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Kadebostany : "Tu ne peux jamais t'arrêter de tourner"

Kadebostany veut affirmer sa différence. Un pays créé de toute pièce, un concert déroutant du hip-hop aux ballades pop, le tout dans un univers déjanté et pétillant. Rencontre avec Kadebostan, président auto-proclamé à la moustache finement taillée, et Amina, diva aux avant-bras royalement tatoués.  

Tous les Festivals : Bonjour tous les deux. Comment se passe votre tournée ? Vous êtes sur les routes depuis assez longtemps !

Kadebostan, sampes : Cela fait trois ans qu’on tourne notre dernier album, qui s’appelle Pop Collection. Du coup, c’est un peu du non stop, que ce soit en festival, en club ou en salle de concert. Où on en est ? On n’arrête pas ! C’était volontaire de ne pas faire de pause. L’idée est de conquérir un maximum de pays. On adore faire ça.

Vous pensez enchaîner sur un album, ou continuer votre tournée à l’infini ?

Kadebostan : On fait un peu tout en même temps là.

Amina, chant : Il y a aussi des pays qu’on n’a pas visité. On passe le mois de novembre en Russie, et là en octobre on sera au Japon. Finalement, tu peux ne jamais d’arrêter de tourner. Je pense qu’on va encore tourner un petit moment, puis faire une pause et se concentrer sur l’album.

Votre but c’est de faire le tour du monde ? C’est vous qui demandez de jouer dans tel ou tel pays ?

Kadebostan : Non, non. En Russie par exemple, on est numéro 1 dans les charts là-bas, et depuis plusieurs mois d'affilés. On a donc des propositions qui arrivent, et là on va faire le tour de la Russie en 20 jours. Ce sont des choses qui ne se refusent pas dans notre démarche. On a créé un pays qui s’appelle la République de Kadebostany, il y a une volonté de conquête du monde grâce à la pop et la musique, à une autre musique. On a la chance d’avoir des demandes un peu partout dans le monde, et d’avoir une équipe de dix personnes totalement dévouées à la cause et qui a envie de faire vivre cet imaginaire kadebostanien

Dans ces trois dernières années, il y a un festival qui vous a particulièrement marqué ?

Kadebostan : Les festivals, ça va crescendo. On a joué devant 18 000 personnes en Belgique il y a quelques jours, et on n’avait jamais joué devant autant de monde. Et à chaque fois le souvenir qu’on a c’est celui du dernier festival où on a joué. 

Amina : il y a quand même quelques festivals emblématiques, comme le Montreux jazz festival, ou le Sziget en Hongrie. Et on en a découvert plein ! J’adorerais faire Glastonbury. 

Kadebostan : Après, je n’ai pas l’impression qu’on court derrière le festival connu, on raisonne plutôt au fait d’avoir un public devant nous. On a la chance de fédérer un certain nombre de gens, qui viennent nous voir ou nous découvrir. On raisonne par rapport aux souvenirs qu’on partage avec les gens, cela peut être dans un festival peu connu, et cela peut être un souvenir incroyable.

Amina : D’ailleurs, il ne pleut jamais pendant nos concerts !

Kadebostan : C’est vrai qu’il ne pleut jamais. On a ce don. Vous allez voir au Chien à Plumes ce soir, il ne pleuvra pas, et juste après il se mettra à pleuvoir ! Vous pouvez noter, on joue à 19h30, et il ne pleuvra pas jusqu’à 21h. (Ndlr : Il a commencé à pleuvoir vers 23h. Mais pas une goutte pendant le concert. Brillant).

Vu que vous avez pas mal voyagé, vous sentez une manière différente de vivre votre concert ou le festival en fonction des pays ?

Amina : Oui, c’est clair. En France, il y a une vraie culture du festival. Au Japon, tu n’as pas mille festivals. Oui, les publics sont différents, et c’est même excitant. Si tu retrouvais toujours face au même public toute l’année, ça serait super bizarre. Après, cela ne veut pas dire que c’est moins bien ou mieux, c’est simplement différent. En Suisse, les gens écoutent énormément. En Belgique les gens sont fous.

Kadebostan : J’ai l’impression qu'au contraire il y a un seul public. Et que de moins en moins il y a cette spécificité culturelle ou régionale …

Amina : Il y a quand même une différence culturelle qui se retrouve dans les mentalités.

Kadebostan : Évidemment, mais c'est ce qu'on ressent à travers l’accueil comme artiste. Mais j’ai l’impression que lorsqu’on donne un spectacle, on recherche à singulariser à fond le show pour le public, de faire promener des émotions, les faire rire, les faire pleurer. Au final sur scène, tu ressens moins cette différence. En festival, il y a plein de groupes qui défilent, et la différence est minime.

