performance scénique de chaque instant, bain de foule compris. Au bout de lui-même lorsqu’il souffle des trilles répétées au trombone, il est ovationné comme un gladiateur par un public debout bras levés. Notre coeur bat la chamade. Give it away des Red Hot, Get up offa that thing de James Brown s’enchaînent jusqu’à son final sur Ain’t no use puis en rappel, Oh when the Saints version rock, référence à son origine de La Nouvelle Orléans.

Difficile de passer après le volcan. Le funk du père du slap Larry Graham paraît tiède et sa chanteuse périmée. Les rangs se vident pendant son Purple Rain interprété sans nouveauté. On reste sur notre faim quant aux apparitions de Jeanne Added trop brèves et de Marco Prince, limite ridicule au trombone. A 1H30 on descend à l’after observer l’ambiance club jouée par Knower. On quitte Vienne le lendemain, repue de musique et on passe la main à une coéquipière pour la suite du festival.

Jour 7. Lundi 10 juillet, 19h40, rien ne roule

L'entrée à Jazz à Vienne se fait non sans encombres pour la deuxième équipe à couvrir le festival. Logés à Lyon, on se retrouve à la Gare Part-Dieu devant un panneau des départs sur lequel tous les trains sont annulés ou en retard, dont le nôtre pour Vienne, supprimé bien entendu. On ira donc vers une autre gare de la ville de Lyon chopper un train in extremis et on arrivera au Théâtre Antique transpirants et un peu énervés. Parfait début de soirée en somme, qui commence avec la jeune Lianne La Havas (photo) dont la (trop grande) douceur du solo ne réussira pas à calmer nos frustrations. Les gens assis derrière nous dans les gradins du Théâtre Antique s'ennuient visiblement car ils discutent comme sur la place du marché un dimanche midi. Vite, la suite ! 

23h07, we are the 90's

Une pinte de succulente bière blonde à un peu moins de 5€ en main pour se rafraichir les esprits, on rejoint la fosse pour voir Mary J Blige (photo), programmée en tête d'affiche ce soir et dont on n'avait pas entendu parler depuis des lustres. La grande diva de l'époque des années 90 où le R'nb rayonnait n'est pas de toute modestie il faut avouer. Elle ne cesse d'appeler ses "plus grands fans" à chanter en choeur avec elle - mais nous ne sommes pas vraiment certains que le Théâtre Antique de Vienne grouille de groupies de Family Affair ce soir. Il n'empêche que c'est un des objectifs de notre tendre adolescence qui a été rayé de la liste ce soir : shaker nos arrières sans hateration, holleration dans cette dancery.

Jour 8. Mardi 11 juillet, 19h04, au jardin en famille

Nous avons plus de chance avec les transports en ce mardi, nous prenons la navette SNCF directe depuis la gare Jean-Macé et nous voici à Vienne 19 minutes plus tard avec des billets à -50% pendant toute la durée du festival. Première étape ce soir le jardin de Cybèle sur la scène gratuite où on découvre le groupe Sweethearts, 30 jeunes australiennes qui jouent et chantent de la soul surpuissante et sur-charmante avec une incroyable pêche, beaucoup d'humilité mais surtout beaucoup de talent. Le jardin est bondé : des lycéens, des enfants, des moins jeunes partagent la pelouse dans la bonne humeur. 

20h57, l'heure de l'apéro littéraire

En arrivant sur place pour les grands concerts de la soirée, le Théâtre Antique est déjà bien rempli mais le public sacrément plus jeune par rapports aux autres soirs. Comme il s'agit d'un festival relativement statique - la configuration de la scène et le peu d'espace autour fait qu'on ne passe pas ses soirées à s'y promener, des jeunes fesses avec des bornes cashless mobiles et des déssoiffeurs de bière se baladent dans les rangées de l'amphithéâtre et font patienter les festivaliers les plus pressés déjà en place plus d'une heure avant le début du premier concert. On profite du concert de Scott Bradlee's postmodern Jukeboxun show pour les masses à l'américaine entre tapdance, coiffures rétro et MC qui en fait des tonnes, pour aller découvrir la librairie Jazz à côté des bars du festival et feuilleter quelques BD.

23h26, pa-rum pa-rum pa-rum pum pum pum

La charmante compagnie électro-pop des moustachus de Deluxe (photo), on a beau les suivre sur toutes leurs tournées depuis des années, on ne s'en lassera visiblement jamais. Assurément le concert le plus punchy des deux semaines à Jazz à Vienne, les 6 compères nous offrent toujours leur plus beau smile, leurs leggings les plus moulants et un moment d'extase collective intergénérationnel. La show est rôdé à merveille et pourtant on y découvre plein de nouveautés et de surprises. Le Théâtre Antique ne se rassoit plus jusqu'à la fin de la soirée.  