Vous préférez jouer votre musique en salle ou en festival ? Vous avez peut-être plus la possibilité de dérouler votre show dans une salle de concert ?

Amina : Quand t’es en salle, tu te rejouis d’être en festival et quand t’es en festival tu te rejouis d’être en salle. Tu as besoin de la variété pour que ce soit excitant. En festival, tu as des gens qui n’ont pas payé pour nous voir, qui ne savent pas qui on est. En salle, les gens ont payé pour venir te voir. Tu dois convaincre, et ce sont ces mêmes personnes que tu retrouveras en club si on les a convaincu. Les deux sont complémentaires.

Kadebostan : Il y a quelque chose de plus rentre-dedans en festival, le fait que les sets soient plus courts. Les gens voient défiler plein de groupes. On essaye toujours de faire des choses particulières en festival, car on veut pousser le truc, mais il y a aussi une efficacité à rechercher. T’es le quatrième groupe que tu vois, c’est pas la même chose que quelqu’un qui va payer pour venir voir Kadebostany en concert, et là t’as 1h30 voire plus pour les faire voyager, et ils n’ont rien vu avant, et ils ne vont rien voir après.

Pour être plus efficace, vous faites vos chansons plus dynamiques en festival ?

Amina : Si t’as 60 minutes, les chansons plus douces vont permettre de mettre plus en valeur les rythmées. Après, on laisse quand même des chansons plus lentes, avec plus de relief, et qui permettent aux gens de se rendrent compte de ce qu’est vraiment Kadebostany. Si tu mets que les morceaux boum boum, tu passes à côté de la subtilité. Après on n’a pas mille morceaux boum boum...

Kadebostan : Je crois même qu’on a aucun morceau boum boum ! (rires) Il y a déjà un set qui est atypique, où l’on passe de morceaux dynamiques à des ballades. On a beaucoup travaillé pour rendre la chose compréhensible. On cherche à faire passer le spectateur dans des états complètement différents tout au long de notre live.

Un de vos titres, Castle in the Snow, a été remixé par The Avener. Et la chanson est devenu un tube, du moins en France. Comment vous l’avez vécu ? Le remixe est presque devenu plus connu que l’original ?

Kadebostan : Cela dépend de quel point de vu on se place. Le remix est sans doute plus connu en FM, mais si l’on regarde notre clip de Castle in the Snow, il est à 8 millions de vues. Je dirais que la chose la plus connue c’est ça. Et il y a des remixes qui permettent de faire connaître l’original. Avener il a fait du bon boulot

Amina : Il n’a pas non plus totalement dénaturé la chanson. Il y a des gens qui l’écoutaient et ils ne savaient pas que c’était un remix. C’est un rework

Kadebostan : C’est intéressant pour lui, c’est intéressant pour nous. Et si cela amène des gens vers la République de Kadebostany, vers ce qu’on a créé, c’est complètement positif.

En parlant de cette République, s’il y avait un festival en Kadebostany, il ressemblerait à quoi ? Il existe peut-être déjà !

Kadebostan : Je dirais qu’il y aurait un mélange des genres assez poussé, et justement, on a un peu tendance à voir les mêmes artistes bookés sur pas mal de festivals. Il y aurait une diversité accrue, avec un maximum de risque. Ce qui est intéressant est de mélanger les publics, les genres, ce qui fait que c’est un public idéal. Cela donne quelque chose qui ressemble à la société, et on a envie de le cultiver. Et si on devait créer le festival de nos rêves, on partirait de là pour développer la programmation.

Il y a peut-être des petits festivals en Suisse que vous pouvez nous conseiller ?

Amina : Si tu aimes le hip-hop, il y a le Frauenfeld, où tu peux retrouver un Eminem ou des artistes plus indépendants.

Kadebostan : Mais avant tout je conseille à vos lecteurs de venir au futur festival de Kadebostany

Mais il sera créé quand ?

Kadebostan : Suprise, on va bientôt l’annoncer ! (rires)

On se demandait s’il y avait une équipe de foot en Kadebostany. Elle en est où dans les éliminatoires pour l’Euro ?

Kadebostan : Justement, on a eu un problème de dopage, et ils ont tous été recalés. Mais bon on va faire en sorte que la prochaine fois tout se passe bien.

Vous pouvez peut-être voir avec la Fifa ? Ils ont l’air très arrangeants …

Kadebostan : Oui, comme ils ont tous des maisons secondaires en Suisse, on peut facilement faire des échanges avec la Fifa qui est basée à Nyon. On discutera avec eux.

Amina : Michel Platini a même une maison en Kadebostany. Il viendra prendre un café avec notre président une fois élu.

Propos recueillis par Morgan Canda et Victoria Le Guern