Jour 9. Mercredi 12 juillet, 14h35, demandez le programme, il n'y en a pas

Nous décidons d'arriver bien plus tôt pour profiter des concerts Jazz en Ville, le programme OFF du festival, mais voilà que fraîchement débarqués de Part Dieu, on se rend compte qu'aucun concert n'est prévu jusqu'à 16h. Sur le site de Jazz à Vienne, aucune référence aux concerts gratuits proposés par les différents cafés et commerces de la ville. Le OFF fait figure d'un événement complétement à part décidément et n'est pas mis en avant. Le programme du jardin de Cybèle ne nous enchante que trop peu cet après-midi, un projet d'hommage à Ella Fitzgerald quelque peu coincé et un quartet de souffleurs lyonnais avec lesquels qui ne réussiront pas à nous embarquer dans leur ambiance cuivrée. On décide d'aller prendre un verre en terrasse sur la place de l'Hotel de Ville aux sons de David Cairol et son groupe (photo), une pop reggae des plages qui passe parfaitement bien à l'heure de l'apéro à l'ombre. 

20h53, le dernier coucher du soleil à Vienne

Le public arrive au compte-gouttes ce soir et c'est tant mieux car nous n'avons pas besoin de faire les fourbes pour trouver une bonne place dans les gradins. Le soleil s'est à nouveau invité de force et déjà quelques personnes succombent à la chaleur du théâtre. Après la traditionnelle annonce de Benjamin Tanguy qui nous rappelle l’horaire de la dernière navette pour Lyon, la première partie de la soirée commence avec Donny McCaslin, saxophoniste ayant accompagné David Bowie sur l'enregistrement de son dernier album Blackstar, une ambiance idéale pour un magnifique coucher de soleil au son de Lazarus. Nous complétons l'idylle avec une glace mojito-pastis de l'artisan glacier viennois "Histoires de glaces". Que demande le peuple ? 

22h53, tout près de la voie lactée

Quelques joints et un chemin d'étoiles s'allument simultanément dans la pénombre alors que le légendaire jazzman Herbie Hancock entame son tube Actual Proof accompagné de ses magiciens de musiciens les uns plus particuliers que les autres. Le grand monsieur est invité à Jazz à Vienne pour la 15e fois et pourtant il sait faire redécouvrir sa musique qui semble plus moderne que jamais. Il reste humble, accessible, très sympathique et terriblement drôle, nous avons l'impression de le connaitre depuis toujours et c'est la bouche-bée que nous rêverons au son de son piano pendant presque deux heures.

Demain les festivaliers passeront toute la nuit au Théâtre Antique, pour nous malheureusement l'aventure s'arrête là. Le train pour Lyon de 00h41 spécialement ajouté pendant la durée du festival est déjà à quai, les paupières sont lourdes mais les souvenirs intenses. Aurevoir Vienne, nous nous reverrons très prochainement.  

Le bilan

Côté concerts

Le choc funk-rock

Trombone Shorty une performance d’une puissance inégalée durant cette édition 2017

Le choc hybride
Jeff Mills - Emile Parisien, une exploration techno jazz de grande finesse

Le choc jazz
Vincent Peirani surprenant accordéon au sein du projet porté par Emile Parisien, Paco Séry, Mino Cinelu

Le choc soul
Vintage Trouble les Californiens portés par leur spectaculaire chanteur Ty Taylor

Les mantra hantés
Shabaka & The Ancestors la rencontre fiévreuse entre Londres et Johannesburg

La perle de l’émotion
Valentin Ceccaldi et Leïla Martial, le moment précieux proposé par Lettres sur Cour

Le souvenir au passé
Mary J Blige, la diva d'un autre temps

Côté festival

On a aimé

- L'amélioration de l’expérience festivalière : passage au cashless, navettes TER pour Lyon renforcées, gobelets consignés
- La machine de guerre en termes d’organisation et de communication
- La mixité dans le public : tous les âges, toutes les conditions
- Les lumières et ambiances exceptionnelles du Théâtre antique, plus belle scène du monde selon de nombreux artistes du festival
Toute la ville de Vienne en musique en accès libre de midi à plus de 2H du matin : les scènes de Cybèle, les Muzaïques, Lettres sur cour, le Club de minuit et le JazzMix.

On a moins aimé

- Il faudrait maintenir libres les cheminements escaliers dans le Théâtre car les circulations sont nombreuses
- Se faire fumer dans le visage mais c’est le propre des festivals de plein air
- Un petit lien vers le programme des concerts dans la ville ne serait pas de refus
- Les tarifs jour pour les concerts, pas forcément abordables pour toutes les familles

Conclusion

Picorer des concerts en accès libre en ville la journée, en prendre plein les yeux au Théâtre Antique en soirée puis descendre de la colline pour le petit théâtre de minuit : le parcours du festivalier de Jazz à Vienne a tout d’un rituel que l’on répète chaque été et dont on reste nostalgique durant l’année. A 37 ans, le festival est un poids lourd qui sait apporter des améliorations et garantir la sécurité des festivaliers. A l’année prochaine.

Récit et photos : Alice Leclercq, Anja Dimitrijevic